Loxias | Loxias 38. Doctoriales IX | Doctoriales IX
Alexandra Masini-Beausire :
Littérature, peinture et musique
Quand Butor chante : Cantique de Matisse
Résumé
L’ouvrage Cantique de Matisse pourrait se perdre aisément dans l’immensité de l’œuvre de Michel Butor tant il est mince. Il convient pourtant de le considérer comme une tentative aboutie de "décloisonnement" entre les arts ; littérature, peinture et musique composent en effet d’un même chœur un chant d’amour au peintre Matisse. La cohabitation du texte et de l’image plastique mérite d’être observée de près tant elle touche à l’harmonie, grâce à la douce mélodie du chant diphonique Butor-Matisse.
Index
Mots-clés : Butor (Michel) , littérature et musique, littérature et peinture, Matisse
Géographique : France
Chronologique : Période contemporaine
Plan
Texte intégral
J’ai des yeux, j’ai des oreilles. Le monde pour moi est non seulement visible, mais audible. […] Qui ne s’intéresse pas à la peinture est un aveugle, à la musique une sorte de sourd, et je voudrais faire tout ce qui est en mon pouvoir pour le guérir de ces maladies. Ce qui est normal pour un peintre, c’est de lire des livres ; pour un musicien aussi ; ce qui est normal pour un écrivain, c’est de s’intéresser à la musique et à la peinture1.
Michel Butor
1Dans un esprit comparatiste interdisciplinaire, nous nous intéressons aux connexions entre littérature et arts plastiques, plus précisément à ces cohabitations texte-image dont le dessein est d’abolir les frontières entre les arts en général. Dans Vie et mort de l’image, Régis Debray évoque une carence appelée « Negloptence » qu’il définit comme le « défaut de ceux qui, à trop lire et écrire, négligent le voir2 ». De notre point de vue, cette forme de cécité touche un grand pan de la littérature et empêche bien souvent une correspondance enrichissante entre les arts qui s’avère pourtant profondément naturelle. Certains auteurs de la littérature contemporaine placent toutefois le regard au centre de l’écriture et invitent le lecteur à ouvrir l’œil au contact de la peinture ; notre travail explore les univers romanesques de l’écrivain anglais Antonia Susan Byatt et de son homologue autrichien Peter Handke ainsi que celui de l’américaine Tracy Chevalier. Louis Aragon et Michel Butor enrichissent également notre corpus avec deux livres atypiques qui se situent dans un entre-genre indéterminé et entremêlent image plastique et texte pour entamer le dialogue. Cet article sera l’occasion d’observer de plus près le livre de Michel Butor Cantique de Matisse dont nous ne pouvons souligner toutes les richesses dans notre travail de thèse par souci d’exhaustivité.
2L’œuvre inclassable et plurielle de Michel Butor en témoigne, il a toujours activement participé à la réévaluation de l’éternel problème de la relation entre les arts, pour reposer autrement la question même de leur hiérarchie. Bien que sa production soit abondante et son travail en collaboration avec les artistes extrêmement riche, nous avons choisi d’aborder un mince ouvrage qui passe trop souvent inaperçu : Cantique de Matisse. Dans notre thèse, nous regrettons de ne pas pouvoir approfondir les ressorts de l’alchimie qui se met en place entre littérature et peinture dans cet étrange petit livre, alchimie qui ne pourrait exister sans le concours de la musique qui intervient comme un véritable liant. Ainsi, l’occasion nous est donnée d’observer sous un autre angle l’interconnexion verbal-visuel3 sublimée et rendue possible par le chant sacré du cantique.
3Dans cet article, nous souhaitons surtout insister sur la structure atypique de Cantique de Matisse et préciser l’expression « montage-collage4 » employée par Mireille Calle-Gruber. En effet, peu de critiques ont tenu compte de la véritable identité de ce livre né de l’amalgame de deux articles publiés par l’auteur dans deux revues. La place de l’image plastique dans l’œuvre se trouve ainsi bouleversée par les conditions inhabituelles de cette naissance qu’il faut considérer.
Cantique de Matisse : « montage-collage » à décrypter
4Dans l’optique d’une réflexion sur une possible confluence des arts, l’ouvrage particulier de M. Butor Cantique de Matisse5, paru en 2006, est tout à fait remarquable. Celui que Sartre voyait déjà en 1960 comme le plus grand écrivain a largement contribué au dialogue des « Sister Arts » dans une œuvre que Mireille Calle-Gruber désigne comme « polymorphe et constellaire d’une ampleur sans précédent6 ». Il est vrai que « […] l’écriture de M. Butor passée au miroir des genres fait naître des formes sans nom et d’hybrides noms d’objets non identifiables7 ». M. Calle-Gruber, qui a notamment dirigé la publication des œuvres complètes de l’auteur, est l’une des rares spécialistes à s’être intéressée à cet ouvrage d’une soixantaine de pages à peine, trop souvent noyé dans l’immensité de la création de l’auteur, peut-être à cause de sa brièveté. « Avec Cantique de Matisse publié à l’automne 2006, Michel Butor trouve une forme inattendue qui semble prendre le peintre au mot : « /…/ il faut peindre comme on chante /…/ » dit Matisse8. » La jonction est ainsi faite entre trois formes d’art car peinture, musique et poésie devront faire chœur. Henri Matisse s’impose comme le sujet de choix de M. Butor dans cet ouvrage laconique qui se situe volontiers dans un entre-genre indéterminé et indéterminable. Représentatif d’un échange original entre les arts, ce livre étonnant doit être observé selon le regard de Butor poète-artiste, critique d’art et amateur d’art.
5Cantique de Matisse ? Le titre interroge. La référence biblique du Cantique de Salomon donne immédiatement le ton et annonce un dialogue amoureux sur le mode du Cantique des cantiques9. Entre artiste et poète, le « dialogue » est fructueux chez M. Butor, la « complicité »,pour reprendre ses propres termes, est un élément constitutif de son œuvre, toujours ouverte vers l’autre. « […] je collabore avec Gauguin10 » clame-t-il lorsqu’il donne trois conférences sur le peintre à la Bibliothèque Nationale. Tout est question de « collaboration » chez M. Butor depuis cette Rencontre11 avec le peintre chilien Enriquez Zañartu en 1962. « […] le texte s’approche de l’œuvre plastique, dans une sorte de fascination qui le pousse à saisir l’œuvre au point de vouloir faire corps avec elle à travers sa force corrosive » explique Lucien Giraudo.
Cette attirance entre texte et peinture ou musique, va se présenter comme une constante où l’on verra une écriture glisser vers le plastique et inversement des compositions qui vont renvoyer la pratique de la peinture ou de la musique à une mise en scène de l’écriture, comme si l’œuvre en collaboration se présentait comme un miroir des pratiques artistiques12.
6Cantique de Matisse est de ces « expériences d’un faire-œuvre ensemble13 ». La préposition « de», contenue dans le titre, suggère d’emblée que le peintre participe à son écriture, ceci se vérifie notamment dans la présence plastique de toiles et dessins de Matisse au côté du texte puis dans une « interpicturalité citationnelle ou allusive14 », sorte d’« effet-tableau15 » produit par l’écriture. Il est surtout possible d’identifier de nombreux extraits de la correspondance de l’artiste qui se mêlent à l’écriture : « J’ai fait parler Matisse lui-même […] en essayant de faire parler Matisse, j’ai essayé de trouver ce qu’il pouvait y avoir de commun entre ce grand maître et moi16 » confie M. Butor. Ce Cantique de Matisse serait donc chanté « par » le plasticien qui pourtant ne sera pas seul soliste car la voix de M. Butor s’en mêle à l’octave, parfois à l’unisson. Serait-il un "culte" rendu et non déguisé au grand maître de Cimiez, comme aimait à le désigner Aragon. « Oui bien sur c’est un hommage à Matisse17 ! » reconnaît à l’évidence M. Butor lorsqu’on l’interroge. « Peut-on dire que Cantique de Matisse est en quête d’une harmonie entre texte et image, entre verbal et visuel ? » lui demandons-nous, certes un peu naïvement au regard de son œuvre : « Evidemment, il faut s’arranger que tout ça aille ensemble18 » répond l’auteur presque amusé, sur ce même ton de l’évidence. On aurait tort, pensons-nous, de compliquer ce que M. Butor considère avec tant de simplicité, cette « sorte de totalité scripturale-picturale19 », pourtant, il faut bien disséquer les ressorts de cette cohabitation pour comprendre comment, parfois, s’abolissent sans choc de forme les frontières entre les arts. À cet égard, on comprend mieux pourquoi Cantique de Matisse est paru dans la collection Carnets d’Ateliers des éditions Virgile, qui s’est fixée pour tâche de : « réfléchir sur la nature de l’espace innommé qui naît de cette relation entre la poésie et la peinture, et qui s’étend entre le trait et le mot qui l’expriment au-dehors20 ». Pour bien cerner cet « espace innommé », il convient tout d’abord de discerner « l’architecture » et la « composition21 », termes chers à Matisse, de ce petit ouvrage dont les apparences sont trompeuses.
Première de couverture de Cantique de Matisse de Michel Butor, Ed. Virgile, Daniel Legrand éditeur, 2006 représentant Nature morte aux grenades d’Henri Matisse, Huile sur toile, 1947, 80,5 x 60 cm, musée Matisse, Nice. (avec l’aimable autorisation des Héritiers Matisse)
7Cantique de Matisse fait état d’une coprésence texte-image tout à fait intentionnelle et élaborée où transtextualité et transpicturalité s’avèrent d’une grande richesse. La première de couverture propose la reproduction couleur de Nature morte aux grenades placée juste sous le titre de l’œuvre, lui-même en lettres colorées. Un titre en couleur, voilà un fait qui n’est certainement pas dû au hasard : « Cantique de » est inscrit en gris, couleur qui répond à celle de la tranche verticale qui scinde quasiment le tableau en deux ; le nom de « Matisse » apparaît en rouge et fait écho à la couleur de certains objets de la toile juste en dessous : table, siège, volet et grenade coupée en deux. Cette harmonisation colorée du titre et du tableau crée un ensemble homogène qui entrecroise et assimile d’emblée verbal et visuel. Toutefois, le nom du plasticien en rouge se trouve mis à l’honneur, non seulement par cette couleur connue pour capter voire "exciter" le regard, mais aussi par la typographie, la police étant de taille bien supérieure. Le nom de l’auteur, « Michel Butor », se trouve sobrement écrit en noir en tête de couverture. Ce soin apporté au paratexte correspond sans nul doute à la norme éditoriale qui donne la parole et la primeur à l’artiste peintre, car deux années après Cantique de Matisse, M. Butor est publié aux mêmes éditions Virgile, collection Carnet d’Ateliers avec Dialogue avec Delacroix22; on retrouve en première de couverture ce même souci dans « l’architecture » de la page. À l’intérieur de Cantique de Matisse surviennent d’autres éléments dits paratextuels que M. Calle-Gruber présente ainsi :
Avant que le texte Michel Butor ne fasse son entrée, il y a, de la première de couverture du livre à la page du faux-titre, tel un prologue ou un proscenium, trois pages intermédiaires. L’une porte le seul nom de Matisse ; l’autre un dessin et son intitulé : Grande Tête, Masque, encre 1951. La troisième est vierge. Puis vient la page du faux-titre : Michel Butor, Cantique de Matisse23.
8L’image aurait donc la primeur sur le texte serions-nous tentés d’avancer, si l’on s’en tenait à un cloisonnement des arts que M. Butor déplore. Loin s’en faut, le peintre parle simplement son langage, « l’œuvre est l’émanation, la projection de soi-même24 » susurre le plasticien qui semble tout désigné pour "donner le la". « C’est dire que Matisse précède. Matisse aura été toujours déjà là. Au commencement, écriture-dessin-signature Matisse25 ». En effet, il introduit et conclut, « […] à la fin, c’est encore l’encre de Matisse et non celle de M. Butor qui termine le livre : Tête de Haïtienne, encre 1943 ; Profil d’homme (Aragon), encre 194226 ». L’artiste invite le regard à entrer et le conduit vers la sortie tandis que M. Butor se fait l’observateur ou le commentateur discret de cet ouvrage en construction. Dès lors, le paratexte s’intègre à l’ouvrage pour fonctionner avec lui, véritable iconotexte, cahier d’artiste à explorer du regard. La collection se nomme d’ailleurs « Cahier d’atelier » et nous rappelle, dans la perspective de Bernard Vouilloux, que « pénétrer dans l’atelier, c’est ouvrir le tableau et le texte aux processus de leur fabrication et, dans le même temps, faire accéder le lecteur et le spectateur à la machinerie qui là se découvre27 […] ».
9La visite de « l’atelier rouge » s’opère crescendo dans ce livre. Cantique de Matisse se trouve scindé en quatre parties introduites par des titres évocateurs : – Le fauve tranquille – Les yeux du voyageur – Les caresses de la paix – Les îles de l’âge – À l’intérieur de ces grands chapitres se trouvent des titres28 accompagnés de dates, inscrits en italique, qui se réfèrent à des tableaux et dessins de Matisse. Ceux-ci parsèment le texte suivant une chronologie temporelle précise qui couvre cinquante années, de Notre-Dame au mur violet (1902) à La Tristesse du roi (1952). Le titre donné au tableau, question que M. Butor évoque notamment dans Les mots dans la peinture29, influence il est vrai l’organisation plastique, mais s’avère nécessaire pour identifier le tableau dans les conversations et les recherches. Le titre ne serait-il pas finalement une sorte de « titre-valise » au sens métaphorique du terme ? Quelques mots en effet à transporter partout pour voyager léger avec l’image plastique sur soi, convoquée par le pouvoir intermédial du titre. Dans Cantique de Matisse, ces titres d’œuvres laissent un peu rêveur, pour les connaisseurs des créations de Matisse, ils fonctionneront comme ces « titres-valises » et pourront aisément appeler le visuel, pour d’autres au contraire, ils ne sauraient être compensés car les mots apparaissent là où l’on s’attendait à "voir" Matisse. L’absence des images plastiques pourrait même encourager à lire ces titres en qualité de sous-titres, c’est d’ailleurs ainsi que M. Butor dispose "le premier jet" du « Cantique de Matisse30 » qu’il met en ligne sur son site en 199331. Il numérote en effet ces titres d’œuvres comme des sous-titres et opère ainsi des scansions assumées dans les quatre chants. A cette ébauche, il ajoute des « suggestions pour illustration » et précise clairement :
L’idéal naturellement, c’est d’avoir une double page pour chaque œuvre étape qui doit obligatoirement être reproduite en couleurs. En outre, pour donner idée de l’extraordinaire acharnement qui se cache sous l’apparente facilité de Matisse, j’aimerais que chacune soit accompagnée d’une ou deux autres en plus petit, dont la plupart seraient en noir et blanc.
10La présence des images plastiques est à cette époque en projet au côté du texte, l’auteur renvoie même les lecteurs de cette esquisse de « Cantique de Matisse » aux reproductions des œuvres dans le Matisse32 de Pierre Schneider. Ce vœu n’est pas réalisé dans le livre qui nous intéresse et pour cause :
Le texte a d’abord été fait pour Télérama et ensuite il y a eu une petite édition du texte tout seul, là il n’était pas possible d’avoir les reproductions des images originelles, donc l’éditeur a mis un ou deux dessins de Matisse pour suppléer à l’absence des images véritables33.
11À l’origine en effet, un premier « Cantique de Matisse » a vu le jour dans le Télérama Hors-série34 et les « suggestions pour illustrations » sont en fait adressées à Michelle Gazier, chroniqueuse de la revue. Cette version doit être prise en compte car sinon l’on risque de mal interpréter l’ouvrage éponyme édité treize ans plus tard. En effet, dans la revue de 1993 consacrée à Matisse, M. Butor rédige ces quatre chants qu’il entremêle aux images de Matisse selon son désir initial, le peintre occupant un espace considérable sur chaque page.
Première page de « Cantique de Matisse » in Télérama Hors-série/Matisse, février 1993, p. 8 comportant en haut « Notre-Dame au mur violet (1902) » mentionné par M. Butor soit Vue de Notre-Dame, Huile sur toile, 1914, 147,3 x 94,3 cm, , MOMA New-York. Un pastel de Notre-Dame de 1900 figure en bas de page (avec l’aimable autorisation de Télérama).
12Toutes les œuvres, que le livre Cantique de Matisse de 2006 se contente de convoquer par leur titre, se trouvent dans l’article éponyme initial. Les contraintes liées aux droits de reproduction seraient donc la seule raison de leur terrible absence dans l’ouvrage.
Seconde page de « Cantique de Matisse » in Télérama Hors-série/Matisse, février 1993, p. 9 comportant en haut « Autoportrait (1906) » mentionné par M. Butor soit Autoportrait d’Henri Matisse, huile sur toile, 1906, 55 x 46 cm, Statens Musem for Kunst, Copenhague. Un autoportrait de 1934-35 figure en bas de page (avec l’aimable autorisation de Télérama)
13Que dire alors de ces dix autres œuvres35 de Matisse en noir et blanc présentes dans le livre ? Elles ne seraient là que pour « suppléer à l’absence des images véritables ». Cette perspective engage alors à la méfiance quant à l’analyse de l’ouvrage Cantique de Matisse : d’une part, il faudra tenir compte de la charge plastique des titres de toiles pour réactiver les images au fil de la lecture ; d’autre part, il conviendra de considérer les reproductions plastiquement présentes dans l’ouvrage comme des images "suppléantes" placées par l’éditeur et destinées à remplacer, à compenser le manque des premières. Finalement, l’analyse nous impose d’avoir recours au premier « Cantique de Matisse » paru dans le Télérama Hors-série pour appréhender la co-présence texte-image telle que l’a conçue M. Butor ab initio. On se demande donc ce qui différencie ces deux cantiques dont le second ne serait que la reproduction textuelle du premier. La version livre se distingue nettement car elle s’enrichit de passages ajoutés à la fin de chaque chant et numérotés de un à quatre selon cette formule : « échappées vers le jardin des Hespérides ». Collées au « Cantique de Matisse », ces « échappées » sont également tirées d’une revue, Travioles n° 5, dans laquelle M. Butor a écrit en 2001 « Vers le jardin des Hespérides, Matisse au Maroc36 », article agrémenté de photographies d’Adélaïde Alba.
14L’œuvre de M. Butor est décidemment placée sous le signe du labyrinthe et le lecteur-spectateur est invité à trouver seul la clef, mis à contribution dans un travail de reconstitution parfois laborieux. L’auteur "caméléon" est en effet coutumier de ces assemblages a posteriori, comme dans ses volumes Illustrations qui rassemblent des textes « orphelins de l’œuvre-support », issus de ces collaborations qui entrent tout à coup « dans une famille textuelle37 » sans leurs images plastiques. M. Butor tisse son œuvre au fil des rencontres et des sollicitations de toutes sortes, il est de ceux qui ne jouent pas de leur notoriété et aiment collaborer sans distinction, y compris dans des revues dite "grand public" comme Télérama. Ainsi, lorsque les éditions Virgile sollicitent M. Butor pour un numéro consacré à Matisse, celui-ci pioche naturellement dans cette réserve de textes et d’images précédemment publiée dans différentes revues, le poète assemble et ré-harmonise la nouvelle partition Cantique de Matisse. L’ouvrage est de ces « montages-collages » à décrypter, une étape nécessaire pour en saisir la portée et restituer au côté du « texte orphelin » le regard de Matisse. Le jeu intertextuel et intermédial qui se déploie dans l’écriture de Butor ne simplifie guère le système. En dehors de Matisse, le texte convoque et reconvoque des images picturales plastiquement absentes, il y a, comme le dit l’auteur avec poésie « les tableaux encadrés ou non38 » :
Portrait de Balthazar Castiglione de Raphaël - Narcisse de Poussin - Christ mort de Philippe de Champaigne - une nature morte de David de Heem – Raie de Chardin – La grande Odalisque d’Ingres etc.
15De même, la correspondance du peintre est conviée, désirée par le texte, par bribes, explicitement citée avec Notes d’un peintre et Jazz. De même, Au Maroc de Loti, Voyage en Orient de Nerval, La vie antérieure de Baudelaire, Paludes de Gide, Don du poème de Mallarmé traversent l’écriture, parcourue d’extraits poétiques. Le premier Livre des Rois, tiré de l’Ancien-Testament, est également reconnaissable avec le personnage de David, des titres d’ouvrages apparaissent ainsi que des noms propres (Gustave Moreau, Sisley, Delacroix etc.). Il s’agit bien d’un « dispositif », sorte de « montage-collage39 » dont l’effet d’emboîtement dépasse de loin la brièveté de l’ouvrage. Cantique de Matisse est un véritable feu d’artifice d’images et de mots. Comme dans cet autre hommage à Matisse de Louis Aragon, tout s’organise aussi autour d’une « intertextualité organisatrice de l’essentielle polyphonie du livre40 ». Cette dernière s’avère nécessaire car l’entreprise est de taille, imaginer « la vie sensible de Matisse41 » souligne le péritexte éditorial en quatrième de couverture de Cantique de Matisse.
Quand Butor chante l’ineffable
16Il faut revenir aux images de Matisse car elles sont constitutives du premier « Cantique de Matisse » qui s’organise avec et autour d’elles dans le Télérama. Lorsque nous interrogeons M. Butor sur ce qui a guidé le choix des images, celui-ci répond sans hésitation :
j’ai choisi, donc, pour cette première parution un certain nombre d’œuvres de Matisse que j’aimais et qui m’ont semblé indiquer à peu près le trajet de Matisse depuis le début jusqu’à la fin42.
17Il confesse ici son désir de raconter Matisse au fil de l’œuvre, sorte de biographie poétique et visuelle qui donne toute primeur au regard. Le choix de M. Butor est également conduit par l’amour de l’œuvre, critère d’autant plus respectable que « sans cet amour » dit Matisse, « il n’y a plus de critères d’observation donc il n’y a plus d’œuvre d’art43 ». Il faut donc regarder aux images choisies, "titres-tableaux" in absentia dans le corps du texte de Cantique de Matisse 2006, compensées par ces reproductions noir et blanc in presentia. Si l’on considère la totalité des œuvres de Matisse, le système semble obéir à une logique d’emboîtement, et pour reprendre un motif symbolique cher à Matisse exploité par M. Calle-Gruber, « ces tableaux en titres » ouvrent des fenêtres successives dont celle d’origine pourrait être celle du tableau en couverture. En effet, représentée dans Nature-morte aux grenades, le motif de la fenêtre est à l’origine d’un phénomène d’ouverture en cascade, "fenêtre sur fenêtre", "tableaux sur tableaux" au fil de la narration dans un effet d’enchâssement iconographique. À l’intérieur de ces quatre chants s’ouvrent des fenêtres textuelles sur des morceaux de vie de l’artiste. Pourquoi d’ailleurs ne pas parler d’actes pour permettre aux voix de trouver leur place dans cet opéra donné pour Matisse. L’écriture se situerait volontiers dans une approche contrapuntique44, superposant des lignes mélodiques distinctes à l’horizontale afin d’atteindre, in fine, à la verticale, l’harmonie de la partition. Le « je » du texte s’exprime sur le mode canonique au côté des images du peintre qui participent activement à « chercher la musique et la danse, trouver l’équilibre et éviter le conventionnel45 », selon la formule de Matisse.
L’écriture fera donc chorus (chœur) avec la peinture. « Cantique de Matisse », c’est à la fois le chant à la gloire du dessin et de la lumière qui émane de l’œuvre du peintre et le chant que Michel Butor compose à la gloire de la peinture Matisse46.
18L’harmonie est telle que le "lecteur-spectateur-auditeur" s’y perd volontiers jusqu’à ne plus reconnaître son soliste. Parfois même, on touche au chant diphonique47 avec deux sons en une seule voix. Matisse composerait le son grave, le fond du chant, et M. Butor, le son plus plus aigu dit « harmonique » pour former la mélodie. La polyphonie s’enrichit avec le flot de voix en intertexte qui accompagnent à l’octave ce chant diphonique. L’image constitue finalement la toile de fond de cette partition, « l’harmonie » du texte prend son essor en se frottant à l’image, en puisant dans la personne de Matisse l’énergie créatrice contenue dans ses créations : « mes dessins et mes toiles sont des morceaux de moi-même. Leur ensemble constitue Henri Matisse48 ». Finalement, l’écriture de M. Butor ne cherche pas la musicalité mais la reçoit. « Je montre le bout de l’œil ou le bout de l’oreille dans chacune de ces phrases49 » dit l’auteur à propos de son Cantique. L’aspect mélodique du texte d’ailleurs n’est plus explicitement formel mais se situe ailleurs, dans la perspective définie par Etienne Souriau dans son précieux dictionnaire de Vocabulaire d’esthétique :
MUSIQUE
3 / Sens étendu (qualitatif)
En littérature, la musique des vers est l’ensemble des modulations de leurs qualités sonores […] On parle surtout de musique quand cet ensemble est doux, harmonieux, nuancé, a du charme et donne une impression d’ineffable50 ; […]
19Il s’agit en effet de donner cette « impression d’ineffable » et ce en tissant la parole poétique au gré des toiles du maître. Quand certains cherchent à raconter Matisse et ne trouvent pas les mots pour le dire, M. Butor se met à chanter, exercice qui lui est par ailleurs familier. N’oublions pas le message sémantique contenu dans le titre. "Cantique" désigne en effet un chant religieux d’actions de grâce inspiré du Cantique des Cantiques de Salomon dont M. Butor reproduit le modèle.
« Que tu es belle, Héloïse ma mère, ton souffle a le parfum d’un verger » [...] Que tu es belle, Amélie, mon épouse ! ton nombril est une coupe de vin toujours pleine. […] Que tu es belle, Terpsichore, mon inspiratrice ! Tes cheveux sont un troupeau de chèvres ondulant sur les pentes. […] Que tu es belle, Marguerite, ma fille ! tes dents sont un troupeau de brebis tondues qui remontent du bain51.
20Ces phrases, dont la mélodie se calque sur le Cantique des cantiques, se trouvent isolées typographiquement et résonnent comme des rengaines langoureuses, voici le rythme qui manquait enfin donné. Au nombre de quinze, ces doux refrains s’adressent à chaque fois à une femme différente selon le principe de l’exclamation directe, tous sont structurés à l’identique. À la fin de chaque tableau, un autre moment rythmique répond au premier avec un autre refrain sorti de la bouche du peintre : « le texte est fait de cellules si vous voulez » précise M. Butor, « chacune est autour d’un tableau dont il y avait la reproduction et dans chacune il y a une femme qui apparaît, une femme que je lie au Cantique des Cantiques52 ». Ces femmes, ce sont les modèles de Matisse. Le cantique s’élève et atteint le lieu interdit réservé aux Dieux dans ces « échappées vers le jardin des Hespérides » qui closent chacun des quatre actes. Le spectateur-lecteur, avec M. Butor, doit se mettre au diapason et ouvrir grandes ses oreilles pour toucher à cet espace sacré où vit Matisse. Comme dans le Cantique des cantiques, le sacré et l’amour se trouvent réconciliés dans Cantique de Matisse pour atteindre ce « sentiment pour ainsi dire religieux que je possède de la vie53 » disait le maître de Cimiez.
21Dans Cantique de Matisse, littérature, peinture et musique n’ont nul besoin de revendiquer la légitimité de leur cohabitation. « "Cantique de Matisse", c’est à la fois le chant à la gloire du dessin et de la lumière qui émane de l’œuvre du peintre et le chant que Michel Butor compose à la gloire de la peinture Matisse54 ». Cette harmonie réalisée, Baudelaire l’a nommée « correspondances » affirmant que « les arts aspirent, sinon à se suppléer l’un l’autre, du moins à se prêter réciproquement des forces nouvelles55 ». Il est une œuvre à laquelle nous pensons en lisant Cantique de Matisse : celle de Louis Aragon, Henri Matisse, Roman56; et M. Butor de répondre à notre comparaison avec sa modestie habituelle : « En beaucoup plus court… je suis très flatté. Evidemment, mon texte est beaucoup plus modeste57 ». Certes, face à l’envergure d’Henri Matisse, roman, deux tomes de 350 pages chacun, se trouve l’ouvrage concis de M. Butor, 60 pages tout au plus ; d’un côté le « bouquet d’artifice », le « désordre58 » formel confessé du livre d’Aragon, de l’autre un cantique qui, même s’il se situe dans un entre-genre, obéit à une structure bien précise, « hors catégorie mais non sans règles59 ». Cette apparente opposition ne saurait toutefois faire oublier à ceux qui cherchent Matisse que ces deux mystérieux ouvrages s’approchent du grand maître avec une sincérité qu’il chérissait. Dans ces deux ouvrages atypiques, le spectateur-lecteur est en effet invité à percevoir au-delà de la signification du texte, dans ce qu’Yves Bonnefoy nomme « ce surcroît de l’aspect sensible, sensoriel » des mots et des images, là où « la signification se dissipe dans la présence60 ».
Notes de bas de page numériques
1 Michel Butor, Improvisations sur Michel Butor, La Différence, 1993, p. 245.
2 Régis Debray, Vie et mort de l'image, Gallimard, 1992, coll.Folio essais, n° 261, p. 68.
3 Nous nous référons ici à la distinction faite par Bernard Vouilloux entre "texte-image" et "verbal-visuel" in « Texte et image ou verbal et visuel ? » in Texte/Image, Nouveaux problèmes, Actes du Colloque international, sous la direction de Liliane Louvel et Henri Scepi (Cerisy-la-Salle, 23-30 août 2003), Presses Universitaires de Rennes, 2005, p. 17-31 : « Le véritable enjeu des études sur le texte et l’image se trouve ailleurs que dans la sphère des relations existant entre certains objets culturels possédant un statut artistique : les problèmes que posent ces relations ne peuvent trouver les conditions de leur résolution que s’ils sont situés à leur niveau et inscrits non plus seulement dans le cadre artistique et esthétique de la littérature et de la peinture, mais dans le cadre sémiotique et anthropologique du verbal et du visuel. », même ouvrage, p. 28.
4 Mireille Calle-Gruber, « Matisse chez M. Butor, comment la littérature offre l’hospitalité à la peinture », dossier thématique La conférence des arts : de la littérature aux arts visuels, et retour organisé par Henri de Rohan-Csermak, chef du département Arts et culture du CNDP, en ligne sur le site Présence de la littérature : http://www.cndp.fr/presence-litterature/fileadmin/fichiers/Litterature_et_arts_visuels/Matisse_chez_Butor.pdf, p. 7.
5 Michel Butor, Cantique de Matisse, Éd. Virgile, Daniel Legrand éditeur, 2006, coll. Carnet d’Ateliers.
6 Mireille Calle-Gruber, Michel Butor. Déménagements de la littérature, actes du colloque de la BNF/Paris III, Presses Sorbonne Nouvelle, 2008, p. 9.
7 Mireille Calle-Gruber, Michel Butor. Déménagements de la littérature, actes du colloque de la BNF/Paris III, Presses Sorbonne Nouvelle, 2008, p. 10.
8 Mireille Calle-Gruber, Michel Butor. Déménagements de la littérature, actes du colloque de la BNF/Paris III, Presses Sorbonne Nouvelle, 2008, p. 3.
9 Cf. Nouvelle traduction de la Bible, La Bible, Paris, Éd. Bayard, 2001.
10 Michel Butor, Quant au livre, Tryptique en l’honneur de Gauguin, Bibliothèque nationale de France, 2000, p. 36.
11 Michel Butor et Enrique Zañartu, Rencontre, Paris, Éd. du Dragon, 1962.
12 Lucien Giraudo, Michel Butor, le dialogue avec les arts, Presses Universitaires du Septentrion, 2006, coll. « perspectives », p. 77.
13 Lucien Giraudo, Michel Butor, le dialogue avec les arts, Presses Universitaires du Septentrion, 2006, coll. « perspectives », p. 189.
14 Liliane Louvel, Texte/image, Images à lire, textes à voir, Presses Universitaires de Rennes, 2002, p. 156.
15 Selon Liliane Louvel, « l’effet-tableau » est le « résultat du surgissement dans le récit d’images-peintures, produit un effet de suggestion si fort que la peinture semble hanter le texte en l’absence même de toute référence directe soit à la peinture en général soit à un tableau en particulier. » in Liliane Louvel, Texte/image, Images à lire, textes à voir, Presses Universitaires de Rennes, 2002, p. 34.
16 Michel Butor s’explique sur Cantique de Matisse après lecture d’un passage lors de la conférence « Mêler les genres, la littérature migratoire », jeudi 4 novembre 2009, invité par Mireille Calle-Gruber au séminaire « Littérature et Arts, Passages et Hospitalités entre les œuvres », Centre de recherches en Etudes Féminines & de genres et littérature francophone, Paris III, Sorbonne Nouvelle, en ligne sur http://vimeo.com/7685694
17 Entretien de Michel Butor réalisé par Micéala Symington le 22 février 2012, questions préparées par Alexandra Masini-Beausire à l’intention de l’auteur sur Cantique de Matisse.
18 Entretien de Michel Butor réalisé par Micéala Symington le 22 février 2012, questions préparées par Alexandra Masini-Beausire à l’intention de l’auteur sur Cantique de Matisse.
19 Nous reprenons ici l’expression « totalité scripturale-picturale » utilisée par Béatrice Bonhomme in « Ville et Archéologie chez Michel Butor et Henri Maccheroni », Loxias-Colloques, Voyage en écriture avec Michel Butor, Le pas du texte, 15 décembre 2011, URL : http://revel.unice.fr/symposia/actel/index.html?id=318 .
20 Cf. Le site des éditions Virgile : http://www.editions-virgile.com/collection-carnet.html
21 Les termes « composition » et « architecture » sont utilisés par Matisse pour désigner son travail d’illustration des livres in chapitre « Comment j’ai fait mes livres », H. Matisse, Écrits et propos sur l'art, Paris, Éd. Hermann, éditeurs des sciences et des arts, 2004, coll. Savoir sur l’Art.
22 Michel Butor, Dialogue avec Delacroix, Editions Virgile, 2008, coll. Carnet d’Ateliers.
23 Mireille Calle-Gruber, « Matisse chez M. Butor, comment la littérature offre l’hospitalité à la peinture », dossier thématique La conférence des arts : de la littérature aux arts visuels, et retour organisé par Henri de Rohan-Csermak, chef du département Arts et culture du CNDP, en ligne sur le site Présence de la littérature : http://www.cndp.fr/presence-litterature/fileadmin/fichiers/Litterature_et_arts_visuels/Matisse_chez_Butor.pdf, p. 6.
24 André Verdet, Prestiges de Matisse, Édition originale parue chez Emile-Paul en 1952 avec couverture et vignette composées par Matisse, Pagine Arte, 2011, p. 47.
25 Mireille Calle-Gruber, « Matisse chez M. Butor, comment la littérature offre l'hospitalité à la peinture », dossier thématique La conférence des arts : de la littérature aux arts visuels, et retour organisé par Henri de Rohan-Csermak, chef du département Arts et culture du CNDP, en ligne sur le site Présence de la littérature : http://www.cndp.fr/presence-litterature/fileadmin/fichiers/Litterature_et_arts_visuels/Matisse_chez_Butor.pdf, p. 6.
26 Mireille Calle-Gruber, « Matisse chez M. Butor, comment la littérature offre l'hospitalité à la peinture », dossier thématique La conférence des arts : de la littérature aux arts visuels, et retour organisé par Henri de Rohan-Csermak, chef du département Arts et culture du CNDP, en ligne sur le site Présence de la littérature : http://www.cndp.fr/presence-litterature/fileadmin/fichiers/Litterature_et_arts_visuels/Matisse_chez_Butor.pdf, p. 6.
27 Bernard Vouilloux, Un art de la figure, Francis Ponge dans l’atelier du peintre, Villeneuve d’Ascq, Presses Universitaires du Septentrion, 1998, p. 59.
28 Notre-Dame au mur violet (1902) – Autoportrait (1906) – La musique et la danse (1910) – L’atelier rouge (1911) – Tryptique marocain (1912) – Le café arabe (1913) – Porte-fenêtre à Collioure (1914) – Intérieur au violon (1918) – Les deux odalisques (1921) - La danse de Mérion (1932) – Nu rose assis (1935) – Le rêve (1940) – Polynésie (1946) – La chapelle de Vence (1950) – La Tristesse du roi (1952).
29 Michel Butor, Les mots dans la peinture, Éditions d’Art Albert Skira S.A, Les sentiers de la création, 1969, coll. « Champs ».
30 Cf. Dictionnaire Butor en ligne dirigé par Henri Desoubeaux in http://henri.desoubeaux.pagesperso-orange.fr
31 Nous supposons que ce premier jet de « Cantique de Matisse » date de 1992-93, il est antérieur mais proche de la parution de l’article dans Télérama en 1993. Henri Desoubeaux a pu nous confirmer cette hypothèse.
32 Pierre Schneider, Matisse, Paris, Éd. Flammarion, nouvelle édition 2002.
33 Entretien de Michel Butor réalisé par Micéala Symington le 22 février 2012, questions préparées par Alexandra Masini-Beausire à l’intention de l’auteur sur Cantique de Matisse.
34 M. Butor, « Cantique de Matisse », Télérama hors-série/Matisse, février 1993, p. 8-19.
35 Les œuvres disposées dans Cantique de Matisse, en noir et blanc, sont, dans leur ordre d’apparition : Grande tête, Masque – Henri Matisse gravant – Portrait de Madame Matisse – Paysage de Collioure – Odalisque au coffret rouge – Papeete-Tahiti – Sainte Face - Le Voile de Véronique – Tête de Haïtienne – Profil d’homme (Aragon).
36 Michel Butor, « Vers le jardin des Hespérides, Matisse au Maroc », pour Philippe Cardinal, Travioles, n°5, été-automne 2001, photographie d’ Adélaïde Alba, p. 39-48.
37 Lucien Giraudo, Michel Butor, le dialogue avec les arts, Presses Universitaires du Septentrion, 2006, coll. « perspectives », p. 127.
38 Michel Butor s’explique sur Cantique de Matisse après lecture d’un passage lors de la conférence, « Mêler les genres, la littérature migratoire », jeudi 4 novembre 2009, invité par Mireille Calle-Gruber au séminaire « Littérature et Arts, Passages et Hospitalités entre les œuvres », Centre de recherches en Etudes Féminines & de genres et littérature francophone, Paris III, Sorbonne Nouvelle, en ligne sur http://vimeo.com/7685694
39 Termes utilisés par M. Calle-Gruber pour qualifier Cantique de Matisse in « Matisse chez M. Butor, comment la littérature offre l’hospitalité à la peinture », dossier thématique La conférence des arts : de la littérature aux arts visuels, et retour organisé par Henri de Rohan-Csermak, chef du département Arts et culture du CNDP, en ligne sur le sitePrésence de la littérature : http://www.cndp.fr/presence-litterature/fileadmin/fichiers/Litterature_et_arts_visuels/Matissechez_Butor.pdf, p. 7-8.
40 Dominique Vaugeois, L'épreuve du livre. Henri Matisse, roman d'Aragon, Lille, Presses Universitaires du Septentrion, 2002, p. 27.
41 Cf. Quatrième de couverture de Cantique de Matisse de M. Butor.
42 Entretien de Michel Butor réalisé par Micéala Symington le 22 février 2012, questions préparées par Alexandra Masini-Beausire à l’intention de l’auteur sur Cantique de Matisse.
43 Cf. « Le rapport des couleurs c’est la parenté des choses, c’est le langage commun ; le rapport c’est l’amour, oui, l’amour. Sans ce rapport, sans cet amour, il n’y a plus de critères d’observation donc il n’y a plus d’œuvre d’art » in André Verdet, Prestiges de Matisse, édition originale parue chez Emile-Paul en 1952 avec couverture et vignette composées par Matisse, Pagine Arte, 2011, p. 76.
44 Nous pensons ici à la discipline musicale du « contrepoint ».
45 Matisse évoque les difficultés de créations de son livre Jazz in André Verdet, Prestiges de Matisse, édition originale parue chez Emile-Paul en 1952 avec couverture et vignette composées par Matisse, Pagine Arte, 2011, p. 71-72.
46 Mireille Calle-Gruber, « Matisse chez M. Butor, comment la littérature offre l'hospitalité à la peinture », dossier thématique La conférence des arts : de la littérature aux arts visuels, et retour organisé par Henri de Rohan-Csermak, chef du département Arts et culture du CNDP, en ligne sur le site Présence de la littérature : http://www.cndp.fr/presence-litterature/fileadmin/fichiers/Litterature_et_arts_visuels/Matisse_chez_Butor.pdf, p. 5.
47 Le chant diphonique est aussi appelé aussi chant harmonique ou chant de gorge. Cette technique de chant permet à une seule personne de produire deux sons simultanés d’une seule voix.
48 André Verdet, Prestiges de Matisse, édition originale parue chez Emile-Paul en 1952 avec couverture et vignette composées par Matisse, Pagine Arte, 2011, p. 47.
49 Michel Butor s’explique sur Cantique de Matisse après lecture d’un passage lors de la conférence, « Mêler les genres, la littérature migratoire », jeudi 4 novembre 2009, invité par Mireille Calle-Gruber au séminaire « Littérature et Arts, Passages et Hospitalités entre les œuvres », Centre de recherches en Études Féminines & de genres et littérature francophone, Paris III – Sorbonne Nouvelle, en ligne sur http://vimeo.com/7685694
50 Cf. Définition du terme Musique, I La notion de musique in Etienne Souriau, Vocabulaire d’esthétique, Presses Universitaires de France, 1990.
51 Michel Butor, Cantique de Matisse, Éd. Virgile, Daniel Legrand éditeur, 2006, coll. Carnets d’Ateliers, pp. 12, 15, 16, 18, 22.
52 Entretien de Michel Butor réalisé par Micéala Symington le 22 février 2012, questions préparées par Alexandra Masini-Beausire à l’intention de l’auteur sur Cantique de Matisse.
53 Matisse est cité par Jean-Marie Le Clézio in « Matisse, le joyeux démiurge », Télérama hors-série/Matisse, février 1993, p. 44.
54 Mireille Calle-Gruber, « Matisse chez M. Butor, comment la littérature offre l'hospitalité à la peinture », dossier thématique La conférence des arts : de la littérature aux arts visuels, et retour organisé par Henri de Rohan-Csermak, chef du département Arts et culture du CNDP, en ligne sur le site Présence de la littérature : http://www.cndp.fr/presence-litterature/fileadmin/fichiers/Litterature_et_arts_visuels/Matisse_chez_Butor.pdf
55 Charles Baudelaire, Œuvres complètes in chapitre I, « L’art romantique », Paris, Éd. Calmann Lévy, 1885.
56 Louis Aragon, Henri Matisse, roman, 2 tomes, Gallimard, 1971.
57 Entretien de Michel Butor réalisé par Micéala Symington le 22 février 2012, questions préparées par Alexandra Masini-Beausire à l’intention de l’auteur sur Cantique de Matisse.
58 Louis Aragon, Henri Matisse, roman, Gallimard, 1971, tome I, p. 1.
59 Mireille Calle-Gruber, « Matisse chez M. Butor, comment la littérature offre l'hospitalité à la peinture », dossier thématique La conférence des arts : de la littérature aux arts visuels, et retour organisé par Henri de Rohan-Csermak, chef du département Arts et culture du CNDP, en ligne sur le site Présence de la littérature : http://www.cndp.fr/presence-litterature/fileadmin/fichiers/Litterature_et_arts_visuels/Matisse_chez_Butor.pdf, p. 5.
60 Yves Bonnefoy, « Peinture, poésie : vertige, paix », in Derrière le miroir, n°213, mars 1975, p. 76.
Pour citer cet article
Alexandra Masini-Beausire, « Quand Butor chante : Cantique de Matisse », paru dans Loxias, Loxias 38., mis en ligne le 20 septembre 2012, URL : http://revel.unice.fr/loxias/index.html/lodel/docannexe/file/7601/%20http:/www.lefigaro.fr/flash-eco/2015/06/02/index.html?id=7194.
Auteurs
Alexandra Masini-Beausire travaille dans l’enseignement supérieur comme professeur de Lettres dans le privé. Après des études de Lettres modernes interrompues par trois années en école supérieure de théâtre, elle achève actuellement une thèse de littérature à la Sorbonne intitulée Littérature et arts plastiques – entre écriture et image, la représentation à l’œuvre dans la littérature contemporaine, Antonia Susan Byatt, Peter Handke, Tracy Chevalier, Louis Aragon et Michel Butor sous la direction de Micéala Symington. Membre de la SFLGC. Ses recherches et publications s’inscrivent dans un esprit comparatiste interdisciplinaire qui souhaite analyser les connexions profondes entre texte et image chez des contemporains de différents pays. Ces derniers réactivent à leur manière le conflit qui pèse sur le vieil adage d’Horace « Ut pictura poesis erit » et participent à la réévaluation de l’éternel problème de la relation entre les arts en reposant autrement la question même de leur hiérarchie.