Loxias | 69. Génération Beauvoir | I. Génération Beauvoir
Julie Sau Ocampo :
L’héritage de Simone de Beauvoir chez Esther Tusquets
Résumé
L’article suivant porte sur l’hypothèse de l’influence beauvoirienne dans l’œuvre fictionnelle d’Esther Tusquets, autrice catalane (1936-2012). Nous nous focalisons ici sur l’essai du Deuxième sexe afin d’observer comment une pensée théorique et idéologique peut s’illustrer dans une écriture romanesque. Nous analysons la réception de l’essai de Beauvoir en Espagne au moment de la dictature franquiste pour étudier ensuite les textes de Tusquets sous le prisme de l’écriture du corps, point névralgique de l’engagement des deux autrices.
Abstract
The following article questions De Beauvoir’s hypothetical influence on the work of fiction of the Catalan writer Esther Tusquets (1936-2012). It focuses on The Second Sex essay and tries to establish how a theoretical and ideological thinking can be interwoven in fictional writing. The reception of the essay in Spain during the Francoist dictatorship will be analysed before an in-depth study of Tusquets’ writings in the light of body writing, at the core of the two writers’ commitment.
Index
Mots-clés : corps , Esther Tusquets, lesbianisme, maternité, Simone de Beauvoir
Géographique : Espagne
Chronologique : Période contemporaine
Plan
- De la réception du féminisme français en Espagne à l’empreinte Beauvoir
- Le protagonisme du corps dans l’œuvre d’Esther Tusquets
- L’enfermement des corps féminins chez Tusquets
- Conclusion
Texte intégral
1 En décembre 1975, quinze jours après la mort du général Franco, les premières journées pour la Libération de la Femme sont organisées par des groupes de femmes à Madrid et « dès lors, le développement des groupes, actions et revendications est très rapide et la “naissance” du mouvement féministe espagnol est déclarée1 ». Les Espagnoles retrouvent les luttes qu’elles avaient menées sous la Seconde République Espagnole entre 1931 et 1936. Elles souhaitent retrouver des droits qu’elles avaient acquis comme le suffrage féminin. En Catalogne, la légalisation de l’avortement à la fin de cette période s’était rapidement étendue au reste de l’Espagne avant que cette dernière soit prise au piège de la Guerre Civile. Cette guerre, ainsi que la dictature nationaliste qui lui a succédé, ont anéanti l’ensemble des droits des femmes auxquels elles pouvaient prétendre. Elles subirent alors une régression de leur condition de femmes désormais régie par la Section Féminine. Cet organe du régime permettait de former des épouses et des femmes correspondant à l’idéal féminin en vigueur et les menait vers une soumission consentie et épanouie au régime patriarcal. Nous pouvons ainsi comprendre que la mort de Franco laissait présager un souffle de liberté pour la population féminine opprimée.
2C’est dans ce contexte de transition démocratique qu’Esther Tusquets (1936-2012), autrice, journaliste, éditrice catalane, publie en 1978 son premier roman. El mismo mar de todos los veranos2 ou La mer toujours recommencée3 décrit l’expérience lesbienne à laquelle s’adonne la narratrice dans une temporalité courte mais qui opère comme un tournant dans son destin de femme. L’autrice s’affranchit ainsi des normes sociales et des codes imposés par quarante années de dictature, de censure et d’auto-censure. Il s’agit d’une autofiction mêlant à la fois autobiographie et univers fictionnel, imaginaire. Elle questionne ainsi la condition des femmes et écrit beaucoup autour du lesbianisme et de l’amour libre. Nous pouvons établir un parallélisme temporel entre l’écriture post-dictatoriale de Tuquets et la publication du Deuxième Sexe4 dans la période de l’après-guerre. Les périodes succédant aux conflits de taille majeure réaffirment le besoin de construire de nouvelles valeurs et de nouveaux référentiels. Les productions littéraires jouent alors un rôle crucial pour permettre à la société de dépasser ce traumatisme et d’envisager d’autres possibilités. Dans cet article, nous souhaiterions étudier la production littéraire, intellectuelle et l’engagement d’Esther Tusquets à l’aune de l’héritage culturel de Simone de Beauvoir. Pouvons-nous deviner des idées beauvoiriennes dans l’œuvre d’Esther Tusquets ? Observons-nous la présence d’un métaféminisme ? Sommes-nous assurée que Tusquets a lu les essais de la mère spirituelle du féminisme français ? Afin de parcourir l’ensemble de ces interrogations, nous nous focaliserons sur le premier roman d’Esther Tusquets que nous avons cité plus haut. C’est temporellement son roman le plus proche de la période dictatoriale. Nous établirons également des liens avec les deux autres romans de sa Trilogía del mar5 qui suivent ce premier texte. Dans un premier temps, nous parcourrons la réception de Simone de Beauvoir en Espagne et les hypothèses d’influence de la philosophe dans les œuvres d’Esther Tusquets. Nous analyserons ensuite quel rôle Tusquets concède au corps et à la corporéité dans ses romans. Quel lien crée-t-elle entre le protagonisme du corps et la liberté des personnages féminins dans son œuvre ? Enfin, nous étudierons comment l’autrice s’approche des ambiguïtés beauvoiriennes dans ses textes. Manifeste-t-elle un quelconque engagement ?
De la réception du féminisme français en Espagne à l’empreinte Beauvoir
3Nous souhaiterions tout d’abord nous focaliser sur le contexte de réception de Beauvoir et des essais féministes français afin d’étudier ensuite l’impact sur l’idéologie des femmes espagnoles et de mettre en avant la dimension innovante de Beauvoir.
4Nous avons rappelé préalablement le contexte espagnol dictatorial et la construction solide d’une société patriarcale. Néanmoins, malgré ce régime de fer, une opposition émerge et l’on entrevoit une agitation dans les milieux intellectuels6. Avant la fin du régime franquiste, l’Espagne profite d’une ouverture progressive sur le monde et sur le reste de l’Europe. Une période de transition des idées et des mœurs s’ouvre alors même si Simone de Beauvoir précise qu’en période de transition, le « monde qui a toujours appartenu aux hommes est encore entre leurs mains ; les institutions et les valeurs de la civilisation patriarcale en grande partie se survivent7 ». L’Église catholique n’accueille pas avec complaisance son œuvre et son idéologie : « des intellectuels chrétiens refusent la logique athée de l’existentialisme et la mise en pièces de la morale sexuelle traditionnelle8. »
5Beauvoir va à l’encontre des valeurs revendiquées par cette institution et c’est ce qui se joue également en Espagne. La péninsule observe un tournant politique grâce au Plan de Desarrollo (Plan de Développement) de 1963 qui élargit la demande de main d’œuvre dans les usines aux femmes. La société réclame alors une redéfinition du rôle des femmes puisque leur place n’est plus « par nature » au foyer. À cause de la politique de censure menée en Espagne les écrits de Beauvoir de 1949 tardent à arriver entre les mains des Espagnols.e.s. Cependant, la nomination de Manuel Fraga en 1962 au Ministère de l’Information et du Tourisme assouplit les conditions de censure et le secteur éditorial connaît un semblant de liberté. Le contexte historique et social alimente donc l’intérêt pour la traduction d’œuvres féministes et politiques. C’est grâce à cet engouement qu’en 1965, La femme mystifiée de Betty Friedan est traduite en catalan. Elle soulève moins de dissensions car il s’agit d’un travail appliqué à la géographie nord-américaine. Cependant, quand Le Deuxième Sexe devient éligible à la traduction et à la publication, une suite d’obstacles s’impose à la maison d’édition Edicions 62. En 1954, l’essai avait été traduit en Argentine et jusqu’en 1998, seule l’œuvre clandestine circule en Espagne. La Catalogne affichait donc une posture avant-gardiste. La première demande de traduction de l’œuvre en 1965 fut refusée sous des prétextes d’ordre strictement moral. En 1966, la nouvelle loi de Fraga sur la presse et l’imprimerie garantit un peu plus de liberté et les censeurs ne s’opposent plus inconditionnellement à la traduction de Beauvoir. La publication des deux tomes en catalan a pu voir le jour en 1968, préfacés par Maria Aurelia Capmany, la « Beauvoir catalane9 ». Simone de Beauvoir s’érigea alors comme modèle pensant du féminisme et ses thèses devinrent des points centraux de la future révolution sociale.
6L’accès des Catalanes et de certaines Espagnoles aux réflexions de Beauvoir a permis la (re)naissance de convictions féministes et la quête émancipatrice des femmes. L’ouvrage de « la mère de la pensée féministe contemporaine10 » fait des vagues et donne à réfléchir et à déconstruire.
Alors que le discours androcentrique régnait encore en Europe, la Française et la Catalane ouvrirent le pas à la première génération de femmes diplômées qui refusèrent les occupations leur étant traditionnellement attribuées et qui se lancèrent dans les relations intellectuelles et amoureuses les plus complexes11.
7Maria Aurelia Capmany augure un climat nouveau en Catalogne, loin des missions de femmes de donner des enfants à la Patrie. La situation d’ouverture en Espagne converge avec la réception de la deuxième vague féministe européenne et états-unienne. Cependant, la réception de la littérature étrangère s’accomplit à travers le filtre sélectif de nos propres transformations sociales et de nos attentes politiques. L’Espagne crée, elle aussi, son féminisme national. Selon Christine Bard, une vague féministe se définit par trois éléments : ses orientations, son répertoire d’action et son contexte au sens d’espace-temps. Elle montre ainsi comment le féminisme est « façonné par une culture nationale, un environnement, des institutions, un type d’éducation, des cultures politiques dans un cadre national12 ». Par exemple, en Espagne le MDM (Movimiento Democrático de Mujeres13) repose sur le féminisme espagnol des années 30 et est très orienté politiquement. Son programme s’aligne tout de même sur certaines idées de Beauvoir et de Friedan comme l’explique l’ouvrage consacré au MDM14.
8 Même si le féminisme beauvoirien n’influence pas dans sa totalité les différents mouvements féministes émergeant en Espagne, il crée, pour les Espagnoles engagées, un horizon de perspectives idéales. Son essai de 1949 fut mis par l’Église à l’index de livres interdits. Les Espagnoles déplorent alors qu’il ne leur parvienne que clandestinement, seulement accessible « dans la traduction publiée en Argentine15 ». Les travaux de Beauvoir relancent aussi à la fin des années 60 et au début des années 70 les études sur la situation de femmes en Espagne, une nouvelle forme de conscience et la constitution de groupes de recherche. L’innovation de Beauvoir relève notamment de l’analyse des fantasmes projetés dans le corps des femmes qu’ils soient de l’ordre de la supposée féminité, de la sexualité ou de la maternité. Le corps de la femme est encore soumis aux tabous et aux stéréotypes sociaux. Malgré le manque de visibilité de l’œuvre de Beauvoir, les Espagnoles saisissent les enjeux de son texte. L’œuvre, dans ses deux tomes, impose une vision du monde à laquelle les femmes ne sont pas toujours préparées. Dans son roman Les Années, Annie Ernaux écrit que durant les années 60 « avoir lu Simone de Beauvoir ne servait à rien qu’à vérifier le malheur d’avoir un utérus16 ». Cette citation montre, en effet, que lire Beauvoir représentait une prise de conscience de sa condition de femme à laquelle les jeunes filles avaient la sensation de ne pouvoir échapper. Les militantes ont travaillé à la visibilité des femmes et à une nouvelle considération du sexe féminin. De leur côté, certaines écrivaines, convaincues par le besoin d’un nouveau statut des femmes ont, elles, tenté de proposer des solutions littéraires et d’illustrer la figure féminine comme sujet. C’est le cas, par exemple, des romans d’Esther Tusquets et de sa trilogie autofictionnelle. Les personnages qui apparaissent dans les trois romans portent les mêmes noms et peuvent partager certaines caractéristiques mais ne se ressemblent pas nécessairement. L’autrice s’immisce dans les conflits sentimentaux de personnages issus de la bourgeoisie catalane. Elle dépeint, dans un temps assez restreint et dans un langage riche, les amours des personnages, la sensualité qu’ils partagent et leur quête du plaisir. Tusquets refuse d’écrire des dialogues et ne donne à lire qu’un long enchaînement narratif. L’œuvre de Beauvoir est révolutionnaire pour le destin des femmes, Esther Tusquets l’est-elle également dans son écriture fictionnelle ?
Le protagonisme du corps dans l’œuvre d’Esther Tusquets
9« Le privé est politique » pouvait-on lire sur les pancartes lors des marches dans le cadre de la libération des femmes à partir des années 60. Les militantes se concentrent alors sur la vie privée et intime des femmes. La thématique de la corporéité est au cœur de l’œuvre beauvoirienne et reste encore très présente dans le paysage actuel. Nous verrons comment Esther Tusquets libère les corps dans son œuvre romanesque.
10Là où Simone de Beauvoir évoque une dépossession du corps des femmes une fois passée l’enfance des jeunes filles, Tusquets redonne une conscience corporelle à ses personnages féminins, une conscience narcissiste de leur propre corps. Selon Beauvoir, la petite fille a confiance en son corps, elle le regarde de manière appuyée et se l’approprie. C’est à partir du moment où elle comprend que son corps est convoité par les individus de sexe masculin et qu’il sera soumis à un tas d’épreuves (les menstruations, la maternité, etc.) qu’elle se désengage de son rapport au corps. Chez Esther Tusquets, les passages narratifs où le corps féminin est le plus sublimé sont les moments d’amour lesbien. L’écriture du corps de cette autrice repose sur ces corps de femmes s’entremêlant et menant à l’épanouissement. La narratrice de La mer toujours recommencée expérimente un type d’écriture qui bouleverse et déconstruit les codes littéraires. Elle réinvestit le langage du corps par la relation charnelle qu’elle vit avec Clara, l’autre femme, l’Amazone, qu’elle décrit comme :
une aristocrate sauvage et solitaire, chevauchant à cru des coursiers pur sang et fouettant de sa cravache la domesticité du palais, une adolescente intelligente, sensible et délicate17.
11À travers cette écriture du désir, de l’extrême désir, les yeux de l’homme s’éloignent. Cette expérience apparaît à plusieurs reprises littéralement comme un jeu où l’imagination, les fantasmes et la réalité se rejoignent. La narratrice parvient à décrire la passion, la fusion, la tension sexuelle lorsqu’elle évoque le plaisir sexuel de Clara :
Sous le regard fébrile, étrangement fixe, de deux yeux trop ouverts – je ne suis pas sûre qu’ils me voient, pas plus que moi les choses –, une bouche s’agite anxieuse et ignorante, comme si elle avait entrevu dans les rêves ou appris lors de vies antérieures tous les baisers, une bouche saline et ardente, aux lèvres coupées et légèrement rugueuses, qui s’obstine en assauts répétés – dans une houle intense, furieuse, désespérée – et vient s’écraser contre la mienne, tandis que le corps de Clara tremble tout entier parcouru de convulsions irrépressibles et sa tête roule de part et d’autre de l’oreiller, et l’un de ses bras entoure ma taille avec une force surprenante – et je suis agenouillée par terre près du lit, à côté d’elle –, et une main s’accroche à ma nuque, à mes épaules, à ma chevelure, attirant constamment ma tête vers la sienne, vers sa bouche entrouverte, haletante, altérée et embrassée, sa bouche qui m’embrasse et pousse en même temps – ou entre chaque baiser – des gémissements étouffés, inhumains, pas même animaux18.
12Nous pouvons observer une véritable revendication du plaisir libre et libéré sans conventions ni contrôle masculin. La narratrice veut être spectatrice de la jouissance de Clara pour, elle aussi, jouir à son tour et laisser son corps s’exprimer. Le désir et le besoin d’amour charnel, qu’elle compare à la faim ou la soif semble inexpliqué, comme un dépassement de soi, dans un langage implicite. La narration est donc dotée d’un fort potentiel sensuel qui émane, en plus du désir suprême entre les deux femmes, d’un protagonisme du corps. C’est la fascination, l’admiration de la narratrice envers Clara qui fait de cette dernière un véritable objet de désir. La narratrice s’approprie en fait cet objet, et c’est dans cet instinct de possession qu’elle s’anime, qu’elle redonne vie à son corps. Pour Beauvoir, le lesbianisme est comme une délectation narcissiste, comme la prolongation d’un état adolescent :
en l’autre, c’est la douceur de sa propre peau, le modelé de ses courbes que chacune convoite ; et réciproquement, dans l’adoration qu’elle se porte à elle-même est impliqué le culte de la féminité en général19.
13C’est dans l’accès à son propre corps et au corps de l’autre que la narratrice de Tusquets trouve sa voix/e. Son obsession se retrouve dans la répétition successive du prénom « Clara ». Très vite, Clara va devenir un pilier pour cette narratrice, un soutien duquel elle devient dépendante et duquel elle ne semble pas vouloir se détacher. Dans le roman, il y a peu de phrases au discours direct mais l’une des seules qui apparaisse sous cette forme est le cri de la narratrice qui demande enfin à Clara « ne t’en va pas20 ». Finalement, Clara et la narratrice entrent dans une sorte de fusion, où l’interdépendance s’installe et où la narratrice se donne sans limites. C’est cet état qui la fait exister. Cette relation qu’elle construit rapidement avec cette jeune femme, va lui permettre de gagner une capacité d’agir ; elle va se situer du côté de l’action et non plus de la passivité, et c’est ce que nous pouvons lire dans l’accumulation de verbes d’actions : « maintenant au contraire j’ai ajouté du bois dans le feu, tiré les rideaux, pris des couvertures21 ». L’amour puissant qu’elle ressent pour Clara la pousse à dire ses émotions, à s’exprimer, à retrouver son propre langage là où elle sombrait dans un silence et une solitude troubles. Elle la pousse à se faire sujet. Par cette passion, elle se réapproprie également des sentiments dont elle se sentait dépossédée jusque-là, son désir, ses envies, ses besoins. C’est par le langage du moi et par le langage du corps que se met en place une résistance face à un système de domination masculine et d’oppression patriarcale. Le langage entre ainsi dans les mécanismes de pouvoir et produit du pouvoir. En plus des mentions intradiégétiques sur la manière d’appréhender la sexualité des deux jeunes femmes, la chercheuse Yamile Silva précise que la publication de ce roman a laissé place à une série de controverses pour avoir décrit l’érotisme féminin d’une manière trop ouverte et inconcevable à la fin de cette période franquiste22. Simone de Beauvoir a essuyé des critiques similaires quant à ses réflexions sur le lesbianisme dans le chapitre IV du tome II très explicitement intitulé « La lesbienne ». Simone de Beauvoir ne passe aucune catégorie de femme sous silence et l’œuvre romanesque de Tusquets est aussi une manière de rendre l’ensemble des femmes visible et de faire tomber les tabous. Le prisme de Beauvoir reste tout au long de son œuvre la liberté des femmes, c’est-à-dire comment elles peuvent l’atteindre et la dépasser.
14À travers l’apparition du corps dans la sphère publique, d’autres modes d’expressions des sexualités ont vu le jour et le tabou de l’amour libre s’est levé peu à peu. Simone de Beauvoir élève sa voix contre le mariage qui assujettit la femme et la rend dépendante de son mari. Elle prône un équilibre dans l’amour et un libre consentement de la répartition des rôles dans le couple. Elle revendique la préservation de la liberté de la femme au sein du couple. L’une des solutions qui lui semble viable est l’amour libre. Il représenterait « un pacte de liberté et de sincérité23 » et abolirait l’une des tares du mariage. Elle oppose le libre consentement de ces unions libres à l’hypocrisie de l’adultère qui, selon elle, met en péril le couple. Tusquets représente également des variantes de l’amour à deux et du canon hétéronormé. Dans le roman El amor es un juego solitario, Elia, protagoniste du roman, se remémore les bains de ses parents dans la mer, nus avec leurs amis. Cette même Elia, alors qu’elle est au lit avec Ricardo, se surprend à regretter qu’il n’y ait pas de troisième personne avec eux. Cette relation charnelle à deux ne lui suffit pas :
Elia ressent à nouveau […] la nostalgie d’un public, au moins d’un seul spectateur, le désir en somme qu’une personne extérieure puisse apprécier et même immortaliser cette scène exquise24
15Enfin, dans le troisième roman de Tusquets, Varada tras el último naufragio, Eva et Pablo semblent assez libérés dans leur vision du couple et de l’amour. Lorsqu’Elia évoque avec Pablo l’infidélité de ce dernier avec une jeune fille rencontrée cet été-même, il affirme que cette aventure sexuelle n’est pas une trahison. Il postule l’indifférence d’Eva face au fait. Néanmoins, à la suite du roman, lorsqu’Eva, prévenue par Clara, jeune femme amoureuse d’Eva, découvre l’infidélité de Pablo, elle est détruite, anéantie. Sa réaction ne résonne plus avec « sa manière d’entendre et de vivre l’amour, la relation de couple25 » qui l’animait auparavant lorsque tout cela n’était encore qu’hypothèses et fantasmes. Elle comprend alors ce qu’Elia, quittée par son mari Jorge, ressent depuis le début de l’été ; elle perd le contrôle de la situation et se laisse défaillir. La libération des mœurs n’apporte pas que bonheur et épanouissement dans les œuvres de Tusquets. De la même manière, lorsque dans El amor es un juego solitario, Elia, Clara et Ricardo s’adonnent enfin à un trio charnel, Clara vit la scène comme un viol :
Clara se retourne, et le frappe, et le repousse, alors qu’il lui enserre les cuisses entre ses genoux, comme à une jument mal dressée, et continue de chercher obstinément sa bouche avec la sienne, et c’est désormais Elia qui, d’un coup, le frappe et le rejette et maintient Clara à l’autre bout du lit, « tu ne vois pas qu’elle ne veut pas ? Laisse-la enfin, laisse-la ! »26
16Clara est alors dépossédée de son corps et elle rejette cette liberté qui s’ouvre à elle. Ces évasions libertaires ne sont parfois que de fausses envolées. Dans les romans de Tusquets, la lutte contre le patriarcat, contre la domination ne peut donc pas toujours passer par une libération forcée. C’est aussi ce que montre Beauvoir dans ses textes lorsqu’elle parle de la responsabilité des femmes dans leur propre émancipation. Il en va de leur autonomie. Ces tendances à la victimisation des femmes comme à la responsabilisation de ces dernières illustrent les ambiguïtés des textes de Beauvoir et des théories féministes dans toute leur complexité et leur amplitude.
L’enfermement des corps féminins chez Tusquets
17Les femmes sont des sujets libres qui évoluent dans un monde en créant leurs propres expériences. Nous l’avons illustré précédemment. Mais ces femmes peuvent-elles finalement réellement s’émanciper dans un rapport continu aux hommes et à la maternité ? Peut-on lire chez Tusquets l’expression d’une liberté tronquée qui empêcherait les femmes d’échapper au « destin féminin » de Beauvoir ? Nous parcourrons les différents obstacles qu’expérimentent les personnages féminins de Tusquets à travers le prisme du corps qui constitue le point d’ancrage des théories beauvoiriennes.
18Les personnages féminins de Tusquets sont toujours tiraillés entre leur soif d’ouverture et leur immanence constante. Leur corps est souvent enfermé dans un espace-temps, dans des représentations et dans des relations de domination. Les sujets féminins des trois romans sont enfermés dans des lieux familiers (maisons de famille ou maison de vacances) et évoluent dans un intérieur et une atmosphère qui peut s’avérer lourde et pesante. C’est dans cet espace-temps que les personnages semblent jouer des scènes, comme dans une représentation théâtrale. Tout au long des trois romans, le mot « jeu » se répète et les personnages déplacent leurs pions comme dans un jeu d’échec, craignant tour à tour que leur expérience ne soit qu’illusion. Dans Varada tras el último naufragio, la métaphore de la tragi-comédie lors de la révélation de la trahison de Pablo à Eva est filée et moquée par le narrateur. Il dépeint des « personnages qui sont, comme dans la Commedia dell’Arte, des prototypes27 » dans leur rôle théâtral. Les personnages féminins renforcent donc leur immanence par l’impossible dépassement de cet état scénique. Enfin, même dans ce jeu sans issue, le corps des femmes est dominé et souvent ramené à l’état d’objet. Elles intériorisent leur dépendance et Simone de Beauvoir théorise cette domination consentie :
L’asymétrie de l’érotisme mâle et femelle crée des problèmes insolubles tant qu’il y a lutte des sexes, ils peuvent aisément se trancher quand la femme sent chez l’homme à la fois désir et respect ; s’il la convoite dans sa chair tout en reconnaissant sa liberté, elle se retrouve l’essentiel au moment où elle se fait objet, elle demeure libre dans la soumission à laquelle elle consent28.
19Dans El amor es un juego solitario, Clara est le personnage qui se retrouve toujours dominé. Elle est passive et ne décide pas, elle n’élève pas la voix :
Et ils l’oppressent et ils la caressent et ils l’embrassent et ils la félicitent et ils se la disputent, ils prétendent même la protéger29
20Clara est au centre mais elle n’est sujet d’aucun verbe d’action, elle patiente, on ne la voit pas. Même dans son amour pour Elia, elle est dominée. La domination n’est donc pas que l’apanage des relations hétérosexuelles. Chaque fois qu’Elia l’appelle « elle accourt sur le champ30 », elle accepte l’ensemble des conditions d’Elia et l’attend, résignée et amoureuse. Enfin, selon Beauvoir la vieillesse est une nouvelle source d’enfermement pour les femmes. Selon elle, les femmes sont hantées par le vieillissement car l’étape de la ménopause les dépouille de leur féminité. Dans les romans d’Esther Tusquets les protagonistes sont des femmes d’environ quarante ans qui se retrouvent à mi-chemin entre la jeune femme et la femme d’âge mûr. Dans Varada tras el último naufragio, Eva, lorsque Pablo la quitte, se voit déjà comme une vieille femme et ne trouve plus de sens à son existence :
qu’est-ce qu’il a cru chercher lui depuis toujours, qu’est-ce qu’il attendait, une femme qui commence à vieillir, qui a rêvé éveillée d’un jeu idiot et qui refuse maintenant de se réveiller31
21Dans les trois romans, les différentes protagonistes se sentent enfermées dans un processus de vieillesse psychologique et physique. De plus, elles sont toujours confrontées au personnage de Clara, jeune femme qui les renvoie à leur maturité et à leur responsabilité en tant que mère. Simone de Beauvoir évoque ce rapport complexe des femmes à la maternité et c’est l’une des problématiques majeures de l’œuvre de Tusquets, qu’elle soit narrative, autobiographique ou épistolaire.
22Simone de Beauvoir pense que tant que les femmes n’obtiennent pas la liberté du ventre (moyens de contraception, avortement etc.), elles ne sont pas libres. Les protagonistes des romans de Tusquets évoquent leur rapport à leur mère ainsi qu’à leurs enfants mais ce qui est ignoré est le désir de maternité. Simone de Beauvoir lutte contre l’asservissement de la maternité et place le désir et l’indépendance au cœur de son discours. Elle se positionne contre la construction d’un modèle maternel et contre la perpétuation d’un mythe qui commence « quand la religion de la Maternité proclame que toute mère est exemplaire32 ». Les œuvres de Tusquets élaborent une réflexion autour des conflits sentimentaux enracinés dans le conflit à la mère. Elle souhaite déconstruire fictionnellement le fantasme de la maternité. Mais nous observons là aussi des ambiguïtés car ses personnages féminins oscillent entre rejet et quête de cette figure maternelle. Margarita García Candeira publie un article sur le discours « matrofóbico33 » (« matrophobique ») des romans d’Esther Tusquets. Elle cite Simone de Beauvoir dès le début de son article et crée ainsi un premier lien entre les deux autrices. Par ce néologisme elle souligne le refus des protagonistes de Tusquets de se confronter à leur condition maternelle, à leur statut de mère. Nous observons que ces différentes individualités connaissent une relation conflictuelle avec leur propre mère. Dans El mismo mar de todos los veranos la description de la mère de la protagoniste est souvent froide et dépréciative. Lorsqu’elle évoque le passé et les possibles moments affectueux avec sa mère, elle se détache de la petite fille qu’elle était, ce n’est plus elle mais une troisième personne comme si elle adoptait une posture extérieure : « la fillette imagine sa mère34 ». Plus le temps passe et plus la narratrice s’éloigne d’une image maternelle positive ; la figure maternelle devient floue, obscure, elle est désormais « cette espèce de dame anglaise35 ». Le rejet et même le dégoût est palpable. Sa mère semble parfois appartenir à une autre réalité. Dans le temps du récit, le lien avec la mère est rompu :
Et quand je pense à la mère de mon enfance, avec ses yeux bleus vraiment capables, et sans métaphore, de lancer des rayons de feu, ou peut-être de froids rayons de glace, qui dans les deux cas me foudroyaient, bien clouée sur ma chaise avec de la terreur dans la poitrine, ma mère avec ses propos mesurés, raisonnables, si justes qu’ils ne souffraient pas la réplique, avec ses lèvres distantes délivrant de rares baisers aseptiques – sans doute les lèvres exactement prescrites par le manuel de pédiatrie36
23Sa relation à sa mère est ainsi dépourvue de structure sociale et affective. En revanche, sa mère répondait tout à fait aux attentes de son rôle de femme, séductrice, épanouie. La sublimation, l’admiration de sa mère passe tout d’abord par son corps. En effet, c’est « une déesse hellénique37 » définie par sa beauté, son élégance, « son pas assuré et sportif, le corps élastique et jeune encore38 », sa toilette faite de « dentelles […] chemisier de soie […] plumes de boa magnifique39 ». Nous pouvons mettre en avant alors l’incompatibilité dans le roman d’Esther Tusquets de l’image sensuelle, charnelle de la femme et de son rôle de mère. Ce rapport maternel se reporte sur les enfants des protagonistes. Par exemple, dans El amor es un juego solitario, Elia refuse de répondre aux normes du comportement maternel, « elle n’a pas voulu ou elle n’a pas pu faire de ses deux enfants sa raison de vivre40 ». Il s’agit ici d’un discours novateur dans l’honnêteté qu’il présente et dans la déconstruction d’un idéal. Par ailleurs, dans Varada tras el último naufragio, Elia ne se sent pas mère et se sent exclue de cette « communauté » des mères aimantes et attentionnées qu’elle observe :
Les félicitations, tous, les médecins, les bonnes sœurs, les infirmières et même les amis, qui s’obstinent à l’appeler « maman », un « maman » qui devrait la flatter et qui la rend cependant mal à l’aise, c’est peut-être juste qu’elle a honte, ou que la maternité lui semble, malgré les mois interminables de grossesse, décevante et étrangère41
24Ces protagonistes refusent de s’astreindre à « un rôle caractérisé par la résignation, le renoncement, l’absence d’expectatives ou l’amour de soi systématiquement dégradé42 ». Par ailleurs, Tusquets présente aussi des personnages qui souffrent de l’absence d’une mère. La mère de Clara dans El amor es un juego solitario ne lui apporte pas l’amour dont elle a besoin :
La mère s’occupe plus ou moins du repas et de la maison […] et elle la punit. La mère – pense Clara – ne l’a jamais aimée – peut-être que ses frères oui, mais en aucun cas Clara43
25C‘est pourquoi Clara recherche cette figure maternelle chez Elia. C’est le cas également dans les deux autres romans de Tusquets. Beauvoir fait ressortir ce même paradoxe rejet/quête dans son essai :
la fille est pour la mère à la fois son double et une autre, à la fois la mère la chérit impérieusement et elle lui est hostile ; elle impose à l’enfant sa propre destinée : c’est une manière de revendiquer orgueilleusement sa féminité, et une manière aussi de s’en venger44
26Clara est le personnage qui recherche un amour à la fois sensuel, charnel et maternel, protecteur auprès d’une femme plus âgée. Dans El amor es un juego solitario, Clara se positionne toujours comme une enfant par rapport à Elia. Elia ressent le besoin de la rassurer, de l’appeler « ma toute petite puce45 ». C’est le cas également dans Varada tras el último naufragio quand Clara attend tous les soirs dans son lit « son baiser de bonne nuit46 » à l’instar d’une petite fille qui a besoin d’être bordée et rassurée. Les insuffisances des personnages avec leur mère se répercutent alors sur leur rapport à leurs enfants puis sur leurs conflits amoureux. Mais les femmes sont dégagées de toute injonction maternelle. Dans El mismo mar de todos los veranos, la mère de la narratrice est sublimée en tant que femme mais détestée en tant que mère. C’est la femme qui l’emporte, femme qui est toujours définie par son corps.
27Finalement, comme le dit Beauvoir, la liberté ne donne pas forcément accès au bonheur mais elle abolit la domination et les injonctions. Tusquets recherchait-elle cela aussi dans son écriture ? Le prix de la liberté chez Tusquets est élevé. Les subjectivités féminines tentent de transgresser leur condition sociale mais elles finissent par se perdre dans les méandres de la solitude et de l’aigreur. La narratrice de El mismo mar de todos los veranos, finit par quitter Clara et revenir vers Julio, par incapacité de dépassement de soi et des normes. Elle décrit leurs retrouvailles charnelles avec violence et brutalité :
mais je finis par me retrouver comme de juste étendue sur le dos, les yeux fixés au plafond blanc, son corps pesant sur le mien, ses bras et ses jambes m’enfermant dans le piège mortel, et je ne peux ni voler, ni marcher sur la mer, ni même bouger désormais et alors, dans une poussée brutale, son sexe me transperce comme une épingle au rouge vif, non, comme une boule de feu franchissant adroitement le cercle47
28À travers des métaphores, la narratrice s’approche de la description d’une scène de viol : elle est passive, spectatrice de la relation avec son mari, observatrice des gestes de ce dernier et elle vit la pénétration comme une intrusion violente et bestiale. Au moment même où Julio la pénètre, il la possède de nouveau et la prive de sa liberté. Clara est toujours le personnage qui se retrouve seul et abandonné à la fin des romans d’Esther Tusquets. Elia dans El amor es un juego solitario termine également seule, incapable de surmonter sa situation, « pire que la mort, bien pire que la mort48 ». L’identité de ces femmes s’efface à mesure qu’elles perdent ce qui constituaient leur vie. C’est le cas également d’Elia dans Varada tras el último naufragio lorsque Jorge la quitte. Elle reste muette une grande partie du roman, elle a perdu sa voix. Néanmoins, dans le dernier instant de la trilogie, un espoir renaît : le fils d’Elia, Daniel, souhaite vivre avec elle et c’est là qu’émerge son envie d’être mère. Elle a la liberté de choisir et elle voit, dans cette nouvelle vie, l’espoir de se trouver et d’apprendre à vivre indépendamment de sa relation à Jorge.
Conclusion
29Selon Sylvie Chaperon, il y a, dans l’essai beauvoirien, « la cristallisation […] de l’esprit de toute une génération49 ». Après avoir étudié l’écriture fictionnelle d’Esther Tusquets, nous pouvons situer ses romans dans la lignée idéologique de Beauvoir. L’autrice catalane s’inscrit dans un contexte général à la fois national et international de libération des femmes. Elle refuse de répondre favorablement aux canons hétéronormés de la sexualité et des injonctions faites aux femmes. Elle donne vie à des subjectivités féminines complexes dans le rapport aux hommes, aux femmes et à la maternité. Ce que l’autrice amène en dernier lieu est le rapport de ces individualités à elles-mêmes et c’est là que se traduit leur rapport à la liberté. Aucune biographie d’Esther Tusquets ne nous renseigne sur son accès aux essais beauvoiriens mais nous savons que Tusquets était familière de la langue française (elle cite Françoise Sagan dans deux romans de sa trilogie) et que grâce à la première traduction catalane de l’œuvre de Beauvoir elle a pu s’imprégner de ses théories. Les romans de Tusquets apparaissent comme des textes tout à fait novateurs dans le contexte espagnol de la fin des années 70 et il serait intéressant de savoir si son œuvre fictionnelle a pu éveiller des consciences ou pousser les femmes à mesurer l’ampleur de leur domination et de leur enfermement. En 2002, l’œuvre de Beauvoir a connu un renouveau en Catalogne avec la publication de la traduction catalane de La femme rompue. Cet engouement pour une féministe des années 40 questionne l’actualité de la lutte pour la liberté des femmes. Le XXIe siècle verra-t-il apparaître une nouvelle génération Beauvoir ?
Notes de bas de page numériques
1 María Martínez, « Troisième vague, transféminismes et la question générationnelle : reconfigurations des féminismes dans l’Espagne contemporaine », in Karine Bergès, Florence Binard, Alexandrine Guyard-Nedelec, Féminismes du XXIe siècle : une troisième vague ?, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2017, p. 77.
2 Esther Tusquets, El mismo mar de todos los veranos, Barcelone, Anagrama, 1978 (édition renouvelée en 1990).
3 Esther Tusquets, La mer toujours recommencée, traduit par Jiménez Eduardo, Paris, Robert Laffont, 1981.
4 Simone de Beauvoir, Le Deuxième Sexe I et II, Paris, Gallimard, « Folio essais », 1949 (édition renouvelée en 1976).
5 La trilogie comprend El mismo mar de todos los veranos ; El amor es un juego solitario (« L’amour est un jeu en solitaire »), Barcelone, Anagrama, 1979 (édition renouvelée en 1996) ; et Varada tras el último naufragio (« Echouée suite au dernier naufrage »), Barcelone, Anagrama, 1980 (édition renouvelée en 1998). Les deux derniers romans n’ont pas été traduits en français, je me chargerai donc de traduire les éventuels extraits tout au long de l’article.
6 Robert Gauthier, « La libéralisation du régime franquiste, apparence ou réalité ? », Le Monde diplomatique, juin 1965, p. 5 à 9.
7 Simone de Beauvoir, Le deuxième sexe I, p. 229.
8 Sylvie Chaperon, « Réception du Deuxième Sexe en Europe », consultable sur https://ehne.fr .
9 Sylvie Chaperon, « Réception du Deuxième Sexe en Europe », p. 3.
10 Máriam Martínez-Bascuñán, « El feminismo que nació con Simone de Beauvoir », El País, 6 juillet 2019.
11 Pilar Godayol, « Censure, féminisme et traduction : Le Deuxième Sexe de Simone de Beauvoir en catalan », Editions Antipodes, « Nouvelles Questions Féministes », 2013/2 vol. 32, traduit du catalan par Bernadette Potez Pichot, p. 84.
12 Christine Bard, « Faire des vagues. Périodiser l’histoire des féminismes », in Karine Bergès, Florence Binard, Alexandrine Guyard-Nedelec, Féminismes du XXIe siècle : une troisième vague ?, op. cit., p. 33.
13 Mouvement démocratique des femmes : organisation féministe fondée à l’origine pour aider les prisonniers politiques et leur famille, pour lutter contre le franquisme puis qui s’intéresse aux problèmes que rencontrent les femmes.
14 Francisco Arriero Ranz, El Movimiento Democrático de Mujeres – De la lucha contra Franco al feminismo, Madrid, Catarata, 2016.
15 Carmen Martínez Ten, Purificación Gutiérrez López, Pilar González Ruiz, El movimiento feminista en España en los años 70, Madrid, Ediciones Cátedra, 2009, p. 192.
16 Annie Ernaux, Les Années, Paris, Gallimard, 2008, p. 85.
17 Esther Tusquets, La Mer toujours recommencée, op. cit., p. 48.
18 Esther Tusquets, La Mer toujours recommencée, op. cit., p. 107.
19 Simone de Beauvoir, Le Deuxième Sexe II, op. cit. p. 107.
20 Esther Tusquets, La Mer toujours recommencée, op. cit., p. 151.
21 Esther Tusquets, La Mer toujours recommencée, op. cit., p. 146.
22 Yamile Silva, « Penélope subvirtiendo textos: reflexiones sobre la escritura de Esther Tusquets », University of Massachussetts on Amherst, 2006, p. 412.
23 Simone de Beauvoir, Le Deuxième Sexe II, op. cit., p. 421.
24 Esther Tusquets, El amor es un juego solitario, op. cit., p. 78.
25 Esther Tusquets, Varada tras el último naufragio, op. cit, p. 205.
26 Esther Tusquets, El amor es un juego solitario, op. cit., p. 138.
27 Esther Tusquets, Varada tras el último naufragio, op. cit., p. 209.
28 Simone de Beauvoir, Le Deuxième Sexe II, op. cit., p. 187.
29 Esther Tusquets, El amor es un juego solitario, op. cit., p. 55.
30 Esther Tusquets, El amor es un juego solitario, op. cit., p. 69.
31 Esther Tusquets, Varada tras el último naufragio, op. cit., p. 185.
32 Simone de Beauvoir, Le Deuxième Sexe II, op. cit., p. 367.
33 Margarita García Candeira, « El discurso matrofóbico y su tratamiento en Esther Tusquets: autobiografía y ficción », Moenia 20, 2014.
34 Esther Tusquets, La Mer toujours recommencée, op. cit., p. 14.
35 Esther Tusquets, La Mer toujours recommencée, op. cit., p. 11.
36 Esther Tusquets, La Mer toujours recommencée, op. cit., p. 74.
37 Esther Tusquets, La Mer toujours recommencée, op. cit., p. 26.
38 Esther Tusquets, La Mer toujours recommencée, op. cit., p. 11.
39 Esther Tusquets, La Mer toujours recommencée, op. cit., p. 11.
40 Esther Tusquets, El amor es un juego solitario, op. cit., p. 64.
41 Esther Tusquets, Varada tras el último naufragio, op. cit., p. 15.
42 Margarita García Candeira, « El discurso matrofóbico y su tratamiento en Esther Tusquets: autobiografía y ficción », p. 346.
43 Esther Tusquets, El amor es un juego solitario, op. cit., p. 84.
44 Simone de Beauvoir, Le Deuxième Sexe II, op. cit., p. 30.
45 Esther Tusquets, El amor es un juego solitario, op. cit., p. 132.
46 Esther Tusquets, Varada tras el último naufragio, op. cit., p. 158.
47 Esther Tusquets, La Mer toujours recommencée, op. cit., p. 202.
48 Esther Tusquets, El amor es un juego solitario, op. cit., p. 150.
49 Sylvie Chaperon, « La deuxième Simone de Beauvoir », Les Temps Modernes, Gallimard, 1997, hal-02091119, p. 14.
Bibliographie
Œuvres d’Esther Tusquets
Tusquets Esther, El mismo mar de todos los veranos, Barcelone, Anagrama, 1978 (édition renouvelée en 1990)
Tusquets Esther, La Mer toujours recommencée, traduit par Jiménez Eduardo, Paris, Robert Laffont, 1981.
Tusquets Esther, El amor es un juego solitario, Barcelone, Anagrama, 1979 (édition renouvelée en 1996).
Tusquets Esther, Varada tras el último naufragio, Barcelone, Anagrama, 1980 (édition renouvelée en 1998).
Œuvres de Simone de Beauvoir
Beauvoir Simone de, Le Deuxième Sexe I, Paris, Gallimard, « Folio essais », 1949 (édition renouvelée en 1976).
Beauvoir Simone de, Le Deuxième Sexe II, Paris, Gallimard, « Folio essais », 1949 (édition renouvelée en 1976).
Articles relatifs à l’œuvre d’Esther Tusquets
Candeira Margarita García, « El discurso matrofóbico y su tratamiento en Esther Tusquets : autobiografía y ficción », Moenia 20, 2014.
Articles relatifs à l’œuvre de Simone de Beauvoir
Chaperon Sylvie, « La deuxième Simone de Beauvoir », Les Temps Modernes, Gallimard, 1997, hal-02091119.
Chaperon Sylvie, « Réception du Deuxième Sexe en Europe », https://ehne.fr.
Godayol Pilar, « Censure, féminisme et traduction : Le Deuxième Sexe de Simone de Beauvoir en catalan », traduit du catalan par Bernadette Potez Pichot, Nouvelles Questions Féministes, 2013/2 vol. 32, Éditions Antipodes.
Martínez-Bascuñán Máriam, « El feminismo que nació con Simone de Beauvoir », El País, 6 juillet 2019.
Silva Yamile, « Penélope subvirtiendo textos : reflexiones sobre la escritura de Esther Tusquets », University of Massachussetts on Amherst, 2006.
Documents relatifs à l’Espagne
Francisco Arriero Ranz, El Movimiento Democrático de Mujeres – De la lucha contra Franco al feminismo, Madrid, Catarata, 2016.
Gauthier Robert, « La libéralisation du régime franquiste, apparence ou réalité ? », Le Monde diplomatique, juin 1965, p. 5 à 9.
Bergès Karine, Binard Florence, Guyard-Nedelec Alexandrine, Féminismes du XXIe siècle : une troisième vague ?, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2017
Martínez Ten Carmen, Purificación Gutiérrez López, Pilar González Ruiz, El movimiento feminista en España en los años 70, Madrid, Ediciones Cátedra, 2009
Autres textes
Ernaux Annie, Les Années, Paris, Gallimard, 2008.
Pour citer cet article
Julie Sau Ocampo, « L’héritage de Simone de Beauvoir chez Esther Tusquets », paru dans Loxias, 69., mis en ligne le 15 juin 2020, URL : http://revel.unice.fr/loxias/index.html/lodel/docannexe/file/7601/lodel/docannexe/fichier/1245/index.html?id=9454.
Auteurs
Agrégée d’espagnol, Julie Sau Ocampo est professeure dans l’enseignement secondaire. Elle prépare actuellement une thèse de doctorat en littérature centrée sur « La problématique féminine comme sujet écriture et objet de réception chez trois auteures de l’Espagne contemporaine » à l’Université Jean Monet de Saint-Etienne au sein du CELEC (Centre d’Etudes sur les Langues et les Littératures Etrangères et Comparées). Cette thèse est co-dirigée par Emmanuelle Souvignet et Edgard Samper. Ses travaux autour du lesbianisme, de l’engagement au féminin et de la figure de la créatrice sont en cours de publication.