Loxias-Colloques |  11. Corps, son et technologies entre théories et pratiques |  Deuxième partie : Le geste musical, contextes et analyses 

Cyril Délécraz  : 

Propositions d’analyse du geste du musicien par la théorie de l’Effort de Rudolf Laban. L’exemple de Toucher (Vincent-Raphaël Carinola, 2009), pour thérémine et électronique

Résumé

Cet article est une proposition d’analyse d’une œuvre soliste où les gestes du performeur ne sont pas directement impliqués dans la production du son. Le fait que le thérémine soit en effet utilisé comme capteur de gestes pose des difficultés analytiques concernant le lien entre formes gestuelles et formes sonores. Grâce à la théorie de l’Effort de Rudolf Laban et une analyse phraséologique en trois temps (« en aveugle », « sourde », « en contexte »), cette étude permet de révéler une dialectique entre les gestes « muets » du performeur et les structures sonores engendrées par l’ordinateur.

Abstract

This article aims to study a concert piece where the performer’s gestures are not directly involved in sound production. These « silent » gestures escape some of the usual categorizations of the musician’s gesture and raise analytical problems. In this paradigm, we will identify some audio-visual units of meaning. The study is based on Rudolf Laban’s Effort theory, which complements a three-stage phraseological analysis (« blind », « deaf » and « contextual »).

Index

Mots-clés : analyse , Carinola, geste musical, Laban, thérémine

Géographique : France

Chronologique : années 2000

Plan

Texte intégral

Introduction

1Les développements de la lutherie électronique1, la nouvelle répertorialisation2 ainsi que l’essor des performances numériques3 ont fait émerger un champ de recherche musicologique centré sur la question du geste4. Le sens et les fonctions que le geste peut contenir au sein du discours musical posent des difficultés relatives à la composition5, à l’interprétation6, ainsi qu’à l’accueil de l’œuvre7 par l’auditeur-spectateur, pour qui ils s’avèrent parfois énigmatiques. Il semble alors à la fois légitime et nécessaire de tenter de dégager des méthodes d’analyse spécifiques (en analysant le mouvement, les fonctions structurelles et dramaturgiques du geste, ou bien en se focalisant sur le pouvoir communicatif du geste en regard des codes sociaux) afin, par exemple, de dégager les enjeux formels d’autres œuvres où le geste est porteur d’un sens « extra-sonore »8.

2Toucher est une œuvre mixte composée par Vincent-Raphaël Carinola en 2009. Il s’agit d’une pièce pour thérémine et électronique avec dispositif de diffusion sur six canaux. La première représentation fut donnée par le percussionniste Claudio Bettinelli le 13 août 2009 dans la Salle des Fêtes des Echelles (Savoie) durant le Festival des Nuits d’Eté9. Bien qu’il existe d’autres interprétations10, nous nous focaliserons sur cette dernière en vertu de son aspect collaboratif d’envergure.

3Cet article est construit en deux parties. Tout d’abord, une étude formelle décrit le paysage sonore et visuel de la pièce en se bornant au vocabulaire musicologique. Celle-ci se termine en une découpe systématique d’unités gestuelles qui permet d’isoler des relations entre geste et son. Puis, une application de la théorie de l’Effort de Rudolf Laban (1879-1958) vient compléter l’analyse. À partir d’une pièce précise et en regard des travaux de Rudolf Laban, cet exposé accompagné de vidéos annotées11 permet de donner quelques outils d’analyse dans une perspective de recherche concernant l’étude du geste du musicien en situation de jeu. L’article est ponctuellement jalonné de propos recueillis lors d’un entretien avec le compositeur et l’interprète12.

Analyse formelle

Phraséologie

4Les gestes du performeur, « muets13 » en apparence, sont interprétés par la « machine14 » qui leur donne du sens. Dans ce contexte, l’analyse geste-son pose des difficultés analytiques puisque, par exemple, un même geste déclenche ou modifie un son différent selon le comportement de la machine. De plus, les expressions corporelles et faciales du performeur ajoutent une information relative aux indications expressives notées sur partition. Même si elles contribuent à éclairer le sens dramaturgique, elles peuvent néanmoins brouiller le lien qui existe entre le geste et le son. C’est pourquoi l’étude de Toucher débute par une analyse phraséologique construite en trois temps : analyse auditive « en aveugle », analyse multimédia « sourde » (c’est-à-dire sans le son), puis analyse musicale « en contexte »15 (c’est-à-dire en réunissant image et son).

Analyse auditive « en aveugle »

5Par une écoute seule, il est possible de séparer la pièce en cinq parties, selon le type d’objets sonores16 entendu : un prologue17, une partie A, une partie B et une reprise variée de A et B. Les durées sont irrégulières comme l’illustre le schéma proportionnel suivant :

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Figure 1 : proportions temporelles des différentes parties de Toucher par l’analyse auditive « en aveugle »

6La première partie expose du matériau sonore fait de soupirs, gémissements, grognements et autres jeux de bouche. Cet espace sonore organique18 qui s’effectue par stratifications est alors suivi d’une introduction progressive de hauteurs repérables, de sons toniques19 aux registres très éloignés, puis d’une accumulation20 de matière. Les événements sont dispersés de manière irrégulière tout en resserrant les importantes respirations, ce qui donne l’impression d’une temporalité plutôt lente, étalée dans un temps lisse21.

7Après quatre minutes de prologue, le son du thérémine légèrement réverbéré surgit par intermittence (partie A). Il possède une fonction transitoire qui établit une frontière nette avec la partie précédente. Une cellule22 dans le registre grave s’établit sur une longue durée et crée une pulsation isochrone qui installe un temps strié opposé à la partie précédente, créant ainsi une sensation d’écoulement régulier du temps. Quatre objets sonores font légèrement varier le discours, comme le tempo de cette cellule qui peut alors s’élever ou bien revenir à sa hauteur principale. À chaque fois, cela s’annonce par un bruit blanc, augmenté d’un objet sonore qui freine23 pour la dernière occurrence. Ce schéma récurrent reste en accord avec le temps strié et fait le pont avec la partie suivante, plus dense.

8La troisième partie, nommée B, est construite sur une temporalité resserrée. On entend des événements agités entrecoupés de nappes ou de « silence numérique24 ». Il s’agit d’une sorte de dialogue où l’on réentend également les événements du prologue (craquements, soupirs) qui avaient été mis de côté pendant la partie A.

9La quatrième partie constitue une reprise de A mais plus développée25. Le thérémine est en effet plus agité et il y a plus d’interactions et d’intermittence entre le son de l’instrument et les autres objets sonores. Par exemple, la présence d’une voix émerge en résonance au timbre originel du thérémine.

10La cinquième et dernière partie est une reprise de B dans la mesure où les événements sonores sont également très agités. Cependant, ils relèvent ici du geste percussif. La fonction téléologique est assurée par la reprise des événements de toutes les parties précédentes (soupirs, craquements, timbre naturel du thérémine) en une sorte de tutti final. Sur la fin, des buzz électriques créent un effet de surprise, et la pièce se termine brutalement, comme si ces quelques perturbations avaient provoqué une coupure de courant. Vincent-Raphaël Carinola a réalisé ce dernier choix afin de mettre en avant l’aspect « électro-organique » de l’instrument :

L’auditeur entend que c’est un instrument électrique. Les buzz, les artéfacts, sont directement liés aux effets de l’électricité. Il s’agit donc d’un environnement très matériel. L’interprète touche à tel point qu’il prend le jus […] C’est un instrument électrique, et j’avais envie de le donner à sentir, de faire sentir qu’il y a quand même de la matière. Ce n’est pas simplement un objet fantomatique qui est très beau. C’est aussi un instrument à l’intérieur duquel se trouvent des circuits qui ont une vie26.

Analyse multimédia « sourde »

11L’analyse vidéo permet de segmenter plus précisément chaque partie. Par exemple, le prologue et la partie B, bien que cohérents en eux-mêmes et progressifs du point de vue sonore, relèvent malgré tout de typologies gestuelles différentes.

12Les caractéristiques du prologue, comme la progression et l’accumulation sont également significatives d’un point de vue du geste. D’abord, l’interprète s’approche de l’instrument avec hésitation : il l’effleure, le touche de temps en temps et recule aussitôt. Ensuite, les deux mains apprivoisent l’instrument avec un rôle différent (un pour chaque antenne, comme c’est le cas dans le jeu conventionnel du thérémine). Enfin, des gestes vifs, comme des poings serrés au niveau de l’antenne gauche27, permettent d’identifier une troisième sous-partie. En effet, les objets sonores du prologue établissent une forme progressive que l’analyse « en aveugle » n’a pas conduit à segmenter. En revanche, le fait de pouvoir visualiser trois phases distinctes de gestes du performeur (approche, apprivoisement, gestes vifs) mène à une division du prologue en trois parties.

13De la même manière, dans la partie B, on observe d’abord un passage avec des gestes déconcertés, comme jetés à l’aveugle, accompagnés de variations dont les « paquets » sont bien séparés. Puis se profile une longue séquence où le performeur alterne successivement ces mêmes gestes avec des mouvements de basculement parallèle des deux bras ainsi qu’un geste emprunté au prologue. Grâce à l’analyse multimédia « sourde », la partie B peut être séparée en deux phases distinctes nommées respectivement « paquets » et « parallèle ».

14Voici donc une nouvelle segmentation de la pièce en prenant en compte ces nouvelles informations :

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Figure 2 : proportions temporelles des différentes parties de Toucher par l’analyse multimédia « sourde »

Analyse musicale « en contexte »

15Manifestement, les analyses précédentes mettent en valeur la dimension agonistique de Toucher par des forces structurelles, tant du point de vue sonore (sons électroniques/voix ; sons formés/bruits ; trames continues/impacts, etc.) que visuel (gestes lents/saccadés, poids lourd/léger, etc.). L’analyse musicale en contexte unifie et confirme cet aspect dialogique fondamental de l’œuvre.

16Lors du prologue, l’approche mesurée du performeur vers l’instrument – ses allers-retours avec hésitation – sont en interaction directe avec le son « sortant » du thérémine, qui est ici résumé à sa substance biologique fondamentale : la peur provoquée par un bruit dont on ne sait expliquer sa production28. En effet, le performeur s’éloigne aussitôt de l’instrument à l’écoute des objets sonores que celui-ci émet car il ne sait pas encore comment le thérémine réagit.

17La partie A et sa reprise A’ proposent un accord entre les deux « protagonistes ». Cela se manifeste par le timbre originel du thérémine, c’est-à-dire par l’affirmation de l’identité de l’instrument. La partie B met au premier plan la dimension d’affrontement, aussi bien sur le plan visuel (par des gestes vifs, saccadés et regroupés par paquets) que sur le plan sonore (par des objets sonores aux dynamiques variables). Le résultat représente une véritable joute. La partie finale B’, où le performeur se trouve confronté – tant sur le plan visuel que sonore – à cette « boîte magique incompréhensible29 » met en avant l’aspect anti-communicationnel que peut résider entre l’homme et la machine.

18L’absence de contact avec un objet qui, bien que statique, est présent sur scène, à hauteur d’hommes, renforce l’idée d’un dialogue, et plus généralement d’une communication entre deux constituants « vivants ». De plus, le timbre originel de l’instrument, souvent associé à la voix, a entraîné le compositeur à faire émerger une vocalité dans la reprise A’ :

L’instrument s’appelle le Théréminvox, il y a donc un lien entre le timbre de l’instrument tel que l’avait pensé Léon Thérémine et la voix humaine. On retrouve dans Toucher un aspect structurel avec la manière dont l’instrument et le son de celui-ci se dévoilent. On l’explore, on le travaille jusqu’à faire sortir son propre son. On joue avec30.

19Voici un tableau qui illustre dans les grandes lignes de cette première approche analytique, mettant en avant l’aspect d’affrontement entre le performeur et son instrument :

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Figure 3 : description sono-gestuelle des différentes parties de Toucher

Découpe systématique

20Cette première phase d’analyse, plutôt métaphorique et basée sur l’intuition, nous a incités à réaliser une découpe plus systématique des mouvements du musicien. Ont pu être relevés 191 gestes répartis sur les dix minutes de cette première représentation de Toucher. Une identification des gestes les uns par rapport aux autres31 a permis d’en distinguer une vingtaine32. Leurs dénominations ne sont qu’indicatives et découlent d’une intuition immédiate après visionnage. Le lecteur est invité à observer chacun de ses mouvements à partir de la vidéo prévue à cet effet33.

21Parmi eux, certains peuvent être regroupés et, bien entendu, le choix des critères discriminatoires est déterminant. Après élimination des gestes n’apparaissant qu’une seule fois dans la pièce34, un classement a été réalisé selon la facture des gestes, qui peut être vue comme une transposition de la notion de facture schaefferienne35 au geste musical36. On a donc des gestes entretenus, des gestes itératifs et des gestes ponctuels, classés comme suit :

22- Itératifs : agitation, bois, confus, précis ;
- Entretenus : balancement, basculement, dessus, tenue, vague, vague longue ;
- Ponctuels : approche, attaque, frappe, grappe, poing fermé, prise, retrait, vif, retrait vif.

23Ces propos mériteraient d’être mis en lumière à partir des relations qu’ils entretiennent avec les objets sonores, à commencer par la facture sonore, afin d’évaluer le « croisement de deux activités énergétiques37 », et donc la prégnance du geste instrumental38.

24En l’absence de ces données, il est malgré tout possible de repérer des « phrases gestuelles39 ». Par exemple, la deuxième sous-partie du prologue (nommée plus haut « apprivoisement ») est entièrement constituée d’un geste de vague au-dessus de l’antenne gauche – l’amplitude du mouvement s’atténue progressivement pour des besoins expressifs – suivi d’un geste précis de la main droite au voisinage de l’extrémité de l’antenne droite (ouverture/fermeture de l’espace entre le pouce et l’index).

25De même, la partie A est organisée comme cinq successions de deux gestes inséparables : un grand geste d’attaque effectué en retrait de l’instrument, puis un geste de vague longue au-dessus de l’antenne gauche.

26La partie B contient un long moment fait d’alternances entre trois types de gestes récurrents et instaure une forme musicale tressée40. Cette phrase est bien délimitée puisque ces trois archétypes gestuels doivent subir une direction de jeu par deux procédés différents : la vitesse d’exécution des mouvements s’accélère et la zone de jeu se rétrécit, pour finir sur un geste cadentiel établissant une rupture franche avec la section suivante.

Relations geste/son

27La découpe systématique ainsi que l’étude du patch Max/MSP41 permettent de révéler précisément les relations geste-son dans chacun des 19 comportements de la machine, ceux-ci étant indiqués par des numéros tout au long de la partition. Le traitement sonore est constitué d’un module de synthèse, d’une réverbération, d’un module de lecture d’échantillons sonores et de trois modules de transformation en temps réel42. À ce sujet, notons le travail de Basile Chassaing43 qui consiste à décrire pas à pas le comportement du logiciel au fur et à mesure du déroulement de la pièce. Voici un tableau décrivant le traitement sonore suivant les 19 points de repère44 :

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Figure 4 : Les noms assignés aux différentes sections – lorsqu’il y en a – sont ceux inscrits dans la dernière page de la partition, intitulée « conduite ». Celle-ci constitue un « script » décrivant les principaux comportements du patch Max/MSP. Cette description s’est avérée essentielle pour la préparation de la performance de Claudio Bettinelli. Dans la colonne de droite, il s’agit précisément des termes utilisés par le compositeur. Ceux-ci sont inscrits dans la partition et dans le patch.

28Le tableau permet de rendre compte de la méthode par stratification que le compositeur a effectuée vis-à-vis du comportement de la machine. Le patch révèle qu’à chaque fois que l’on change de repère, certains modules s’activent tandis que d’autres se désactivent. Le choix d’une écriture par accumulation crée une cohérence d’ensemble et évite les transitions abruptes entre les parties.

29La relation du geste au son est parfois explicite, avec une facture tantôt bijective (un geste long implique un son de durée longue), tantôt dissociée (un geste franc de facture impulsive déclenche une trame45). Dans d’autres cas, le synchronisme entre le geste et le son résultant reste flou. Techniquement, le traitement en temps réel permet de contrôler au maximum 18 paramètres simultanément (2*4 + 1 = 9 par main), de la manière suivante :

30- 4 paramètres par main : variation de distance de chaque main par rapport à l’antenne correspondante, suivant 4 zones (la dernière zone étant le contact de la main avec l’antenne) dont les seuils (définis par les valeurs de hauteur et d’intensité envoyées par le thérémine) sont ajustables46 ;
- 4 paramètres par main : se trouver dans une des 4 zones ;
- 1 paramètre par main : geste rapide de chaque main selon une différentielle – variation de hauteur ou d’intensité sur un temps donné et défini par l’utilisateur – ajustable ;

31La relation de cause à effet entre le geste et le son relève parfois de l’anecdote47. Par exemple, lorsque Claudio Bettinelli referme son poing gauche, l’auditeur entend des craquements, comme si l’exécutant manipulait des graviers. Techniquement, il s’agit de centaines de sons brefs déclenchés aléatoirement après détection d’une variation de distance de la main gauche par rapport à l’antenne. Comme le souligne le compositeur, des gestes comme celui-là sont presque conditionnés par la machine :

En ce qui concerne les graviers, toutes les autres personnes qui ont joué la pièce ont fait le même geste que Claudio, car c’est le plus simple. En réalité, je ne sais pas s’il y a une autre manière de faire. Puisque cela se passe dans un espace réduit, le mouvement ne peut être qu’une descente. Et puisqu’on se retrouve assez rapidement au bout, il faut que très vite l’autre main prenne le relais. Je crois qu’on est obligé de procéder ainsi afin d’avoir un peu de continuité48.

32Les gestes possèdent des fonctions sonores différentes : déclenchement d’une trame (excitation à résonance), mutation d’un son continu (modification), déclenchement d’objets sonores rapprochés (excitation itérative), déclenchement de son unique et localisé (excitation ponctuelle). Il en résulte que la relation causale entre un geste précis et un son produit demeure parfois mystérieuse49. Par exemple, le performeur peut faire varier une trame par un geste de la main gauche, et de suite après, avec la répétition du même geste, accéder à un autre traitement sonore tandis que la trame continue d’évoluer en arrière-plan.

33Malgré toutes les combinaisons sonores possibles et une palette de gestes relativement restreinte, on note une volonté du compositeur de se rapprocher du geste « naturel » provenant des instruments acoustiques. On retrouve en effet, malgré les innombrables possibilités offertes par l’ordinateur, une préservation du geste instrumental50. Par exemple, dans la partie A et sa reprise A’, l’interprète joue du thérémine sur une bande qui l’accompagne. À ce moment-là, bien que le performeur soit dépassé par les sonorités entendues, il maîtrise quelque chose en particulier : le timbre originel du thérémine. En outre, lorsque les deux mains sont complémentaires (remarquons qu’elles le sont toujours dans la pratique ordinaire du thérémine) – la main droite déclenche une sonorité et la main gauche la modifie – il y a un « renouement » avec le geste instrumental. Cette situation est similaire à un accord joué à la guitare puis immédiatement modifié à l’aide du vibrato. Le couple excitation-modification51 qui définit une partie du jeu des instruments acoustiques est ainsi préservé. De plus, le renouvellement constant du matériau par des procédés aléatoires52 se limite aux variations d’un même type de matériau : le timbre. De cette manière, bien que le spectateur perçoive des sonorités différentes pour un même geste, l’association geste-son, et donc la notion de geste instrumental, restent cohérents.

34Pour résumer, même si tout est possible avec les lutheries électroniques (en particulier ici avec l’utilisation de l’ordinateur), le compositeur cherche souvent à retrouver une « gestualité instrumentale53 » :

Comment faire en sorte de garder dans le geste une certaine logique ? Même si, à la fin, la complexité est telle que l’on perd le lien entre le geste et le son, comment est-il possible de garder une continuité d’un point à un autre de la pièce ? Il y a d’autres endroits où la machine est indifférente au geste. Dans ce cas, une fois que la musique est partie, que le son est parti, il suit sa propre logique54.

35À ce sujet, Claudio Bettinelli admet avoir eu quelques difficultés à garder cette cohérence entre le geste et le son, ce qui peut représenter une barrière psychologique importante, puisque peu importe ce que l’exécutant fait, des sons seront quand même produits :

Il y a un passage qui pour moi était un peu difficile à interpréter […] C’est un moment où je commence avec des gestes qui déclenchent des petites cloches qui arrivent en retard. J’envoie le geste, puis j’entends « tititititi… ». Je me faisais la réflexion suivante : « je donne un geste rapide pour déclencher un événement mais le résultat n’est pas synchrone avec mon geste ». Ce qui m’intéressait alors, c’était de travailler avec la résultante sonore. J’envoyais donc un son, puis je le stoppais, et ainsi de suite. Finalement, c’est la machine qui, de façon aléatoire, va choisir une durée plus ou moins longue de ces déclenchements. Par conséquent, mes gestes sont influencés par ce que la machine décide après coup55.

36Concernant la genèse de Toucher du point de vue de l’interaction geste-son, le compositeur et l’interprète ont bien insisté sur le fait qu’aucun geste n’est venu avant le son. Pour reprendre une expression de Bernard Sève, « l’ouïe [a] pilot[é] le toucher56 ». La démarche fut presque57 entièrement musicale :

Tous les sons sont nés avant le geste. À aucun moment Vincent a dit qu’il aurait pu placer tel son avec tel geste. Il était avec moi et me disait plutôt que tel module provoquait telle sonorité, et il fallait trouver un geste pour la déclencher. Les sons étaient là, et pour chacun d’entre eux, le geste est né après58.

37Vincent-Raphaël Carinola appuie le propos en affirmant que « ce qui était important, c’était de trouver la matière. Ensuite, le geste s’est imposé d’une certaine manière59 ». Il fallait par exemple choisir des gestes continus qui puissent faire varier des sonorités. D’un point de vue de l’élaboration de la pièce, le compositeur explique bien qu’il s’agissait de trouver des gestes pertinents pour faire marcher le programme :

J’avais déjà fait le programme informatique avant car ce n’est pas facile de tout faire simultanément. J’avais enregistré le thérémine, et je me servais de l’enregistrement, du son de l’instrument pour tester le patch Max. Après, j’ai pris l’instrument et j’essayais de voir comment on pouvait, grâce aux gestes, contrôler les différents événements de la pièce. Ça a donné des suggestions, une sorte de typologie gestuelle qu’on a creusée après en répétant ensemble à la Villa Gillet60.

38Le moment le plus pertinent au sujet de cette relation geste-son – qui demeure clairement perceptible de bout en bout – est la dernière partie, dans laquelle Claudio Bettinelli alterne des mouvements percussifs sur le bois61 avec le retrait d’une main, puis deux. Les gestes vifs sont attribués à des accumulations d’objets sonores percussifs, et les retraits, gestes de facture entretenue, font office de suspension du discours en déclenchant des nappes temporaires. Finalement, des buzz sont provoqués lorsque le performeur saisit les antennes de l’instrument.

39La première partie de l’analyse a permis de décrire et d’identifier les gestes du musicien de manière conventionnelle, c’est-à-dire en se bornant au vocabulaire et aux méthodes propres à la musicologie, en particulier l’analyse structurelle et la typomorphologie schaefferienne. Elle ne permet par exemple pas de parler du mouvement selon un vocabulaire propre à une discipline du geste – comme la danse, le théâtre ou le cirque – ni de proposer une approche à partir de sensations corporelles, ou selon une chaîne continue de transferts d’énergie dont le corps constituerait la source. Voici les raisons qui ont conduit à la seconde partie de l’analyse, qui consiste à emprunter des outils à un spécialiste de la danse moderne : Rudolf Laban.

La structure de l’effort de Rudolf Laban

40Rudolf Laban est l’auteur d’une théorie du mouvement dont nous nous permettons d’utiliser quelques éléments. Sa partie sur « l’effort » se trouve entre autres dans La maîtrise du mouvement62. Selon l’auteur, chaque action d’une activité humaine (qu’elle soit liée à un art ou non, qu’elle soit scénique ou pas63) est qualifiable selon un Temps, un Espace, un Poids et un Flux, ce dernier représentant la capacité de l’exécutant à arrêter ou continuer le mouvement en cours d’exécution. Cette qualification repose sur deux attitudes opposées : la lutte (ou résistance) et l’abandon (ou soumission). Ainsi, le Poids est tantôt léger (qui cède), tantôt lourd (qui lutte), et l’Espace se situe entre un élément direct (qui lutte) et un élément flexible (qui cède), comme l’illustre le tableau suivant :

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Figure 5 : tableau récapitulatif des éléments de l’effort de Rudolf Laban (transcription personnelle)64

41Chacun à leur manière, des chercheurs65 ont emprunté la théorie de Rudolf Laban pour analyser ou qualifier certaines musiques. James Jordan66 éduque des jeunes chefs à partir de ce cadre théorique tandis que, pour compenser le manque d’un vocabulaire du mouvement en musique, Ina Henning utilise celui de Rudolf Laban67. La partie suivante propose quatre applications des concepts labaniens pour analyser Toucher.

Applications

Répartition des gestes selon les huit actions élémentaires

42Tout d’abord, essayons d’attribuer une action élémentaire68 à chaque geste du musicien. Ainsi, si tant est que l’on puisse au préalable segmenter une phrase en plusieurs actions, on obtiendrait une séquence d’efforts définis par ses facteurs moteurs. Par exemple, si la perception de deux actions consécutives est frapper puis flotter, cela revient à dire que l’exécutant effectue deux actions : la première avec un Poids lourd et un Espace direct, la seconde, plus longue, avec un Poids léger et un Espace flexible. Ce couple paradigmatique frapper/flotter correspond à l’idée d’un geste musical appuyé suivi d’un geste de détente, de relâchement69. Dans Toucher, il est représentatif d’une séquence de la partie A où l’interprète, à l’aide d’un geste vif, place sa main gauche au-dessus de l’antenne puis réalise une ondulation, comme s’il voulait représenter une vague70.

43Certains gestes ne posent aucune difficulté classificatoire. Ils sont répertoriés ci-dessous :

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Figure 6 : répartition des archétypes gestuels de Toucher en tant qu’action élémentaire labanienne

44En revanche, d’autres se heurtent à des problèmes de plusieurs types. D’une part, certains sont trop désordonnés pour être appréciés selon des éléments d’effort (agitation, bois, confus). En effet, lorsque par exemple l’exécutant agite ses mains de manière véloce et recentrée, il est difficile de dire si l’intention d’Espace est dirigée ou flexible, ou bien si l’on reçoit une sensation de pesanteur ou d’apesanteur71. D’autre part, certains gestes de retrait ne constituent pas des gestes en soi, mais plutôt une position de repos, une sorte de retour à zéro72. Rudolf Laban utilise le terme d’élasticité pour décrire ce phénomène73. Enfin, le geste d’approche, puisqu’il concerne la motricité du corps, ne semble pas mériter d’analyse supplémentaire en dehors de sa fonction rhétorique dialogique vis-à-vis de l’instrument.

45À la différence du classement établi en amont selon la facture schaefferienne, cette première application permet de regrouper certains mouvements du musicien sous une intention d’énergie similaire. À l’aide des diagrammes proposés par Rudolf Laban, cela pourrait avoir une application pédagogique intéressante.

46Cependant, cette première tentative se heurte d’emblée à un des problèmes fondamentaux de l’analyse du mouvement : il est délicat d’isoler un geste du précédent. De plus, on peut se demander quelle discussion une telle découpe engendre a posteriori. En effet, bien que l’on observe la mutation74 d’un facteur d’effort en un autre (passer de frapper à flotter implique que l’élément d’effort de Poids est passé de lourd à léger), aucune logique d’effort ne se dégage sur une durée significative de l’œuvre. Néanmoins, une première étape d’association d’actions labaniennes aux gestes du musicien peut s’avérer déjà suffisante pour un travail à visée didactique. En effet, ces affinités proposent indéniablement un point de vue descriptif des facultés motrices de l’exécutant. Ina Henning procède de cette manière en apposant les diagrammes de Rudolf Laban directement sur partition :

La méthode de Laban, reproduite sur une partition de Wolpe, révèle que les paramètres d’Espace, de Poids et de Temps fournissent au lecteur une lecture plus informée sur les mouvements corporels, au sein-même de la partition, indépendamment de tout propos instrumental75

47Ainsi, le lecteur, en plus de pouvoir se faire une idée sonore de l’œuvre, peut également – modérant une brève initiation à la théorie de Rudolf Laban – imaginer non pas les mouvements du musicien (il ne s’agit pas d’une notation chorégraphique76) mais les gestes musicaux issus des qualités motrices écrites et décrivant ces « impulsions intérieures dans lesquelles le mouvement prend son origine77 ».

Les accents

48Une seconde application de la théorie de l’Effort dans ce contexte est de distinguer, dans une ou plusieurs séquence(s) de la pièce musicale, une éventuelle prépondérance d’un facteur sur les autres, ou plus généralement une inflexion de l’interprète envers une attitude de résistance ou d’abandon vis-à-vis de son propre corps. Mais tout d’abord, il convient de tenter de voir comment se présentent les facteurs moteurs dans Toucher78. En effet, comment traiter l’Espace et le Poids quand le jeu entier de l’instrumentiste, sans contact, semble n’être qu’une question d’espace ?

L’Espace

49L’élément d’effort paraît direct lorsque le musicien a une idée précise du point de l’espace vers lequel il dirige son mouvement. Dans ce cas, le regard joue un rôle important lors de l’attaque du geste79. En effet, nous remarquons qu’un geste dirigé est très souvent accompagné d’un regard droit et fixe80. La tension musculaire maximale – au sens où un muscle est tendu au maximum et qu’un membre est éventuellement verrouillé – est également l’indicateur d’un effort direct. Lorsque l’exécutant pointe son doigt vers une antenne, cela rétrécit d’autant plus la zone d’espace d’attention effective. Ces deux éléments, regard et tension musculaire maximale, lorsqu’ils sont combinés, témoignent d’une attention particulière. Le regard apparaît alors comme un stade de préparation intérieure, d’effort mental qui donne une impulsion au mouvement81.

Le Poids

50Dans la partie finale, le performeur doit jouer sur le bois de l’instrument. Il s’agit du seul moment où le geste se rapproche explicitement d’une situation de jeu conventionnelle : le toucher d’un clavier. Les phases où les doigts entrent en contact avec la surface sont entrecoupées de gestes confus et aériens. Il y aussi une nette opposition entre d’une part un Poids lourd, celui des doigts et des mains joués de manière franche sur le bois du thérémine, et d’autre part le sentiment d’apesanteur qui règne lors des gestes rompant cette « frénésie digitale ». Il s’agit d’un des seuls moments de la pièce où il est possible de ressentir une opposition explicite entre deux énergies distinctes, probablement car il s’agit de l’unique phase de jeu avec contacts. En somme, le musicien communique une attitude de lutte sur le bois, qui est entrecoupée de manière ponctuelle et accélérée par une attitude d’abandon, de laisser aller, grâce à des mouvements aériens82.

Le Flux

51Le Flux est un paramètre qui est traité différemment des trois autres. En effet, Rudolf Laban décrit ses huit actions élémentaires comme ayant toutes un Flux latent83, et assure que la maîtrise du mouvement passe par la maîtrise des trois autres facteurs. Il associe alors le Poids avec l’intention, l’Espace avec l’attention et le Temps avec la décision :

La personne qui a appris à se familiariser avec l’Espace et à le maîtriser physiquement possède l’attention. La personne qui maîtrise sa relation avec le facteur Poids de leeffort possède l’intention ; elle acquiert la décision quand elle s’ajuste au Temps. Attention, intention et décision sont les stades de la préparation intérieure à des actions corporelles extérieures. Cela se produit quand, à travers le flux du mouvement, l’effort trouve une expression concrète dans le corps84.

52Dans cet extrait, Rudolf Laban laisse de côté la qualité de précision qu’il avait associée au Flux durant la phase d’efforts mentale précédant toute action85. Quoi qu’il en soit, on ne maîtrise donc pas le Flux comme on pourrait maîtriser le Poids. En revanche, dans Toucher, l’exécutant n’arrête pas d’essayer de maîtriser le flux continu du thérémine, peu importe s’il s’agit des sonorités originelles de l’instrument ou d’échantillons provenant de l’ordinateur. Même s’il arrive parfois à le maîtriser, il finit par abandonner.

53Le thérémine est un instrument qui émet de l’énergie en continu. L’instrument « joue » en permanence. Même si le performeur essaye de stopper le son en s’immobilisant, le programme informatique, lui, continue de recevoir constamment des informations. Le rôle de l’interprète est de maîtriser ce flux afin d’acquérir cette précision dont parle Rudolf Laban. Le thérémine est un instrument qui ne requiert pas d’éducation musculaire spécifique86 mais plutôt une précision dans le geste, où la marge de manœuvre reste très restreinte, contrairement à un instrument à frettes où la hauteur entendue n’est que le résultat d’une pression digitale. Par conséquent, maîtriser son propre flux revient à maîtriser celui du thérémine.

54Durant le prologue, l’interprète va acquérir de plus en plus d’assurance, jusqu’à prendre le contrôle des sonorités que l’instrument peut produire. Le Flux est d’abord très retenu (le mouvement pourrait s’arrêter à tout moment), puis se libère petit à petit. Dans la partie A et sa reprise A’, il est totalement libéré, au point où il ne semble pas possible de prédire quand le mouvement va être stoppé. Dans la partie B, on assiste à un renversement temporaire, où il s’agit d’effectuer un nouvel « apprivoisement » de l’instrument, passant d’une attitude déconcertée à une attitude confiante, comme indiqué sur la partition87. Dans la partie finale, le musicien va se sentir de plus en plus dépassé par les sonorités du thérémine et finira simplement par abandonner. Il a effectué tout un chemin pour prendre le contrôle de son instrument, et tout compte fait, c’est ce dernier qui « gagne. » Or, cette remarque n’est pas forcément liée au fait que le mouvement puisse être arrêté au cours de son exécution, mais plutôt à la position relative du musicien contre son instrument88.

55Finalement, la prépondérance d’un facteur sur les autres doit être observée avec précaution. Rien ne fonctionne sur la totalité de l’œuvre. Pourtant, il semblerait que se dessine une ligne directrice selon une attitude de lutte ou d’abandon de l’instrumentiste vis-à-vis du thérémine.

Les attitudes

56En analysant Toucher selon que le performeur entretient une attitude de résistance ou de relâchement face à son instrument, il est possible de dégager une trajectoire sur le long de la pièce. Ce graphique a l’avantage de prendre en compte les quatre facteurs et permet une réflexion plus générale qui dépasse les contraintes théoriques fondées sur des observations principalement chorégraphiques.

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Figure 7 : proposition d’illustration d’attitude de Claudio Bettinelli dans Toucher

57Cette courbe n’est qu’une illustration approximative au sujet de la première représentation de Toucher par Claudio Bettinelli. Le graphique est différent en se basant sur une autre interprétation. Voici une proposition d’illustration d’attitude de Frédérique Cambreling89 :

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Figure 8 : proposition d’illustration d’attitude de Frédérique Cambreling dans Toucher

58Comparé au performeur d’origine italienne, l’interprète est ici plus à l’aise durant la phase d’approche. Cependant, la performeuse intègre ensuite plus de retenue dans ses mouvements alors qu’elle devrait au contraire acquérir progressivement plus d’assurance. Ses gestes très contrôlés et ponctuels – les mouvements sont en effet moins amples, plus rares, la part d’immobilité est plus importante et la zone spatiale de jeu est bien plus réduite que celle de Claudio Bettinelli – rendent moins clair l’indication d’expression notée sur partition (« de plus en plus assuré »). De plus, les mouvements de la tête participent également de cette introversion, ce qui rend le regard moins dynamique. Le visage comporte également moins d’indications expressives. D’une manière générale, la dialectique entre des forces sonores et gestuelles est moins évidente dans cette seconde interprétation, ce qui rend la pièce moins spectaculaire90. Finalement, on remarque que la personnalité musicienne de l’interprète s’affirme à travers le degré de théâtralité : Claudio Bettinelli est percussionniste tandis que Frédérique Cambreling est harpiste. On est donc en présence de deux interprétations très différentes, qui permettent de commencer à révéler un invariant de l’intention d’attitude dans Toucher. Il serait en effet intéressant de réaliser d’autres graphiques d’attitudes à partir d’observations d’autres interprètes afin de déterminer une lecture de Toucher plus objective du point de vue énergétique91. Celle-ci pourrait se concrétiser en un « modèle » d’attitudes labaniennes sous forme graphique et permettrait ainsi de révéler une courbe d’intentions gestuelles déjà présente en filigrane dans la composition.

La kinesphère

59La kinesphère est un concept labanien distinct de la théorie de l’Effort. Il peut également être transposé au musicien afin de devenir un descripteur du mouvement – ou plus précisément, de l’occupation de l’espace. D’un point de vue technique, l’utilisation du thérémine, en tant que « contrôle d’espace92 » revient à découper la zone de jeu du théréministe en plusieurs zones de captation. Dans une situation de jeu où le performeur ne bouge pas sur scène, tous ses mouvements sont circonscrits dans un espace que Rudolf Laban nomme kinesphère93. Au sein de cet espace théorique se trouve une zone de jeu précise où l’instrument va réagir, que nous pouvons appeler kinesphère de jeu. Cette dernière contient les sons les plus graves et les plus aigus du thérémine, du volume le plus bas au plus élevé, et varie légèrement suivant les paramètres présents sur le corps de l’instrument. Suivant la pièce à jouer, l’interprète ne va utiliser qu’une partie de cet espace. Dans un article intitulé Musical Gestures, Concepts and Methods in Research, les auteurs font la remarque suivante : « au sein de la kinesphère, il est possible de distinguer les différents espaces de performance ou espaces de gestes, c’est-à-dire d’imaginer des boîtes délimitées pour les différents types de gestes musicaux94 ».

60Dans Toucher, le découpage en différentes zones est très précis et dépend du programme écrit par le compositeur. Pour chaque antenne, ce dernier a découpé la kinesphère de jeu95 en plusieurs zones : trois zones d’espace plus une saisie. Dans la partie B de la pièce, on distingue clairement une zone de jeu sonore et une zone de retrait. Par intermittence, le musicien sort de sa kinesphère de jeu pour couper le son, mais également pour se tenir à distance de cette « boîte magique ». Cet exemple constitue une illustration intéressante de la délimitation d’une kinesphère propre au jeu de l’instrumentiste. Durant la dernière partie – cette reprise B qui se transforme progressivement en tutti final – l’attention du spectateur (mais aussi celle de l’interprète), pour la première fois depuis le début de la pièce, est spécifiquement dirigée vers la zone du clavier. Grâce au contact de l’instrumentiste avec le bois du thérémine, le spectateur peut enfin percevoir un point de fuite explicite, qui constitue un type de « détente » musicale pour cette pièce qui est littéralement spectaculaire.

Les diagrammes

61Afin de pouvoir mémoriser cette théorie de l’Effort, l’auteur de La maîtrise du mouvement a conçu une notation graphique des actions à partir de la matrice suivante96 :

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Figure 9 : modèle graphique de représentation de l’effort labanien (transcription personnelle)97

62En plus de ces caractéristiques de base, Rudolf Laban rajoute des symboles : +, -, ., <, >, trait plus ou moins long, barres de reprises, etc.)98. Il devient alors plus commode de communiquer avec les interprètes, lecteurs, ou autres personnes intéressées dans cette démarche d’analyse du mouvement.

63Intégrés dans une partition, ils permettent par exemple de mémoriser certains mouvements d’un point de vue énergétique. Le choix et le placement de ces diagrammes, motivés par l’imaginaire de l’interprète, pourraient venir compléter les indications textuelles et expressives données par le compositeur99, et ainsi diriger son intention lors de phrases où la marge de manœuvre est très grande.

64Par exemple, dans l’extrait ci-dessous (section 8), l’interprète, que ce soit Claudio Bettinelli ou Frédérique Cambreling, effectue quatre grands gestes qui vont déclencher des trames sonores différentes. Voici comment l’on pourrait s’aider d’un diagramme pour qualifier ce paradigme de geste :

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Figure 10 : insertion d’un diagramme de l’Effort dans la partition de Toucher (section 8)

65D’un point de vue énergétique, cette séquence se réduit à des variations du paradigme flotter de Rudolf Laban. Le diagramme renvoie à des mouvements lents et légers qui sont dirigés vers l’espace entourant l’instrument. Bien que la partition indique quelques gestes vifs à effectuer par la main gauche (matérialisés par des bosses rouges sur l’extrait de partition ci-dessus), l’action flotter caractérise globalement cette section. Il reste alors à déterminer si les autres sections peuvent chacune être associée à une action labanienne, et ainsi évaluer comment la transformation des actions intervient dans les enjeux formels de l’œuvre.

66Dans sa thèse, Ina Henning utilise également ces graphiques en les posant sur partition, en tant qu’aide à l’analyse. Cela lui permet de mémoriser facilement quels types de gestes sont effectués par l’interprète à tels moments de la partition, pour ensuite entrer dans une analyse plus approfondie. En revanche, James Jordan utilise ces diagrammes pour l’apprentissage des mouvements du chef. Il y a donc ici trois applications distinctes des diagrammes de Rudolf Laban en musique : descripteur des mutations du mouvement du performeur pour une analyse formelle, aide à la mémorisation, description locale des mouvements du chef.

Conclusion

67Le corps produit de l’énergie interne qui peut se transformer au cours de ses actions. Dans un art vivant comme la musique, cette vitalité est mise en scène et aboutit à de l’énergie acoustique organisée par des formes sonores qui nous impose l’étude des relations entre les gestes du musicien, leurs perceptions par l’audience et leurs complexes rapports au son. Cette énergie « propulsée de l’intérieur100 » va amener le musicien à réaliser des gestes qui constituent une quantité d’informations non négligeable perçue par le spectateur. Comment analyser cette « sémiosphère101 » dans une œuvre où le contact se réduit principalement à une action d’effleurer ou à une prise ?

68La première partie de l’analyse de Toucher nous a permis d’établir deux structures formelles différentes : l’une par le geste, l’autre par le son. L’analyse audiovisuelle permet de qualifier un parcours dramaturgique cohérent, basé sur la lutte, soumis ensuite aux commentaires du compositeur102. Cependant, le vocabulaire et la méthodologie musicologique se sont révélés incomplets pour l’analyse du geste. En faisant appel à la théorie de Rudolf Laban, comme le vocabulaire de l’analyse de l’Effort du mouvement et le concept de kinesphère, il est possible de décrire les gestes du musicien de manière expressive. L’approche selon les attitudes de lutte et d’abandon demande à être approfondie afin d’envisager les mouvements du musicien sans évacuer ses caractéristiques expressives. La courbe d’attitude qui, rappelons-le, est dessinée selon des considérations à la fois personnelles et spécifiques à une représentation particulière de l’œuvre, constitue une lecture analytique complémentaire faite de niveaux d’énergie et de quantités d’informations. Les diagrammes peuvent quant à eux être utilisés à des fins interprétatives ou analytiques. On retiendra également la notion de Flux qui exprime les sentiments du sujet103 et devient par exemple tangible lorsqu’elle est croisée avec l’idée du flux d’air maîtrisé par le chanteur. Cependant, ce système d’analyse du mouvement doit être utilisé avec prudence. Il se prête par exemple difficilement à l’étude de la musique vocale, qui se qualifie plutôt par des micro-gestes. De plus, le facteur de Temps se cantonne à définir une action entre soudaine et soutenue, et ne renseigne donc pas directement sur les fonctions structurelles des événements (gestuels ou sonores), ce qui nous pousse à chercher des méthodes alternatives104 afin de rendre compte de l’inscription des rapports temporels de la musique et des gestes du musicien sur la durée totale de l’œuvre.

69Des données sur la cognition du mouvement apporteraient des éléments de compréhension complémentaires pour cerner les modalités expressives des formes scéniques où le geste revêt une fonction extra-sonore, comme dans Toucher. En effet, comment est-ce que l’amplitude d’un mouvement peut-elle avoir une influence sur notre perception du temps ? Est-ce que deux musiciens du même pupitre d’orchestre, en donnant à voir une information dédoublée par rapport à un musicien seul, donnent l’impression d’un temps plus court ? La perception est-elle différente si ceux-là jouent des parties distinctes ? On sait par exemple que pour avoir la perception d’un volume deux fois plus élevé, nous devons entendre jouer une dizaine de violonistes, c’est-à-dire que la perception du volume n’est pas proportionnelle à l’amplitude sonore ou, comme l’énonce plus généralement la loi de Weber-Fechner, la sensation varie comme le logarithme de l’excitation. Par conséquent, il semblerait que seule une étude croisée entre les sciences cognitives du mouvement dans l’expression et la réception des arts105, les études sur le geste dansé106 ainsi que les outils musicologiques107 puisse révéler le sens du mouvement108 de manière holistique, et ainsi rendre compte des différentes modalités de l’expression musicale, tant le son reste indissociable du geste qui le produit.

Notes de bas de page numériques

1 Période débutant après la seconde guerre. Pour le développement des interfaces numériques, cf. Marcelo M. Wanderley, Eduardo Miranda, New Digital Musical Instruments : Control and Interaction Beyond the Keyboard, Middleton, A-R Editions, 2006. Durant ces dernières années, on observe un développement important de toute sorte d’objets « grand public », comme l’ACPAD, le Zoom ARQ, le Mogees, ainsi que des outils plus avancés, comme le Karlax, le Seaboard ou le Méta-Instrument qui possèdent des qualités plus « instrumentales ». Le joueur possède en effet un contrôle plus fin et une palette d’archétypes gestuels plus large (se pencher en avant, faire tourner l’instrument sur plusieurs axes, etc.).

2 Terme emprunté à Bernard Sève. Cf. Bernard Sève, L’instrument de musique, une étude philosophique, Paris, Seuil, 2013, p. 94. Dans notre contexte, fait principalement référence aux pièces de Théâtre Musical contemporain et de Théâtre Instrumental.

3 Pour une histoire des performances numériques, cf. Steve Dixon, Digital Performance: A History of New Media in Theater, Dance, Performance Art, and Installation, Cambridge, The MIT Press, 2007.

4 À tel point qu’il convient de parler de « gesture studies » (cf. l’International Society of Gesture Studies : http://gesturestudies.com/, cons. le 21 février 2018). Dans le domaine de la musique, il s’agit de relier les mouvements et micro-mouvements de l’instrumentiste à des dispositifs électroniques (Marcelo M. Wanderley, Martin Laliberté), de comprendre comment l’imaginaire de l’auditeur réagit pendant l’écoute (Rolf Inge Godøy, Marc Leman), d’identifier les différents types de gestes (Claude Cadoz, Hugues Genevois) ou bien d’étudier le geste comme cinquième paramètre musical (Jean-François Trubert, Nicolas Donin).

5 Le compositeur doit par exemple réfléchir à une notation capable de décrire le geste du musicien, aussi précis et inhabituel soit-il.

6 Le musicien de scène doit évaluer le degré de liberté de cette notation du geste.

7 Le spectateur a parfois du mal à percevoir la relation entre le geste capté du performeur et le son résultant, en particulier quand celle-ci implique une interface numérique, comme l’ordinateur. Il est par conséquent difficile d’évaluer le caractère délibérément spectaculaire d’une forme musicale scénique.

8 Il peut avoir une fonction comique, comme c’est souvent le cas chez Mauricio Kagel. Par exemple, dans Auftakte, sechshändig, un des deux percussionnistes doit faire comprendre à l’audience qu’il a perdu une baguette, puis doit fouiller dans un sac pour la retrouver. Après avoir sorti une quantité d’objets du sac, il finit par retrouver l’objet perdu.

9 Une captation vidéo est disponible sur : https://www.youtube.com/watch ?v =bKKO4GTj8v0 (cons. le 4 janvier 2017).

10 Parmi les autres représentations pour lesquelles Vincent-Raphaël Carinola a supervisé les répétitions, on note celles de Frédérique Cambreling et de Dominique Clément.

11 Disponibles sur : https://www.youtube.com/playlist ?list =PLPAzRDMgZuyFhaqw-Edjq_KsIpfNZqDRT (cons. le 26 janvier 2018).

12 Vincent-Raphaël Carinola, Claudio Bettinelli, Entretien avec Cyril Délécraz, Lyon, 29 juin 2016

13 Au sens où ils ne produisent aucun son, à la manière des gestes de Silence Must Be (Thierre De Mey, 2002) et de certains moments de Circles (Luciano Berio, 1960), Con Voce (Mauricio Kagel, 1979) et Les sept crimes de l’amour (Georges Aperghis, 1979).

14 Nom générique représentant le système interactif impliqué dans le traitement du son. Ce terme, utilisé par le compositeur lui-même lors de l’entretien, rassemble ici un ordinateur accompagné du logiciel Max/MSP, une pédale MIDI, un capteur piézo-électrique, une interface audio et des câbles.

15 En tout état de cause, une analyse en contexte suppose un commentaire de la performance vécue en direct par l’observateur. Dans le cas présent, il s’agit d’un regard passé à travers le crible du film, avec toute la subjectivité et le manque d’information que cela engendre. Néanmoins, cela n’enlève en rien la validité de la proposition des dynamiques structurelles établie dans une perspective temporelle et sémiotique, à la manière du travail réalisé par Jean-François Trubert et Grégory Beller pour la pièce Luna Park (Georges Aperghis, 2011). Cf. Jean-François Trubert, Grégory Beller, « Luna Park (2011): An Aesthetics of Shock », Contemporary Music Review, vol. 35, n° 4-5, 2016, pp. 500-534.

16 Notion-clef de la typomorphologie schaeferienne. Il s’agit d’un « phénomène et événement sonore perçu comme un ensemble, comme un tout cohérent, et entendu dans une écoute réduite qui le vise pour lui-même, indépendamment de sa provenance ou de sa signification ». Cf. Michel Chion, Guide des objets sonores, Paris, Buchet/Chastel, 1995, p. 34. Disponible sur : http://michelchion.com/books/9-guide-des-objets-sonores (cons. le 25 septembre 2015).

17 Ce mot est choisi à dessein, au détriment d’« introduction », afin de préserver le caractère scénique de la relation entre deux « personnages » : le thérémine et l’instrumentiste.

18 Auquel se superposent des sonorités « craquelées » aux attaques franches s’apparentant à des artéfacts électriques.

19 Dans le vocabulaire de la typomorphologie schaefferienne, un son tonique est un son dont la hauteur est fixe et repérable. Pour plus de détails, cf. M. Chion, Guide des objets sonores, op. cit, pp. 119-120.

20 M. Chion, Guide des objets sonores, op. cit, pp. 119-120.

21 Terme emprunté à Pierre Boulez dans son application de la notion d’espace lisse. En référence à une surface, le temps lisse, puisqu’il ne se réfère pas au temps chronométrique, est étranger au concept de vitesse. Au contraire, pour le temps strié (ou pulsé), « les structures de la durée se réfère[nt] au temps chronométrique en fonction d’un repérage, d’un balisage [la pulsation] ». Le temps strié est « susceptible d’être agi par la vitesse, [l’]accélération ou [la] décélération ». Cf. Pierre Boulez, Penser la musique aujourd’hui, Paris, Gallimard, 2011, pp. 99-100.

22 Se dit d’un échantillon sonore d’une durée courte et répété en boucle.

23 Il s’agit d’une Unité Sémiotique Temporelle (UST) décrite par les chercheurs du MIM (Marseille) comme un « ralentissement du déroulement de la figure sonore, dû à une force extérieure […] une retenue subite d'un mouvement jusqu’à son arrêt. », la force extérieure étant ici le mouvement du performeur. L’équipe du MIM, Les Unités Sémiotiques Temporelles : éléments nouveaux d’analyse musicale, Marseille, MIM, 1996, p. 85.

24 Le terme désigne un silence total de la part du système audio. Il s’oppose au silence analogique des bandes magnétiques qui laissent toujours un peu de souffle, en particulier lors de copies successives d’un même son ou dans l’enregistrement à bas niveau. Dans les années 1970-1980, il existait une véritable « obsession hygiéniste » consistant à gommer ce bruit externe au sein des compositions électroacoustiques. Cf. Michel Chion, « La venue du souffle : sur trois sens de ce mot, in Muriel Joubert, Denis Le Touzé (dir.), Le souffle en musique, Lyon, Presses Universitaires de Lyon, 2015, p. 164.

25 Au début de la section 15, la partition indique : « variation de la section 8 ».

26 V-R Carinola, Entretien avec Cyril Délécraz, op. cit.

27 Jusqu’à la fin de l’article, l’antenne gauche – respectivement l’antenne droite – désigne celle placée du point de vue du performeur.

28 Dans la nature, le son est toujours indice d’un mouvement. Lorsqu’un animal perçoit un bruit dont il ne sait identifier la source, il est alerté car le son est synonyme de mouvement, donc de prédateur potentiel. Cet instinct est directement lié à la notion de peur.

29 Coralie Ehinger, Jimmy Virani, Manuel d’initiation au theremin, Lausanne, Éditions des Sentiers, 2012, p. 8.

30 V.-R. Carinola, Entretien avec Cyril Délécraz, op. cit.

31 Selon que les deux bras sont concernés ou pas, suivant la place qu’occupe un mouvement dans l’espace et vis-à-vis de sa proximité avec les antennes.

32 Exactement vingt-quatre. Mais le chiffre importe peu puisque certains sont difficilement discernables.

33 Il s’agit d’un montage vidéo réalisé personnellement afin d’exemplifier cette vingtaine de gestes. Disponible sur : https://youtu.be/elgKfVlM-Sw (cons. le 26 janvier 2018).

34 Notons également que ces gestes ne sont pas significatifs pour le discours musical. Il n’y a par exemple aucun grand geste central avec un impact structurel important.

35 Définie comme la « perception qualitative de l’entretien énergétique des objets sonores, avec lequel elle est en relation étroite ». M. Chion, Guide des objets sonores, op. cit., p. 117.

36 Cette idée apparait dans deux autres travaux. Selon Jean-François Trubert, puisque la facture désigne la perception qualitative de l’entretien énergétique, elle être transposée au domaine gestuel au même titre que la masse ou l’itération. Il s’agit ensuite de produire une grille de lecture croisée entre une activité énergétique sonore (par la typomorphologie schaefferienne) et une activité énergétique gestuelle (par les concepts labaniens). Cf. Jean-François Trubert, « Approches heuristiques pour l’analyse du théâtre Instrumental chez Mauricio Kagel », in Jean-Michel Bardez, Xavier Hascher, L’Analyse musicale aujourd’hui : crise ou (r)évolutions, Paris, Delatour France, 2015, pp. 405-426. Rolf Inge Gødoy remarque également que la plupart des termes de la typomorphologie schaefferienne peuvent aussi convenir aux gestes producteurs de son, et qu’il existe par conséquent une composante gestuelle dans ce système théorique, ce qui l’invite à développer son concept d’« objet sono-gestuel » [gestural-sonorous object]. Cf. Rolf Inge Gødoy, « Gestural-Sonorous Objects: embodied extensions of Schaeffer’s conceptual apparatus », Organised Sound, vol. °11, n° 2, 2006, pp. 149-157.

37 J.-F. Trubert, « Approches heuristiques pour l’analyse du théâtre Instrumental chez Mauricio Kagel », op. cit., p. 422.

38 Le terme désigne ici les comportements gestuels associés eu jeu d’un instrument. Par exemple, un geste franc et appuyé déclenchera, dans la plupart des cas, un son avec une attaque franche et à fort volume. Claude Cadoz définit le geste instrumental comme « [l’]ensemble des comportements gestuels appliqués à l’instrument et dont une partie produira l’énergie nécessaire à la finalité de la tâche ». Cf. Claude Cadoz, « Musique, geste, technologie », Hugues Genevois, Raphaël De Vivo (dir.), Les nouveaux gestes de la musique, Marseille, Parenthèses, 1999, p. 62.

39 Qui sont appelées « séquences d’effort » selon la terminologie labanienne.

40 Terme emprunté à Pierre Boulez pour décrire des alternances soudaines entre deux patterns A et B, comme dans les Symphonies pour instruments à vent d’Igor Stravinski. Ici, trois patterns sont à l’œuvre et la forme est une succession ordonnée de moments A, B et C.

41 Max/MSP est un logiciel de traitement audio et vidéo développé par Cycling 74. Disponible sur : https://cycling74.com/ (cons. le 5 janvier 2017).

42 Il s’agit plus précisément de synthèse granulaire. Ce module, décliné sous trois formes, permet de parcourir un fichier son et de faire varier ses paramètres, comme la taille d’un grain (c’est-à-dire la longueur de la partie d’échantillon à jouer en boucle), la dispersion des grains autour du grain principal (c’est-à-dire le degré de hasard dans la place du fragment au sein de l’échantillon) ou la direction de lecture (avant, arrière, avant-arrière).

43 Basile Chassaing, Toucher de Vincent-Raphaël Carinola, pour theremin, ordinateur et dispositif électroacoustique, Mémoire dirigé par Marc Battier, Paris, Université Paris-Sorbonne, 2010-2011.

44 Pour une description détaillée du comportement du patch, cf. B. Chassaing, Toucher de Vincent-Raphaël Carinola, pour theremin, ordinateur et dispositif électroacoustique, op. cit., pp. 8-22.

45 Notons que cela n’est pas propre à la lutherie électronique comme en témoignent certains instruments à percussions (tam-tam, cymbale, marimba, etc.).

46 Le calibrage des zones doit être perçu comme un accordage de l’instrument, au sens large (variation de l’espace entre un manche de guitares et les cordes, colophane sur l’archet, etc.).

47 Se dit d’un objet sonore dont l’identification de la cause est évidente, à telle point qu’elle empêche l’auditeur de se focaliser sur les caractéristiques morphologiques de celui-ci.

48 V.-R. Carinola, Entretien avec Cyril Délécraz, op. cit.

49 Ce mystère se rajoute à celui créé par l’instrument lui-même.

50 Le terme est ici employé pour souligner la cohérence, l’osmose dans la relation entre le geste et le son qu’il produit, ce que l’on trouve dans la plupart des instruments acoustiques, hormis éventuellement l’orgue dont l’ampleur du son et l’absence de nuances sont en contradiction avec le toucher du ou des clavier(s). Le sens est donc ici différent de celui que lui donne Claude Cadoz.

51 En référence au vocabulaire utilisé par Claude Cadoz. Le geste d’excitation correspond par exemple à une corde pincée ou une touche de piano enfoncée, au frottement d’un archet ou à une frappe sur percussion. Le geste de modification correspond par exemple au vibrato d’un violon, d’une guitare ou au piston du trombone. Cf. C. Cadoz, « Musique, geste, technologie », op. cit., p. 92.

52 Par exemple, dans la première section, chaque geste du performeur déclenche un soupir parmi un ensemble de sons présents dans la machine.

53 La Fabrique. Toucher, la magie sonore du theremine. Disponible sur : http://lafabriquedocumentaire.fr/production/toucher-la-magie-sonore-du-theremin/ (cons. le 9 janvier 2017).

54 V.-R. Carinola, Entretien avec Cyril Délécraz, op. cit.

55 Claudio Bettinelli, Entretien avec Cyril Délécraz, Lyon, 29 juin 2016.

56 B. Sève, L’instrument de musique, une étude philosophique, op. cit., p. 61. D’une manière générale, soulignons également que l’aspect visuel modifie la perception sonore, de sorte que les qualités du son perçu sont influencées par les qualités du geste musical. Cf.: Mary Broughton, Catherine Stevens, « Music, Movement and Marimba: an Investigation of the Role of Movement and Gesture in Communicating Musical Expression to an Audience », Psychology of Music, vol. 37, n° 2, 2009, pp. 137-153; Jonna K. Vuoskoski, Marc R. Thompson, Eric F. Clarke, Charles Spence, « Crossmodal interactions in the perception of expressivity in musical performance », Attention, Perception and Psychophysics, n° 76, 2014, pp. 591-604.

57 Hormis le tout début et la toute fin de la pièce qui contiennent des éléments de mise en scène (en particulier, l’entrée et la sortie spectaculaires de l’interprète).

58 C. Bettinelli, Entretien avec Cyril Délécraz, op. cit.

59 V.-R. Carinola, Entretien avec Cyril Délécraz, op. cit.

60 V.-R. Carinola, Entretien avec Cyril Délécraz, op. cit.

61 Captés à l’aide d’une capsule piézoélectrique.

62 Rudolf Laban, La maîtrise du mouvement, Arles, Actes Sud, 2007.

63 « L’art du mouvement sur scène contient la gamme complète de l’expression par le corps qui comprend : la parole, le jeu théâtral, le mime, la danse et même l’accompagnement musical ». Cf. R. Laban, La maîtrise du mouvement, op. cit., p. 23.

64 R. Laban, La maîtrise du mouvement, op. cit., p. 113.

65 Comme Ina Henning, James Jordan, Lisa Billingham, Janet K. Halfyard, Charles Gambetta, Barbara Adrian ou Jean-François Trubert.

66 James Jordan, The Conductor’s Gesture, Chicago, GIA Publications, 2011.

67 « Mon but est d’appliquer à la musique les huit actions élémentaires […] de Rudolf Laban, dans l’objectif de créer un langage qui puisse communiquer les performances corporelles ». Cf. Ina Henning, Displaced Spaces, Shocks, Negations: a musical and gestural analysis of Stefan Wolpe’s Studies for Piano, Part I (1946-48) and its implications for Performance, Thèse de doctorat, Toronto, Université de Toronto, 2013, p. 76.

68 Au nombre de huit selon l’auteur. Il s’agit de considérer le Flux comme latent et de combiner les trois autres facteurs. Ces actions sont nommées comme suit : frapper, fouetter, tapoter, épousseter, presser, tordre, glisser et flotter.

69 Ou bien, selon le vocabulaire des UST, à une unité « contractée/étendue », et plus généralement au couple « tension/détente ».

70 Cf. exemple vidéo n° 1 : https://youtu.be/Mgx2SNazW-A (cons. le 26 janvier 2018).

71 Cf. exemple vidéo n° 2 : https://youtu.be/lHugqYr5hQ8 (cons. le 26 janvier 2018).

72 Cf. exemple vidéo n° 3 : https://youtu.be/Cx-__UtFDs0 (cons. le 26 janvier 2018).

73 Pour plus d’informations à ce sujet, cf. R. Laban, La maîtrise du mouvement, op. cit., pp. 269-270.

74 Ce mot, utilisé par Rudolf Laban lui-même, désigne le changement d’effort d’un facteur en son opposé, par exemple de léger à lourd pour le Poids, ou bien de direct à flexible pour l’Espace.

75 « The Laban method, transferred onto a musical score of Wolpe reveals that Laban’s parameters – space, weight and time – provide the reader with a more informed reading of bodily movement in the score, free from any instrumentalist concerns ». Cf. I. Henning, Displaced Spaces, Shocks, Negations: a musical and gestural analysis of Stefan Wolpe’s Studies for Piano, Part I (1946-48) and its implications for Performance, op. cit., p. XIX.

76 À ce sujet, Rudolf Laban a créé la cinétographie (ou Labanotation). Cette écriture des mouvements du danseur est utilisée par quelques chercheurs en musique. Cf. l’article de Ledice Fernandes, dans la présente revue, ainsi que : Kyle Maxwell-Doherty, « Labanotation : A New Notation for Percussionists & Composers », Library News, vol. 9, n° 2, 2014. Disponible sur : http://www.dancenotation.org/news/Library_News/library_v9_n2.pdf (cons. le 26 janvier 2018).

77 Définition de l’effort selon Rudolf Laban. Cf. R. Laban, La maîtrise du mouvement, op. cit., p. 30.

78 Le facteur de Temps ne pose en général pas de problème, sauf celui de déterminer s’il est long ou court. En revanche, l’analyste ne peut se contenter de calculer simplement les durées des différents gestes du performeur. C’est la raison pour laquelle une étude de la perception cognitive des gestes du musicien pourrait compléter une telle démarche.

79 Terme emprunté à Hubert Godard pour signifier le pré-mouvement. Cf. Hubert Godard, « Le geste et sa perception », in Marcelle Michel, Isabelle Ginot (dir.), La danse au XXe siècle, Paris, Larousse/Bordas, 1998, p. 224.

80 Notons que Rudolf Laban conçoit cet élément d’Espace comme directement lié à l’attention. Plus précisément, chaque action est précédée de quatre micro-gestes expressifs liés respectivement à l’attention, l’intention, la décision et la précision. Cf. : R. Laban, La maîtrise du mouvement, op. cit., p. 153.

81 Cf. exemple vidéo n° 4 : https://youtu.be/gaQcvia_Kg8 (cons. le 26 janvier 2018).

82 Cf. exemple vidéo n° 5 : https://youtu.be/lDRkNOCp7ro (cons. le 26 janvier 2018).

83 Rudolf Laban emploie ce mot pour dire qu’il n’est ni retenu ni libre. Cette latence peut éventuellement s’appliquer aux autres facteurs. Lorsqu’un élément est latent, il appartient à la catégorie des pulsions motrices. Cf. R. Laban, La maîtrise du mouvement, op. cit., p. 113-118.

84 R. Laban, La maîtrise du mouvement, op. cit., p. 118.

85 « On peut observer que toute action pratique est précédée par quatre phases d’effort mental qui sont rendues visibles par de petits mouvements expressifs ». Cf. R. Laban, La maîtrise du mouvement, op. cit.,.p. 153.

86 Pensons par exemple aux déformations physiques des doigts et des mains subies par certains pianistes ou guitaristes.

87 Le titre de la section 12 est : « Déconcerté, puis en maîtrisant la gestuelle ». Celui de la suivante est : « Assuré, stable ».

88 Cf. exemple vidéo n° 6 : https://youtu.be/a7UxbaAaJFI (cons. le 26 janvier 2018).

89 Cette performance s’est déroulée le 14 mars 2015 dans le cadre du concert « Musique du geste » à la Philharmonie de Paris. Elle fait partie du reportage vidéo suivant : La Fabrique, Toucher, la magie sonore du theremin, op. cit.

90 Au sens étymologique du terme, c’est-à-dire « qui se donne à voir ».

91 Une étude comparée des différentes interprétations permettrait également de discuter les choix interprétatifs des différents exécutants, en particulier dans les endroits où plusieurs gestes sont possibles pour réaliser une même phrase musicale.

92 Selon la terminologie de Lydia Kavina. Cf. Lydia Kavina, « Thereminvox », in Nils Meise, Dmitri Zakharine, (dir.), Electrified Voices: Medial, Socio-historical and Cultural Aspects of Voice Transfer. Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2012, p. 190.

93 Selon l’auteur, la kinesphère définit les « limites naturelles de l’espace personnel ». Cf. R. Laban, La maîtrise du mouvement, op. cit., p. 65.

94 « Within the kinesphere, it is possible to further distinguish among different performance spaces or gesture spaces, i.e. imaginary bounding boxes for various types of musical gestures ». Cf. Alexander R. Jensenius, Marcelo M. Wanderley, Marc Leman, Rolf Inge Gødoy, Musical Gestures, Concepts and Methods in Research, in Rolf Inge Gødoy, Marc Leman (dir.), Musical Gestures: Sound, Movement and Meaning. Oxford, Routledge, 2009, p. 20.

95 Dans le cas du thérémine, il y a en réalité deux kinesphères, une pour chaque antenne.

96 Une petite application en VBA nommée LED est disponible sur http://cyrildelecraz.com. Elle permet d’apposer plus facilement des diagrammes sur un document numérique (traitement de texte, PDF, etc.) via la fonctionnalité presse-papier du système d’exploitation.

97 R. Laban, La maîtrise du mouvement, op. cit., p. 112.

98 Pour plus de détails, cf. R. Laban, La maîtrise du mouvement, op. cit., p. 249-276.

99 Dans une présentation concernant la Symphonie Alpestre de Richard Strauss (Conservatoire National Régional de Nice, 14 mai 2014), Jean-François Trubert a proposé l’idée de placer ces diagrammes pour apporter des indications de jeu supplémentaires dans des parties de percussions notées de manière identique par le compositeur mais ayant une intention différente.

100 « Un geste est un mécanisme vivant et intelligible propulsé par une énergie à l’intérieur d’un être. ». Cf. Apollinaire Anakesa Kululuka, « Du fait gestuel à l’empreinte sonore : pour un geste musical ». APC-MCX, Atelier n° 37. Disponible sur : http://archive.mcxapc.org/docs/ateliers/0905anakesa.pdf (cons. le 8 mai 2014).

101 Désigne l’ensemble des signes provenant de la scène : présence de l’instrument, gestes du musicien, sonorités (timbre, espace, etc.), lumière, occupation du corps dans l’espace scénique, etc.

102 Bien que le parcours soit cohérent, il n’en reste pas moins abstrait et sujet à différentes modalités d’interprétation. Sur ce point, Claudio Bettinelli est formel : « raconter une histoire claire aux gens ne [les] intéresse pas. […] Il faut qu’un imaginaire se crée. ». Cf. C. Bettinelli, Entretien du 29 juin 2016, op. cit.

103 « Les idées et les sentiments sont exprimés par le flux du mouvement et deviennent visibles par les gestes, ou audibles par la musique ou les mots ». Cf. R. Laban, La maîtrise du mouvement, op. cit., p. 28.

104 Par exemple à l’aide des UST ou de l’analyse fonctionnelle de Stéphane Roy. Cf. : Stéphane Roy, L’analyse des musiques électroacoustiques : modèles et propositions, Paris, L’Harmattan, 2003.

105 En se référant par exemple à la réaction des neurones miroirs. Cf. Giacomo Rizzolatti, Corrado Sinigaglia, Les neurones miroirs, Paris, Odile Jacob, 2008 ; Gabriele Sofia, « Neurones miroirs et intention dilatée. Vers une étude de l’expérience performative du spectateur », in Bérengère Voisin (dir.), Du récepteur ou l’art de déballer son pique-nique, Publications numériques du CÉRÉdI, Actes de colloques et journées d’étude (ISSN 1775-4054), n° 6, 2012. Disponible sur : http://ceredi.labos.univ-rouen.fr/public/ ?neurones-miroirs-et-intention.html (cons. le 5 mars 2018).

106 Comme l’analyse du mouvement de Rudolf Laban.

107 Comme les UST.

108 Alain Berthoz considère la kinesthésie, ou sens du mouvement, comme un 6e sens. Cf. Alain Berthoz, Le Sens du Mouvement, Paris, Odile, Jacob, 2013.

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WANDERLEY Marcelo M., MIRANDA Eduardo, New Digital Musical Instruments: Control and Interaction Beyond the Keyboard, Middleton, A-R Editions, 2006

Sitographie

Interprétation par Claudio Bettinelli : https://www.youtube.com/watch ?v =bKKO4GTj8v0 (cons. le 26 janvier 2018)

Interprétation par Frédérique Cambreling : http://lafabriquedocumentaire.fr/production/toucher-la-magie-sonore-du-theremin/ (cons. le 26 janvier 2018)

Montages vidéo : https://www.youtube.com/watch ?v =elgKfVlM-Sw&list =PLPAzRDMgZuyFhaqw-Edjq_KsIpfNZqDRT (cons. le 26 janvier 2018)

Exemples de chaque geste : https://youtu.be/elgKfVlM-Sw (cons. le 26 janvier 2018)

Exemple vidéo n° 1 : https://youtu.be/Mgx2SNazW-A (cons. le 26 janvier 2018)

Exemple vidéo n° 2 : https://youtu.be/lHugqYr5hQ8 (cons. le 26 janvier 2018)

Exemple vidéo n° 3 : https://youtu.be/Cx-__UtFDs0 (cons. le 26 janvier 2018)

Exemple vidéo n° 4 : https://youtu.be/gaQcvia_Kg8 (cons. le 26 janvier 2018)

Exemple vidéo n° 5 : https://youtu.be/lDRkNOCp7ro (cons. le 26 janvier 2018)

Exemple vidéo n° 6 : https://youtu.be/a7UxbaAaJFI (cons. le 26 janvier 2018)

Application LED : http://cyrildelecraz.com (cons. le 26 janvier 2018)

Pour citer cet article

Cyril Délécraz, « Propositions d’analyse du geste du musicien par la théorie de l’Effort de Rudolf Laban. L’exemple de Toucher (Vincent-Raphaël Carinola, 2009), pour thérémine et électronique », paru dans Loxias-Colloques, 11. Corps, son et technologies entre théories et pratiques, Deuxième partie : Le geste musical, contextes et analyses, Propositions d’analyse du geste du musicien par la théorie de l’Effort de Rudolf Laban. L’exemple de Toucher (Vincent-Raphaël Carinola, 2009), pour thérémine et électronique, mis en ligne le 23 juillet 2018, URL : http://revel.unice.fr/symposia/actel/index.html?id=1142.


Auteurs

Cyril Délécraz

Cyril Délécraz est doctorant à l’Université Côté d’Azur, laboratoire CTEL. Il travaille sur une méthodologie d'analyse visant à rendre compte des dimensions autant sonore que gestuelle dans des formes musicales scéniques de la création contemporaine, allant du Théâtre Musical des années 1960 aux pièces électroniques en temps réel des années 2010. Également titulaire d’un Diplôme d’Études Musicales en composition électroacoustique, Cyril se produit en tant qu’électroniste sous le pseudonyme « Khiryos » ainsi qu’avec le groupe « Dart Lab », Folk’lore Alternatif de Provence.

Université Côte d’Azur, CTEL