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Loxias | 49. | I.

Charlot poète de l’asyndète et maître épileptique du cinématographe
Dadas et surréalistes face à la poétique chaplinesque du détournement de l’objet

Résumé : Charlot semble à la fois libre devant les objets et, bien souvent, un être mécanique ou risquant de devoir se rendre à la mécanique des objets. Or les dadaïstes et les surréalistes analysent ce paradoxe en associant le caractère mécanique de Charlot à une attitude de liberté, dont témoignent notamment ses détournements de l’usage habituel des objets. L’article entend donc évaluer l’hypothèse que ce paradoxe repose sur des enjeux rhétoriques, corporels et visuels qui expriment peut-être moins la liberté de Charlot que l’affirmation, à travers lui, de la figure de l’artiste. Trois perspectives permettent d’explorer ce paradoxe qui nourrit les poétiques chaplinesque et surréaliste. D’une part, le détournement d’objet, source d’émotion, permet de créer un effet poétique qui fait rire ou pleurer. D’autre part, Charlot tente d’échapper au cannibalisme de l’objet et à l’emprise du monde du déchet. Ce mouvement, tour à tour émancipateur et tyrannique, met au jour le motif du désir qui donne une place nouvelle au personnage. Enfin, Charlot expose la tentative, toujours fragile et réitérée, de s’affirmer comme un magicien du réel le plus humble. Ainsi le vagabond, sans s’affranchir de l’objet lui-même, qui demeure impérieux et toujours utile dans la voie d’un affermissement de soi, opère une ponctuelle, fébrile et pulsative émancipation par l’objet. Aussi la poétique du détournement de l’objet permet-elle de dessiner les contours d’un personnage hors du commun : Charlot, en poète de l’asyndète et artiste épileptique, maître du cinématographe lui-même.

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