Loxias-Colloques |  15. Traverser l'espace 

Delphine Mazari  : 

Relativité spatiale et création, entre transposition et exposition

Résumé

Cet article se propose d’étudier la traversée d’espace dans la création artistique. En effet, une œuvre d’art est avant tout un emprunt à l’espace monde, qui est transformé puis rendu à ce dernier dans espace un autre. Il y a donc passage d’une espace à l’autre par la création. C’est à partir de l’explication de mon protocole de création artistique et d’une étude des pratiques de création et d’exposition, qu’il s’agit de monter dans quelle mesure l’œuvre d’art incarne-t-elle le passage d’une espace à l’autre, et de chercher à voir ce qui se joue de la traversée d’espace par l’œuvre lorsqu’elle est exposée dans un dispositif particulier.

Index

Mots-clés : espace , exposition, transposition, traversée, œuvre d’art

Chronologique : Période contemporaine

Plan

Texte intégral

1Mouvoir revient à mettre en mouvement, à déplacer un objet ou un corps. Se mouvoir, présuppose un déplacement physique, perceptif ou sensoriel. Les recherches phénoménologiques de Maurice Merleau-Ponty pensent la perception en tant qu’elle est intrinsèque au mouvement. Pour le phénoménologue, percevoir revient à se mouvoir et se mouvoir implique de percevoir1. Traverser l’espace présuppose donc d’une part de le voir. D’autre part, allier le déplacement à l’observation d’un objet signifie que nous modifions ce dernier. En effet, l’auteur développe la thèse selon laquelle la perception opère une déformation cohérente de l’objet perçu. Pour Maurice Merleau-Ponty, percevoir une chose revient à opérer un mouvement subjectif de déformation de cette même chose. C’est-à-dire que dès lors qu’un sujet regarde un objet quelconque, ce dernier se trouve stylisé par ce même sujet qui le voit, l’entend et le comprend de manière singulière. Ainsi, à mesure que l’espace est en présence de mobilités percevantes, ce dernier varie. Des lors, un jeu de ressemblances et de différences d’un même espace s’installe par la traversée.

2À l’instar d’une sur-mondialisation paradoxalement augmentée d’un contrôle des espaces, comment la création artistique joue-t-elle avec celui-ci ?

3Issue d’observations et d’emprunts à l’espace monde, une œuvre d’art est bien souvent le fruit d’une mise en forme de matériaux et de techniques qui re-présentent, qui donnent à voir une chose autre dans un espace autre. Elle advient d’une transposition aux allures multiples, qui modifie l’emprunt puis l’expose aux regards de spectateurs. Créée en vue d’être donnée à voir, une œuvre d’art s’inscrit dans un face-à-face perceptif au sein d’un espace d’exposition. Dès lors, l’objet plastique, son exposition et les spectateurs construisent et traversent l’espace. Toutefois, cette traversée s’accompagne de dispositifs d’exposition qui font, dictent et dirigent les attentions, les corps et les représentations. À cet égard, il nous intéresse de questionner le passage d’un espace à un autre par l’art, en proposant l’hypothèse d’une traversée d’espace inhérente au processus de création d’un objet d’art. Issue de mes réalisations plastiques, cette réflexion ouvrira ainsi sur mon procédé de création, qui use de l’espace comme matériau artistique. En effet, ce dernier utilise l’espace non pas comme contenant de corps, mais comme celui qui se définit par sa composition et qui contient une multitude de représentations. C’est pourquoi mon protocole de travail artistique fonctionne par principe d’analogie. De manière plus précise, mon procédé de création répond de l’analogie en tant qu’elle établit un principe de ressemblance entre deux réalités différentes. User de cet outil de création me permet donc de prendre un espace du monde et de le déplacer, de le modifier de manière cohérente afin de créer un espace autre par correspondance à celui d’origine. L’objet d’étude artistiquement pratiqué et développé est alors celui d’une création par la transposition, qui interroge un dispositif spatial de représentations. Ainsi, c’est à partir de mon œuvre Nulle part et de son protocole de création, que nous discuterons l’espace comme matière d’une œuvre.

4Enfin, à la question d’une pratique de l’espace en art succède inévitablement celle d’une pratique de l’espace artistique. Nous proposerons ainsi une étude de cette traversée de l’espace à ce moment de réception d’une œuvre d’art. De cette analyse, il conviendra alors de considérer les différents niveaux d’influence d’un dispositif d’exposition sur la réception d’un objet d’art.

Passage d’un espace à l’autre : processus de création d’une œuvre d’art

5Prenons comme hypothèse de départ que traverser l’espace c’est en faire partie, le compléter. C’est aussi orienter sa relativité et être en dehors de ce dernier. À la différence d’un lieu, l’espace est relatif aux interactions qui l’intègrent parce qu’il supporte un ensemble de perceptions, de corps et d’ossatures qui le composent et le modulent à la fois. L’espace peut donc être dit réceptacle, cadre ou encore contenant de corps, d’objets et d’intervalles. C’est-à-dire qu’il devient scène ou arène des rapports qu’entretiennent les unités qui le composent. L’œuvre d’art en tant qu’objet exposé, devient quant à elle une unité compositrice de l’espace qu’elle crée et de celui qui l’expose. Cette dernière s’adresse aux sens et constitue un objet qui une fois achevé, est mis au regard de spectateurs, de lecteurs ou d’auditeurs qui effectueront chacun à leur manière, une traversée de l’espace d’exposition. Convoquée par la présence de l’œuvre, l’unité percevante vient donc à son tour composer cet espace qui nous intéresse.

6Du processus de création jusqu’au dispositif d’exposition d’une œuvre, il s’agira dans cette partie d’entreprendre l’analyse des unités constitutives de l’espace en art.

7Si traversée de l’espace par l’art il y a, c’est qu’il semble que l’œuvre soit un ensemble physique issu de la mise en forme de matériaux et de techniques qui tendent à re-présenter au monde un élément de ce même monde. Cette association qui re-présente fait passer l’œuvre d’art du statut de savoir-faire reproducteur à celui de création d’espaces dans le réel. De fait, chaque œuvre témoigne d’un intervalle spatial du monde qu’elle fait apparaître sous d’autres formes ou tout simplement hors de la sphère habituelle, hors de son milieu d’existence.

8Prenons comme point de départ ce qu’établit Dominique Chateau dans son essai L’art comme fait social total. Pour l’auteur, une œuvre « intègre divers aspects de la réalité […] qui existent indépendamment, elle spécifie les sphères de cette réalité, les intègre différentiellement2 ». Cette conception de l’objet d’art inscrit le processus de création dans un acte de transposition différentielle d’un espace choisi. De manière plus précise, le procédé de création transfère et déplace les unités constitutives de l’espace sélectionnées par l’artiste. Ainsi, parler d’un procédé de création par le déplacement, inscrit la conception d’une œuvre d’art au sein d’un mécanisme de l’emprunt et du mouvement. La manière dont l’artiste transpose, dérange, ou encore déterritorialise puis reterritorialise un objet de l’espace monde, devient créatrice d’un nouvel espace maintenant pictural, sonore ou performé. Dès lors, lier conjointement la traverse d’espace et sa modification, à la création d’un objet d’art, revient à penser l’œuvre tel un emprunt modulé puis rendu à la perception. C’est-à-dire que peindre, créer, ne revient pas à imiter mais bien à produire à partir de l’intime perception, de l’intime prélèvement d’une chose à l’espace monde. Une partie du procédé création d’une œuvre s’inscrit donc dans un travail esthétique des variabilités de l’espace délicatement prélevé puis re-présenté par l’artiste. À l’aune de cette association du déplacement et de la création artistique, le geste pictural devient ainsi celui qui matérialise le mouvement de déformation au sein de l’objet d’art. Maurice Merleau-Ponty l’écrit à propos de Cézanne : le peintre est celui qui se rend disponible aux choses et réceptifs aux sensations en tant que « l’œil est ce qui a été ému par un certain impact du monde et le restitue au visible par les traces de la main3. » Dès lors, la perception de l’artiste est ce par quoi il opère ce que l’auteur nomme une déformation cohérente de son emprunt, que le geste pictural fait exister dans la composition de ses œuvres. Autrement dit, l’équilibre d’une toile, ou ce que nous appellerions la force d’une peinture, réside dans la capacité de l’artiste à rendre l’invisible des distorsions spatiales opérées dans son œuvre. Ce glissement du réel, au prélèvement, puis à la re-présentation en passant par la déformation, révèle un processus de création artistique qui se construit du passage d’un espace à l’autre par l’altération.

9Cette manière plastique de percevoir, de défaire, puis de refaire un milieu par la re-présentation, joue sur deux niveaux. D’une part, la perception de l’artiste est celle qui opère un déplacement singulier de l’espace. D’autre part, le geste est celui qui accomplit la mutation dans l’objet d’art. De ce moment de passage d’un espace à la création d’un nouveau, résulte le style de l’artiste qui n’est donc rien d’autre que « l’indice universel de la déformation cohérente par laquelle l’artiste concentre le sens encore épars dans la perception et le fait exister expressément4 » dans son œuvre. Tant il appartient à la perception de l’artiste et à l’expression de cette dernière dans ses créations, le style est alors ce qui désigne à la fois le peintre et son œuvre. Ainsi il incarne sa traversée.

Une pratique plastique protocolaire de l’espace

10Si l’espace peut être considéré comme une étendue indéfinie, c’est par ce qu’il est modulable par ce qui le constitue. Ainsi, par un simple mouvement de ses composants, le passage d’un espace à l’autre peut appartenir à l’inframince5, comme rendre compte d’un changement conséquent.

11La question de l’espace et de ses traversées convoque donc les cinq sens donnés à l’homme et les associe à l’existence physique de lieux, de structures, de choses naturelles ou non et d’êtres vivants.

12Ma pratique plastique s’est constituée d’un travail hyperbolique de ces délimitations modulables et d’une étude des concepts de déterritorialisation et de reterritorialisation de Gilles Deleuze et Felix Guattari6. Pour les auteurs, la déterritorialisation et la reterritorialisation est l’action de quitter une habitude de représentation de l’espace. C’est-à-dire que cela revient à éteindre nos connaissances et nos pratiques ordinaires d’un territoire afin de le vivre autrement et ainsi, parvenir à le modifier. Plus précisément, parvenir à l’altérer jusqu’à le reterritorialiser pas nos actions. Ainsi, afin de comprendre l’espace, il s’agit pour moi de le transposer plastiquement, de le définir et de le redéfinir sans le modifier arbitrairement. Par une pratique artistique, j’essaie donc d’éprouver et de produire de manière explicite, la déformation cohérente de l’espace dont nous parlions. Afin de rester conforme aux normes structurelles des éléments à transposer tout en modifiant l’allure de ces derniers, ma pratique repose sur un protocole de création. Ce procédé compose à partir de l’espace à déplacer et de celui qui supportera cette migration modifiée. C’est pourquoi, la situation, l’expérience, et ce qui constitue ces deux milieux de transfère, sont des composants de mes œuvres.

13En 2017, je réalise l’œuvre Nulle part, qui est une transposition du temple d’Apollon du Sanctuaire de Delphes. Le temple passe du Sanctuaire de Delphes à une salle de la Faculté des arts, lettres, langues et sciences humaines d’Aix-Marseille. Dès lors, ce qui suit donne à voir la création de cette œuvre Nulle part au sein d’un espace d’écriture. C’est-à-dire que par l’entrelacement d’une pratique rédactionnelle analytique et d’une pratique textuelle de mon protocole de création, il s’agira de donner à lire une pratique plastique à la fois analogue et transpositionnelle de l’espace. Ainsi, cette partie comporte deux écritures distinctes. Les inserts, relatent le récit de mon protocole de création de l’œuvre, depuis la découverte du Sanctuaire de Delphes, jusqu’à l’exposition de Nulle part. Le corps de texte quant à lui, relève d’une explication textuelle de cette œuvre et de son protocole. L’une et l’autre des écritures s’entrecoupent afin de créer un dialogue entre les deux, entre une traversée physique de l’espace et une ouverture théorique qui en créée de nouveaux. Cette forme textuelle apparaît donc comme un moyen de rendre tant visible que vivant, les deux traversées textuelles d’un protocole et d’un processus de création artistique.

14L’intention ici n’est pas de faire l’auto-analyse d’un travail artistique, ni de tendre à une uniformisation théorique des pratiques de création à partir d’une réflexion plastique personnelle. Il s’agit de transposer un processus matériel de création en une écriture de recherche. C’est-à-dire qu’à partir d’une pratique textuelle des objets, il est question de se mouvoir au sein d’un protocole de création particulier.

Le 15 octobre 2016 à 09h du matin, je foule pour la première fois le sol du Sanctuaire de Delphes. Ce dernier est d’une superficie de 51 hectares et abrite le temple d’Apollon, objet de la traversée et élément de recherche. Rectangulaire, il mesure 23,82 mètres sur 60,32 mètres de côté et se constitue de quarante-deux colonnes, chacune de 8 mètres de haut et d’un diamètre de 1,91mètres. Nous pouvons donc calculer une superficie de 11 494,6 m2. Avertis que 1m2 équivaut à 0,0001 hectares, ce temple a donc une superficie de 1,14946 hectares. Après calcul proportionnel, je constate donc que de marbre, de tuf stuqué et de calcaire, le temple d’Apollon occupe 2,02 % de la superficie totale du sanctuaire de Delphes.
Édifié par Spintharos de Corinthe, l’accès au temple nécessite une ascension de 1 235 mètres de long par la voie sacrée traversant d’abord l’entrée du sanctuaire, puis le monument des rois d’Argos ; le Trésor de Cnide ; le Trésor d’Athènes ; le Trésor de Thèbes ; le Bouleutérion ; le Trésor de Corinthe puis le Temple d’Apollon.
Cette montée traversant demande une demi-heure de marche à vitesse moyenne et est investie par 137 550 visiteurs de différentes nationalités par an. Outre son architecture, ces personnes foulant le sol du sanctuaire font, composent et modulent l’espace du temple. Ce que l’on y croise, ce que l’on y entend et ce que l’on y dit participe donc de ce que l’on y voit. Ce séjour de cinq jours au sanctuaire m’a fait croiser, de l’ouverture à la fermeture du lieu, 1.507 personnes d’après un décompte personnel. 1.507 individus ont donc participé à ma perception du temple d’Apollon sur lequel est inscrit gnôthi seauton, « connais-toi toi-même ». Symboliquement et d’après sa mythologie, ce lieu est à l’image de la quête que mènent les hommes à propos de leur existence et de leur devenir. En effet, ils venaient interroger les dieux au travers de la Pythie qui, après un rituel bien précis d’inhalation de feuilles de laurier, de farine d’orge et d’eau de la fontaine Castalie, entrait en communication avec les dieux afin de répondre aux interrogations des hommes. Ces paroles étaient ensuite traduites et interprétées par un prêtre6.

15Les recherches de Michel Foucault rapprochent le gnôthi seauton « connais-toi toi-même », de l’epimeleia heautou, le « souci de soi » que développe Platon. En effet, ce « souci de soi » se trouve être la notion à l’intérieur de laquelle se développe la connaissance de soi. Si ce gnôthi seauton renvoie à une pratique de soi sur soi, Michel Foucault rappelle qu’il n’est pourtant rien d’autre qu’une « activité consacrée à soi-même et qui constitue, non pas un exercice de la solitude, mais une véritable pratique sociale7 ». Associer la compréhension de soi-même à son antonyme qu’est la découverte d’autrui, fait entrer ce « connais-toi toi-même » au sein d’un mécanisme de reconnaissance de soi et de l’autre, par soi et par l’autre. Dès lors, le « je » est modulé par l’autour de soi et réciproquement le soi participe de la construction de notre environnement. À cet égard, en tant qu’il porte cette inscription du gnôthi seauton, le temple d’Apollon incarne ces interrelations du soi à l’autre et de l’autre à soi-même. À l’image de l’espace qui se construit et se module par ce qui le constitue et le traverse, ce temple appelle à s’appréhender soi-même par ce qui nous altère, soit, par les autres.

Pendant 5 jours, je suis alors devant un espace dit, habité et changeant. Espace dit par sa symbolique, sa mythologie, sa représentation et sa géographie. Habité par son architecture et enfin mouvant par ces 376,75 personnes par jour ainsi que par ces inscriptions qui sont interprétées quotidiennement.

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Temple d’Apollon au IVe siècle, dessin P. de La Coste-Messelière : Au Musée de Delphes. Recherches sur quelques monuments archaiques et leur décor sculpté, Paris, E. de Boccard, 1936, Sanctuaire de Delphes

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Face au temple d’Apollon, photographie, 2016, Delphes, © Delphine Mazari

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Plan du Sanctuaire de Delphes, Dessin

16Transposer le temple d’Apollon implique de déplacer sa structure, de transférer les unités qui composent cet espace et enfin, d’y replacer l’immatérialité qui le compose, soit sa symbolique. Transposer le temple d’apollon c’est aussi reporter l’expérience personnelle d’un milieu qui pendant cinq jours, s’est construit de la traversée de 1 507 individus.

17Afin de passer d’un espace à un autre, le protocole de réalisation de l’œuvre Nulle part dépend de toutes ces données ainsi que de celles de l’espace qui accueillera ce nouveau temple transposé. Il s’agit alors de déplacer, de modifier de façon cohérente tout ou certains éléments de cet ensemble. Du Sanctuaire de Delphes à la salle D240 de la Faculté des arts, lettres, langues et sciences humaines d’Aix-Marseille, il est question de produire un déplacement en mouvement d’un point à un autre.

18Cet engagement organisationnel est marque de transposition analogique telle qu’en est sa définition stricte : A est à B ce que C est à D. Par conséquent, j’affirme que tout ce qui est vrai dans le rapport entre A et B, l’est aussi dans le rapport entre C et D ; et aussi que tout ce qui est faux dans le rapport entre A et B, l’est aussi dans le rapport entre C et D. Cette définition de l’analogie est une manière de respecter toutes les interdépendances entre les éléments constitutifs de l’espace à transposer. Du même pas, l’analogie permet d’établir un cadre normé qui permet de vérifier les choix réalisés pendant la création et les concordances entre l’objet d’origine et sa duplication analogue. Par conséquent, comme toute transposition valide, celle-ci nécessite un équilibre entre une « mathesis, sciences des égalités, des attributions et des jugements ; science de la vérité8 » et une « Taxinomia, qui traite des identités et des différences au travers d’une science des articulations et des classes9 ».

19Par la transposition du temple d’Apollon, le procédé de création de Nulle part répond d’un travail esthétique des variabilités de l’espace délicatement prélevé puis réintroduit afin d’en créer un nouveau.

La salle D240 de l’université en sera l’espace d’exposition du nouveau temple. Lieu de savoir et espace d’apprentissage, de découverte du soi, de liberté individuelle et collective, cette pièce est rectangulaire. D’une superficie 38,6 m2, cette dernière accueille des classes de licence et de master Arts plastiques trente-trois heures par semaines sur la période de janvier à mai 2016. L’espace d’exposition se constitue matériellement de planches, de tréteaux, de chaises, d’élèves et de quelques professeurs. Je décide de former Nulle part à partir de ces unités compositrices de l’espace d’exposition.

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Delphine Mazari, Nulle part, 2017, Aix-en-Provence, Faculté des arts, lettres, langues et sciences humaines d’Aix-Marseille, D240, 2017. © Delphine Mazari

À l’image de celui d’Apollon, le nouveau temple occupe 2,02 % la salle de classe. La composition à partir d’objets présents dans la pièce demande alors de ne fourvoyer ni le temple d’Apollon, ni le sanctuaire, ni la salle D240. Il me faut le faire avec le respect de la forme, de la mesure et des phénomènes. Par conséquent, l’analogie devient l’outil de ces agencements. Dix tables, seize tréteaux blancs à angles arrondis entretenus par du fil blanc, six tréteaux gris à angles droits et quarante-deux morceaux de marbre funéraire forment le nouveau temple. Enfin, de manière à transposer l’expérience in situ du Sanctuaire de Delphes, deux flux sonores composent avec cette architecture. Le premier reprend de part et d’autre de la pièce un enregistrement audio de trente-deux heures et trente-sept minutes pris devant le temple d’Apollon. Le second, dissimulé par le temple, émet les lectures qui ont accompagnées ces journées au sanctuaire10.

20Les pieds de tables et les tréteaux deviennent colonnes ; les planches de ces pupitres définissent l’espace intérieur du temple et enfin des figures contingentes se construisent par le biais du respect des formes et des mesures. D’allure de squelettes et d’ossements, Nulle part est carcasse, comme un reste inébranlable fait d’objets du quotidien.

21Cette structure mortuaire également situation de vie, repose sur des cales de marbre. Une inversion de noblesse de matériaux est ainsi opérée. Le marbre n’est plus travaillé mais soutient le quotidien squelette. La sculpture, dans son appréhension des sens est alors ébranlée. Ces cales de marbre ne sont pas signe de noblesse déchue mais soutiennent au contraire les restes de ce qui a été taillé. Comme un tailleur de pierre formerait sa sculpture depuis un modèle, la salle D240 apparaît tel un bloc à égayer, à découper à partir des données récoltées.

22Nulle part marque ainsi un déplacement modifié du temple d’Apollon dont le protocole de réalisation particulier participe de cette recherche de justesse entre une norme et une singularité d’espace et de représentation. À travers un assemblage et une composition de la structure, un jeu d’équilibre s’installe entre un temps, un sensible et des mesures formelles. Cette figure plastique vacillante entre ces trois termes apparaît donc comme une reconstruction transposée d’une déconstruction spatiale faite du sujet et de l’objet en situation. L’espace est à la fois traversé, modifié et confronté au passage d’un espace à l’autre par la simple modification de variables. Cette manière plastique de pousser aux limites de l’absurde l’hypothèse selon laquelle l’œuvre d’art incarne une traversée d’espace, s’est formé tout contre une pensée que toute œuvre telle qu’elle soit, est issue de cette traversée, joue avec cette dernière et provoque ce passage d’un espace à un autre par l’art.

23Penser la perception d’une chose comme un potentiel stylisant et déformateur de cette même chose, revient à penser que le sujet percevant de cet objet déforme ce dernier. Or, une œuvre d’art re-présente face à des sujets qui la perçoivent. Dès lors, à une traversée d’espace par l’art succède une traversée de l’espace artistique, qui n’est rien d’autre que la création d’un nouvel espace qui se module par ses objets d’arts et leur réception.

Traversée de l’espace d’exposition : la réception d’une œuvre d’art

24Conjointement à l’espace traversé par son processus de création, une œuvre d’art est constitutive d’un deuxième espace : celui de son exposition. Le milieu de cette dernière est délimité par les murs de l’institution accueillante et porte le nom d’espace d’exposition et non celui de lieu d’exposition. En effet, nous parlons du lieu dans lequel se trouve une exposition et de l’espace d’exposition disponible. Cette nuance aux allures infimes, précise comment l’art définit ces traverses d’espace. Ce choix linguistique détermine la place de l’œuvre, la place des œuvres et celle des visiteurs. C’est-à-dire que d’une part, cette précision implique le spectateur dans l’espace et, d’autre part, qu’elle annonce la variabilité de ce dernier. La traversée est alors modulée par chaque œuvre et chaque visiteur qui intègre ce milieu. En effet, lorsqu’une entité dotée de perception adosse son regard ou bien ses sens face à une création artistique, ce dernier l’active et module à son tour l’espace qu’il pénètre et qui le pénètre.

25Si la traversée d’espace en art répond de ces deux moments que sont le processus de création et celui de l’exposition d’une œuvre, en découle une relation équivoque entre l’élaboration d’une production plastique, l’œuvre d’art et sa réception. En effet, parler d’un procédé de création et d’exposition à partir de l’intime traversée de quelqu’un ou de quelque chose, place le passage d’un espace à l’autre dans l’art au sein d’une polysémie de sens et donc de milieux. Ces traversées artistiques finalement singulières, s’inscrivent alors dans ce que Hans-Georg Gadamer appelle l’historicité du comprendre11. Afin de s’opposer à toute appréhension de l’œuvre comme objet indépendant du sujet qui la lit, cette notion tend à ancrer la relation du lecteur au texte. C’est-à-dire que l’œuvre se déploie à mesure qu’elle est mise en mouvement par le spectateur. Ce passage d’un espace à autre que peut produire un texte ou une œuvre dépend donc de la singularité perceptive du sujet qui la crée, de celui qui la regarde et du milieu à l’intérieur duquel elle agit. Dès lors, la traversée d’espace en art semble s’inscrire dans une relation triangulaire qui comprend l’œuvre, son milieu et les spectateurs.

26Le passage d’un espace à l’autre en art semble revenir à se mouvoir en plusieurs temps. Tandis que pour re-présenter, l’un crée un emprunt modulé, les autres l’altèrent à leur tour par leurs réceptions.

27En amont de ce que nous nommons l’espace d’exposition, se trouve la structure qui supporte l’exposition même. Autrement dit, l’espace d’exposition s’imbrique au sein de l’institution qui la montre. Cette interrelation de l’œuvre à l’exposition et de l’exposition à l’institution, place la traversée artistique au cœur de stratégies dispositives qui oriente ce passage d’un espace à l’autre qui nous intéresse. Lorsque le spectateur entre dans une salle d’exposition, il pénètre un agencement spatial tout particulier pensé par l’artiste exposé, par un commissaire, un scénographe et par une structure artistique dont dépendent ces acteurs de l’exposition. De manière plus précise, la structure artistique procède à des choix qui révèlent l’orientation du commissariat, de la scénographie et de l’exposition même. Loin d’être une activité relevant seulement de l’arbitraire et du singulier le plus intime, traverser l’espace d’exposition semble finalement répondre également d’un dispositif directionnel des objets et des corps dans l’espace. Penser la traversée d’espace dans l’art revient donc à penser la manière dont les structures artistiques cadrent, jouent et entrent en relation avec les œuvres et leurs réceptions.

28Depuis une quinzaine d’années, la création et l’exposition contemporaine s’accompagnent d’une démultiplication des médiations culturelles, de la notion de parcours ou même de la création de différents parcours suivant les publics. Ces moments qui se positionnent entre l’œuvre et le spectateur sont aujourd’hui instituées dans nos manières de voir et semblent ainsi venir perturber les pratiques sensibles de réception qui se jouent au sein d’un espace d’exposition. Prise dans une dynamique directionnelle qui creuse l’écart d’une rencontre singulière entre une œuvre et un individu, la traversée d’espaces dans l’art apparaît alors comme dépendante des formes de médiations prévues à son effet. Par conséquent, il nous intéresse de penser ce surplomb des formes de médiation en formulant une interrogation quant aux facultés directives que ces dernières appliquent aux modalités de réception des œuvres.

29Prenons l’exposition Fan-Tan de l’artiste Ai Weiwei au Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée. Le titre fait référence au nom d’un char d’assaut offert au Royaume-Uni par un homme d’affaires chinois et fut utilisé en France pendant la première guerre mondiale.

30Au sein d’une vaste salle, l’exposition regroupe nombre d’œuvres de l’artiste. Ces dernières s’accompagnent d’une quantité de pièces d’archives qui, de près ou de loin, ont un lien avec le plasticien lui-même ou son travail. Le spectateur déambule ainsi parmi une multitude d’objets, s’arrête devant une œuvre de l’artiste, croise un élément de méditions, une pièce d’archive, puis s’attarde sur un objet renvoyant à la vie de l’artiste. On y observe par exemple la maquette du bateau avec lequel le père du plasticien est arrivé à Marseille. On y croise des pièces de collection du Mucem tel qu’une Pipe à opium, réalisée dans une douille d’obus par un membre des Chinese Labour Corps pendant la première guerre mondiale. Cette dernière renvoie au char Fan-Tan qui fut peint par ces mêmes Chinese Labour Corps, engagés volontaires des forces chinoises auprès de l’Angleterre et de la France.

31Par leurs liens à l’artiste, aux matériaux qu’il utilise ou bien à son travail de plasticien, ces objets aux statuts et aux origines divergentes sont ainsi exposés sur le même plan. Tant le commissariat que la mise en espace de cette exposition semblent alors formuler le vœu d’une réduction de la distinction entre œuvre exposée, matériau de médiation et objet d’archive. De cette spatialisation au même niveau, résulte une réception qui ne distingue que très peu les œuvres d’Ai WeiWei, des objets de leurs médiation ou des pièces d’archives. Par là-même, la part de déformation singulière du spectateur se trouve complétée ou même orientée par une narration et des connaissances externes aux œuvres de l’artiste. De cette combinaison, la traversée du spectateur n’est plus immanente mais se trouve dissociée des seules configurations qui la manifestent. Ainsi, elle advient de manière moins sensible, plus signifiante, et risque dès lors de léser l’importance de la forme de l’œuvre et celle de l’espace qu’elle produit.

32Reprenons l’exposition Fan-Tan qui, comme beaucoup d’autres, augmente chaque œuvre exposée d’un cartel lui-même composé d’une note explicative à l’attention des visiteurs. Le commentaire proposé pour les œuvres Savon avec la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et Savon avec la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne de 1791, est le suivant :

Ai-Weiwei a conçu pour cette exposition deux savons de Marseille géants fabriqués selon la technique traditionnelle à base d’huile d’olive. Chacun pèse une tonne. Sur ces ouvres d’art qui reprennent l’esprit du « ready-made », sont gravées la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, rédigée en 1793. Écrites sur un savon, elles peuvent s’effacer avec l’usage car, symboliquement, le savon est l’objet qui nettoie12.

33Le commentaire est positionné à même le socle de l’œuvre et est visible depuis l’observation de deux des quatre faces de l’une ou de l’autre des structures. Cette annotation est donc lue dès lors qu’un spectateur observe l’œuvre depuis deux des quatre faces du savon. À mesure que le visiteur circule autour de l’œuvre, il apprécie cette dernière et son cartel de manière presque simultanée. Les informations à propos de l’objet d’art ainsi que la partie narrative révélée par le cartel, se joignent donc à l’expérience sensible et perceptive du sujet observant. Dès lors, les termes employés résonnent chez le visiteur qui ne traverse plus entièrement l’espace de l’œuvre, qui ne le déforme pas non plus de manière singulière, mais qui le lit au travers du texte. Tel un filtre perceptif et intelligible, le commentaire écrit agit sur la perception du visiteur en tant qu’il oriente et uniformise cette dernière, à partir du sens même du texte. En effet, le rapprochement que révèle le commentaire, entre les ready-made et les savons d’Ai Weiwei, peut associer le travail de l’artiste à celui de Marcel Duchamp. Le terme de ready-made agit dès lors tel un marqueur qui inscrit l’objet d’art au sein d’un champ spécifique de la création et refuse, du même pas, tout rapprochement qui divergerait de cette inscription. Mis à part la création d’une affiliation entre une œuvre et une pratique artistique, cette assimilation du ready-made aux deux savons, opère également une réduction de l’importance de la part formelle de l’objet d’art. Si le terme de ready-made renvoie directement l’œuvre d’art à la fonction utilitaire de sa matérialité, la plasticité de la matière savon et l’action de graver se voient alors écartés par le sens du texte. Or, les objets plastiques de l’artiste ne sont pas seulement des savons déplacés. Ils ne sont pas non plus Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, mais sont bien deux blocs de savon d’un mètre sur un mètre, sur lesquels sont gravés la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

34Expliquer un objet d’art au moment même de sa révélation matérielle revient à nier qu’une œuvre existe de manière formelle face à un spectateur. L’œuvre n’est plus pensée comme un emprunt, une substance ou une forme qui s’offre par elle-même à la perception d’un sujet. Elle n’est plus un espace qui conjugue avec celui qu’elle habite et qu’elle compose. Dès lors, une œuvre n’est plus à ressentir mais à lire et la traversée du spectateur se voit orientée par cette même lecture. Si plus bas, le commentaire associé à l’œuvre d’Ai Weiwei demande au visiteur dans quelle mesure le savon lave les consciences, ce questionnement fait à nouveau sortir la traversée du spectateur de l’espace qu’il compose. Bien que pédagogue, une association d’idée tout à fait extérieure à la forme et la matérialité de l’œuvre se construit chez le visiteur. Le passage d’un espace à un autre que réalise le spectateur au sein de l’exposition est alors à nouveau soumis aux dires d’un cartel qui compose lui aussi cette traversée.

35Plus loin dans l’exposition, nous découvrons Circle of animals du même Ai Weiwei. Pour cette installation, l’artiste reproduit les douze têtes pillées d’animaux du Zodiaque chinois qui ornait l’ancien palais d’été en Chine. Au centre de cette installation en demi-cercle, le commissariat d’exposition nous donne à lire une citation du ministre de l’économie française. Il y est écrit : « On accepte des investissements sur le long terme et pas des investissements de pillage13 ». Une fois encore, un élément externe à l’œuvre participe du champ perceptif propre à la réception de l’objet d’art. Le lien à la déclaration de Bruno Le Maire oriente les choix sensibles que le sujet opère face à l’œuvre. Aussi, par un rapprochement spatial de l’œuvre et de la citation, l’installation se trouve irrémédiablement liée à une entité politique française.

36Cette proximité spatiale entre une œuvre et son explication ou une citation, est alors un dispositif qui réduit l’espace de l’œuvre et du spectateur. La traversée de l’espace dans l’art se fondent des lors sur des données externes à la matérialité de l’objet d’art et à la singularité du sujet qui l’observe. Dans son essai Contre l’interprétation14, Susan Sontag fait le constat de la violence faite aux œuvres et à l’expérience qu’elles procurent. Pour l’auteur, interpréter ou donner des informations sur une œuvre au moment de sa révélation, est un procédé qui récuse tout écueil sensible du spectateur en tant que ces données orientent et dirigent la traversée de ce dernier. Observer une œuvre et lire à propos de cette dernière de manière simultanée, marque un cran d’arrêt à l’œuvre et récuse du même pas la place du regardeur et sa sensibilité. Il n’est plus considéré comme capable de traverser l’espace en art. Pour Susan Sontag, un tel acte a pour conséquence un mutisme de l’œuvre et de celui qui la regarde.

37Le constat des nouvelles formes d’existence des œuvres au sein ou en marge des institutions qui les montrent et les transmettent, marque ainsi une perte de l’autonomie de l’œuvre d’art et du sujet percevant. Cet état des lieux est aussi celui qui observe une remise en jeu du para-langage d’une œuvre d’art au sein de sa réception. C’est pourquoi cette expérience in situ de l’œuvre se constitue aujourd’hui d’une conjonction équitable faite : d’une œuvre, d’une institution, de sa médiation, d’un para-langage et de sujets. Par conséquent, les traversées induites par une œuvre et son sujet percevant sont heurtées, contentées par ces cadres parfois débordants. Bien qu’ils aient toujours existé, il semble aujourd’hui, en cette crise de l’attention, qu’ils modulent à leur tour l’existence et la réception d’une œuvre.

Conclusion

38Traverser l’espace en art s’entend ici d’un point de vue plastique et pratique des modalités de création, de réception et d’exposition des œuvres. Ainsi, afin de penser une traversée d’espace relative à la production d’une œuvre et à son exposition, la démarche développée jusqu’ici s’est construite à partir de l’écriture d’un protocole artistique de transposition analogique des espaces et d’une réflexion théorique des modalités de transmission et de réception des passages d’espaces à d’autres en art.

39Si l’art produit une traversée et offre une multiplicité de passage d’espaces à d’autres à ses sujets récepteurs, l’institution qui l’accueille semble à son tour participer de ces traversées.

40Dès lors, les problèmes formulés invitent à se demander si d’une part, la volonté pédagogique d’une institution artistique doit appartenir au temps d’expérience d’une exposition, à ce temps de traversée produit par l’art. D’autre part, il nous intéresse d’identifier les conséquences de ces temporalités sur la création contemporaine, afin d’y intégrer de nouvelles formes d’exposition, de nouvelles formes de traversée autonome.

Notes de bas de page numériques

1 Nous nous sommes largement inspirée de Maurice Merleau-Ponty, L’Œil et l’Esprit, chapitre IV, [1985], Paris, Gallimard, « folio essais », 2013.

2 Dominique Chateau, L’Art comme fait social total, Chapitre IV, L’art comme fait social total, versant objectif, [1998], Paris, L’Harmattan, 2015, p. 77.

3 Maurice Merleau-Ponty, L’Œil et l’Esprit, chapitre IV, [1985], Paris, Gallimard, 2013, « folio essais », p. 26.

4 Maurice Merleau-Ponty, L’Œil et l’Esprit, chapitre IV, [1985], Paris, Gallimard, 2013, « folio essais », p. 68.

5 Créé par Marcel Duchamp qui le pense comme condition de la production artistique, l’inframince est un concept qui indique une nuance ou une différence si ténue qu’elle relève de l’imperceptible pourtant perçu. L’inframince indique ainsi ces subtils écarts singuliers qui ne se mesurent pas mais qui se ressentent et s’imaginent.

6 Gilles Deleuze et Félix Guattari, L’Anti-œdipe, Capitalisme et schizophrénie 1, [1972], Paris, Les Éditions de Minuit, 2015, « critique ».

6 Processus protocolaire de création et de réalisation de Nulle part.

7 Michel Foucault, Histoire de la sexualité III, Le souci de soi, Chapitre II, « La culture de soi », [1984], Paris, Gallimard, 2013, « tel », p. 72.

8 Michel Foucault, Les Mots et les Choses. Une archéologie des sciences humaines, Chapitre III Représenter, II L’ordre, [1966], Paris, Gallimard, 2013, « tel », p. 88 

9 Michel Foucault, Les Mots et les Choses. Une archéologie des sciences humaines, Chapitre III Représenter, II L’ordre, [1966], Paris, Gallimard, 2013, « tel », p. 88

1 0 Concept développé par Hans-Georg Gadamer, Vérité et Méthode. Les grandes lignes d’une herméneutique Philosophique, [1976], Paris, Édition intégrale, Le Seuil, 1996.

1 1 Concept développé par Hans-Georg Gadamer, Vérité et Méthode. Les grandes lignes d’une herméneutique Philosophique, [1976], Paris, Édition intégrale, Le Seuil, 1996.

1 2 Exposition Ai Weiwei Fan-Tan, Cartel indicatif pour les œuvres Savon avec la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et Savon avec la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne de 1971, Mucem, Marseille, juin à novembre 2018. https://www.mucem.org/media/4392

1 3 Exposition Ai Weiwei Fan-Tan, citation de Bruno Le Maire, janvier 2018, Mucem, Marseille, juin à novembre 2018.

1 4 Susan Sontag, L’œuvre parle. Œuvres complètes volume V, Article. Contre l’interprétation [1966], trad. Guy Durand, Paris, Bourgois, 2010.

Bibliographie

BERGSON Martin, Remarques sur Art – Sculpture – espace, discours à l’inauguration d’une exposition, [1964], trad. Didier Franck, Paris, édité par Hermann Heidegger, Rivages poche, « Petite bibliothèque », 2007.

CHATEAU Dominique, L’art comme fait social total, [1998], Paris, L’Harmattan, 2015.

DELEUZE Gilles et GUATTARI Félix, L’anti-œdipe, Capitalisme et schizophrénie 1, [1972], Paris, Les Éditions de Minuit, « critique », 2015.

FOUCAULT Michel, Les Mots et les Choses. Une archéologie des sciences humaines, [1966], Paris, Gallimard, 2013.

FOUCAULT Michel, Histoire de la sexualité III, Le souci de soi, [1984], Paris, Gallimard, 2013.

GADAMER Hans-Georg, Vérité et Méthode. Les grandes lignes d’une herméneutique Philosophique, [1976], Paris, Éditions du Seuil, Édition intégrale, Seuil, « L’ordre philosophique », 1996.

MERLEAU-PONTY Maurice, L’Œil et l’Esprit, [1985], Paris, Gallimard, « folio essais », 2013.

SONTAG Susan, L’œuvre parle. Œuvres complètes volume V, [1966], trad. Guy Durand, Paris, Bourgois, « Titres », 2010.

Pour citer cet article

Delphine Mazari, « Relativité spatiale et création, entre transposition et exposition », paru dans Loxias-Colloques, 15. Traverser l'espace, Relativité spatiale et création, entre transposition et exposition, mis en ligne le 20 décembre 2019, URL : http://revel.unice.fr/symposia/actel/index.html?id=1461.


Auteurs

Delphine Mazari

Récemment diplômée du master recherche arts plastiques parcours esthétique et théorie de l’art contemporain, Delphine Mazari est actuellement en deuxième année de thèse en arts plastiques et sciences de l’art. Sous la direction d’Anna Guilló et Charles Floren, Aix-Marseille Université, Laboratoire d’étude en sciences des arts, ED354 elle prépare la thèse suivante : MISE EN ŒUVRE ET VÉRITÉ, Une épistémologie de l’œuvre d’art et du sujet percevant. Sa recherche établit les caractères premiers de l’œuvre d’art et du sujet percevant afin de considérer l’hypothèse d’une vérité mise en œuvre dans et par l’œuvre d’art. Sa création se situe dans le champ des procédés protocolaires et inscrivent son travail dans des rapports analogues, allant de formes existantes en formes nouvelles.Outre les questionnements propres à l’œuvre d’art, sa recherche s’emploie à interroger les formes de recherche, de création et d’enseignements en art à partir de l’articulation entre pratique et théorie de l’art.