XVIIe siècle dans Loxias-Colloques


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Loxias-Colloques | 7. Images de l’Oriental dans l’art et la littérature

« Contro l’empio Ottoman / Veneti Eroi » : la figure du Turc sur les scènes vénitiennes du XVIIe siècle

Au carrefour entre l’Est byzantin et l’Ouest latin, Venise instaure depuis le XIIe siècle des relations commerciales durables avec les villes majeures du Proche et du Moyen Orient : elle s’empare des motifs décoratifs orientaux, et intègre certaines populations dans le fonctionnement mercantile interne à la ville. Si au premier abord il semble que Venise soit régie par un esprit de tolérance, la culture artistique et scénique du XVIIe siècle nous révèle un regard complexe envers l’altérité orientale, comprise comme objet de fascination et de répulsion à la fois. Plus spécifiquement, c’est la culture turque qui stigmatise le tremens et fascinans de l’altérité sur les scènes vénitiennes. En focalisant l’analyse sur les livrets d’opéra compris entre 1637 et 1700, il s’agira de mettre en confrontation la représentation de la spécificité vénitienne (la « venezianità ») et de « l’Autre », qui est caractérisé comme l’impie turc, ennemi et barbare.

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Loxias-Colloques | 10. Figures du voyage

La citation de l’autre : discours direct et altérité dans les relations de voyage des missionnaires aux Antilles au XVIIe siècle

À partir du constat que la manière dont la littérature viatique incorpore et « cite » l’autre est complexe et relève de plusieurs stratégies d’écriture (mots vernaculaires, discours direct, discours indirect, etc.), cet article propose d’étudier comment quelques relations de voyage aux Antilles du dix-septième siècle inscrivent les paroles autres dans la narration. Nous interrogerons plus précisément l’inclusion des discours directs dans la trame narrative, dans le but de voir à quelle fin la relation de voyage se fait l’écho des voix d’autrui et comment ces voix interviennent dans la construction de l’altérité. Il sera démontré que par le truchement du pathos, la voix de l’autre fait plus que couronner le voyageur d’héroïsme ou remplir le texte d’objets linguistiques exotiques. Elle agit sur le lecteur et compte parmi les figures servant à dynamiser la relation de voyage. Taking as a point of departure the fact that travel writing incorporates and quotes others in a complicated fashion, using a large variety of writing strategies (vernacular words, direct and indirect discourse, and so on), this article sets out to study how a select number of travelogues about the Caribbean from the seventeenth century include other voices in their narratives. More precisely, the aim is to interrogate the inclusion of direct discourses in the texts with the objective to understand the motivation behind making other voices heard and how these voices intervene in the construction of alterity. The article argues that through the uses of pathos, the voice of the other has other functions than to simply play into the heroization of the voyager or to fill the texts with exotic linguistic objects. These voices are meant to touch the reader and can be considered among the figures that contribute to the dynamics of travel writing.

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La pratique de l’ironie dans le récit d’un voyageur amateur libertin du XVIIe siècle : proposer un regard relativiste sur l’ailleurs ? Jean-François Regnard, Le Voyage en Laponie (1681)

L’ironie, qui a partie liée avec le rire, la satire, la moquerie grinçante ou joyeuse, devrait être un trope ou une figure de discours absente des relations de voyage, genre davantage enclin au sérieux de l’inventaire cartographique ou ethnographique. Tourné vers l’enregistrement des bizarreries exotiques, confrontés aux savoirs des scientifiques et érudits contemporains, le récit de voyage est avant tout garant d’un savoir, à visée généralement didactique, quand il ne relève pas du manuel commercial ou du récit missionnaire. Et pourtant, un usage relativement extensif de l’ironie est repérable dans les récits de voyage au XVIIe siècle, dans les récits émanant de voyageurs amateurs issus des milieux de sociabilité mondains. Cette pratique relève-t-elle du simple jeu d’esprit, permettant de faire glisser la finalité de ces récits du savant au plaisant ? L’usage de l’ironie est-il la marque d’un sentiment de supériorité d’un Européen qui peine à aller à la rencontre de l’ailleurs ? Ou l’ironie n’est-elle pas un moyen de camoufler les audaces de la pensée en contexte de censure pour des auteurs qui se serviraient du détour de l’ailleurs pour remettre en cause les fondements de la société catholique d’Ancien Régime ? C’est davantage à ce dernier questionnement que nous nous intéresserons, d’autant plus que l’ironie est l’une des grandes figures employée par les auteurs libertins dans leurs récits, romans et essais pour déguiser la subversion de leur pensée, en jouant sur l’ambiguïté fondamentale de cette figure de discours, qui leur offre ainsi un véritable espace de liberté. Avec les théories de Dan Sperber et Deirdre Wilson, complétées par celles d’Oswald Ducrot (1984), nous rechercherons ces moments où une parole autre se fait entendre, celle d’autres auteurs, d’instances dirigeantes… : quelles paroles, quels stéréotypes, quelles théories scientifiques, politiques, philosophiques sont alors mises à distance ? Au nom de quel système de valeurs alternatif ? Grâce à quels marqueurs ? Nous prendrons chez Regnard, Bouchard, Chapelle et Bachaumont, Dassoucy, François Bernier des exemples où l’ironie est l’espace où se joue la relation inter-culturelle. L’ironie ne sera plus alors simplement un moyen de représenter l’autre à distance : elle permettra surtout un retour sur soi, une réflexion sur le monde d’où l’on vient, sur les structures politiques, économiques, culturelles du pays d’origine.

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Loxias-Colloques | 13. Lettres d'exil. Autour des Tristes et des Pontiques d’Ovide | Mélancolie de la disgrâce: échos génériques

De la mélancolie du disgracié. Étude d’un vestige ovidien dans les Mémoires du duc de Saint-Simon

Le duc de Saint-Simon (1675-1755) fut assurément nourri de lettres latines et il ne fait aucun doute sur le fait qu’il se délecta des historiens romains, à commencer par Salluste et Tacite. C’est toutefois aux Tristes d’Ovide qu’est emprunté l’un des plus spectaculaires surgissements d’un fragment de littérature latine dans les Mémoires. Dans la chronique de 1709, Saint-Simon relate en effet une savoureuse anecdote qui invite à dresser un parallèle explicite entre Ovide et Chamillart, ami de Saint-Simon qui vient de faire l’expérience d’une bien cruelle disgrâce. Il s’agira donc d’étudier à la fois la valeur paradigmatique de la référence à Ovide pour nourrir une médiation sur la disgrâce, véritable fil d’Ariane courant dans les milliers de pages des Mémoires et thème essentiel de la chronique de cour. Il s’agira aussi de mener une réflexion sur la façon dont la référence à Ovide permet à Saint-Simon de mettre en valeur sa position originale d’ami demeurant envers et contre tout fidèle à un homme foudroyé par la disgrâce du Roi-Soleil. La référence ovidienne, outre le thème de la disgrâce, en innerve donc un second, plus discret certes, et pourtant essentiel, celui de l’amitié. En faisant de Chamillart un anti-Ovide, Saint-Simon esquisse donc aussi de lui-même l’image d’un ami idéalement fidèle.

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Loxias-Colloques | 18. Tolérance(s) II : Comment définir la tolérance?

Vérité et tolérance dans la pensée de Philippe Duplessis-Mornay

Cette étude se propose d’explorer la tension entre vérité et tolérance dans la pensée de Philippe Duplessis-Mornay. Si, dans la France des guerres de religion, le concept de tolérance civile s’impose peu à peu comme un mal nécessaire pour en éviter un plus grand, la question de la défense de la vérité demeure aux yeux des protagonistes. Ardent serviteur de la cause réformée, Mornay œuvre en faveur de la coexistence en contribuant à l’élaboration de l’édit de Nantes qui est signé en 1598. La même année, la publication de son Traité de l’Eucharistie manifeste son intransigeance sur le point le plus sensible de la déchirure entre catholiques et réformés. Toutefois, l’objectif du controversiste reste de convaincre et de susciter la conversion. Il s’agira donc d’analyser la façon dont l’auteur module entre intransigeance et concession et adapte son discours en fonction d’une hiérarchisation des objectifs à atteindre. The purpose of this paper is to analyse the tension between truth and tolerance in Philippe Duplessis-Mornay’s thought. If, during the Wars of Religion in France, the concept of civil tolerance begins to be seen as a necessary evil in order to avoid an even greater one, the defence of truth remains an essential question for the protagonists. Duplessis-Mornay, a faithful servant of the Reformed cause, strongly promotes coexistence by contributing towards the formulation of the Edict of Nantes, signed in 1598. That same year, the publication of his Traité de l’Eucharistie reveals his intransigence concerning the most sensitive point of contention between Catholics and Protestants. Nevertheless, his intention remains to convince and to encourage conversion. This study aims to analyse how the author moves between intransigence and concession and adapts his discourse to a hierarchy of objectives he wishes to obtain.

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