Loxias-Colloques |  12. Le Diversel
Universel ou « Diversel », Tout-Monde ou « Multivers » à l’œuvre dans la fiction caribéenne contemporaine
 |  "L'intraitable beauté" du Diversel 

Renée Clémentine Lucien  : 

La beauté du Divers de Teo Martinica, dans Archipiélagos (Archipels), d’Abilio Estévez (2015)

Résumé

La beauté, telle que la définit Édouard Glissant, réfute la systématisation d’une universalité verticale et univoque. Elle est constitutive du « diversel », intuition d’un autre universel, où l’identique n’est pas érigé en valeur nodale. Autour du personnage Teo Martinica, du roman Archipiélagos du Cubain Abilio Estévez (2015), s’élabore une fiction dans laquelle ressortent son hybridité et son inscription dans un « multivers » archipélique, qui le dessinent à la fois comme une incarnation de la beauté du divers et comme l’auteur d’une œuvre, une caravelle, mise en abîme de la beauté composite inscrite au cœur de la poétique du divers glissantienne.

Plan

Texte intégral

Il est remarquable que la fiction narrative d’Abilio Estévez ait étendu le paysage et le locus d’ancrage et d’énonciation de ses personnages de l’île de Cuba, non nommée mais identifiable par le lecteur dans son premier roman, Tuyo es el reino1 (Ce royaume t’appartient)2, de 1997, qui lui valut de recevoir en France le Prix du Meilleur Livre étranger, à des territoires moins claustraux et oppressants, plus précisément aux continents puis aux archipels, ainsi qu’en témoigne le titre de son dernier roman que ne renierait pas Édouard Glissant, Archipiélagos3 (Archipels), publié en 2015 par l’écrivain cubain installé depuis l’année 2000 à Barcelone puis à Palma de Majorque. Ce roman s’inscrit, donc, dans une étape de son œuvre marquée par le nomadisme de ses personnages, qui prend son essor après la parution du premier texte écrit consécutivement à son arrivée en exil, Inventario secreto de la Habana4 (Inventaire secret de La Havane), véritable exercice thérapeutique nécessaire, selon lui, au dépassement des inhibitions qui l’assaillirent à ce moment douloureux et inconfortable de son cheminement d’écrivain.

Archipiélagos se déploie comme une ample fresque de l’histoire de Cuba où occupe une place cardinale la dictature de Gerardo Machado, cet autocrate surnommé el Vesiánico (le Fou), qui gouverna de 1925 à 1933, et mit en ébullition puis en révolution de multiples secteurs de la société de l’île, en l’occurrence, la révolution de 1930, qui a marqué la mémoire historique de ce pays, et dont les ouvriers et les étudiants furent les principales victimes jusqu’à la médiation de Sumner Welles, dépêché par le gouvernement des États-Unis auquel était inféodé le dictateur. Cependant, l’ambition du roman, fort d’une architecture très fragmentée, repose surtout sur son allure d’édifice proustien, où un narrateur, José Isabel, tente de retisser le fil du temps perdu, dans une géographie qui mythifie un centre médullaire, Marianao, quartier de La Havane où naquit l’auteur Abilio Estévez, il y a un peu plus de soixante ans, et qui ne cesse de le hanter, à n’en pas douter, dans ses nouveaux ports d’attache.

En rapport avec notre propos, ce qui attire au premier chef notre attention, c’est que cet édifice élabore les contours d’un Tout-Monde où échoue et ou, mieux encore, cohabite le divers, à travers des personnages, Libertad Peña, Japón, Ñabuela Amor, Ezequías, Creto Congo, el padre Hermolao, el soldado Purí, Manila, Mino Blanchet, Teo Martinica, dont la flamboyance onomastique est significative de leur multidiversité ; celle-ci est patente, tant par la multiplicité des origines et des voyages qui les a fabriqués, que par les causes historiques qui les ont forgés pour former, somme toute, un creuset identitaire inconciliable avec l’unique, où s’épanouissent tous les ingrédients indispensables à l’alchimie de l’imprédictible de la créolisation et de la Relation glissantienne, sous le signe de l’opacité et du tremblement. Nous n’excluons pas qu’Abilio Estévez soit redevable à des modèles revendiqués, puisque nous venons de nous référer à Proust qu’il inscrit au panthéon des dieux de la littérature, en faisant la part belle, avec bonheur, aux canons de la valeur littéraire qui conçoit verticalement l’universalité et proclame l’univocité des imaginaires et de leurs productions désormais gravées dans le marbre. Pourtant, à l’évidence, il ne cherche pas à résoudre ce qui pourrait s’affirmer comme un paradoxe. Né dans la Caraïbe créolisée, dans une île de transculturation, la terre de Fernando Ortiz, laboratoire au sein duquel a émergé l’ajiaco, une sorte de pot-pourri, métaphore culinaire dont use l’ethnologue et anthropologue cubain dans son Contrapunteo del tabaco y del azúcar5 (Contrepoint du tabac et du sucre), expression du choc violent entre les Amériques indiennes, l’Espagne déjà métisse de la judaïté, du christianisme et de l’islam, et l’Afrique, où ont mijoté ensemble toutes ces composantes des humanités, Abilio Etévez fluctue, donc, entre une universalité classiquement pensée et, qu’il y prenne garde ou pas, une intuition du divers qui est un autre universel. C’est par le néologisme « diversel » qu’Édouard Glissant traduit cet autre universel, dans sa Philosophie de la Relation6. Notre certitude, forgée par notre connaissance de l’auteur Abilio Estévez et de son œuvre, est que ce Cubain, fils d’Espagnols venus de la Côte cantabrique, n’échappe pas à la dynamique imparable qui préside à la labilité des identités aux prises avec ce « diversel », et qui le situe, comme tous les écrivains et artistes de cette région du monde dans un entre-deux fécond.

Or la beauté figure parmi les catégories constitutives et nodales qui sous-tendent la philo-poétique d’Édouard Glissant, qu’il installe dans une nouvelle lecture anthropologique de l’homme et de ses réalisations imaginaires, et qui induit nécessairement de nouvelles lignes d’approche et de nouveaux angles d’attaque, lorsqu’il s’agit de penser, de sentir, d’élaborer une épistémologie, et donc, de décoder et de comprendre cette catégorie de la beauté. Cette lecture et cette conscience peu orthodoxes du monde érigent la beauté, indomptable et réelle, en « dimensions et matière » du Tout-Monde créolisé. Par exemple, c’est cette beauté du monde que le Président des États-Unis, Barack Hussein Obama, premier Métis appelé à diriger un pays aveugle à sa créolisation, est sommé, avec un enthousiasme non dissimulé, d’exalter parce qu’il l’incarne lui-même, dans l’appel qui lui est adressé par Édouard Glissant et Patrick Chamoiseau lors de sa première élection7, cette beauté intrinsèque de toute digenèse ou création nouvelle produite après le passage traumatique par le gouffre de la cale des bateaux négriers, rétive au fixisme et sans cesse projetée dans une dynamique du devenir et de la Relation. C’est dans le sens de cette dynamique qui sous-tend le « diversel » que sont discutées des catégories systématiques du Beau, platoniciennes, kantiennes et hégéliennes, même si une lecture du Beau depuis le prisme hégélien n’a pas été écartée par d’aucuns pour aborder par exemple l’interoralité, notamment pour ce qui concerne le conte caribéen. Grief est fait, donc, à cette conception du Beau et de son arc-boutement à une verticalité hiérarchisée de l’universel, qui tend à disqualifier l’Autre et ses différences, en ne souscrivant qu’à des canons qui ne « sont forgées et érigées en réalité », pour le dire comme Glissant, parlant des imaginaires et de leurs œuvres, que comme « une particularité au plus haut point qui se serait d’elle-même érigée en universel » et proclamée recevable pour tous, en les imposant « en décidée valeur aux autres formes d’expressions des civilisations ou des cultures. 8 ». S’agissant de la beauté, cette modalité hégémonique de sublimation de la valeur est, à l’évidence, inconciliable avec le « diversel » horizontalement centrifuge du Tout-Monde.

C’est à la lumière de cette configuration des humanités, qui se détourne d’une mise en système de la beauté au nom d’une certaine conception d’universel, que nous regarderons Teo Martinica et « le multivers » dont il est le parangon. L’imaginaire du romancier cubain Abilio Estévez l’a conçu comme un pont entre des îles, épanouies en archipels de la Relation. Il a ainsi pensé et ciselé ce personnage comme un fruit de l’archipélisation dans lequel se reconnaissent ceux issus de la diversalité.

Un Cubain de la Havane dans les villes d’Europe

Les coruscations de cette palpitation multidirectionnelle et de cette imprévisibilité qui président à la Relation, indissociables de la poétique du divers9, scintillaient déjà dans Inventario secreto de La Habana, un texte hybride, objet littéraire fragmenté, frappant par la diversité de sa texture. Structuré par l’écriture du moi tout en tenant de l’essai, des mémoires, de la fiction, de la compilation de bribes multiplement génériques sur la représentation diachronique de la Havane depuis le dix-septième siècle par ses découvreurs, ses visiteurs, ses romanciers et ses poètes, paradis de l’Eros pour des jouisseurs de ses moindres recoins, le texte trace de la sorte un chemin poétique, onirique, à la fois jubilatoire et douloureux, entre cette ville où l’auteur narrateur avait vécu jusqu’en 2000 et les villes d’Europe où le conduit son errance vers un état d’instabilité qui, cependant, se révèle propice à une fécondation propre à l’incessante germination et fructification du « diversel ». Dans ce premier texte qu’il écrivit après son départ de Cuba, cette beauté du « diversel » vint à lui comme une épiphanie lorsqu’il lui fut donné d’observer avec ravissement, dans un café de Majorque, une blonde serveuse originaire d’Allemagne et un brun Maghrébin.

Le serveur algérien, tunisien ou marocain plaisante avec la serveuse blonde. Ensemble, l’un près de l’autre, le Maghrébin est plus maghrébin et elle plus européenne qu’ils ne l’auraient été, chacun de leur côté. Cependant, quelque chose les rend semblables. Je ne saurais l’expliquer10.

Cette expression d’une intuition de l’auteur narrateur répond exactement à ce que proclame Édouard Glissant sur la beauté du divers, du différent que l’identique ne reconnaît pas, mais qui suppose une idée de l’universel qui n’est pas autre chose que la révélation que nous partageons tous, où que nous soyons, du commun, tout en répudiant la hiérarchisation à la fois centripète et verticale. Et il n’est pas douteux que soit préservée l’opacité de chacun dans cette rencontre qui résulte des processus d’échanges transatlantiques globalisés. C’est ainsi que s’opère La Relation dans l’utopie du vivre ensemble dans le Tout-Monde, qui est le divers, entre une Allemande, entrée régulièrement dans cet archipel des Baléares et un Maghrébin, qui y avait peut-être échoué en « patera » (embarcation de fortune). C’est en ce sens que l’auteur narrateur caribéen met volontiers en regard la raideur presque spectaculaire des Barcelonais croisés dans la rue quotidiennement, fuyant le regard de l’étranger, et qui le déconcerte, et cette même dynamique du « diversel » à l’œuvre partout où il est confronté à l’utopie du vivre ensemble et à sa beauté intrinsèque, dans des bars de Stuttgart où la bière est servie par des Mulâtresses colombiennes, dans le lit de la pension où il réside et où lui parvient le tremblement de la nuit, et où il passe le plus clair de son temps éveillé, émerveillé par une trompette d’où jaillissent des thèmes de jazz, production du Tout-Monde s’il en est, et influencés par des mélodies de Joseph Haydn, de Mozart et des airs baroques, très postmodernes par leur vibration chromatique. Ainsi, au fil de son errance, l’auteur narrateur s’épanouit-il au cœur d’un processus où l’homme du « diversel » ne peut que, comme l’exprime Glissant,

Recevoir les différents, leurs rencontres, et où la beauté infiniment s’élève, et d’où la beauté jaillit infiniment, c’est enfin en venir à des diversités qui sont les dimensions et matières (en même temps) du Tout-Monde. Nous reconnaissons par là que l’identique ne consent pas aux beautés de ce Tout-Monde, ni ne les conçoit11.

Teo Martinica, je ne suis rien et je suis tout

Quel droit fil se tisse entre cette poétique du divers de Inventario secreto de La Habana et celle du roman Archipiélagos ? Si tous les personnages du roman répondent, à des degrés différents, à cette mise en tension relationnelle, il semble que Teo Martinica soit encore plus intensément pétri par la beauté du divers.

C’est, à l’image de l’auteur narrateur de Inventario secreto de La Habana, un personnage forgé par une errance, non seulement dictée par les nécessités de l’histoire de sa Martinique natale, mais aussi relevant d’une volonté de s’émanciper du lieu-racine, un appel suscité par un appétit du monde12, comme le dirait Édouard Glissant, son patronyme faisant pourtant de lui l’antonomase de ce lieu. Par l’effet du tropisme communément partagé par les itinérants du Tout-Monde, « una poderosa enfermedad de las Antillas 13 », une maladie très puissante dans les Antilles, alors qu’il vit encore les années de sa prime jeunesse dans la ville capitale de Saint-Pierre où son père tient un magasin d’exportation d’indigo, Teo succombe à la pulsion du départ. Celle-ci jaillit de sa contemplation des paysages montagneux et marin d’avant l’éruption de la Montagne Pelée du 8 mai 1902 et de la rade fascinante de « la Paris des Antilles » envahie par les bateaux marchands qui ont partie liée avec le commerce du rhum, de l’indigo et autres produits d’exportation et d’importation. Il n’est pas indifférent que le narrateur cubain José Isabel recoure à l’appellation « las Antillas », instaurant de la sorte une communauté de l’errance géographiquement et identitairement relationnelle14 et reconnaissable dans laquelle il s’insère lui-même, ainsi qu’on le verra à la fin du roman. L’imagination ainsi nourrie et exaltée de Teo fait germer puis palpiter en lui une sorte de fascination, prélude à la vibration d’une intention poétique face à l’étendue archipélique, l’un des motifs de la poétique du divers15. « Le monde est Tout-Monde d’abord par la distension et le détail de ses situées et de ses dévirées16 », écrit Glissant.

Avant que Teo ne se propulsât dans la dynamique de l’errance qui le conduisit à Cuba, le lieu d’où il procédait s’était déjà constitué comme un Tout-Monde du « diversel » : plus précisément, par le narrateur José, complice du lecteur, qui déploie le fil conducteur dans la fragmentation narrative, il est établi que ce jeune homme de l’île de la Martinique charriait dans ses veines et transportait en soi et avec soi l’Histoire coloniale de la Caraïbe métisse et créolisée, pour être un fils de Blanc de France et d’une chabine17 (Métisse de Noir et de Blanc) et par son passage par la plantation d’indigo du Robert, petite commune fondée par le Père dominicain Labat, sur la côte atlantique. Il y avait demeuré durant quelques années après le cataclysme de la Montagne Pelée, qui avait anéanti ses parents et détruit leur commerce et toutes les plantations, rhumeries et sucreries alentour, et cette expérience dans une habitation ne le laisserait pas indemne ; aux yeux de ceux qui l’accueillirent à Cuba, à Marianao, il passa pour un fou car il croyait en la proximité des morts et des vivants, sans doute parce qu’il avait cruellement souffert des retombées de la catastrophe de Saint-Pierre mais aussi parce que, par sa mère, il portait dans ses croyances les stigmates de l’esclavage. La folie qui, apparemment, le troublait, provenait de ce que la Caraïbe façonne des hommes doublement marqués au fer rouge par l’hubris des éléments et la mémoire de leurs ancêtres asservis. C’est ainsi que dans l’espace qui l’accueillit, il hantait el Cementerio de los Cimarrones, le cimetière des Nègres marrons, et ce qui sembla étrange à ses interlocuteurs cubains, lorsqu’il s’agit d’expliquer l’assassinat énigmatique d’un personnage au début du roman dont avait été témoin José Isabel, il fut le seul à proposer une clé qui renvoyât les vivants de Marianao à un continuum de la mort ; cette mort n’était pas n’importe laquelle mais celle d’un homme inscrite dans une trajectoire historique marquée par la domination de l’esclavage et la révolte entraînant la disparition de l’esclave, comme s’il incombait à Teo Martinica de faire resurgir et d’entretenir une mémoire enfouie au fil du temps. Il fut rangé dans la catégorie des fous car il semblait obéir à un mode de relation avec son environnement autre que celui fondé sur une rationalité accessible à tous. Mais le narrateur ne prit pas à la légère ce rapport au réel et se demanda aussitôt si Teo n’avait pas raison. Il récusa l’idée de sa folie, lorsqu’à un autre personnage du roman, Ezequías, soldat de l’armée cubaine qui avait réprimé les hommes de couleur révoltés contre leur condition, à Santiago de Cuba en 1912, sous le gouvernement de Menocal, Teo adressa ces paroles d’un ton sentencieux : « No viste cómo mataban a un vivo, sino cómo se repetía una muerte que tuvo lugar hace muchos años, lo que viste fue un cimarrón18 ». « Tu n’as pas vu comment l’on tuait un vivant, mais comment se répétait une mort qui se produisit il y a plusieurs années, Ce que tu as vu est une mort qui se répète, tu as vu un Nègre marron19 ».

Après avoir erré tel un homme d’archipels bien qu’il s’en dît lassé, pour avoir traversé le canal entre la Martinique et la Dominique puis parcouru les voies maritimes des îles de la Guadeloupe, entre la Basse-Terre et Marie-Galante, ensuite Montserrat puis Puerto Rico et les Iles Vierges pour finir par jeter l’ancre à Cuba, selon le narrateur, Teo Martinica avait surgi dans une rue de la Havane, l’année où le général noir Quintín Banderas, héros mal considéré de l’indépendance de Cuba pour sa prétendue brutalité, fut tué à coups de machette par la garde civile. Combattant de la « Guerrita de Agosto » de 1906, la petite guerre d’Août, engagée par des partisans du Parti libéral de Miguel Gómez, contre Tomás Estrada Palma, le premier président de la République de Cuba, après la proclamation d’une indépendance usurpée par les États-Unis, Quintín s’était insurgé contre la réélection d’Estrada Palma. Si le narrateur ne propose aucune explication de cette concomitance, sauf qu’elle brosse un arrière-plan historiquement agité, il souligne de façon appuyée l’étrangeté de « Teo Martinica (que) daba la inequívoca impresión de un hombre fuera de lugar20 ». Teo Martinica donnait l’impression indiscutable d’être un homme sans lieu précis identifiable, nullement prisonnier d’une racine unique, et il était à la fois rien et tout. Cependant, la beauté dont il était plein fut confusément ressentie d’abord par Japón, une vieille femme noire de Marianao, aux traits asiatiques et généreuse, dont le surnom rendait compte de la créolisation à l’œuvre dans ce Tout-Monde caribéen. À propos des Batoutos, ce peuple « invu » du roman Sartorius de Glissant, qui, comme l’a écrit Patrick Chamoiseau, participe au monde en y étant, sans en être, l’on comprend que « L’éclat d’un peuple est d’arrimer la beauté de son lieu à la beauté de tout l’existant 21 », et ce fut ce qu’éprouva Japón par sa relation naissante avec Teo Martinica puis ensuite ce que ressentirent tous ceux de Marianao.

La beauté de Teo n’allait pas sans son opacité. Pour les Cubains de Marianao, il était malaisé de deviner sa provenance exacte, en se fondant sur son phénotype, ses habits, et ses manières, mais ce qui ne faisait aucun doute, c’est qu’il avait mijoté dans l’ajiaco de la créolisation du monde américain. Ceux qui l’aperçurent pour la première fois se demandèrent sans parvenir à le savoir avec exactitude combien son mélange comportait de Noir, de Blanc et de Chinois, sa casquette de marin disciplinant avec peine ses cheveux aux tons blonds, roux et noirs22 ; il aurait pu être né dans les régions côtières de la Colombie, du Venezuela, de la Guyane, à Santiago, cette ville du sud de Cuba qui, selon les tenants de la créolité, Patrick Chamoiseau, Jean Bernabé et Raphaël Confiant, serait la partie la plus créolisée de l’île caribéenne23.

La langue composite de Teo

La beauté du divers dans Teo Martinica, faite également d’opacité, se révélait aussi dans la langue dont il usait pour le plus grand étonnement et le contentement de ses nouveaux amis24. D’après le commentaire rapporté du narrateur, il chantait dans une langue absurde, significative d’un décalage entre la norme et la réalisation discursive : par exemple, n’ayant pas conscience des registres de langue et de la spécificité des situations d’énonciation, comme il se produit dans le cas de ceux qui apprennent une langue étrangère dans la circonstance très particulière de l’errance, il avait recours au mot manjar, en français « mets », d’un registre très recherché, pour désigner ce que ceux qui l’invitèrent à partager leur repas considéraient comme un vulgaire plat de haricots rouges au chorizo. Le Martiniquais maniait une langue que l’on comprenait à Cuba mais qui n’arborait pas les signes distinctifs de la brutalité articulatoire havanaise. L’on sait par le narrateur qu’il l’avait apprise, au cours de son errance archipélique, auprès d’un Noir constructeur de bateaux, un étrange grand lecteur de Don Quichotte25, lors de son escale à Puerto Rico. Son maniement d’une langue castillane tout à la fois approximative et grevée de tournures taxées d’archaïsantes par ses interlocuteurs de Marianao, se parait ainsi des éclats de la beauté du divers. À cet égard, comment ne pas se rappeler le propos de Glissant : « Je crois qu’il y a une solidarité de toutes les langues du monde et que ce qui fait la beauté du chaos-monde […], c’est cette rencontre, ces éclats, ces éclatements dont nous n’avons pas encore réussi à saisir l’économie ni les principes26 ». Le tremblement du divers et de la beauté se manifestait dans la langue composite de Teo Martinica, qui mettait en relation archipéliquement, en les rendant audibles et intelligibles, l’espagnol peu orthodoxe enseigné par le Noir portoricain, même si le Quichotte de Cervantès en était la matrice, et le créole de l’errant, qui n’était pas le français atavique de l’empire mais une langue du divers, composite, selon la typologie glissantienne. Somme toute, Teo Martinica parlait la langue du Tout-Monde en Relation.

Même si leur histoire ne vivait pas à l’unisson, tous ces personnages du roman d’Abilio Estévez, êtres d’archipels, ne se contentaient pas de se parler dans un langage forgé par une relation imparable, ils finissaient par se reconnaître dans l’infinie beauté constitutive du Tout-Monde qui les changeait à son tour. C’est dans cette atmosphère que Teo Martinica entendit et savoura cette chanson, entendue dans l’île caribéenne de Cuba, comme un message familier par son tempo et son message : « la rumba no tiene raza, pa la rumba no hay color, la rumba se baila en masa, aunque haya frío o calor27 ». « La rumba n’a pas de race, pour la rumba, il n’y a pas de couleur de peau, on danse la rumba ensemble, qu’il fasse froid ou qu’il fasse chaud. ». La rumba cubaine, fruit fécond de la créolisation, issue de la plantation, concentre la poésie du divers, en opérant comme un liant que reconnut immédiatement l’homme de l’entre-deux qu’était Teo Martinica, un fils de blanc créole devenu familier du cimetière des Cimarrones de Marianao.

Le carnaval de José Manuel Poveda

Dans Archipiélagos, au gré du déploiement d’une stratégie narrative du fragment rétive à la linéarité univoque et qui épouse le mouvement incessant d’un monde du « diversel » accueillant envers Teo Martinica, n’est nullement fortuite sa rencontre avec la figure fictionnalisée du poète mulâtre originaire de Santiago de Cuba, à la vie brève, José Manuel Poveda, auteur de Versos precursores (Vers précurseurs), que l’on range de façon réductrice dans la case de la poésie négriste. Poveda était arrivée de sa ville de l’Orient cubain, très hybride et créolisée, jusqu’à la capitale havanaise, pendant les années du gouvernement de Miguel Gómez, dit le Requin (El Tiburón), au cours desquelles il publia ses premiers poèmes, les plus connus, et une œuvre de fiction narrative en partie détruite par son épouse après sa mort. Le roman Archipiélagos suggère une parenté stylistique et sensible entre l’esthétique de Poveda et celle brillante et inquiète de Julián del Casal, autre dieu du panthéon littéraire de Abilio Estévez, poète moderniste cubain, un rêveur écrivant sur la capitale française où il ne s’était jamais rendu, très versé dans la culture raffinée de la France finiséculaire, ce dont témoigne sa correspondance avec le peintre Gustave Moreau. Cette parenté est mise en relief par la mise en scène fictive de ce poète mulâtre sujet à une forme de taedium vitae, affection à laquelle était sujet del Casal, et campé en personnage au parcours rhizomatique, à l’image de Teo Martinica, un Poveda, accoutumé à l’aspiration du narguilé bourré de cocaïne sucrée, dans sa pension de La Havane fréquentée par une société aux mœurs très libres. Amant idéalisé par Libertad Peña, une jeune femme portant un prénom allégorique que lui avait hypocritement donné son sénateur de père, théoriquement défenseur de l’égalité et de l’émancipation pour tous, mais qui n’aurait jamais consenti à l’union de sa fille avec un Métis car convaincu comme beaucoup de Blancs de la bourgeoisie de l’île qu’il était inconcevable pour une femme bien née de « noircir ses draps », le poète Poveda, à la fois attaché à un universel du Beau moderniste et fils de la transculturation, entraîna Teo dans le tourbillon du carnaval de la Havane. Ils se trouvèrent emportés par les vagues de cette manifestation identitaire née, comme chacun le sait, dans sa modalité caribéenne, de la société de plantation, méprisée en apparence par ces Blancs qui, cependant en jouissaient, en se déguisant et en se noircissant l’épiderme par des artifices. Dans l’ardeur des chants et des défilés, authentiques exaltations du divers, Blancs créoles, Noirs et Mulâtres, déguisés en aristocrates de la Cour de France, reprenaient de concert, pour les tourner en dérision, des bribes de mélodies introduites dans l’île de Cuba durant les années de la Révolution haïtienne à la fin du dix-huitième siècle par les colons français et leurs esclaves, sur l’exécution de la Reine Marie-Antoinette, (« la pobre María Antonieta /no solo perdió la cabeza/ también le cortaron las tetas/ Ay Dios mío qué pataleta », « la pauvre Marie Antoinette/ a non seulement perdu sa tête/ mais on lui a aussi coupé les tétons (seins),/ oh Mon Dieu, quelle colère ! ». Celles-ci se mêlaient aux sons de tambours des comparses qui rendaient inaudibles par leurs chants les airs d’opéra qu’auraient dû entendre le Président Miguel Gómez, son épouse et son fils, comme dans un vrai carnaval où s’inversent les hiérarchies et où les subalternes prennent le pouvoir pour un bref laps de temps.

Le constructeur de caravelle et la poétique du divers

Outre ce détour par les rues de La Havane submergées par le déferlement d’une manifestation du « diversel », peut-être la caravelle construite patiemment par Teo Martinica à Marianao, dans une ambiance de mystère qui ajoute à la poésie de l’œuvre, est-elle l’emblème la plus manifeste de la beauté du divers, de son opacité et de son tremblement. Mal remis de la vision catastrophique des bateaux de la rade de Saint-Pierre anéantis par les cendres incandescentes et la coulée de lave de l’éruption, en dépit de son passage par la plantation Bleu Regret du Robert, happé par l’appel du large et mû par une énergie résiliente, Teo Martinica était devenu un constructeur de bateaux au cours de son errance archipélique, véritable voyage initiatique jalonné d’épreuves.

La caravelle de Marianao, fabriquée avec des morceaux de bois usagés, ciselés par une histoire humaine non encore déchiffrée inscrite sur des troncs, sur de vieilles planches que la mer rejetait de toutes parts vers la côte, finit par arborer un jour son existence poétique, produit d’une digenèse, métaphore lumineuse de ce processus dont est issue la Caraïbe et qui l’a façonnée. Bien qu’ils connussent la propension quasi compulsive d’un Teo presque insomniaque à fabriquer des bateaux miniatures, lorsqu’ils furent mis en présence d’une réalisation tenant de l’imprévisible, ses amis éprouvèrent de l’étonnement mêlé à de la fascination. Comme une mise en abîme de la création de la poétique du divers, la réalisation de l’œuvre de Teo, à taille humaine et à son image d’homme archipélique, témoignait d’une sorte de sublimation de la trajectoire initiatique qu’il avait entreprise depuis son départ de son île ravagée ; elle en était le point d’orgue parce que sa caravelle ressemblait à l’une de celles de Christophe Colomb, sans lui ressembler vraiment, car elle mettait en évidence l’impossibilité de se figer dans une forme finie, dans le droit fil de la leçon que lui avait prodiguée le Noir portoricain Coloso Molinero, en lui enseignant l’art de fabriquer une embarcation en même temps que son espagnol composite, inspiré du Quichotte de Cervantès. À la suite de sa rencontre avec son maître charpentier de marine, ce Métis caribéen avait éprouvé pour la première fois, en prenant le large sur un bateau construit sur une autre île que la sienne, une exaltation, le sentiment de se gouverner tout seul et de se sentir maître de tout ce qu’il découvrait, de petits archipels qui émergeaient de la mer, comme d’antiques animaux.

L’imprédictible de la poétique du divers, traduit dans la caravelle créolisée de Teo Martinica, était signifié par « la delicadeza », la délicatesse, ou beauté du composite, fruit d’un détournement stylistique de ce qui avait été l’instrument de conquête du Grand Amiral de la Mer Océane et de son équipage, l’expression à la fois métaphorique, rituelle et partagée d’une liberté et d’un refus de l’immobilité. Le dévoilement de cet objet poétique à Marianao montre qu’il recélait aussi sa part d’opacité. Il surgit, comme dans un rêve, auréolé de lumière, et, comme pour une cérémonie religieuse, près du jardin créole de Creto Congo, un vieux Nègre décédé et qui avait plié l’échine sous l’esclavage. L’auteur de cette œuvre étrange frappait l’un contre l’autre un morceau de cloche et de fer, près de la caravelle hissée sur une estrade. Cette grande Clémentine de la Martinique, ainsi qu’il avait nommé la caravelle de la Relation, résultait d’une digenèse et conjoignait universel et « diversel », en arborant une voile latine, à l’image de celle qui avait été hissée lors du passage de l’Europe à l’Afrique et à l’Amérique, et des reliefs d’objets en dérive dont était jonchée la Mer Caraïbe. La description qui en est donnée, en focalisation interne, pareille à une ekphrasis, rappelle, par exemple, l’œuvre du plasticien martiniquais Serge Hélénon28, ou celle d’autres artistes caribéens qui renouvellent le sens d’objets pour offrir une autre vision de l’Histoire que celle des récits impériaux. La caravelle de Teo portait sur sa voile la trace indigo de la plantation Bleu Regret du Robert et de l’économie esclavagiste mise en œuvre par le dominicain le Père Labat tandis que les deux flancs du bateau arboraient, en italique et en français dans le texte, le nom d’une fille de la région du monde caribéenne créolisée, « une autre région du monde » pour paraphraser Glissant, qui l’auréolait de noblesse. Installée ensuite dans la Estrella de Occidente, le bar refuge de tous ceux qu’épouvantait la situation désespérée de Cuba, à la fin du règne de Gerardo Machado, la caravelle de Teo Martinica n’épuisait pas sa beauté et son mystère, même si elle avait été vue et revue et maintes fois admirée. Personne ne comprenait comment des mains de marin avaient pu produire un tel objet. Aussi le Père jésuite Hermolao nourrissait-il l’espoir que l’homme des digenèses, dont le génie consistait à reconstruire l’Histoire avec des matériaux de seconde main sculptât un saint François Xavier mais « Como siempre, Teo Martinica sonríe y responde Ese barco es san Francisco Javier y es Dios y es cualquier cosa que uno quiere que sea29 ». « Comme toujours Teo Martinica sourit et répondit Ce bateau est Saint François Xavier et il est Dieu et il est tout ce que l’on veut qu’il soit ». La caravelle singulière, objet du divers, s’affirmait comme une forme autre de l’universel qui mettait tous en Relation, antinomique de l’universel hiérarchisant constitutif du christianisme du Père jésuite ; la valeur que Teo accordait à sa caravelle hissait sur le même plan tous ceux qui, librement, lui trouveraient une signification et y découvriraient une source de plaisir esthétique.

 

En 1936, Teo Martinica, après la mort et l’inhumation à Marianao de la vieille Japón qu’il avait adoptée comme une mère tendrement soignée, disparut de ce lieu du Tout-Monde, de même que sa caravelle composite, archétypale du « diversel », comme s’il n’y avait été qu’un oiseau de passage. « […] había algo huidizo en aquel hombre cuya identidad se desconocía y que, siempre, a cualquier hora y en cualquier sitio, daba la impresión de esperar el momento justo para desaparecer30 », « […] il y avait quelque chose de fuyant dans cet homme dont on ne connaissait pas l’identité et qui, toujours, à n’importe quelle heure et n’importe où, donnait l’impression d’attendre le moment juste pour disparaître. », dit Libertad Peña, après qu’il s’en fut allé. Était-ce le moment opportun pour s’évanouir du « multivers » de Marianao et de la fiction de Archipélagos ? Que signifia donc cette disparition, sans crier gare, de Teo Martinica, aussi rapide que celle du poète José Manuel Poveda originaire de Santiago de Cuba ? Certainement pas l’extinction de l’imaginaire de la beauté dans l’opacité du Tout-Monde, mais peut-être Teo, fruit et poète du divers, se trouve-t-il dans un « invu », comme un Batouto, au cœur d’autres territoires archipéliques, toujours en Relation.

Notes de bas de page numériques

1 Abilio Estévez, Tuyo es el reino, Barcelona, Tusquets Editores, colección andanzas, 1997.

2 Abilio Estévez, Ce royaume t’appartient, trad. de l’espagnol par Alice Seelow, Paris, Grasset/Bourgois, 1999.

3 Abilio Estévez, Archipiélagos, Barcelona, Tusquets Editores, colección andanzas, 2015.

4 Abilio Estévez, Inventario secreto de La Habana, Barcelona, Tusquets Editores, colección andanzas, 2004.

5 Fernando Ortiz, Contrapunteo del tabaco y del azúcar [1940], Madrid Cátedra, Edición de Mario Santí, Letras Hispánicas, 2002.

6 Édouard Glissant, Philosophie de la Relation, Paris, Gallimard, 2009, p. 40.

7 Patrick Chamoiseau, Édouard Glissant, L’intraitable beauté du monde, adressé à Barack Obama, Éditions Galaade, coll. « auteur de vue », Institut du Tout Monde, 2009.

8 Édouard Glissant, Philosophie de la Relation, op. cit., p. 37.

9 Édouard Glissant, Introduction à une poétique du Divers, Paris, Gallimard, 1996.

10 Abilio Estévez, Inventario secreto de La Habana, op. cit., p. 20.

11 Édouard Glissant, Philosophie de la Relation, op. cit., p. 30.

12 Édouard Glissant, L’imaginaire des langues, Entretiens avec Lise Gauvin (1991-2009), Gallimard, 2010, p. 37.

13 Abilio Estévez, Archipiélagos, op. cit., p. 182.

14 L’antillanité se définirait comme un processus d’américanisation d’Européens, d’Africains et d’Asiatiques à travers l’archipel antillais, Éloge de la créolité, Jean Bernabé, Patrick Chamoiseau, Raphael Confiant Gallimard, 1989, Gallimard, édition bilingue, traduction anglaise de M. B. Taleb-Khyar, 1993, p. 32.

15 Édouard Glissant, Philosophie de la Relation, op. cit., p. 30.

16 Édouard Glissant, Philosophie de la Relation, op. cit., p. 34.

17 En vieux normand, « chabin » se réfère à une espèce d’ovins au pelage roux. La typologie des degrés de métissage dans les colonies se fonde sur des désignations renvoyant au genre animal, signe de racisme, de mépris et de l’hostilité des autorités coloniales vis-à-vis de ces mélanges inévitables entre Blancs et Noirs.

18 Abilio Estévez, Archipiélagos, op. cit., p. 175.

19 Nous traduisons.

20 Abilio Estévez, Archipiélagos, op. cit., p. 50.

21 Patrick Chamoiseau, La matière de l’absence, Paris, Éditions du Seuil, 2016, p. 266.

22 Abilio Estévez, Archipiélagos, op. cit., p. 50.

23 Jean Bernabé, Patrick Chamoiseau, Raphael Confiant, Éloge de la créolité, Gallimard [1989], Gallimard, Édition bilingue, 1993. Pour ces essayistes, de nombreux points du Nord de Cuba n’auraient subi aucun processus de créolisation, mais « une américanisation des colons andalous, galiciens et canariens, sans créolisation aucune. », p. 32. Cette analyse est discutable compte tenu des conditions du développement massif de l’économie de plantation dans le nord de la colonie espagnole.

24 Abilio Estévez, Archipiélagos, op. cit., p. 181.

25 Abilio Estévez, Archipiélagos, op. cit., p. 186.

26 Édouard Glissant, L’Imaginaire des langues, Entretiens avec Lise Gauvin (1991-2009), op. cit., p. 15.

27 Abilio Estévez, Archipiélagos, op. cit., p. 186. Nous traduisons.

28 Voir Renée Clémentine Lucien, « Regards d’Édouard Glissant sur la peinture : vibrations, explosions, Relation », Revue Iberical n° 4, Automne 2013, p. 160.

29 Abilio Estévez, Archipiélagos, op. cit., p. 179.

30 Abilio Estévez, Archipiélagos, op. cit, p. 187.

Bibliographie

BERNABÉ Jean, CHAMOISEAU Patrick, CONFIANT Raphael, Éloge de la créolité, Paris, Gallimard [1989], Gallimard, Édition bilingue, 1993.

CHAMOISEAU Patrick, GLISSANT Édouard, L’intraitable beauté du monde, adressé à Barack Obama, Éditions Galaade, coll. « auteur de vue », Institut du Tout-Monde, 2009.

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ESTÉVEZ Abilio, Tuyo es el reino, Barcelona, Tusquets Editores, colección andanzas, 1997

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LUCIEN Renée Clémentine, « Regards d’Édouard Glissant sur la peinture : vibrations, explosions, Relation », Revue Iberical n° 4, automne 2013, p. 149-161.

ORTIZ Fernando, Contrapunteo del tabaco y del azúcar (1940), Madrid Cátedra, Edición de Mario Santí, Letras Hispánicas, 2002.

Pour citer cet article

Renée Clémentine Lucien, « La beauté du Divers de Teo Martinica, dans Archipiélagos (Archipels), d’Abilio Estévez (2015) », paru dans Loxias-Colloques, 12. Le Diversel
Universel ou « Diversel », Tout-Monde ou « Multivers » à l’œuvre dans la fiction caribéenne contemporaine
, "L'intraitable beauté" du Diversel, La beauté du Divers de Teo Martinica, dans Archipiélagos (Archipels), d’Abilio Estévez (2015),
mis en ligne le 15 avril 2019, URL : http://revel.unice.fr/symposia/actel/index.html?id=1206.

Auteurs

Renée Clémentine Lucien

Renée Clémentine Lucien est agrégée d’espagnol, docteur en Études romanes de l’Université Paris IV-Sorbonne. Elle est spécialiste de littérature, civilisation et art de l’Amérique latine, plus particulièrement de la Caraïbe (XIXe-XXIe siècles), et chercheuse au CRIMIC de Sorbonne Université et au GRIAHAL (CHCSC) de l’Université Saint Quentin en Yvelines. Elle travaille sur les identités, l’interculturalité, les relations entre art et littérature. Elle a publié Résistance et cubanité (2006), Regards sur 50 ans de vie culturelle avec la Révolution cubaine, 1959-2009 (2012) (dir. avec Julie Amiot-Guillouet), De la Cuba esclavagiste à Notre Amérique (2014) (dir. avec Sandra Hernandez, Sylvie Bouffartigue, et la collaboration d’Alvar de la Llosa). Elle est l’auteur d’une soixantaine

Sorbonne Université-Faculté des Lettres CRIMIC (EA 2561)