Francis Ponge dans Loxias


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Loxias | Loxias 41 | I.

« Fragment de la nature des choses » et « inachèvement perpétuel » : l’écriture du monde selon Francis Ponge

Cet article tente de dégager des écrits de Ponge une poétique du fragment et de montrer en quoi celle-ci est liée à l’épicurisme qu’il revendique. Éprouvée au moment du « drame de l’expression » comme une menace, la fragmentation est ensuite choisie et assumée comme seul mode possible d’écriture du monde, en accord avec les lois de la combinaison atomique qui le régissent. Les métaphores récurrentes des écorces et des peaux montrent que le texte est perçu comme un fragment organiquement lié à celui qui l’a produit, tandis que la double signification du latin truncus, qui désigne à la fois le tronc et le tronçon, permet à Ponge de développer le paradoxe du « fragment intégral », selon la formulation de Gérard Farasse. Si la physique épicurienne explique que tout objet du monde offre un échantillon de sa texture, la poétique pongienne du fragment se pense aussi comme « pratique augurale », c’est-à-dire comme délimitation d’un fragment d’espace et valorisation de l’instant présent. En cela, elle peut rencontrer la conception barthésienne de l’écriture comme satori. This paper aims to show how Ponge’s writings reveal a poetics of the fragment and tries to explain how this poetics is related to Ponge’s epicureanism. First seen as a threat, at the time of the « drama of expression », fragmentation later becomes the only way to write the world, according to the laws of atomic combinations. Recurrent metaphors about trees shedding their bark and animals shedding their skin prove that the text is conceived as fragment organically related to who produced it. Likewise the two meanings of the Latin term truncus (trunk and broken piece) lead Ponge to work out the paradox of the « whole fragment » (Gérard Farasse). Whereas according to epicurean physics every object in the world proposes a sample of its texture, Ponge’s poetics of the fragment must be thought as an « augural practice », i. e. as a process that isolates a fragment of space and favours the present time. In that sense, this poetics is not so far from Barthes’ idea of writing as satori.

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