Alliage | n°47 - Juillet 2001 Varia 

Alain Gras  : 

Un nouveau procès pour Galilée

La science ne veut pas être un art : généalogie d’une technique sans conscience
p. 11-18

Plan

Texte intégral

1Tout au long de son œuvre mais tout particulièrement dans l’opuscule Wissenschaft als Kunst,1 Feyerabend reprend de manière lancinante la même question : « La science exprime-t-elle une position qualitative sur le monde ? » Il répond bien sûr positivement, en argumentant de manière différente dans chacun de ses ouvrages, mais dans ce cas, le titre qu’il a choisi pour l’ouvrage signifie sans ambiguïté que la connaissance moderne appartient essentiellement au domaine du qualitatif, la science comme art.
S’appuyant sur les thèses du critique d’art allemand Riegl, il tente ainsi, dans Wissenschaft als Kunst, une comparaison entre les progrès dans les arts et les sciences, en prenant pour référence le modèle de la modernité pourfendu dans toutes ses œuvres, celui de la physique expérimentale galiléenne. Or, bien avant le philosophe de l’anarchisme méthodologique,  l’historien de la science Giorgio de Santillana avait fait une sévère critique de Galilée à partir d’une conception éthique de la connaissance.2 Tandis que Frances Yates voyait dans Bruno non le prédécesseur de Galilée, comme le voulait Koyré,3 mais l’achèvement d’une pensée en pure continuité avec les magiciens hermétistes de la Renaissance.4

2C’est à ce stade là que je voudrais reprendre le problème, en mixant les deux approches et en reformulant les thèses de ces auteurs, de telle manière qu’elle éclaire d’un jour nouveau non seulement la position de l’Église de l’époque mais aussi le débat actuel sur la technoscience. On verra que c’est chaque fois à coup d’arguments invérifiables et irrationnels (de son point de vue même) que se déploie le discours moderniste. En réalité, sa rhétorique occupe bien davantage le champ d’une morale politique que celui d’une philosophie de la connaissance, lors même que le refus de toute préoccupation éthique marque la naissance de la technoscience moderne.
Je reformulerai donc la question plus précisément, avec les termes de Silvia Mancini, ethnologue et historienne des religions, dans sa magistrale postface à l’ouvrage fondamental d’Ernesto de Martino, Le monde magique ,

« [peut-on] mettre en perspective historique, ... historiciser ... les catégories fondamentales de la pensée occidentale, comme les concepts de sujet, d’objet, de réalité, de nature, etc., catégories que la philosophie rationaliste postule a priori comme des essences auto-évidentes ? »5

3Je ne propose donc pas ici une interprétation épistémologique ou historienne mais j’expose brièvement des considérations anthropologiques sur la nouvelle manière d’être au monde que va produire le mouvement de pensée dont Galilée fut l’un des premiers et des meilleurs représentants au XVIIe siècle.

L’unicité du monde physique

4Le monde nouveau de la science expérimentale naît, symboliquement au moins, avec Galilée. Or, que propose ce dernier, sinon une vision du monde dans laquelle l’objectivité de ce monde va être posée comme unique et indiscutable. Mais de fait, cette objectivité est une unicité : le monde n’a pu être construit que d’une seule manière. L’Église disait : « Dieu l’a voulu ainsi », la science nouvelle répondra : « La nature l’a fait ainsi », mais aussi : « ne pouvait que le faire ainsi ». Objectif et unique, ce monde doit être encore perçu par le sujet (d’où le problème à l’époque de la valeur des sens comme moyen de connaissance de la réalité, le sensualisme anglais, Hume, Berkeley, etc.).

5Dans les dialogues Galilée ridiculisera ainsi Simplicio, qui incarne le vieux monde :

« Assurément, Dieu aurait pu faire voler les oiseaux avec leurs os faits d’or massif, leurs veines emplies de mercure, leur chair plus lourde que le plomb et des ailes toutes petites. Mais il ne l’a pas fait, et cela devrait montrer qu’il aime l’ordre et la simplicité », et la conclusion s’imposera : « La Nature est inexorable et n’agit que suivant des lois immuables, qu’elle ne transgresse jamais. »6

6L’exorbitante prétention de cette affirmation annonce pourtant une autre intolérance, celle de la pensée rationaliste, intolérance que Brecht n’a malheureusement pas voulu mettre en scène en contrepoint, dans la pièce sur ce thème.
Face à Galilée, il y a certes l’Inquisition, puissance policière et tortionnaire, mais il ne faut pas négliger le fait historique que cette Inquisition, si horrible que soit son action, exprime de manière violente la réaction d’une pensée populaire autant que catholique romaine, qui est en train de perdre son combat et sait qu’elle va mourir dans le désenchantement du monde.
Lors du premier procès qui aboutira à un non-lieu théologique, le pape Urbain VIII  avait compris l’enjeu du débat. Il défendait, curieusement, les idées anciennes de la magie naturelle, celle de Marsile Ficin, de Pic de la Mirandole, de Tomaso  Campanella, de Giordano Bruno (condamné par Bellarmin, celui-là même qui fut l’inquisiteur de ce premier procès, en 1616) et bien d’autres penseurs des XVe et XVIe siècles : pour eux, la nature, loin d’être inexorable, contient tous les possibles et n’est pas contenue dans les limites de notre position particulière. La solution galiléenne de la loi mathématique n’était encore qu’une possibilité parmi tant d’autres. Et Duhem trouvait même admirable l’argument du pape, repris à Augustino Nepo, « tout homme est capable d’erreur si prenant un phénomène naturel dont la manifestation peut émaner de bien des causes, il conclut en faveur d’une seule cause... parce que les apparences peuvent être sauvées par d’autres théories qui ne peuvent être encore inventées. »7
L’Église aurait sans doute dû réfléchir avant de brûler Giordano Bruno, car le Nolain se situe, en effet, à l’opposé philosophique du Pisan.8 Il refuse de lire la nature sous forme mathématique (mertiri est mentire, mesurer c’est mentir), rejette l’idée de l’explication causaliste, soutient la multiplicité des mondes contre la finitude de l’aristotélisme, mais pour promouvoir le principe de base de la magie, la sympathie universelle.

7Galilée se distingue, en effet, radicalement de Bruno lorsqu’il passe de l’affirmation de l’existence d’une légalité dans la nature à la vérification de l’objectivité du monde, en faisant appel à l’expérimentation : entre autres celle, fameuse des billes sur les plans inclinés pour la gravité et — invention, sans doute — celle de la tour de Pise pour la mobilité de la Terre. Galilée innove donc aussi dans un domaine autrefois réservé à la théologie ou à la morale : la vérité s’obtient non plus par la discussion, la médi(t)ation, l’échange de points de vue, c’est-à-dire la communication au sens d’Habermas, elle devient, au contraire, le produit d’une technologique. Le logos  s’inscrit, en effet, dans un appareil matériel, une mécanique qui fait accoucher la réalité de son sens, ou la force à se dévoiler dans son intimité première (sans doute, est-ce l’une des première formulations de ce dispositif que Heidegger appelle Gestell), ainsi que la technique devient-elle aussi idéologie (dont l’une des formes s’appellera progrès par la suite).9 L’astuce du Pisan consiste à imposer l’idée que, sans savoir ce qu’est l’intimité première de la nature, l’objectif du dévoilement est posé comme devoir incontestable, Paul Feyerabend  nomme ce procédé « tyrannie de la vérité ». Ou bien encore dans les termes d’Isabelle Stengers :

« Le monde fictif proposé par Galilée est un monde que nul ne peut interroger autrement que lui. »10

8Il est certain que l’Inquisition craignait bien davantage les thèses de la magie naturelle, celles de la sympathie universelle et de la vibration cosmique, proches de l’idée d’une création continue, que celles de la Scienza Nuova. Elle connaissait la puissance sur les foules de la métaphysique de l’âme intérieure que depuis deux siècles défendaient les mystiques allemands de Tauler à Boehme. Ce troisième œil, qui dépasse les limites de l’étroite connaissance de l’institution dominante, celle des savants aussi bien que des prêtres effrayaient les institutions religieuses. Les praticiens qu’étaient les sorciers, ou plutôt sorcières, se retrouvaient souvent au bûcher depuis le début du deuxième millénaire, sans constituer d’ailleurs une menace réelle sur le plan intellectuel. Tout change à la Renaissance, car les magiciens se révèlent alors grands penseurs, cultivés, raffinés, prêts à affronter avec un « enthousiasme héroïque » (Ernst Bloch)11 les docteurs de la loi de la religion dominante, exotérique et moniste.
Ce danger théorique des penseurs de la Renaissance n’était donc pas celui qu’allait faire surgir Galilée : il se situait dans un appel au merveilleux de l’imaginaire, à l’infini de la réflexion créatrice libre de tout carcan, souvent au nom d’un dualisme gnostique selon lequel le monde terrestre est le lieu où se trouve prisonnière la lumière du « Dieu des bons esprits ». En quelque sorte Giordano Bruno se voulait, tout comme Paul Feyerabend, anarchiste de la pensée ; c’est cela qui était insupportable à tous ceux qui entendaient maintenir l’ordre dans la connaissance. En fait, la police politico-théologique de l’Église romaine a reconnu Bruno comme ennemi flagrant, parce qu’elle combattait depuis longtemps ce genre de croyance par le glaive et le feu (et sur ce point, les réformés, calvinistes et luthériens ensemble, étaient pour une fois d’accord avec les papistes). Il me semble, par conséquent, que si la position de ce que l’on peut appeler l’Intelligence-Service de l’Église était très claire à l’égard de doctrines qu’elle connaissait de longue date, il n’en allait pas de même pour la Scienza Nuova,et sans doute Copernic n’était-il qu’un prétexte pour savoir dans quel camp se situait Galilée. Cela permet de mieux comprendre l’acquittement lors du premier procès, mené seize ans après, rappellons- le, par celui-là même qui fit condamner Bruno au bûcher, le cardinal Bellarmin. L’Inquisition ne s’y retrouvait pas vraiment.12

L’amoralité  absolue du monde de la connaissance

9Avec Galilée, s’impose aussi une manière amorale de construire le monde. La brèche est ouverte, et la modernité scientifique va s’emparer de ce fameux aphorisme, « les Saintes Écritures nous apprennent comment aller au ciel, pas comment le Ciel doit aller. » Dès lors, il devient interdit d’interdire dans le territoire occupé par la science. Le ridicule dans lequel va sombrer la condamnation de l’Inquisition a alimenté, tout naturellement, le moulin de la raison scientiste pour laquelle toute connaissance est bonne en soi, quelles qu’en soient les conséquences. La morale ne viendra plus se greffer qu’en aval de la recherche, après coup.
Il existe donc plusieurs facettes dans le discours et la pratique de Galilée. D’une part, le monde est construit comme s’il suivait une rationalité externe au sujet, et même externe au sujet Dieu, comme le montre la première citation : si Dieu était vraiment tout-puissant, il ne pourrait être contraint par une quelconque loi, celle, par exemple, qui empêcherait  les oiseaux d’avoir des ailes toute petites ou bien mieux les veines remplies de mercure ! D’autre part, cette loi impose l’absolue réalité du monde, car ce monde échappe à tout sujet depuis sa création, il devient donc nécessairement objectif. Il n’appartient plus ni à Dieu ni aux hommes, mais à la raison universelle, qui s’exprime dans des énoncés mathématiques.
Enfin, aucune contestation de cet ordre n’est permise à l’homme sur le plan éthique. Du coup, la position des Lumières, science = humanisme, paraît bien être un voile idéologique cachant la volonté de puissance de ce que Peter Sloterdijk appelle « la raison cynique ».13 Cette raison, qui renvoie la religion dans les marécages de l’obscurantisme, évacue les avantages de l’ancienne formulation de la situation de l’homme dans le monde, « Galilée est non seulement un génie qui découvre mais aussi un génié qui cache. »14 En effet, jusque-là l’homme pouvait intervenir dans la réalité environnante. Même si cette intervention était monopolisée par une Église, c’était une virtualité que pouvaient éveiller des maîtres penseurs mystiques, des gurus en rupture avec l’autorité de l’Église. Ainsi, Maître Eckhardt : « Dieu m’engendre comme lui-même », et encore, « Tibi dico adolescens surget»,15 ce qui peut se traduire « réveille ta conscience, tu es le monde ».

10Le combat contre l’Église pouvait donc se concevoir comme révolutionnaire à l’intérieur d’une même vision cosmique : contre la confiscation du rapport avec le réel, pour la dignité du sujet, la vraie dignité, celle d’être un participant actif de la vie de l’univers. Je veux dire qu’avant Galilée et la contre-réfome, certes l’Église interdisait le carnaval mais laissait aussi faire le peuple, qui aimait le culte des saints et ses fêtes, à tel point qu’au Grand siècle encore La Fontaine se lamente :

« L’une fait tort à l’autre, et Monsieur le Curé, de quelque nouveau saint charge toujours son prône. »16

11Et lorsque le peuple fêtait le carnaval ou bien les saints, il n’était pas loin d’invoquer les dieux derrière les saints, exactement comme le fait le candomblé dans le Brésil d’aujourd’hui. L’Église d’avant la contre-réforme et la pensée magique se trouvaient encore d’accord sur l’essentiel, et nous n’étions pas perdus dans l’absolue objectivité du monde : la connaissance de la nature était encore soumise à une tension théologique. Tension qui, reconnaissons-le, devint si forte qu’elle fit du XVIe siècle le pire de tous pour les contestataires les plus faibles, les artisans de la magie d’origine hermétique ou d’autre tradition, représentés, je l’ai dit, par l’ensemble des sorciers, et surtout, sorcières.

La nouvelle passivité du sujet dans le monde

12Avec la modernité galiléenne, l’homme, ainsi exclu du monde en acte, n’est plus qu’un sujet passif, observant l’univers déjà donné dans sa totalité. Et c’est cela l’extraordinaire imposture idéologique de la pensée moderne, affirmant que Galilée, pour la première fois, ouvre l’univers infini  de la connaissance, fait sortir l’homme du monde clos,  et lui apporte la liberté.17 Alors que, bien au contraire, sa formulation du problème de l’existence élimine de manière radicale la condition de la présence pleine et entière de l’homme dans la nature. Elle lui interdit de prendre toute position intellectuelle qui lui laisserait jouer un rôle pleinement créatif en transformant la nature. Elle lui refuse de droit de prendre cette nature comme une totalité à la fois physique et spirituelle, ou bien morale, peu importe ici. Bref, l’homme perd la liberté d’imaginer à sa guise sa puissance et sa gloire dans l’univers dont il fait partie, alors même qu’il va gagner au siècle suivant sa liberté politique dans le monde terrestre. Cet effet de compensation est troublant, et mérite qu’on le prenne comme une part de la question posée à l’idéologie scientiste contemporaine, qui croit pouvoir allier progrès technique et évolution démocratique.

13Du reste, selon Alain le Pichon, dans un article publié ici-même, Husserl aurait aussi pensé que

« bien loin de nous conduire à remettre en cause notre vision du monde et celle de la condition humaine, la découverte de la circularité et de la mobilité de la Terre n’aurait eu pour effet que de renforcer la fixité de notre regard sur la Terre. »18

14Je pourrai ajouter que l’histoire a validé la proposition de Husserl puisque, par exemple, la conquête de l’espace, promise et entamée dans les années soixante, n’a abouti qu’au déploiement d’un énorme attirail pour se regarder le nombril : satellites espions, photographes, baliseurs (GPS), etc. Par conséquent, l’homme de science d’aujourd’hui se voit beaucoup plus contraint que le chamane indien : il ne crée pas, il se contente de ratifier la volonté d’une puissance externe, celle de la nature légiférante. En contrepartie, dans le monde humain le savant compense son impuissance naturelle  par une intervention constante sur le devenir des êtres vivants ; cela s’appelle la technique, et n’est évidemment rien d’autre que l’autre face, depuis le début de l’ère moderne, de la connaissance dite scientifique. Pour clore sur le temps présent, tout en revenant à mon propos du début, je citerai le philosophe italien Eugenio Galimberti, qui décrit avec une sobre précision la manière dont Galilée introduit l’idée même de machine comme instrument autonome (ce que n’avait pas fait Léonard de Vinci) : « Pour Galilée, connaître ne signifie pas contempler la nature, mais reproduire les processus naturels de la même manière que la nature les produit. »19

Conclusion : magie et science

15Il me paraissait donc nécessaire de rétablir dans une dimension la filiation des prétentions de la science, dont il ne faudrait pas non plus attribuer la seule paternité à l’illustre Pisan. La contestation a duré longtemps, et n’a été anéantie qu’au XXe siècle. Bertrand Meheust a décrit, par exemple, le long et violent combat du scientisme médival pour arriver à imposer sa raison, face à la contestation néo-shamanique de Puységur au XIXe siècle.20 Revenir à la source, faire une généalogie de cette raison scientifique arrogante, pour la ramener à plus d’humilité  sans contester son utilité, constitue selon moi la seule démarche qui permette d’en cerner les effets pervers potentiels, d’en prévenir les désastreuses conséquences. Toutefois, il faut aussi replacer la pensée contemporaine dans sa case socio-historique spécifique :  la science reste bien porteuse des valeurs occidentales, mais elle porte celles-ci en niant toute relation avec le monde des valeurs ; c’est en cela, dirait Feyerabend, qu’elle est incommensurable avec les autres manières de penser le monde. Pourtant, si la science correspond seulement à une posture possible parmi d’autres de l’être jeté au monde dans l’appréhension qu’il veut avoir de ce monde, alors, sa légitimité durera aussi longtemps que sera reconnue sa puissance comme ayant un sens. C’est ici que la technique prend toute son ampleur métaphysique : la technique valide le monde par l’effet de puissance qu’exerce la connaissance sur ce monde. Elle est donc  tautologique dans sa démonstration, et son efficacité dépend des systèmes symboliques qui donnent sens à cette démonstration... le progrès, par exemple.

Notes de bas de page numériques

1 . Paul K. Feyerabend, Wissenschaft als Kunst, Suhrkamp, Francfort, 1984. Deux chapitres ont été traduits dans Adieu la raison, Seuil, 1996.

2 . Giorgio de Santillana, Le procès de Galilée, Club du meilleur Livre, Paris, 1955. Je précise que je ne veux pas dans ce court article faire preuve d’érudition doctus cum libro, la bibliographie sur Galilée est très vaste, mais curieusement, à ma connaissance, les textes récents, tel celui, passionnant, d’Isabelle Stengers, Les affaires Galilée, ne posent pas la question éthique. À ma connaissance, Michel Henry est le seul auteur français à la poser clairement dans La Barbarie, Paris, LGF, 1988, nouvelle édition à paraître PUF, 2001.

3 . Alexandre Koyré, Du monde clos à l’univers infini, Gallimard, 1973 ou bien Études galiléennes, Hermann, Paris, 1966. Il souligne bien sûr les différences, mais présente les thèses de Bruno comme aboutissant à une impasse de la pensée. Voir aussi infra,  note 13.

4 . Frances K.Yates, Giordano Bruno and the Hermetic Tradition, Routledge and Kegan Paul, 1964.

5 . Silvia Mancini postace de Ernesto de Martino, Le monde magique, Les empêcheurs de penser en rond, Paris, 1999, p. 305 et Silvia Mancini, Bernard Meheust « La réponse des métapsychistes » in L’homme, n° 161, janvier-mars 2002, pp. 225-238.

6 . Lettera a Madama Cristiana di Lorena, Granduchessa di Toscana, Opere, vol.V, Rizzoli ed, Milano, p. 885. Cette traduction  se trouve dans Alistair C. Crombie, Galilée devant les critiques de la postérité, Conférence du palais de la Découverte, 1965, série D, n° 45. Le texte original est le suivant: :­«...ma, all’incontro, essendo la natura inexorabile e immutabile e mai non trascendente i termini delle leggi impostegli. » On peut voir là une première formulation de la fatalité qui s’inscrira ensuite dans une histoire, celle de l’évolution de l’humanité. J’ai développé récemment ce thème in « L’illusion de la fatalité technique », L’écologiste,  n°  5, automne 2001.

7 . Alistair C. Crombie, ibidem, p.  34 .

8 . Une biographie romancée de Bruno met bien en scène le personnage, S. Filippini, L’homme incendié, Paris, Phébus, 1990, mais la petite plaquette éditée à l’occasion de la commémoration de la mort de Bruno le 17 février 1600, présente aussi l’essentiel de sa pensée, Evviva Bruno, Anais, Nice, 2000.

9 . Voir Lucien Sfez, Technique et Idéologie - Un enjeu de pouvoir, Seuil, 2002

1 0. Isabelle Stengers, L’invention des sciences modernes, La Découverte, 1993, p. 98 sq. Elle retrouve d’ailleurs Kant qui écrivait : « Quand Galilée fit rouler des sphères sur un plan incliné (…) que Torricelli (…) que Stahl… Ils comprirent que la raison ne voit que ce qu’elle produit elle-même. » in Critique de la raison pure, préface de la seconde édition, PUF, Paris, 1963,  p. 17.

1 1. Ernst Bloch, La philosophie de la Renaissance, Payot, 1974.

1 2. J. Brodrick, Robert Bellarmin, l’humaniste et le saint, Desclée de Brouwer, Paris, 1963 et L’affaire Galilée, présentée par E. Wemer, Gallimard, Paris, 1975.

1 3. Sa généalogie de la modernité techno-scientifique, écrite dans une langue décapante est féroce, P. Sloterdijk, Critique de la raison cynique,  Paris, Christian Bourgois, 1983. La dérive bio-extrémiste (pour ne pas dire plus) de l’auteur dans La domestication de l’être , Mille et une nuits, 2000, écrit dans  un prétentieux jargon pseudo-heideggerien, n’en est que plus affligeante.

1 4. A. Negri, Modernità e tecnica, Seam, Bari, 1998. Dans ce très intéressant ouvrage l’auteur consacre de nombreuses pages à la mise en relation des thèses de Galilée avec l’invention de la machine thermique.

1 5. Sermons n°  6 et n°  26 in Traités et Sermons, Paris, Aubier, p. 146 et p. 203.

1 6. Un auteur religieux, Thomassin, reprend cette phrase et dénonce des pratiques qui commencent à être percues comme anormales, dans le Traité des fastes de l’Église, Paris, 1697, dont le chapitre XI s’intitule « De la diminution du nombre des fastes ». Emmanuel Le Roy Ladurie décrit cette évolution dans Le carnaval de Romans  d’où a été tiré un beau film, malheureusement introuvable aujourd’hui.

1 7. La manière dont Alexandre Koyré décrit le problème du big-bang (sans utiliser ce terme) au Moyen Age me paraît bien plus intéressante,  « Le vide et l’espace infini au  XIVe siècle », in Études d’histoire de la pensée philosophique, Gallimard, 1971, pp. 37-92. La question de savoir si Dieu a pu créer un second monde ouvrait un large débat, qui durera trois siècles et sera fermé théologiquement au XVIIe siècle.

1 8. Alain le Pichon, « Le temps du monde fini s’achève », in Alliage, n°  41-42, 2000, p. 16.

1 9. Eugenio Galimberti, Psyche e techne — L’uomo nel l’étà della tecnica, Feltrinelli, Milano, 1999.

2 0. Bernard Meheust, Somnanbulisme et médiumnité, Les empêcheurs de penser en rond, 1998.

Pour citer cet article

Alain Gras, « Un nouveau procès pour Galilée », paru dans Alliage, n°47 - Juillet 2001, Un nouveau procès pour Galilée, mis en ligne le 31 août 2012, URL : http://revel.unice.fr/alliage/index.html?id=3807.


Auteurs

Alain Gras

Socio-anthropologue, professeur à l’Université de Paris 1, UFR de Philosophie, Centre d’Etude des Techniques, des Connaissances et des Pratiques