Gary (Romain) dans Loxias


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Loxias | Loxias 44. | I.

Le Roman Gay de Romain Gary

Résumé : Les figures d’homosexuels sont nombreuses dans les romans de Gary, sinon dans les héros du premier plan, du moins parmi les seconds rôles. L’œuvre leur ménage un accueil de qualité : sans survalorisation, positive ou négative, du fait homosexuel ; en restituant une large gamme, à l’opposé de répétitions caricaturales, de manières de vivre l’homosexualité. Elle illustre en outre par l’homosexualité la confrontation des élans de la nature aux conventions sociales qui ne devraient être ni déstabilisantes, ni humiliantes. Pour toutes ces raisons, l’œuvre de Romain Gary mérite de figurer sur les rayonnages du roman gay. Abstract: Romain Gary’s books host a motley crew of gay characters, each with his own, idiosyncratic way of living his homosexuality, many spared any kind of confrontation with militant or hostile overinterpretation of the homosexual fact. Never caricaturing from a single type, posing homosexuality per se as a non-issue, except as a telling illustration of how nature will not fail to overrule inadequate social norms, Romain Gary’s novels deserve to stand on the shelves of Gay Literature.

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Lady L. et Pygmalion

Le roman Lady L. propose le récit d’une métamorphose, celle d’une prostituée en aristocrate distinguée. Il n’est pas sans éveiller le souvenir de Pygmalion, celui d’Ovide comme celui de Bernard Shaw. Ce mythe a servi de fil conducteur à notre réflexion. Annette s’apparente en effet à Galatée mais se distingue également d’elle puisque tirant profit des leçons du maître, elle conquiert sa liberté. Femme libérée, féminine sans être féministe, elle triomphe de Pygmalion qui cesse d’être, conformément au mythe, un créateur et un éducateur, pour devenir un destructeur et se pétrifier sous l’effet des idéologies mortifères. Ainsi par un remarquable renversement carnavalesque Galatée devient la figure essentielle du vieux mythe ovidien.

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La Promesse de l’aube : Ode à la mère qui fut la France

Pour Romain Gary, deux personnes ont incarné la France : le général de Gaulle, qu’il célèbre dans Ode à l’homme qui fut la France, et sa mère, à qui il rend hommage dans La Promesse de l’aube. L’éducation qu’elle lui a donnée en Pologne a construit son identification à la France et, pendant la Seconde Guerre mondiale, Mina Kacew est représentée comme un double du Général qui appelle à poursuivre le combat. Ce rapprochement des deux figures tutélaires constitue une ascendance qui permet d’affirmer que c’est par ses origines étrangères et par son choix politique que Roman Kacew a réalisé le vieux rêve d’intégration de sa mère par son adhésion au gaullisme. According to Romain Gary, France has been embodied by two people: general de Gaulle, celebrated in Ode to the Man who was France, and his mother, praised in Promise at Dawn. The education she gave him in Poland built his identification to France and, during the second World War, Mina Kacew is portrayed as the alter ego of the General while calling for the fighting going on. Bringing together both tutelary characters forms an extraction allowing to say that Gary became French by a combination of his foreign origins and his political choice. Thus Roman Kacew made his mother’s old dream for integration come true.

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Les incorporations de Romain Gary : un pluriel stylistique

Romain Gary devient diplomate en 1945. Impliqué pendant une quinzaine d’années dans les négociations onusiennes et européennes, il ne cachera jamais dans son œuvre ses réticences concernant la construction de ces organisations internationales dont les fondations abstraites ne pouvaient pas être à la hauteur de l’idéalisme qui les présidait. L’ONU et l’Europe deviennent chez Gary des emblèmes symboliques d’une imagination abstraite et stérile s’apparentant à un fantôme de l’humanité. Si d’un point de vue politique ces organisations internationales s’imposent comme un miroir déformant de la fraternité dans lequel l’homme occidental désire se reconnaître, d’un point de vue littéraire, l’écrivain les réduit à des figures de style soulignant leur futilité et leur stérilité. Grâce à un jeu subtil de métaphores récurrentes dans plusieurs romans (principalement dans L’Homme à la colombe et Europa, mais aussi dans Tulipe et Le Grand Vestiaire), ces institutions peuvent être envisagées comme une écriture du corps. Romain Gary became a diplomat in 1945. With 15 years of involvement in United Nations and European negotiations, he never hided in his written works his reticence regarding the creation of these international organizations whose abstract foundations cannot meet the lofty idealism that preceded them. The UN and Europe became for Gary symbolic emblems of abstract and sterile imagination derived from a vain dream of humanity. From political point of view these organizations impose themselves as a distorting mirror of the brotherhood in which a western man would like recognize himself; from a literary point of view the writer reduce them to the figures underlining their futility and vanity. Thanks to their fine play of metaphors recurring in several novels (mainly in L’Homme à la colombe and Europa as well as Tulipe and Le Grand Vestiaire translated in English in 1950 as The Company of Men), these institutions can be considered as a writing of body.

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Formes et enjeux de l’équivoque dans Les Racines du ciel

La forme du témoignage, privilégiée par Gary dans Les Racines du ciel, favorise l’émergence d’une parole multiple qui s’émancipe de la seule narration pour se décliner aussi sur les modes de l’analyse et du commentaire et conduire à une certaine déconstruction du réel. L’entrecroisement des regards et la multiplicité des interprétations placent le lecteur face à un récit qui interroge plus qu’il ne raconte, et qui charge les faits comme les personnages d’un fort coefficient d’équivocité. On verra comment s’exprime dans le roman cette culture de l’équivoque et en quoi elle s’inscrit au cœur du projet romanesque de Romain Gary.

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Allégories du masculin chez Romain Gary

Les Études sur la masculinité sont une branche encore relativement jeune des Études du genre. Elles se penchent sur la question de la représentation et de l’identité masculines et, de la sorte, favorisent des approches résolument interdisciplinaires. Romain Gary interrogeait le fait masculin de diverses manières : dans ses textes fictionnels le masculin est étroitement lié à des figures allégoriques : ainsi dans La Promesse de l’Aube, Nina Kacew et Charles de Gaulle forment des parents symboliques permettant à Gary d’accéder à la francité. Dans La Danse de Gengis Cohn, Florian représente l’homme qui, dans sa recherche de l’absolu, tombe en proie aux idéologies fascistes, tandis que le roman Au-delà de cette limite votre ticket n’est plus valable lie le déclin de la puissance à une certaine perte de vitesse de la France après les Trente Glorieuses. Masculinity Studies are a relatively new field within Gender Studies – they explore representations of maleness and male identities, thus fostering a radically interdisciplinary approach. Questions of masculinity are omnipresent in Romain Gary’s texts, frequently they are linked to allegorical figures. In La Promesse de l’Aube, Charles de Gaulle and Nina Kacew assure a symbolic parenthood allowing Russia-born Gary to access to his « certain idea of France ». In La Danse de Gengis Cohn, Florian, a mass murderer, embodies the man who, in his quest for the absolute, falls prey to a fascist ideology. The novel Au-delà de cette limite n’est plus valable links the decline of male sexual power to the decline of France after the years of unprecedented economic groth between 1947 and 1975.

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La défense de l’éléphant – ou quel idéal pour l’indépendance ? Les Racines du ciel de Romain Gary

Les Racines du ciel, prix Goncourt 1956, continue à faire date comme le premier roman « écologique » – et la critique s’est interrogée sur le sens de cet engagement : que cherche Morel, le protagoniste du roman ? protéger les éléphants ? défendre un idéal de liberté ? renverser le système colonial ? ou simplement assouvir des lubies personnelles ? Chaque personnage gravitant dans son orbite interprète son engagement différemment. Jusqu’à Romain Gary lui-même qui explicite son projet dans la « Lettre à l’éléphant ». Son expérience de l’Afrique lui fait présenter des portraits de colonisateurs et de colonisés, à la veille des mouvements d’indépendance : écologie et postcolonialisme peuvent-ils être conciliables ? The Roots of Heaven, which was awarded the prestigious Prix Goncourt in 1956, is known as the first “eco-novel”, and literary criticism is eager to analyse this environmental concern: what is really the aim of the main character, Morel? Does he intend to protect elephants? or ideal freedom? Does he endeavour to pull down the colonial system or is he just doing randomly whatever crosses his mind? Everyone has his own idea about it. Even Romain Gary himself explains the plot in a so-called letter to “Dear Elephant”. From his own experience he is very much capable of writing a novel on pre-Independence Africa. But are environmental protection and colonial/postcolonial system compatible or do they exclude each other?

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Romain Gary, si « JE est un autre » qui est-IL ?

Le IL vient définir la présence naissante dans le corps de l’écrit, qui hante la littérature de Gary. Il s’agit d’un rapport au temps et au corps qui dépasse la seule problématique de l’individu. Au-delà des pseudonymes, c’est dans la nature même de ses écrits que se déploie cette puissance. Dans l’épaisseur de la page se dissimule le pli entre auteur, personnage et signature. Dans un lien créatif, original et organique au phonème se loge un monstrueux rapport qui délie les lois de l’engendrement, de la naissance, à travers la création. Toutes ces implications vitales font participer son écriture à celles du danger, où l’engagement du sujet, auteur et lecteur, est inévitable. “Romain Gary, if "I is someone else", who is HE?” The HE just defines the emerging presence in the body of the writing, which haunts Gary’s literature. It is a relation to time and body that goes beyond the mere problem of the individual. Beyond pseudonyms, it is in the very nature of his writings that this power unfolds. In the thickness of the page, hides the fold between author, character and signature. In a creative, original and organic link to the phoneme fits a monstrous relationship which loosens the laws of procreation and birth through the creation. All these vital implications involve his writing to those of danger, where commitment of the subject, author, reader, is unavoidable.

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« Adieu Gary Cooper adieu Che Guevara  »  : quelques exemples de la référence à Romain Gary dans l’œuvre de Hubert-Félix Thiéfaine

L’article retrace les modalités de réappropriation de séquences de l’œuvre de Romain Gary dans les chansons de Hubert-Félix Thiéfaine ainsi que leur intégration dans la dynamique du discours poétique, essentiellement caractérisée par un processus d’oxymorisation mis en œuvre sur tous les plans de l’écriture du texte. Le recours aux techniques du cut-up et de l’entrelacement des références permet la création d’un jeu de miroirs complexe confrontant les divers éléments constitutifs du «  puzzle  » textuel, ce qui permet de révéler l’affinité avec les positions de Gary notamment pour ce qui concerne le problème de l’idéalisme et la place de l’homme dans l’histoire et l’univers. The purpose of this article is the description of the integration process that makes it possible for the songwriter Hubert-Félix Thiéfaine to transform sequences from Romain Gary’s novels into constituents of his own poetical discourse. The way the quotations or allusions are recreated (especially by using the cut-up technique) and become part of a mirror game of great complexity based on the combination and implicit confrontation of many intertextual elements lets the songs appear like a "puzzle" (so the author) that reveals in this case the affinity with Gary’s positions especially concerning the problem of idealism and the place of man in history and the universe.

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