Loxias-Colloques |  8. Ecrire en Suisse pendant la grande Guerre |  Ecrire en Suisse pendant la Grande Guerre 

Béatrice Bonhomme  : 

Jouve, Romain Rolland vivant et En Miroir : les deux facettes, en regard, d’un même art poétique

Résumé

Le Romain Rolland vivant de Jouve publié en 1920 n’est autre que l’ébauche de En Miroir (1954), le passage, le détour nécessaire par l’étude de l’autre (Romain Rolland) qui constitue, à l’époque, une sorte de père spirituel et permet à Jouve d’arriver à la connaissance de soi-même comme de son propre art poétique. Dans le premier cas (Romain Rolland vivant) nous avons la biographie intellectuelle d’un ami si proche que Jouve déjà peut s’y projeter et s’y construire (« parce que c’était lui, parce que c’était moi », déclare Jouve, citant Montaigne). Dans le deuxième cas, En Miroir constitue une autobiographie intellectuelle et recomposée pour projeter une image de soi-même qui corresponde exactement à l’auteur que l’on voudrait être. Deux monuments, deux architectures, deux statues, l’une d’un modèle adoré puis renié, l’autre de soi-même.

Index

Mots-clés : autobiographie , En Miroir, Jouve (Pierre Jean), Rolland (Romain), Romain Rolland vivant

Géographique : France , Suisse

Chronologique : XXe siècle

Texte intégral

Il est évident, d’après moi, que si Jouve s’est trouvé lui-même tant sur le plan humain, politique que créatif, s’il est parvenu à être le grand écrivain qu’il a été, capable des positions politiques et humanistes qu’il a prises durant la seconde guerre mondiale, c’est en partie grâce à l’épisode suisse et à la rencontre avec Romain Rolland.

Dès novembre 1914, dans la correspondance qu’il commence à entretenir avec ce dernier, Jouve l’assure en effet de son « ardente sympathie1 ». En avril 1915, il lui envie son séjour dans ce territoire neutre qu’est alors la Suisse et cette liberté qu’a Romain Rolland, entre deux haines, de « respirer un air libre ». Il souhaite ardemment le rejoindre. Il proclame également son admiration et sa « fraternité ». Avant même de rencontrer Romain Rolland, il voit en lui la sauvegarde d’une pensée spirituelle de la paix et de la fraternité. Il ressent comme nécessaire que l’art, s’étant retranché dans un trop grave silence, se jette en pleine mêlée : « l’art sait maintenant qu’il doit exprimer la religion violée – Il se sent guéri de tout matérialisme ».

Jouve voit, en effet, dans la position de Romain Rolland, l’incarnation d’une « révolution des hommes religieux contre la société meurtrière » (6 juin 1915), et résume ainsi sa pensée dans une lettre du 15 septembre 1915 : « Je relis Jean-Christophe avec amour. Quelle somme de vie et de bonté. J’y vois une des plus grandes tentatives de la pensée moderne vers l’esprit fraternel – depuis Beethoven et Tolstoï », y soulignant surtout, le 15 octobre 1915, la force de Foi. L’auteur souhaite donc ardemment rencontrer Romain Rolland :

C’est à la fin du mois d’octobre 1915 qu’[il] gagne la Suisse. Il se rend aussitôt à Vevey où pendant quelques jours, il loge dans un chalet voisin de celui du peintre Gaston Thiesson qui est, pour sa part, sur le sol helvétique depuis le 8 septembre [...] À peine installé à Vevey, le poète compte sans tarder, aller à Champel rendre une visite à Romain Rolland. Mais le 2 novembre, c’est Romain Rolland lui-même qui se rend à Vevey et qui crée la surprise2.

Pour décrire cette rencontre, Jouve a d’ailleurs trouvé, le 4 novembre 1915, des accents de vraie beauté mystique : « Cher et grand Ami, vous êtes parti mais la lumière qui est en vous reste. Je sens que j’approche pour la première fois un homme de génie », émotion que l’on retrouve dans Romain Rolland vivant et qui relate aussi bien la découverte d’une personne exceptionnelle que le lieu et le paysage remarquables qui ont constitué le cadre de la rencontre de deux écrivains qui ont très vite constitué, dans l’esprit de Jouve, les deux facettes d’un même miroir. Nous ne pouvons oublier les étapes primordiales d’un cheminement et son importance dans la constitution de l’œuvre d’un auteur reconnu aujourd’hui comme fondamental, même si plus tard le miroir s’est inversé puis définitivement obscurci. En 1917 Jouve évoque ainsi avec émotion les nombreux moments passés avec Rolland à Sierre :

Je voyais Romain Rolland chaque jour, à la nuit, dans sa chambre que l’on reconnaissait de loin comme une lanterne éclairée. Les grands vents de la montagne sifflaient à ras de la neige ; s’il faisait beau, les couchants d’or secs et durs se cassaient sur les reliefs, par dessus les brumes de la vallée, et mouraient sur les glaciers. Les vaches processionnaient avec leurs cloches énormes. – Un autre jour il venait chez moi, glissant et marchant avec peine dans la neige ; il y avait, pour monter dans ma vigne, un diable de raidillon qui se terminait en patinoire. Il entrait, un peu essoufflé ; il gardait son pardessus, car ma chambre, exposée au vent de toute la vallée, était difficile à chauffer. Et la conversation commençait, embrassant les nations et la bataille, les idées et les faits, regardant sans faiblesse la barbarie et la servitude, scrutant l’avenir, cherchant, sans espérer la trouver, une issue pour la foi humaine (RR, 31)3.

Le lieu tout d’abord, la Suisse, qui demeure dans la neutralité et le pacifisme pendant la première guerre, a joué un rôle déterminant : « Ici seulement, dans cette île suisse, on pouvait garder la liberté de comprendre et de pouvoir parler » (RR 50). « La Suisse, pendant la guerre des nations fut le point sensible de l’Europe [...]. La Suisse fut le refuge où bien des nageurs fatigués de toutes les nations vinrent aborder, où ils voulurent vivre, même dans une solitude sans douceur » (RR, 244).

Assis près de lui à cette place retirée, j’ai souvent pensé avec quelque religion ou poésie à la valeur de ce lieu-ci encaissé sous la montagne ; combien, de ce lieu, il était possible de voir clair, comme d’une île de paix douloureuse et sereine ; et quels regards intérieurs, de tous les points du monde, étaient toujours tournés vers ce lieu, depuis quatre ans (RR, 32)

Comme Daniel Leuwers nous l’apprend : « L’admiration de Pierre Jean Jouve pour Romain Rolland va se transformer en 1916, en amitié véritable, à la faveur de plusieurs rencontres et notamment d’un long séjour commun à Sierre entre le mois de septembre 1916 et le mois de mars 19174 ». Jouve souffrant, comme il le signale à plusieurs reprises, d’atteintes dépressives avait besoin, en outre, d’un maître pour aller vers une vie neuve, ce qui deviendra plus tard, après sa rencontre avec Blanche Reverchon, la « Vita Nuova ».

Jouve exprime donc le désir d’être guidé et rassuré et cela de façon très évidente et forte dans sa correspondance où Romain Rolland apparaît comme un père chéri, un guide spirituel qui lui montre une direction et lui apporte l’aide nécessaire pour trouver un sens à la vie : « Je vis pour les idées. Vous êtes leur incarnation héroïque. Je regarde la clarté intense de vos yeux pour comprendre ce qu’il faut maintenir, ce qu’il faut espérer, ce Dieu intangible que la conscience révèle, la Raison de vivre » (6 novembre 1915). Il avoue le fort besoin d’une « direction absolue » de la vie, d’un sens, et d’« un sens surtout humain, vivre pour tout ce qui vit et souffre » (13 novembre 1915). Son souhait profond est de se diriger vers une nouvelle vie qui lui permettra d’y voir clair. Aller vers une vie neuve. Rechercher les mots pour se dire. « Terrible besoin d’y voir clair ». Il veut connaître la direction où aller : « Je crois que c’est un besoin religieux. Je crois que je vais vers une forme de pensée religieuse » (13 décembre 1915). Cette idée exprimée très tôt dans cette correspondance, tout comme la nécessité de rester absolu, dans la vie déréglée comme dans la règle, restera d’ailleurs une des pensées fondatrices de l’œuvre à venir de Jouve et on retrouvera ces phrases exactes, exprimées au mot près dans En Miroir5. Jouve éprouve d’ailleurs très vite une véritable adoration mystique pour Romain Rolland dont il contemple parfois le portrait dans les moments difficiles de sa vie comme celui d’une sorte d’icône, en espérant y trouver la guérison… Bientôt il se sent très proche affectivement de Romain Rolland qui l’appelle « son frère » et il retrouve, sur un plan poétique, les mêmes textes fondateurs dans l’œuvre de celui qu’il vénère que dans les siens propres, comme Shakespeare par exemple, que Jouve traduira plus tard : « J’admire, dit-il à Romain Rolland, comme vous trouvez dans Shakespeare l’appui le plus fort pour l’œuvre d’aujourd’hui » (17 avril 1916). Finalement, et ce mouvement nous intéresse particulièrement, il se projette dans Romain Rolland, faisant sien tout ce qui le touche et le concerne : « Tout ce que j’aperçois de votre vaste intelligence m’apparaît aussi comme mon bien » (8 mai 1916). Le 16 mai 1916, lui viendra alors l’idée d’écrire un témoignage vibrant sur Romain Rolland et il en sollicite la possibilité, souhaitant obtenir l’autorisation d’écrire un texte qui présenterait la lutte de Romain Rolland, en faisant usage de certaines pensées exprimées dans les lettres. C’est une pensée « vivante » à laquelle il souhaitera désormais s’associer, au moins pour un temps et avant le reniement. Jouve fera sien Romain Rolland. Peu à peu se précisera l’idée de Jouve qui est de consacrer un ouvrage à la pensée de Romain Rolland. En 1918, « le poète transcrit ses entretiens avec Rolland dans des cahiers méticuleusement datés qu’il utilisera pour la rédaction de son ouvrage6 ». La rédaction même de l’ouvrage Romain Rolland vivant couvrira les années 19-20 et sortira en septembre 1920 des presses de la Librairie Ollendorff.

Ces moments vécus en Suisse avec Romain Rolland resteront donc absolument fondateurs et essentiels pour la vie et l’œuvre jouvienne et lui permettront, dès cette première période, à la suite de celui pour lequel il éprouve des sentiments filiaux et qu’il considère, à l’époque, comme un maître, de se retirer dans cet exil volontaire (RR, 51) et intérieur d’où l’on peut penser tout à fait librement, « au dessus de la mêlée ». Cela restera ensuite le choix de toute une vie, « une sorte de grand couvent du premier moyen-âge » (RR, 50) dit Jouve de Romain Rolland, comme il pourrait le dire de lui-même. Le Jouve des années 1925, le deuxième Jouve, restera tout à fait fidèle à ce choix d’ascétisme, tournant le dos à toutes les facilités mondaines et littéraires, à toute quête de reconnaissance, lui qui, durant des années, contemplera de son bureau d’écrivain, avec un grand bonheur, « le pur grand jardin vert des Sœurs visitandines » (EM, 1070). Si Jouve est resté toujours un écrivain libre, c’est qu’il a puisé au départ dans la pensée de Romain Rolland, telle que ce dernier la développe en Suisse durant la première guerre. La liberté est un des piliers de cette pensée et ce sera aussi la pierre de touche de la posture jouvienne : « Chateaubriand écrit dans son superbe livre : je pense que sans la liberté il n’y a rien dans le monde : elle seule donne du prix à la vie ; dussé-je rester le dernier à la défendre, je ne cesserai de proclamer ses droits » (EM, 1111). Cette pensée que Jouve attribue à juste titre à Chateaubriand, a été, de façon encore beaucoup plus proche de lui, incarnée par Romain Rolland : » un tel couvent de l’esprit où règne la pensée pacifique » (RR, 52), pensée fondée avant tout sur la liberté : « une forme religieuse de la pensée libre » (RR, 56). C’est Romain Rolland qui déclare : « Surtout, la liberté. La vérité cela va de soi. La fraternité, c’est une joie. Mais la liberté, c’est une passion ». Jouve restera toujours, à l’instar de Romain Rolland, un poète, jaloux de sa liberté, habité par la foi, par la spiritualité (« Il fut d’abord une foi » dit-il, en effet, de Romain Rolland (RR, 57)) mais aussi une foi fraternelle, une foi en l’homme, à contre-courant de tous les mouvements. Il connaîtra, tout comme Romain Rolland, la solitude, l’éviction et l’exil volontaire plutôt que la compromission : « l’état d’exil intérieur et de proscription » (EM, 1163). Plus encore, si, lors de la seconde guerre, Jouve est capable de suivre la voix et la volonté de Charles de Gaulle (autre guide spirituel…) et d’y rester fidèle, c’est la formation qu’il a auparavant reçue de Romain Rolland qui l’y engage. Romain Rolland a constitué une étape décisive et a montré le chemin à Jouve d’une difficile exigence qui passe par le silence et le secret et qui préfère le chemin ardu de la solitude et de l’exil à toute compromission facile. Romain Rolland était, avant Jouve, cet écrivain qui, n’appartenant à aucun parti politique, n’obéissait à aucun système (RR, 89), sa critique du marxisme mais aussi du capitalisme, de l’impérialisme et du catholicisme, son refus des partis, son intuition d’une civilisation moribonde en Europe préfigure la critique jouvienne qui voit dans la civilisation européenne une civilisation de la mort et du cadavre : « Je vais te parler du monstre froid entre les monstres froids… je vais te parler de la mort des hommes » (RR,109).

L’idée que je souhaite développer est, donc, la suivante : Pierre Jean Jouve, lorsqu’il écrit Romain Rolland vivant (1920), est déjà habité par les mêmes choix et les mêmes thèmes que celui qui écrira En Miroir, journal sans date (Paris, Mercure de France, 1954) et cela même si cet auteur reniera toute cette partie de son œuvre, antérieure à 1925. Romain Rolland vivant prenait l’allure d’un témoignage passionné sur la vie et l’œuvre de celui que Jouve considérait comme un grand homme, En Miroir, journal d’une création, rendra compte a posteriori d’un cheminement intellectuel et créatif personnel et de la mise en place progressive d’un art poétique. Or, à la lecture comparée de ces deux ouvrages, il m’est apparu que le Romain Rolland vivant n’était autre que l’ébauche de En Miroir, le passage, le détour nécessaire par l’étude de l’autre qui constitue, à l’époque, une sorte de père spirituel, afin d’arriver à l’étude de soi-même et de son propre art poétique. Dans le premier cas, la biographie intellectuelle d’un ami si proche que Jouve déjà peut s’y projeter et s’y construire (« parce que c’était lui, parce que c’était moi », déclare Jouve, citant Montaigne, page 25). Dans le deuxième cas, une autobiographie intellectuelle et recomposée pour projeter une image de soi-même qui corresponde exactement à l’auteur que l’on voudrait être. Deux monuments, deux architectures, deux statues, l’une d’un modèle adoré puis renié, l’autre de soi-même. Celui qui était le modèle absolu est salué encore de loin dans En Miroir et cela au détour d’une simple phrase, alors qu’il a été autrefois l’objet vénéré de toute une correspondance et tout un ouvrage : « J’avais rencontré Romain Rolland. J’avais certes beaucoup reçu de cette amitié que je salue encore de loin ; mais cette amitié à son insu, m’avait confirmé dans mes fautes » (EM, 1067). En même temps que cette ancienne amitié est poliment saluée, une erreur, plus encore une « faute », au sens existentiel, est mise en exergue, celle même amenée par cette amitié, relue désormais comme néfaste et stigmatisée comme ayant éloigné l’auteur de son authentique chemin intérieur. Ainsi devient nécessaire l’écriture du deuxième livre, sur soi-même cette fois, comme une réparation apportée au premier livre qui portait sur un autre et qui apparaît a posteriori comme une falsification, une impasse, une faute, éloignant l’auteur de son vrai chemin. Pierre Jean Jouve a eu pourtant, à l’évidence, besoin de passer par cette étape de l’admiration et de l’amour pour un autre écrivain, pour arriver à assumer son propre art poétique. Loin de l’éloigner, ce détour indispensable n’a constitué que la possibilité d’un retour à soi-même. Romain Rolland a constitué un véritable tuteur sur lequel s’appuyer pour poursuivre sa propre frondaison. On verra ainsi tous les grands thèmes fondamentaux de l’art poétique jouvien trouver leurs racines dans le panégyrique de Romain Rolland, l’exercice de la contemplation et de l’étude de l’autre acquérant toute son importance dans cette quête de soi-même. Or c’est Romain Rolland qui, par sa lucidité, a amené Jouve tant personnellement, que sur un plan politique et créatif, à se trouver lui-même.

C’est alors le portrait d’un Jouve au miroir de Romain Rolland que l’on verra se dessiner en filigrane de ces deux curieux ouvrages bâtis comme les deux faces d’une même architecture, celle de l’œuvre s’érigeant sur l’œuvre d’un autre et y trouvant ses principales fondations, et cela malgré le reniement qui a empêché bien des critiques d’y voir clair. Loin de perdre du temps dans cette amitié, Jouve parvient à se connaître lui-même, en passant par l’autre, en traversant le miroir. Jouve a eu besoin de s’appuyer sur l’œuvre d’un autre pour ériger son œuvre propre mais aussi de faire autre une partie de son œuvre propre en la reniant violemment pour arriver à trouver, à saisir son chemin de création. Pour Jouve, le « je » créateur se découvre en se confrontant à l’altérité, à l’étrangeté, qui est avant tout en soi-même. L’œuvre ne trouve son autonomie que par la violence et le rejet d’une partie d’elle-même. En Miroir est une écriture au miroir de soi-même mais aussi de l’autre que Jouve a voulu assimiler et rendre soi-même. Le parcours psychanalytique, profondément intégré de façon originale au processus de création, est vécu dans le cheminement créatif lui-même à travers les stades du miroir et de l’altérité qui permettent, de façon alternée, proximité puis mise à distance, productives et fructueuses, « je » étant ici, plus que chez n’importe quel auteur, un « autre ». Regardons de plus près les deux livres et les fils thématiques qui s’y tissent et s’y retrouvent comme les deux faces d’une même réflexion. Dans le premier livre, l’auteur a besoin de passer par l’étude de l’ami admiré et aimé, dans le deuxième, il devient le sujet de sa propre étude et le travail qu’il avait accompli d’abord par affection pour Romain Rolland, il l’accomplit, désormais, pour lui-même, conférant ainsi à son œuvre propre une ossature, une « architecture » nécessaire. Jouve devient le propre sujet de sa réflexion critique.

Le premier risque était le mauvais chemin, l’erreur, et Jouve estime a posteriori avoir emprunté ce mauvais chemin en suivant Romain Rolland. Avec En Miroir, il reste, tout de même, un risque, celui de poser « l’auréole et le nimbe7 », de « méduser » son écriture, de la statufier à trop se contempler soi-même. En Miroir risque de figer la création jouvienne dans une posture mortifère, celle de l’auteur s’édifiant lui-même. Mais ce qui est en jeu n’est qu’une mort symbolique lors de laquelle Jouve se dédouble et tue l’ancien Jouve en érigeant le nouveau, le roi est mort, vive le roi. En Miroir n’intervient d’ailleurs que tardivement dans la production jouvienne, comme des sortes de « mémoires » de création et cela est profondément significatif de ce besoin jouvien de laisser vivre sa création, de la laisser évoluer sans trop la figer. De 1920 à 1954, toute une création a pu s’élaborer et En Miroir peut désormais jeter un regard rétrospectif sans forcément paralyser le créateur, alors que Romain Rolland vivant intervenant très tôt dans le parcours jouvien ne pouvait qu’être renié pour être dépassé, le risque encouru étant la mort de la création du poète figé dans une posture définitive. Car en statufiant Romain Rolland, il se statufiait lui-même d’une certaine manière.

Il est significatif du lien fort que ces deux textes entretiennent intimement entre eux que les deux ouvrages commencent par une évocation de la poésie, qui constituera le thème principal du processus de création qui traverse les deux œuvres. Le Romain Rolland commence par une « Préface » qui met en lumière le genre poétique entre tous les autres et cela nous montre que Jouve, même lorsqu’il ne semble parler que de Romain Rolland, parle en fait de lui-même et du poète qu’il veut être :

Le poète est un ouvrier de poèmes. Que l’on me pardonne si j’aborde ce travail avec les travers d’un métier dont le monde n’a que faire, et qui aspire à saisir la vie d’un seul regard, à la construire selon une vérité plus hardie que longuement éprouvée, à la deviner plutôt qu’à la connaître, à l’étreindre enfin de façon désintéressée (RR, 17).

À cette préface, répondra le premier chapitre « De la poésie » qui ouvre En Miroir :

Poésie, art de « faire ». Selon cette définition qui remonte à la science des Anciens, la poésie tient sous son influence, par rayons droits ou obliques, tous les autres arts de l’homme. Faire veut dire : enfanter, donner l’être, produire ce qui, antérieurement à l’acte, n’était pas […]. Comme l’amour, la Poésie est soumise à une secrète interdiction. La Poésie, qui est pour les uns la chose la plus nécessaire, peut être aux yeux de beaucoup la chose décriée (EM, 1055).

Dès le premier ouvrage sur Romain Rolland, c’est la Poésie qui prend donc pour Jouve le pas sur tous les autres genres. Elle acquiert d’emblée l’envergure d’une épopée et une tonalité héroïque pour évoquer la « merveilleuse » figure d’un homme hors du commun et elle introduit avec elle la dimension du sacré, constituée qu’elle est par « un acte de foi » comportant un contenu religieux. Jouve ne renoncera pas à cette première idée d’un lien entre poésie et sacré et il continuera à écrire dans En Miroir : « Je n’aurais jamais écrit une ligne, si je n’avais pas cru au rôle sanctificateur de l’Art ». Il décrétera de façon forte le contenu religieux de la poésie. Or, c’est dès le livre sur Romain Rolland qu’est souligné ce caractère sacré et secret et Jouve ne changera plus ni de terminologie, ni de pensée. Le mot essentiel est déjà présent qui sous-tendra tout l’art poétique de Jouve : le « secret », qui lui fait écrire dans En Miroir, en soulignant le caractère profondément énigmatique de la poésie : « Création et Mystère forment le trésor de la poésie » (EM, 1056). Le sacré, le spirituel, l’élévation de la pensée, la transcendance, demeurent une fondation forte à cette écriture et traversent les deux ouvrages. Si Romain Rolland, dans le premier ouvrage, acquiert des dimensions angéliques (Ariel) et christiques (une face de Christ flamand), Jouve n’oubliera pas cette présence christique dans la seconde partie de son œuvre et sa conception de l’art restera fondée sur une vision profondément spirituelle, l’auteur endossant lui-même cette fois la figure christique d’un poète maudit écrivant avec son sang

Le secret est aussi la fondation de toute œuvre forte et cela Jouve en est persuadé dès les tout premiers prémisses de son œuvre, au moment de l’écriture du Romain Rolland vivant : « Toute grande vie, tout grand esprit est un secret. Un secret en mouvement et en passion. Sa domination ou sa sagesse se ramènent à l’existence d’un secret imperceptible » (RR, 20). Il reprendra cette catégorie si remarquable du secret pour définir son œuvre propre : « Le secret est intime à l’œuvre, car il n’y a pas une œuvre de quelque importance qui veuille vraiment livrer son fond et expliquer son but avec son origine » (EM, 1057). Ce qu’il cherche dans son Romain Rolland vivant c’est déjà cet art du secret, cette loi intérieure et mystérieuse, propre à chacun, qui préside au processus de création. Dans le titre même Romain Rolland vivant, Jouve pose d’ailleurs le problème de travailler sur un contemporain vivant :

Certes il ne faut jamais établir de comparaison entre l’esprit qui agit au milieu de nous, si grand qu’il nous apparaisse, et ces hauts piliers de lumière posés dans le passé, dont les rayons font pâlir les vivants mêmes qui continuent leur œuvre. Je n’enfermerai pas Romain Rolland dans une des cellules du Panthéon des hommes illustres ; il en serait offusqué, lui si modeste et vrai, à moins qu’il n’en rie. Nous sommes au temps des vivants, qui doivent lutter, prier et avancer, en s’ignorant eux-mêmes (RR, 6).

Avec le temps et la mort, les grands hommes deviennent plus définitifs. C’est un problème qu’il se reposera dans les mêmes termes, pour lui-même cette fois, dans En Miroir et dans Proses puisqu’il y explique que seule la mort définit une œuvre : « La mort a ciselé ce merveilleux ensemble de création » (« Génie mort » dans Proses)8.

Ainsi, alors qu’il bâtit la statue d’un écrivain qu’il aime, Jouve commence à ériger sa propre statue et il est significatif que d’une statue à l’autre, il n’abandonne aucune des postures qu’il a mises en lumière chez l’autre autrefois aimé. Tout d’abord il avoue les mêmes fondations et une création enracinée dans une enfance, une adolescence ou des épreuves tout à fait semblables. Le portrait de Jouve fait par lui-même constituera quasiment un décalque de celui qu’il a fait, plusieurs années auparavant, de son ami, portrait dans lequel il tient à souligner les étapes qui ont marqué la formation et l’apprentissage. Les premiers attachements des deux écrivains sont les mêmes : la sœur et la mère pour l’un comme pour l’autre. Pour Romain Rolland : « C’est sa sœur, « sa conseillère et son amie », comme dit la dédicace de Saint Louis ; il la tient pour le meilleur juge de ses œuvres. On pense à l’amour de Renan pour sa sœur Henriette, bien que la proportion d’âge soit ici renversée » (RR, 38). La mère joue aussi, pour Romain Rolland, un rôle décisif, celui que jouera aussi celle de Jouve dans son lien à la musique : « sa mère à qui il doit son âme musicienne, et qui, pendant des heures, écoutant le fils au piano, communiait en silence avec lui, dans la tendresse émue de Gluck et de Mozart ». Jouve écrira dans En Miroir des lignes qui se trouvent en résonance avec celles-ci : « La précoce capacité d’inventer en imitant, et le développement de la mémoire, ceci seulement dans la Musique, m’apparaissent aujourd’hui comme les signes, non seulement du lien profond à ma mère, mais aussi du démon artiste » (EM, 1062). C’est d’ailleurs par la musique que les deux auteurs parviendront à fuir les souffrances et les épreuves de la vie, et de trouver la force de continuer leur œuvre : « Et dans le vieux salon xviiie siècle de l’hôtel, Romain Rolland se mit au piano. La Musique, suprême oubli du cœur et de l’esprit. Pour nous, salut profond de l’âme, des grandes âmes musiciennes fraternelles accourues autour d’un de leurs enfants. » (mai 1915).

En Miroir évoque avec émotion cette même musique qui permit au jeune Jouve de sortir de ses crises obsessionnelles : « alors le développement de l’improvisation au piano fut considérable. Je passais mes journées entières devant le clavier [...]. Tel Saül écoutant la harpe de David, je me secourais moi-même contre cette contrainte morale » (EM, 1062).

Ainsi, voici le portrait que trace Jouve de Romain Rolland :

Complexion faible, épreuve de la maladie, nature délicate plusieurs fois menacée et qu’un grave accident vint encore ébranler, sévères crises pendant l’adolescence ; âpres luttes et bataille pour la formation de son esprit et la conquête de son âme ; travail dévorant, passions, voyages ; peines et drames intimes ; combat moral contre la veulerie d’un temps, œuvres énormes bâties dans la solitude, réclusions forcenées des années de travail ; — enfin la lutte démesurée que sa pensée entreprend seule, contre la tyrannie de la guerre en Europe, son apostolat, le surmenage écrasant de son action, la résistance quotidienne aux persécutions, de nouvelles grandes œuvres ; — et voilà cet homme au visage pâle et tranquille, marqué par la souffrance, fait noble par elle, mais vif encore de jeunesse et de force, et qui sait, vous le voyez d’un seul coup d’œil, ce que c’est que la paix intérieure conquise et intangible ( RR, extraits des pages 21-26).

Relisons En Miroir à la lumière du Romain Rolland vivant et nous trouvons, en écho exact à ce portrait, les traits de caractère précis de Jouve, se peignant lui-même pour la postérité :

Après une grave opération subie à l’entrée de l’adolescence, je fus abattu par la crise dépressive pendant quelques années, enfermé dans l’agoraphobie et les obsessions coupables et menacé par d’autres processus moins visibles qui auraient pu détruire l’autonomie de la personne [...] La porte de la maladie n’était pas la plus mauvaise porte. Elle seule pouvait ouvrir sur un monde entièrement hétérogène à celui dans lequel je vivais ; elle seule pouvait me permettre de franchir la muraille (EM, 1062) [...] Depuis trente ans, – depuis toujours – je suis soumis à la torture du silence. [...]. L’histoire de l’œuvre est assez longue, et la résistance qui lui fut opposée est assez exceptionnelle [...] La principale détermination de l’époque est la volonté de détruire ce que je nomme les sources de la foi (EM, 1060) [...] Il y avait un pas à faire, une porte à ouvrir ou à fracturer. Pouvais-je l’ouvrir, moi si faible et si mal constitué ? Pourquoi pas moi – cependant. Pourquoi pas moi ? (EM, 1063) [...] Quant au mouvement contemporain, je m’en sentais séparé par une glace des plus épaisses (EM, 1072) [...] Je poursuivis après Sueur de sang, une route semée d’embûches (EM, 1079) [...] Le travail a toujours été d’une grande dureté. Le bourreau comme le croyant veulent que je travaille sans cesse (EM, 1082). L’exil dont je veux parler maintenant est l’état d’exil intérieur et de proscription pour cause de nature de tempérament, forme de pensée ou manière de vivre. Je connais cet état depuis une vingtaine d’années (EM, 1161).

L’image de l’auteur, que ce soit celle de l’auteur admiré ou de soi-même, mis à distance par un processus de miroir, est significativement la même : celle d’un être souffrant, attaché à sa mère et à sa sœur, dépressif, délicat, profondément solitaire, rejeté par la société littéraire et vivant en état d’exil et de silence. Cet être particulièrement sensible a vécu les affres de la maladie, des crises proches de la folie, des combats contre lui-même et les autres, combats traversés de prises de conscience et de doutes. C’est pourtant un être qui se relève des épreuves car il est porté par la détermination de la foi et par un travail permanent. Il donne aux autres un haut exemple vital et moral, il reste un modèle éthique car il ne se compromet jamais et reste droit au milieu des orages qui nourrissent la force de sa création. Cette dernière reste la plus importante, même si pour la trouver, il aura fallu rejeter nombre de guides, pour aller vers l’absolu de l’art. Ainsi Romain Rolland persécuté pour son pacifisme préfigure Jouve éloigné de tous les mouvements contemporains et mis à l’écart du monde littéraire par les autres auteurs comme par le public. Voici, en effet, comment Jouve dépeint Romain Rolland :

En vérité, sa vie en Suisse aura été d’une âpre solitude. Solitude complète, en face du travail, pendant des semaines et des mois. Solitude secrète et intime qui est celle de toute son existence. Il faut en arriver au chapitre le plus triste à écrire. La pensée fut persécutée, l’homme fut injurié, suspecté, surveillé. L’orage fut si fort, autour de lui, que ses amis purent craindre quelque acte violent d’un imbécile, manifestation extrême d’une opinion enragée. Pendant cinq ans, Romain Rolland fut, en France et en Suisse, l’un des hommes les plus haïs du temps. Et l’apaisement relatif où nous sommes aujourd’hui obéit à un mot d’ordre de mépris : on affecte de croire qu’il soit mort (RR, 37).

On notera la même posture de dignité devant l’adversité chez Romain Rolland comme chez Jouve :

Je me suis trouvé, depuis un an, bien riche en ennemis. Je tiens à leur dire ceci : ils peuvent me haïr [...] Ma tâche est de dire ce que je crois juste et humain. Que cela plaise ou que cela irrite, cela ne me regarde plus… (RR, 248).

De même, Jouve préférera l’éviction à la compromission et ne cessera d’opposer à ce qu’il considère comme un cruel rejet de la part du monde littéraire, voire une forme de persécution ou de malédiction, une foi personnelle, raisonnée et consciente dans les moyens de l’art.

À l’issue de cette étude dans le cadre de ce colloque, étude qui méritera sans aucun doute d’être approfondie par d’autres recherches, Romain Rolland vivant et En Miroir m’apparaissent comme les deux volets d’une même pensée profondément cohérente. Ils relèvent de la même volonté de conférer une architecture à sa propre création, qui en passe d’abord par le miroir de l’autre avant de pouvoir contempler sa propre image. De même, il nous semble que Romain Rolland a tenu précocement un rôle aussi important dans la construction de l’œuvre jouvienne que celui que jouera plus tard Blanche Reverchon qui prendra, elle aussi, ce rôle de guide spirituel en devenant la dépositaire du relais laissé par Romain Rolland. Cette fois, pourtant, dans la mesure où ce guide particulier, du fait de sa nature sexuelle féminine, a pu aussi se transformer en un amour fusionnel, elle pourra enfin apporter à Jouve à la fois une direction – un sens qu’il trouvera à travers une connaissance approfondie de la psychanalyse, discipline qu’il avait cependant déjà quelque peu approchée – et un réconfort à ses angoisses, réconfort qu’il avait cherché vainement auprès de Romain Rolland. D’ailleurs, il est très significatif que Romain Rolland ait été d’abord lu et admiré par Andrée, la première femme de Jouve qui, à l’époque de leur amitié, a joué le rôle de truchement. Blanche, à qui seront dédiés les livres d’après la rupture, prendra la place à la fois de la première femme de Jouve et de Romain Rolland, les deux personnes à qui étaient dédiés les premiers livres. Ainsi Blanche Reverchon guidera toute la seconde partie de l’œuvre, car elle parviendra à être à la fois l’objet de désir et de fusion et le maître spirituel (« le personnage exerçant l’ascendant » (EM, 1063), comme le poète l’exprime si bien dans En Miroir) dont Jouve avait désespérément besoin. Avec Blanche Reverchon, il trouve à la fois une amante, une mère et un père spirituel car, par son intelligence et sa fine connaissance de la psychanalyse, elle lui apporte la structure qui lui manquait. Mais, ce n’est pas parce que Jouve a souhaité tirer un trait sur le passé que la critique doit ignorer l’importance de l’épisode suisse et de l’amitié avec Romain Rolland pour la construction tant de l’écriture jouvienne que de la personnalité politique d’un écrivain qui n’a cessé de se structurer au miroir de l’autre. C’est la qualité de cet autre, qu’il soit incarné par Romain Rolland ou Blanche Reverchon qui a finalement permis à un auteur de trouver la force de suivre son extraordinaire cheminement créatif et politique. Dans le cas de ces deux « mentors » le lien s’est fait sur fond de liberté, puisque Romain Rolland avait choisi la Suisse pour y développer sa pensée fraternelle et que Blanche Reverchon reviendra souvent en Suisse avec Jouve, pays où significativement Jouve a su tresser, tout au long de sa carrière d’écrivain, des relations fortes avec un grand nombre d’auteurs et d’éditeurs.

Notes de bas de page numériques

1 Cet extrait et ceux qui vont suivre appartiennent à la Correspondance de Pierre Jean Jouve à Romain Rolland, juin 1914-mai 1916, Inédite, consultée à la BNF.

2 Daniel Leuwers, Jouve avant Jouve ou la naissance d’un poète, Paris, Klincksieck, 1984, p. 111.

3 Pierre Jean Jouve, Romain Rolland vivant, 1914-1919, Paris, Librairie Paul Ollendorff, 1920. J’utiliserai le sigle RR suivi de la pagination.

4 Daniel Leuwers, Jouve avant Jouve ou la naissance d’un poète, op. cit., p. 115

5 Pierre Jean Jouve, En Miroir Journal sans date, Œuvre II, Edition établie par Jean Starobinski, Paris, Mercure de France, 1987, p. 1051-1191. J’utiliserai le sigle EM, suivi de la pagination.

6 Daniel Leuwers, Jouve avant Jouve ou la naissance d’un poète, op. cit., p. 124.

7 Cf. Le texte de Pierre Jean Jouve intitulé « Auréole » dans Proses, dans Œuvre II, op. cit., p. 1243.

8 Pierre Jean Jouve, « Génie mort », Proses, op. cit., p. 1202.

Pour citer cet article

Béatrice Bonhomme, « Jouve, Romain Rolland vivant et En Miroir : les deux facettes, en regard, d’un même art poétique », paru dans Loxias-Colloques, 8. Ecrire en Suisse pendant la grande Guerre, Ecrire en Suisse pendant la Grande Guerre, Jouve, Romain Rolland vivant et En Miroir : les deux facettes, en regard, d’un même art poétique, mis en ligne le 22 août 2017, URL : http://revel.unice.fr/symposia/actel/index.html?id=954.

Auteurs

Béatrice Bonhomme

Béatrice Bonhomme, poète, directrice de Revue, professeur à l’Université Nice Sophia Antipolis, spécialiste XX-XXIe siècles, a créé, en 2003, un axe de recherche dédié à la poésie, POIEMA, au sein du CTEL. Elle a fondé avec Hervé Bosio, en 1994, la Revue Nu(e), revue de poésie et d’art, qui a consacré à ce jour 60 dossiers à l’œuvre des poètes contemporains et elle dirige avec Jean-Yves Masson La Société des lecteurs de Pierre Jean Jouve. Elle a publié de nombreux articles et ouvrages critiques sur la poésie moderne et contemporaine ainsi que plusieurs livres de poèmes. Un ouvrage a été consacré à l’œuvre poétique de Béatrice Bonhomme, Le mot, la mort, l’amour (Peter Lang, Oxford, 2013).