Sciences et Fictions |  Rudyard Kipling et l'enchantement de la technique | Session 3 

Éric Picholle  : 

Aux fils de Marthe, une littérature avec des boulons ?

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Texte intégral

Here’s my wisdom for your use, as I learned it when the moose

And the reindeer roamed where Paris roars to-night : —

“There are nine and sixty ways of constructing tribal lays,

“And-every-single-one-of-them-is-right !”1

Rudyard Kipling sait jouer de la nostalgie d’un monde plus simple, où science et technique n’auraient guère leur place. Purement absentes du Livre de la jungle, elles sont symbolisées dans Puck, lutin de la colline (Puck of Pook’s Hill, 1906)par l’intrusion du métal — celui par exemple du fer à cheval, qui protège contre les innocentes malices du “petit peuple”.

Héritée des Romantiques du XIXe siècle plus que de Shakespeare, cette lecture antiscientifique de la magie se fait plus ambivalente dans les textes pour adultes de Kipling. Ainsi, le recueil Rewards and Fairies (1910) juxtapose sous le même titre de «Cold Iron» un conte de l’impuissance de Puck devant la malédiction du collier d’esclavage forgé par Thor, et un poème disant la détresse d’un noble chevalier face à l’irrésistible modernité du canon2 :

For Iron — Cold Iron — is master of men all.

Le retard technique ou l’inculture scientifique ne sont pas des péchés. Si Kipling se moque gentiment des habitants du « Village qui vota que la Terre était plate » (« The Village that Voted the Earth Was Flat », 1913), prêts à toutes les inepties pour un banquet gratuit (« Huckley a voté comme il fallait. Ne vous y trompez pas : pas de vote, pas de dîner »),il réserve sa vindicte à la bêtise informée et autosatisfaite (ici, l’édile qui ne voit dans l’automobile qu’une occasion nouvelle d’imposer des règlements arbitraires ; mais aussi bien, ailleurs, l’érudit qui oublie de voir le monde3).

Il n’y a pour lui rien de blâmable en soi à traverser la vie « endormi, sans même se douter »4 de la somme d’intelligence et de travail qui la rendent si confortable dans une société technique — pourvu que d’autres s’en soient chargés. S’il y a en effet les “fils de Marie”5, qui ont peu de souci « car eux ont hérité de la bonne part», il y a aussi les héritiers de sa sœur Marthe, dont un poème fameux martèle la rude responsabilité. Dans la modernité du jeune XXe siècle, «Les Fils de Marthe» distingue les techniciens, les vaillants spécialistes qui affrontent les rigueurs du monde, « en supportent les coups et en amortissent les chocs ».

Mauvais genre

L’allégorie admet toutefois une lecture plus académique. En réaction à l’encyclopédisme des Lumières, le XIXe siècle avait été celui de la séparation artificielle entre “littéraires” et “scientifiques”, avec le fatal éclatement des universités en facultés “des lettres” vs. “des sciences”. Dépositaires de la “bonne part” spirituelle, les premiers entendaient reléguer la technique dans un rôle ancillaire. D’un point de vue artistique, ceux, nombreux, qui ne renoncent pas à en intégrer les symboles dans leurs histoires sont progressivement relégués aux marges de la littérature, sous l’étiquette péjorative d’auteurs “populaires”, voire vulgaires.

Un tel schisme culturel heurte les aspirations unitaires d’un “fils de la veuve”. Franc-maçon à 20 ans, Rudyard Kipling haut n’est pas prêt à renier l’équerre et le compas. Au tout début de sa carrière littéraire, il clame et fort son admiration pour un autre maçon notoire, grand amateur de techniques qui ne s’embarrassait guère des codes de la soi-disant “grande” littérature: Mark Twain. Lors de leur première rencontre, ce dernier « met sur le tapis une question d’équipement intellectuel » :

Ce que j’aime lire, ce sont des faits et des statistiques, de toutes sortes. Ne concerneraient-ils que la culture des radis, ils m’intéressent. À l’instant, je lisais par exemple un article sur “les Mathématiques”. Des maths absolument pures.
Mes propres connaissances mathématiques s’arrêtent à “douze fois douze”, mais j’ai pris un immense plaisir à cet article. Je n’en ai pas compris un traître mot; mais les faits, ou ce qu’un homme pense en être, sont toujours délicieux. Ce type, ce mathématicien, croyait en ses faits. Moi aussi. D’abord, trouvez les faits pertinents, puis — la voix s’éteint dans un bourdonnement presque inaudible — après, vous pouvez les déformer autant que vous voulez6.

C’est « porteur de ce précieux conseil » que Kipling quitte l’Américain. Conscient de sa propre originalité, il entend incarner à son tour la tradition universaliste, inclusive et socialement responsable de la littérature.

En dépit des réticences de certaines élites littéraires7, le public le plébiscite. Cette militance sera récompensée par le prix Nobel de littérature, qui lui est attribué en 1907 « en considération du pouvoir d’observation, de l’originalité de l’imagination, de la virilité des idées et du remarquable talent narratif qui caractérisent les créations de cet auteur mondialement connu ».

L’enchantement de la technique

S’il est sans doute vain de chercher à convertir ceux qu’un préjugé esthétique écarte de toute considération technicienne, il est en revanche possible d’y intéresser ceux —la vaste majorité — auxquels la modernité est juste étrangère. À cette fin, Kipling convoque les techniques narratives éprouvées du merveilleux. La personnification de l’objet technique est particulièrement efficace: demême que les panthères et les ours du Livre de la jungle éprouvent des émotions humaines, la vaillante petite locomotive de «.007», ou la Dimbula, «Le Navire qui trouva sa voix», nous font partager leurs aventures passionnées.

La fable est alors à double détente. Sous l’apologue qui feint de s’intéresser à l’objet pour mieux en tirer une leçon politico-morale — il n’est pas de sot métier et si chacun, à sa place, fait son office, la civilisation triomphera — Kipling instille une dose de curiosité véritable pour la technique : « sténographe de la sensation »8, il propose, paradoxalement, une lecture littérale de l’allégorie9.

L’âme attentive et le cœur inquiet

La même dualité vaut pour ses lecteurs spécialistes. Sans bouder leur plaisir à voir reconnus dans leurs livres et leurs journaux, d’ordinaire plus bégueules, les objets de leurs attentions quotidiennes —vis, boulons, canons, règlements administratifs, calculs— ils y trouvent également des modèles10 et une expression de la morale de leurs corporations. La fierté et la gloire de l’ingénieur kiplingien, c’est l’ouvrage bien faite, l’objet technique efficace derrière lequel il s’efface, rouage modeste et indispensable de toute société moderne11.

L’intention de Kipling est explicite. Lorsque, en 1922, il est sollicité par la société des ingénieurs canadiens pour les aider à se doter d’un rituel, il propose de placer une lecture des «Fils de Marthe» au cœur de leur cérémonie de prestation de serment12. À l’annulaire, complétant la leçon d’humilité de ceux qui « somment les montagnes de se déplacer » et « touchent la Mort au bout de leurs gants où ils tressent et rapiècent les câbles sous tension », ils porteront un jonc de fer que la légende veut récupéré des débris du Pont de Québec, effondré en 1907 —l’un des pires désastres historiques de l’ingénierie du pays…

À ce prix seulement ces anti-héros peuvent-ils se souvenir du vrai « Secret des Machines » : « plus puissantes que les Peuples et les Rois », elle ne sont pourtant « rien de plus que le fruit de leur esprit »13 :

Though our smoke may hide the Heavens from your eyes, It will vanish and the stars will shine again, Because, for all our power and weight and size, We are nothing more than children of your brain !

Héros malgré eux

La Nature, toutefois, ne l’entend pas toujours ainsi. Lorsqu’elle mobilise ses forces (ou celles des dieux qui les personnifient, comme dans «Les Bâtisseurs de ponts») contre le vaillant technicien, celui-ci devient le dernier rempart de la civilisation contre des puissances qui le dépassent. « S’il part, d’autre suivront [car] rien n’est plus contagieux que des rivets qui lâchent »14. Pour les composantes de la Dimbula comme pour Gunga Din, porteur d’eau au cœur de l’escarmouche, une seule ligne de conduite : « en cas de doute, tiens bon » !

Cette esthétique du dernier rempart, de la « fine ligne rouge de héros »15, a inspiré nombre d’auteurs de littérature militaire “sérieuse”, notamment dans le domaine de la science-fiction, où plus qu’ailleurs l’impensable arrive.

L’humour britannique de Kipling, entre litote et hyperbole, understatement et overstatement, lui permet toutefois un traitement plus léger du motif de l’homme ordinaire plongé dans des circonstances extraordinaires. Le “Vaillant petit tailleur”, selon la nomenclature de Robert Heinlein16, se prête aussi bien au récit d’apprentissage qu’à un traitement épique. Kipling mêle volontiers les deux, offrant au spécialiste et au Béotien, aux fils de Marthe comme à ceux de Marie, des niveaux de lecture superposés, complémentaires et mutuellement perméables, qui les réconcilient dans un sentiment commun, tantôt de familiarité, tantôt d’humilité.

Phases normales

Les « choses cachées » dont s’occupent les fils de Marthe, les « sources secrètes » qu’ils cherchent, n’ont rien de métaphorique: c’est «pour les reverser sur les villes assoiffées ». Ce sont des ingénieurs, parfois des explorateurs ou des inventeurs, mais jamais ou presque des “savants”, a fortiori des chercheurs au sens actuel du terme. Ils sont curieux des inventions nouvelles mais s’en tiennent aux connaissances fondamentales bien établies.

Ainsi, en 1887, la même expérience historique de Heinrich Hertz validait définitivement la théorie maxwellienne de l’électromagnétisme (1865) par l’observation des ondes dites “hertziennes” qui inspirent «Sans fil » (1902), et tout à la fois la déstabilisait par la découverte d’un effet photoélectrique, l’une des grandes énigmes physiques de la fin du XIXe siècle17. De ces deux aspects, représentatifs ensemble de la science en marche, Kipling ne retient que le premier, le plus consensuel, et ses applications.

Mieux: lorsque, dans «L’Œil d’Allah», il imagine l’introduction prématurée d’un novum susceptible de remettre en cause les paradigmes dominants de l’Angleterre du XIIIe siècle (en l’occurrence, un microscope emprunté à la science arabe), c’est pour mieux mettre en scène son rejet, son reniement presque, par des esprits pourtant aussi éclairés que celui de Roger Bacon.

La distinction vaut aussi, dans une large mesure, pour les sciences sociales. Là où un H.G. Wells aime à imaginer des peuples qui ont perdu leur histoire, où un Robert Heinlein explorera toutes sortes d’organisations alternatives, Kipling s’attache à décrire des rouages de l’Empire. Il sait en reconnaître et même en dénoncer les imperfections, mais n’en remet jamais véritablement en cause la philosophie politique — qu’on retrouve encore à peine entamée dans «L’Enfance de l’air» même, en dépit des inévitables changements engendrés par l’introduction de transports faciles et relativement bon marché.

Dans le vocabulaire épistémologique de Thomas Kuhn, on pourrait dire que Kipling, comme Verne, ne s’intéresse à la science qu’en “phase normale”. C’est le temps des progrès modestes et de l’effort organisé, non celui des percées intellectuelles héroïques et des conflits d’interprétation, des “révolutions scientifiques”, réelles ou supposées, qui fascineront la science-fiction campbellienne. Si Kipling oublie rarement d’ouvrir une fenêtre sur l’inconnu, l’inachevé de la science, les siennes donnent sur les mystères de la conscience plutôt que sur ceux de la nature, avec par exemple l’irruption de Keats dans une expérience de transmission sans fil.

Neuf et soixante manières d’écrire de la science-fiction ?

Même dans l’acception la plus large de l’expression, la part de la science-fiction reste mineure dans l’œuvre immense de Rudyard Kipling. Elle n’en est pas moins significative, et d’autant plus essentielle dans la définition du genre qu’elle n’a guère d’équivalent au XXe siècle18.

Bien que leurs approches de la science en littérature soient diamétralement opposées, il en va de même pour Edgar Allan Poe, qu’il admirait. Les deux géants marquent en quelque sorte les pôles de la science-fiction émergente. Leurs positions respectives sont relativement aisées à cerner, du fait même du petit nombre de textes concernés. « Poète de la connaissance »19, Poe exprime dans son singulier Eureka (1848) le sublime isolement et la liberté absolue, quasi-mystique, de l’artiste dans son rapport à la science, résolument théorique et contingent (« tout l’épique et le pathétique de l’intellect », dit Paul Valéry). Kipling, à l’inverse, nes’intéresse guère aux vastes théories mais s’attache aux « platitudes »20,aux petits faits et aux objets techniques, ainsi qu’à la façon dont ils déterminent, collectivement et concrètement, le comportement de ses frères humains.

Cette vision déterministe de la technique — parfois confondue avec une volonté prophétique— deviendra l’une des caractéristiques de la science-fiction campbellienne. Elle trouve peut-être son expression ultime dans «The Cold Equations» de Tom Godwin (1954), l’un des archétypes de cette hard SF. Toutefois, la science-fiction moderne ne limite plus son propos aux objets à dimension humaine. Loin de se réduire à cette “littérature avec des boulons” à laquelle Kipling, contre tous les préjugés esthétiques, avait conféré ses lettres de noblesse, elle s’adonne aussi aux spéculations les plus théoriques, pour sa partie la plus “dure”, voire aux vertiges métaphysiques, et n’hésite pas à départager les interprétations des scientifiques, le temps d’une histoire.

Mais en cela même, la science-fiction démontre qu’elle a intégré la « sagesse » de Rudyard Kipling, le cœur de son héritage littéraire: le souci de forger les mythes de son époque, à partir de son observation objective et déterminée, technique aussi bien que sociale, mais en toute liberté, sans impasse ni exclusive.

Il y a neuf et soixante manières dans la tribu de construire des lais,
Et-chacune-d’entre-elles-est-dans-la-vérité ! 21

Éric Picholle

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Notes de bas de page numériques

1  R. Kipling, « In the Neolithic Age », in Ballads & Barrack-Room Ballads, 1892.

2  Dans Tempête d’une nuit d’été (A Midsummer’s Tempest, 1974 ; trad. P. Marcel, Pocket, 1990), Poul Anderson s’amusera à réinjecter la problématique kiplingienne du “fer froid” dans l’univers shakespearien.

3  R. Kipling, « Tomlinson », poème de 1891. Tomlinson n’ayant aucun acte duquel se prévaloir auprès de Pierre, ni d’idées propres, pas même un « péché valable » pour le Diable qui l’interroge, son âme est dédaigneusement renvoyée au néant de sa vie.

4  R. Kipling, « The Sons of Martha », 1907.Les citations non attribuées du présent article sont extraites de ce poème (trad. Peyresq, D. Tron).

5  Marthe et Marie de Bethanie sont les sœurs de Lazare (la seconde est parfois assimilée à Marie-Madeleine).
Lorsque Jésus et sa suite font étape chez elles, Marie s’installe à ses pieds pour mieux l’écouter, tandis que Marthe s’affaire à les recevoir (Luc, 10, 38–42).

6  R. Kipling, « An Interview with Mark Twain », 1889 ; in A Separate Star, pp. 216–226.

7  Peut-être paradoxalement rejointes, suggère André Maurois, par quelques éléments populaires sujets à un “mouvement de pudeur” : « Le propre du héros de Kipling est de ne pas savoir qu’il est brave, ni qu’il est sage. Le héros de Kipling se tait, surtout lorsqu’il s’agit de ses propres actions. En lisant Kipling, qui le dévoilait aux autres et sans doute à lui-même, peut-être éprouvait-il une imperceptible irritation » ;in Magiciens et logiciens, Grasset, 1935, p. 12.

8  Francis Léaud, La Poétique de Rudyard Kipling, essai d’interprétation générale de son œuvre, Didier éd., 1958, p. 477.

9  Le procédé, ou sa généralisation à une lecture littérale des métaphores, reste à la base du rapport entre science et littérature caractéristique de la SF moderne. cf. Serge Lehman, «La Légende du processeur d’histoires», in L’Histoire dans la science-fiction, la science-fiction dans l’histoire, actes du Ve colloque international de science-fiction de Nice ; in Cycnos, 22, 1, 2005, pp. 6–25.

10  Même si l’irruption de la technique dans la société est politique par essence, Kipling laisse s’exprimer ses personnages ; il saurait d’autant moins être tenu comptable de leurs opinions et de leurs préjugés de classe qu’il faut toujours, avec lui, faire la part de l’ironie. On retrouve ici une difficulté amplement discutée l’an dernier à propos de Robert Heinlein — dont « Les Routes doivent rouler», par exemple, n’est pas sans rappeler «L’Enfance de l’air» jusque dans les polémiques induites.

11  Impérialiste ou non. Ainsi, pour le socialiste H.G. Wells, « Son emprise sur nous fut inouïe. Nous étions hantés du cliquetis de ses rimes. (…) Kipling m’a fourni les phrases nécessaires pour rendre ce désir de discipline, de dévouement, d’effort organisé, que le socialisme de notre époque ne parvenait pas à exprimer » (in The New Machiavelli, 1911 ; Le Nouveau Machiavel, Albin Michel, p. 135).

12  Société des sept gardiens: www.ironring.ca

13  R. Kipling, « The Secret of the Machines », in A School History of England, 1911.

14  « Le Navire qui trouva sa voix », trad. Peyresq. Ici encore, la métaphore sociale est doublée d’une observation technique pertinente, et non triviale.

15  R. Kipling, « Tommy » (1892, in Barrack-Room Ballads). L’expression, devenue un lieu commun dans le monde anglo-saxon, renvoie aux vers : Then it’s Tommy this, an’ Tommy that, an’ “Tommy, ‘ow’s yer soul ?” But it’s “Thin red line of ‘eroes” when the drums begin to roll.

16  R.A. Heinlein, « Grandeur et misères de la science-fiction »,in Robert Heinlein et la pédagogie du réel, premières Journées interdisciplinaires Sciences & Fictions de Peyresq, éd. du Somnium, 2008.

17  Son interprétation par Albert Einstein, en 1905, passera par l’introduction de quanta de lumière, les “photons”, et lui vaudra son prix Nobel de physique.

18  Au contraire de celles de Jules Verne et de H. G. Wells, notamment, si souvent imitées et continuées qu’il devient difficile de les utiliser comme références autre qu’historiques.

19  P. Valéry, « Au sujet d’Eurêka », in Œuvres, tome I, Pléiade, p. 856.

20  « Kipling ne cherche pas à faire de l’esprit, à être “osé”, il n’a aucun désir d’épater le bourgeois. Il traitait largement de platitudes et, puisque nous vivons dans un monde de platitudes, une bonne part de ce qu’il disait colle toujours. Même ses pires folies semblent moins creuses et moins irritantes que les outrances “éclairées” de la même période »; George Orwell, «Rudyard Kipling», in Critical Essays, Londres, Secker and Warburg éd., Londres, 1946.

21  R. Kipling, «À l’ère néolithique», trad. D. Tron (supra, p. 25).Ces vers sont également en exergue d’un essai de Robert Heinlein, «On The Writing of Speculative Fiction», 1947 (à paraître dans Bifrost, dossier spécial Heinlein, 2010).

Pour citer cet article

Éric Picholle, « Aux fils de Marthe, une littérature avec des boulons ? », paru dans Sciences et Fictions, Rudyard Kipling et l'enchantement de la technique, Session 3, Aux fils de Marthe, une littérature avec des boulons ?, mis en ligne le 21 avril 2010, URL : http://revel.unice.fr/symposia/scetfictions/index.html?id=528.

Auteurs

Éric Picholle

Physicien CNRS & IRH Nice, eric.picholle@unice.fr