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Corinne Fournier Kiss  : 

Solidarité franco-allemande en Suisse au cœur de la première guerre : Stefan Zweig (1881-1942) et Romain Rolland (1866-1944)

Résumé

Stefan Zweig arrive en Suisse en novembre 1917. D’abord libéré du service militaire pour deux mois, il obtient finalement la permission de rester en Suisse jusqu’à la fin de la guerre. Il peut ainsi assister aux répétitions et à la première de Jérémie, sa pièce de théâtre pacifiste représentée pour la première fois au Stadttheater de Zurich en février 1918. Son séjour en Suisse est également marqué par le développement de son admiration et de son amitié pour Romain Rolland – celui qu’il désigne comme étant « la conscience morale de l’Europe ». L’objet de cet article est de montrer que la conjonction Suisse–Rolland a joué un rôle absolument essentiel dans la vie personnelle et créatrice de Zweig.

Index

Mots-clés : première guerre , Rolland (Romain), solidarité franco-allemande, Suisse, Zweig (Stefan)

Plan

Texte intégral

L’arrivée de Zweig en Suisse

1Il est un épisode de la vie de Stefan Zweig relativement peu connu, et dans tous les cas peu commenté : c’est celui de son séjour en Suisse, de novembre 1917 à mars 1919. Au début de la guerre, Zweig avait été jugé inapte de par sa faible constitution à devenir soldat, et il a dans un premier temps été affecté aux Archives militaires de Vienne, où il a assuré le service de bibliothèque et la correction des communiqués ; en 1915, il a été envoyé en Galicie, territoire autrichien qui avait été conquis par les Russes lors des premières opérations militaires en 1914, puis repris par l’armée austro-allemande en 1915 : Zweig y est chargé de récupérer tous les originaux des proclamations et affiches russes pour les archives. C’est là qu’il est pour la première fois directement confronté aux horreurs de la guerre – à la misère des populations civiles et aux blessés mal soignés faute de médicaments et de personnel compétent. Enfin, en 1917, il obtient une libération de son service, d’abord provisoire et très courte, pour un séjour de quatre semaines en Suisse. Voici comment il décrit son arrivée en Suisse dans son autobiographie commencée en 1934 et terminée peu avant sa mort en 1942, et intitulée Le Monde d’hier [Die Welt von Gestern] :

Je franchis la frontière suisse. Il est difficile de se représenter ce que signifiait alors de passer en zone neutre quand on venait d’un pays en guerre barricadé et déjà à moitié réduit par la famine. Il n’y avait que quelques minutes d’une station à l’autre, mais dès la première seconde, on était pris par le sentiment de quitter un air étouffant et renfermé pour pénétrer soudain dans une atmosphère vivifiante et neigeuse, par une sorte de vertige que l’on sentait se répandre du cerveau dans tous les organes des sens1.

2Le prétexte officiel de son séjour est un prétexte culturel : le directeur du théâtre municipal de Zurich, premier à oser monter le drame de Zweig intitulé Jérémie [Jeremias, 1916], a invité l’auteur à assister aux répétitions ainsi qu’à la première. Pour répondre à cette invitation, Zweig doit passer par les services culturels de son pays : comme il l’explique dans Le Monde d’hier, il existe en effet dans l’Autriche en guerre une section de propagande culturelle qui continue à produire de la culture pour l’exporter dans les pays neutres et prouver ainsi à la face du monde que les Germaniques ne sont pas des barbares. La demande de Zweig est agréée, à la condition que son voyage en Suisse soit également mis à profit pour faire une tournée de conférences culturelles et donner lecture de ses œuvres. Les raisons profondes du séjour de Zweig en Suisse relèvent cependant de considérations plus personnelles : l’écrivain, d’une part, ne supporte plus l’atmosphère morbide de l’Autriche en guerre dans laquelle il est devenu « impossible d’échanger avec quiconque une parole raisonnable2 », et il aspire ardemment à pouvoir, l’espace de quelques semaines au moins, se sentir libre de ses mouvements et de sa pensée (désir qui semble se réaliser dès le franchissement de la frontière, si l’on en croit la description ci-dessus de son arrivée en Suisse, où il prétend pouvoir d’un coup respirer normalement) ; d’autre part, il éprouve un très grand besoin de se sentir plus proche de Romain Rolland, qu’il considère à la fois comme son meilleur ami et son guide spirituel, et qui lui d’ailleurs enjoint à plusieurs reprises déjà depuis le début de la guerre de venir le trouver en Suisse. À son arrivée le 14 novembre 1917, l’écrivain autrichien envoie sur-le-champ à l’écrivain français une missive : « Je viens d’arriver en Suisse […]. Ma première idée, après avoir passé la frontière, est de vous saluer ! Quand pourrai-je vous voir3 ? ». Dès réception de la réponse de Rolland, Zweig se rend pour quelques jours à Villeneuve, où son ami séjourne depuis l’été 1914 à l’hôtel Byron.

Zweig et Rolland : leur amitié et leurs projets

3Au moment où Zweig arrive en Suisse, son amitié avec Romain Rolland, basée avant tout sur des affinités intellectuelles, est encore relativement fraîche. Selon Le Monde d’hier, c’est à Florence que Zweig aurait découvert l’œuvre de Romain Rolland (probablement en 1910). La revue bimensuelle Les Cahiers de la quinzaine, fondée par Charles Péguy, et dans laquelle paraissait depuis 1904, épisode après épisode, le roman Jean-Christophe de Rolland, serait tombée par hasard dans ses mains. Zweig, qui jusque-là n’avait jamais entendu parler ni de Romain Rolland ni de Jean-Christophe, est littéralement enthousiasmé par cette lecture. Fort d’avoir traduit de nombreux auteurs européens et d’avoir ainsi pu attirer l’attention de son pays sur plusieurs d’entre eux (notamment sur Verhaeren), il se considère comme faisant partie de la catégorie, peu nombreuse à l’époque, des citoyens européens, et il est ravi d’être confronté à quelqu’un qui fait mieux que lui – c’est-à-dire qui écrit ce qu’il définit comme étant le « premier roman consciemment européen », ou encore une « œuvre qui sert non pas à une seule nation européenne mais à toutes et à leur fraternisation4 ». Avec la figure de Jean-Christophe, qui rêve d’une symphonie européenne dans laquelle les voix de tous les peuples se mêlent et s’élèvent jusqu’à exprimer l’harmonie de l’humanité, Zweig voit la réalisation de l’idéal artistique que lui-même et quelques-uns de ses amis poursuivent depuis longtemps : celui d’un art qui contribue à unir les hommes des différentes nations européennes. « Ici se trouvait accompli dans le silence ce que nous espérions et attendions5 ».

4Sa première préoccupation, lorsqu’il regagne Paris, est de se renseigner sur cet écrivain, puis d’entrer en contact avec lui en lui faisant parvenir l’une de ses œuvres. 1910 marque ainsi le début de leur correspondance, qui sera longue et abondante6 ; ce n’est toutefois qu’en 1913 qu’ils se rencontrent, et leur entrevue ne fait que confirmer et renforcer l’admiration que Zweig éprouve pour Rolland : « Au premier coup d’œil je reconnus en lui – et le temps m’a donné raison – l’homme qui, à l’heure décisive, serait la conscience de l’Europe7 ». Lors de cette première conversation avec Zweig, Rolland prend surtout le soin d’exposer, dans la lancée de son Jean-Christophe, sa foi en l’unité européenne et de dénoncer les puissances qui poussent à la haine entre les nations.

5Au moment où la guerre éclate, l’auteur de Jean-Christophe est en Suisse. La guerre, plutôt que de provoquer l’interruption des relations entre le Français et l’Autrichien, donc entre deux écrivains appartenant à des camps ennemis, sert au contraire de prétexte à une intensification de leur correspondance. Tous deux sont profondément bouleversés par les événements – Rolland parce qu’il les avait plus ou moins prévus, Zweig au contraire parce qu’il ne s’y attendait pas du tout (jamais sa collaboration avec des écrivains étrangers, français ou belges, n’avait été si intense que dans la période juste avant la guerre), et tous deux éprouvent le besoin d’échanger leurs impressions et leurs points de vue sur le sujet. D’emblée, cependant, la différence du ton de leurs lettres est patente : alors que Rolland, dans ses commentaires, témoigne d’une neutralité exemplaire, les lettres de Zweig n’arrivent pas à cacher une certaine foi patriotique naïve, voire même un certain engouement national, et son point de vue est loin d’être impartial. Selon Zweig, par exemple, les journaux allemands parleraient des événements de façon extrêmement digne, sans jamais se moquer des français ni exagérer leurs exactions – alors que les journaux français, au contraire, ne reculeraient pas devant la calomnie ; Zweig refuse notamment de croire Rolland qui affirme que de nombreux monuments culturels français et belges ont été détruits par des bombes allemandes : « La guerre détruit inévitablement mais je ne connais pas de peuple aussi soucieux de préserver les monuments d’art que le peuple allemand8 ».

6Concernant leurs prises de position publiques, la même différence est sensible. Dans un article intitulé « Aux amis de l’étranger » [« An die Freunde im Fremdland »], publié dans le Berliner Tageblatt du 19 septembre 1914, Zweig dit adieu à tous ses amis français, belges et anglais et leur annonce que sa fidélité à sa nation le contraint à rompre provisoirement tout contact avec eux, faute d’une langue commune ; ce silence lui coûte, certes, mais il est préférable aux dissensions ouvertes, invariablement subversives, et lui seul permettra peut-être de renouer des liens d’amitié après la guerre9. La réaction de Rolland à cet article ne se fait pas attendre, et sa lettre à Zweig du 28 septembre est brève, mais incisive : « Je suis plus fidèle que vous à notre Europe, cher Stefan Zweig, et je ne dis adieu à aucun de mes amis10 ». Rolland maintiendra cette opinion jusqu’au bout, et il ne se fera pas faute non plus de l’exprimer officiellement, comme dans sa « Lettre à ceux qui m’accusent » du 17 novembre 1914 :

Oui, j’ai des amis allemands comme j’ai des amis français, italiens, anglais, de toute race. C’est ma richesse, j’en suis fier, et je la garde. Quand on a eu le bonheur de rencontrer dans le monde des âmes loyales avec qui l’on partage ses plus intimes pensées, avec qui l’on a noué des liens fraternels, ces liens sont sacrés, et ce n’est pas à l’heure de l’épreuve qu’on ira les briser. Quel lâche serait-il donc, celui qui cesserait peureusement de les avouer, pour obéir aux sommations insolentes d’une opinion publique qui n’a aucun droit sur notre cœur 11 ?

7Ainsi, là où Zweig hésite, tergiverse et use de détours pour éviter de garder le contact avec ses amis étrangers, Rolland a au contraire le courage de ses opinions, et il se montre ferme dans ses positions éthiques. On ne sera donc pas étonné de repérer, dans la correspondance des deux écrivains, un certain agacement de l’aîné face à la naïveté et au manque de courage du cadet : « Je déplore votre silence », lui fera-t-il remarquer à plusieurs reprises12

8Si Zweig, du moins au début de la guerre, résiste difficilement à une certaine partialité patriotique dans ses jugements et offre par là même un contraste sensible avec la neutralité inébranlable de Rolland, les deux écrivains se rejoignent parfaitement, en revanche, sur le point qui est à l’origine de leur amitié – à savoir sur le rêve d’une fraternité spirituelle de l’Europe. Ce rêve, ils le nourrissaient déjà tous deux avant la guerre, mais ils souhaitent d’autant plus précipiter sa réalisation dans cet état d’urgence qu’est la guerre. L’essentiel de leur correspondance de 1914 porte sur le projet d’établir au sein de l’organisation des états-majors une organisation qui entrerait en porte-à-faux avec elle : celle des esprits libres d’Europe, manière de parlement moral réunissant les meilleurs hommes de chaque nation. Les poètes et les savants en vue pourraient faire figure d’arche au milieu du déluge en offrant l’image d’une désolidarisation d’avec la guerre criminelle ainsi que le moyen de s’entretenir dignement, sans haine, des relations entre les nations. En tant que pays neutre, la Suisse aurait un rôle clé à jouer dans cette initiative et pourrait servir notamment de lieu d’accueil à l’arche d’intellectuels et d’artistes. Ainsi Rolland écrit-il à Zweig :

J’estime que le plus grand service que rendraient au monde des hommes comme nous, qui voudraient travailler à dissiper les malentendus meurtriers entre les nations et à diminuer les horreurs de la guerre, serait de se réunir en pays neutre, afin de loyalement se faire connaître leurs griefs et leurs torts mutuels. Si, dès le début de la guerre, nous nous étions trouvés, – vous, Gerhart Hauptmann, Dehmel, Verhaeren, Frederik van Eeden, Bazalguette et moi, – à Genève ou à Berne, combien nous aurions pu empêcher de mensonges et combattre efficacement la haine ! Nous avons, au milieu, au-dessus du combat, un grand rôle de "modérateurs" à jouer. Et nous ne pouvons nous en acquitter que très incomplètement, si nous restons, chacun, dans notre pays car nous n’arriverons jamais à nous expliquer, ainsi13.

9Rolland et Zweig, tous deux persuadés que sur le plan de l’esprit, les pays qui combattent sont capables de se comprendre et de négocier raisonnablement, lancent alors à l’Europe un appel solidaire à l’entente. Zweig essaie de sonder Gerhart Hauptmann, Thomas Mann, Rilke, Dehmel – sans succès. Rolland ne réussit pas mieux en France : « nous restions seuls14 ». En novembre 1914, Zweig écrit à Rolland : « Il est trop tard pour une entente : des hommes comme Verhaeren, Maeterlinck, France, Gerhard Hauptmann sont trop enlisés dans leurs convictions et préfèrent l’anéantissement à la paix15 ». Néanmoins, ils ne s’avouent pas vaincus pour autant et continuent à partager des idées de projets dirigés contre la haine, comme celui par exemple d’éditer une revue neutre et bilingue en Suisse16, ou encore de travailler activement à la préparation de la réconciliation future.

10Quoi qu’il en soit, on constate qu’au fil des mois, la correspondance entre les deux écrivains exerce une puissante stimulation sur Zweig, et celui-ci en vient à considérer Rolland comme un véritable « maître », si l’on en croit ses lettres qui débutent de plus en plus souvent par l’apostrophe » mon cher maître ». Son irrésolution et son flottement dans ses prises de position se stabilisent ; son pacifisme et son dégoût de la guerre se renforcent au détriment de son patriotisme ; enfin, son désir d’action se réveille.

Jérémie, ou le drame pacifiste de Zweig

11Si la force d’âme qu’exprime Rolland dans ses lettres met Zweig sur le chemin d’une crise de conscience, le voyage que ce dernier effectue en Galicie en 1915 contribue également à lui ouvrir les yeux et à le pousser à une action littéraire plus concrète. Après avoir vu personnellement les terribles désastres humains occasionnés par la guerre, Zweig se montre choqué par les mensonges d’une presse qui promet la victoire de l’Allemagne et ne parle que des pertes énormes essuyées par le camp adverse, alors que le camp allemand n’en subirait que de minimes. L’écrivain réagit en opposant à la parole de ceux qui attisent la guerre une parole qui, au contraire, se veut apaisante et pacifiste. C’est ainsi qu’il crée Jérémie [Jeremias, 1916], pièce de théâtre ouvertement consacrée à défendre une idéologie anti-guerre. L’argument de l’œuvre s’inspire de l’histoire du prophète Jérémie17 : comme lui, le Jérémie de Zweig est taraudé par des visions de Jérusalem détruite et supplie son peuple de ne pas s’allier avec les Égyptiens pour faire la guerre aux Chaldéens, car la guerre signera leur perte :

Moi, je te le dis, peuple de Jérusalem, la guerre est un animal méchant, il mord, il dévore la chair des forts et suce la moelle des puissants. Nul ne l’endort plus une fois qu’il l’a réveillée, et celui qui brandit l’épée peut facilement en être la victime […]. Pourquoi appelez-vous à la guerre, hommes de Jérusalem ? Avez-vous mis vos fils au monde pour qu’ils soient tués, vos filles pour qu’elles soient souillées ? […] Oh, contente-toi de loger paisiblement sous le regard tranquille de Dieu et garde la paix, peuple de Jérusalem, garde la paix18 !

12En dépit de ces sages mises en garde, la guerre a lieu, l’Égypte et les juifs sont vaincus, et Jérémie est accusé d’être responsable de la défaite de par son influence délétère : n’a-t-il pas maudit son peuple plutôt que de croire en lui et de l’encourager ? Quand Nabuchodonosor oblige les survivants à quitter Jérusalem en ruine et à se rendre en exil à Babylone, Jérémie, encore vivant malgré les mauvais traitements que son propre peuple lui a infligés, trouve des mots pour consoler ses « frères » : l’exil n’est que provisoire, Jérusalem est éternelle dans leurs cœurs et ressuscitera sous peu.

13À plusieurs reprises lors de l’écriture de cette pièce, Zweig exprime combien Rolland est présent à son esprit, et il n’est d’ailleurs pas impossible qu’en peignant Jérémie, il ait aussi pensé à son ami : Rolland comme Jérémie avait pressenti l’imminence d’une guerre particulièrement meurtrière, et comme lui, il avait lancé un appel afin que tout soit mis en œuvre pour l’éviter. Quoi qu’il en soit et comme le montre la correspondance de Zweig, c’est bien Rolland qui lui a donné le soutien psychologique nécessaire pour terminer cette œuvre.

Dans les courts laps de temps que me laisse mon service [son service aux Archives de Vienne], je travaille à mon œuvre [Jérémie]. Je pense alors souvent à vous, et je me demande si elle comptera à vos yeux : rien n’est plus important lorsqu’on travaille, lorsqu’on élabore une pensée intellectuelle, une architecture de l’art, que d’utiliser quelque chose de pur comme mesure. Et cette mesure est pour moi l’opinion des quelques hommes que j’aime et que je vénère. Penser à vous m’aide alors, car cela stimule au maximum mes forces morales et évince tout clin d’œil à un succès plus large. Cette œuvre que je suis en train d’écrire, je l’écris aussi pour vous, très cher ami – c’est peut-être ma première œuvre véritable19.

Je ne sais si j’aurais pu achever [Jérémie] sans votre exemple moral, et sans la certitude que me dictait ma conscience, que le sens de la justice émanant des grands hommes s’érige en loi du cœur20.

14La pièce paraît au printemps 1917, et Zweig en envoie aussitôt un exemplaire à Rolland. Les louanges de celui-ci sont dépourvues de toute ambiguïté : « J’ai bien reçu votre Jeremias et je l’ai lu avec une joie émue. C’est d’une grande beauté […]. Nous considérons que le théâtre contemporain compte peu d’œuvres de cette hauteur21 ». Désireux de faire connaître cette œuvre au public francophone et italophone, Rolland en fournit pour la revue Coenobium à Lugano une analyse dans laquelle, outre les parallèles tirés entre « cette épopée de la ruine de Jérusalem » et la situation actuelle, il souligne la fécondité que peut générer une défaite et la beauté contenue dans certaines douleurs : « Israël écrasé […] va à travers les temps, plein d’une joie intérieure qu’il n’avait jamais connue, et fort de ses sacrifices, qui lui ont rendu conscience de sa mission22 ». Plus tard, vers la fin de la guerre, Rolland évoquera cette pièce en des termes identiques : « En ces jours, je pense à votre Jeremias, et je crois que l’Allemagne verra en lui plus tard, le plus beau poème de sa chute23 ».

15Si Jérémie fait immédiatement l’objet d’un article de Rolland dans une revue suisse, c’est également en Suisse qu’elle sera jouée pour la première fois, et pour cause. Car comment représenter sur une scène allemande ou autrichienne une pièce qui annonce une défaite guerrière, et qui en fait même l’éloge en montrant la supériorité morale du vaincu ? Le directeur du théâtre municipal de Zurich peut quant à lui, dans un pays neutre, se permettre de relever ce défi et, on l’a vu, il invite Zweig à venir en Suisse pour suivre la mise sur pied de cette pièce. La représentation, qui a lieu le 27 février 1918, connaît un véritable succès : le tout Zurich international est dans la salle, et la NZZ marque l’événement en signalant qu’il est rare qu’un auteur soit à ce point fêté lors d’une première24.

Activités d’écriture de Zweig en Suisse

16Après la représentation de Jérémie, Zweig s’attend à chaque moment à être rappelé en Autriche, et même à être obligé de servir sous les drapeaux, car il sait que les soldats manquent : « Je ne sais pas si je pourrai rester longtemps encore. C’est un de ces procédés infâmes du militarisme que de faire part de ses décisions toujours au dernier moment, de ne pas laisser libre l’esprit ; j’ai reçu deux jours avant le départ la nouvelle de la prolongation de ma permission. C’est une torture morale bien raffinée25 ».

17Il n’en reste pas moins qu’en dépit de cette « torture morale », le séjour en Suisse exerce une influence bénéfique sur Zweig. D’une part, parce que « la paix extérieure en Suisse [lui] a rendu la paix intérieure » et qu’il peut désormais travailler régulièrement, comme il l’explique à Rolland dans ses lettres 26 ; d’autre part, parce qu’il se sent visiblement rassuré par la proximité de Rolland. Tout se passe en effet chez Zweig comme s’il avait besoin, pour être actif et efficace, d’être réchauffé par une amitié protectrice et par des encouragements continuels : « Je travaille toujours merveilleusement après avoir pu parler avec lui [avec Romain Rolland] », confie-t-il dans son Journal27.

18Dans les faits, les activités de Zweig en Suisse sont toutes, peu ou prou, liées à Rolland, et sa correspondance montre un accord de plus en plus parfait avec les idées du maître. A l’instar de Rolland, il importe désormais plus à Zweig de faire figure d’autorité morale que de célébrité littéraire ; à l’instar de Rolland, toutes ses pensées sont dirigées vers l’idée d’une solidarité européenne, tandis que tous ses textes rédigés en Suisse, qu’ils soient littéraires ou critiques, œuvrent systématiquement à faire prendre conscience des conséquences inhumaines de la guerre.

19C’est ainsi qu’en décembre 1917, Zweig rédige une petite brochure intitulée Au cœur de l’Europe28, dans laquelle il rend compte de l’une de ses visites à la Croix-Rouge et s’efforce d’attirer l’attention européenne sur le fonctionnement de logiques autres que celles qui régissent les combats. Dans le musée Rath à Genève, transformé en « Agence internationale des prisonniers de guerre », la pitié et la solidarité humaines ont par exemple évacué les haines et apaisé les souffrances de la guerre. « Le cœur de l’Europe, comme on le sent frapper ici !29 », s’exclame Zweig, et il convoque au passage de nombreux exemples de vies séparées par la guerre, et qui ont pu être réunies grâce à l’activité inlassable de la Croix-Rouge. Mais la brochure sert également de prétexte pour rendre un vibrant hommage à son ami Romain Rolland, qui non seulement a travaillé bénévolement deux ans pour cette organisation, mais qui, de surcroît, lui a fait don de tout l’argent de son Prix Nobel (obtenu en 1915).

20C’est en Suisse également, en 1918, que Zweig rédige l’essentiel de sa biographie sur Rolland – biographie qui relève d’une véritable hagiographie, car l’intellectuel français est présenté comme un être d’exception qui, où qu’il soit et quoiqu’il fasse, ne peut que se tenir au-dessus de la mêlée des hommes ordinaires. Rolland est « le plus grand événement moral de notre époque » ; il a été « la conscience de l’univers » et « la voix de l’Europe au temps de sa plus profonde détresse » ; il a offert à tous une consolation qui n’a pas « pour objet l’avenir, mais plus loin encore, l’éternité » ; sa gloire, venue juste avant la guerre, « lui [a] fait don de la puissance et de la parole afin qu’il soit l’avocat de l’Europe » ; enfin, il est le seul, « au milieu de la folie des masses ivres » pendant la guerre, à être resté « un homme libre, humain et vigilant30 ». La guerre, ici encore, est l’élément central de cet ouvrage, car c’est elle qui donne une unité à la vie de Rolland : seule une perspective traversée par l’expérience de la guerre permet de comprendre que les idées mises en scène par Rolland dans ses œuvres antérieures à la guerre (conflits entre patrie et conscience, défaite et victoire, etc.) n’étaient pas abstraites et hors de propos, mais contenaient des germes auxquels l’épreuve de la guerre a conféré tout leur sens : « Votre vie est une des rares qui ait les péripéties d’une œuvre d’art, qui va […] depuis des années vers un but inconnu. Ce but était – pour moi – l’épreuve morale de vos idées dans cette guerre […]. Jamais on n’aurait compris l’unité de votre œuvre sans cette guerre. C’est une prophétie morale31 ».

21Les quelques textes littéraires que Zweig écrit en Suisse font eux aussi de la guerre leur thématique essentielle – non pas parce qu’ils la décrivent en tant que telle ou dans ses conséquences matérielles concrètes, mais parce qu’ils examinent tantôt ses répercussions psychiques, tantôt la pression psychologique qu’elle exerce sur différentes individualités. C’est ainsi que la nouvelle « L’Épisode de Villeneuve » [« Episode am Genfer See », 1919] 32 conte l’histoire d’un paysan russe amené en France pour combattre sans qu’il comprenne pourquoi, et qu’on retrouve voguant sur un radeau près de Villeneuve, alors que lui-même se croyait sur le lac Baïkal. Désespéré de ne pouvoir rentrer chez lui à cause de la guerre, et laissé dans un total isolement psychologique puisque dans toute l’agglomération, seule une personne parle russe, le paysan met fin à ses jours en se noyant dans le lac. Remarquons au passage que le choix par Zweig de Villeneuve n’est pas innocent et qu’il est un moyen discret de saluer les journées passées à Villeneuve en compagnie de Rolland.

22Quant à la nouvelle « La contrainte » [« Der Zwang », 1918], elle est très clairement la transposition des angoisses personnelles de Zweig concernant l’éventualité de son recrutement tardif. Elle met en scène, en effet, un jeune Autrichien qui, jugé inapte au service, a réussi à s’installer avec sa femme en Suisse et coule ainsi des jours heureux dans une maison qui domine le lac de Zurich. La conscience du protagoniste n’est cependant pas tranquille et un jour, comme il s’y attendait, il reçoit de l’Autriche une lettre de conscription. Tout le récit repose sur un combat psychologique entre son refus d’obéir et une impulsion irrépressible qui le pousse envers et contre tout à rentrer dans son pays :

Je ne veux pas, je ne veux pas, rien en moi ne veut. Mais contre ma propre volonté, j’irai. C’est là que réside leur puissance terrible : on les sert contre sa propre volonté, contre sa propre conviction […]. On ne peut pas expliquer cela. C’est comme une contrainte : je ne peux casser la chaîne qui étrangle vingt millions d’êtres humains […]. C’est un combat inégal. On ne peut rien faire contre une machine. S’il s’agissait de personnes, on pourrait se défendre. Mais c’est une machine, une machine de boucher, un instrument sans âme, sans cœur et sans raison. On ne peut rien contre elle33.

23Le protagoniste, malgré lui, finit donc par se mettre en route. Arrivé à la frontière entre la Suisse et l’Autriche, il observe, en attendant son train, ce qui se passe de l’autre côté : il y voit des militaires armés qui gardent le pont et empêchent les gens de circuler. Il réalise alors avec horreur que traverser ce pont signifie se livrer à jamais aux atrocités de la guerre. Bouleversé par cette vision, il prend le train qui le ramène à Zurich plutôt que celui qui traverse la frontière…

Prises de position politique de Zweig

24Romain Rolland subit des attaques de plus en plus violentes de la part de la presse : ses positions pacifistes lui valent notamment l’appellation dédaigneuse de « défaitiste ». En mai 1918 paraît par exemple à Genève une brochure rédigée par Isabelle Debran, une Américaine domiciliée en Suisse, et dans laquelle Rolland est désigné comme le père du défaitisme intellectuel et l’emblème du suicide moral : le pacifisme en temps de guerre équivaut à une trahison, car il sape le moral de ceux qui s’engagent activement pour l’existence et la victoire de la patrie34.

25Zweig, peu enclin jusqu’ici à des prises de position politique ouvertes, réagit cette fois immédiatement pour défendre son ami. Dans un article de la revue Friedenswarte35 intitulé « Aveu de défaitisme » [« Bekenntnis zum Defaitismus », 1918]36, il propose de ne pas s’offusquer du mot de haine des ennemis, de faire de cette insulte une fierté et même de l’adopter comme mot d’ordre réunissant sous le même toit tous ceux qui considèrent que cette guerre criminelle doit enfin cesser. Ainsi reconsidéré, le défaitiste devient celui qui ne souhaite la victoire ou la défaite pour personne ; celui qui n’éprouve aucune honte à être le plus faible dans la guerre ; celui qui refuse de devenir victime de l’orgueil, de l’argent ou de l’honneur ; celui, enfin, qui se préoccupe plus de la souffrance des hommes que de la prospérité des nations. Ces termes, on l’aura reconnu, reprennent certains de ceux utilisés par Zweig pour qualifier l’attitude du protagoniste éponyme de Jérémie, et dans Le Monde d’hier, il ne se fait d’ailleurs pas faute de faire de son prophète un membre du clan des « défaitistes »37.

26Rolland n’est pas tout à fait convaincu par les arguments de son ami, car il se refuse quant à lui à revendiquer le défaitisme, qui pour lui ne peut jamais revêtir des valeurs positives et actives : « Non, je ne verrai jamais en cette injure un titre d’honneur, et je le repousse, quant à moi, de toutes mes forces […]. Je ne suis pas un "non-résistant", bouddhiste ou tolstoïen. Je ne me résigne nullement à être vaincu. Et je ne le conseillerai jamais aux autres38 ». Néanmoins, Rolland se montre fort reconnaissant à Zweig d’avoir enfin mis sa plume en action et osé une prise de position publique.

Conclusion : Zweig, Rolland et la Suisse

27La conjonction Rolland–Suisse a infléchi la créativité de Zweig dans une direction bien déterminée. Au début de la guerre, les positions de l’écrivain autrichien étaient encore timides et peu assurées, et dans le cadre de son travail aux Archives de Vienne, il suivait assez fidèlement la ligne officielle de la propagande ; ses échanges épistolaires et ses rencontres avec Romain Rolland, combinées avec son séjour en Suisse, ont cependant tôt fait d’arrondir les angles de son patriotisme et d’aiguiser sa volonté, son courage et son activisme. A l’instar de Rolland, il en vient à demander à l’Europe de répudier toute haine nationale et de faire acte d’empathie en éprouvant le sort des autres nations comme le sien propre ; à l’instar de Rolland qui se réfère à Goethe39, il proclame un idéal de littérature mondiale [Weltliteratur], c’est-à-dire un idéal de tolérance universelle basée sur le dialogue plutôt que sur la confrontation, un idéal de perméabilité des frontières plutôt que de leur fermeture. Cette position s’avère d’autant mieux défendable en Suisse, pays doté de toutes les qualités nécessaires pour favoriser l’échange international :

J’aimais la Suisse comme je ne l’avais jamais aimée […]. L’idée suisse de la cohabitation sans hostilité des nations dans un même espace, cette maxime très sage de hausser jusqu’à la fraternité les différences des langues et des populations, par l’estime réciproque et la démocratie honnêtement vécue. Quel exemple pour notre Europe en proie à la pire confusion ! Refuge de tous les persécutés, depuis des siècles asile de la paix et de la liberté, hospitalière à toutes les opinions tout en conservant avec la plus grande fidélité son caractère particulier – combien s’est révélée importante pour notre monde l’existence de cet État supranational unique40 !

28Cet idéal supranational, Zweig le renforce cependant par un élément qu’il ne doit pas à Rolland et qu’il ne partage d’ailleurs aucunement avec lui, et qui lui vient de sa judaïté : c’est celui de la diaspora juive, qu’il aime et qu’il approuve justement parce qu’elle incarne une dimension cosmopolite et humaine située en dehors de toute étroitesse nationale (l’état d’Israël n’existait pas encore à l’époque). Dans une lettre à Martin Buber, il confie : « Je trouve que notre situation actuelle [la situation des Juifs] est la plus merveilleuse de l’humanité : cette unité sans langue, sans lien, sans pays natal, juste par le fluide de l’être41. »

Notes de bas de page numériques

1 Stefan Zweig, Le Monde d’hier. Souvenirs d’un Européen, trad. de Serge Niémetz, Paris, Librairie générale française, 1996, p. 308.

2 Stefan Zweig, Le Monde d’hier. Souvenirs d’un Européen, p. 279.

3 « Lettre 182. Stefan Zweig à Romain Rolland » (14.11.1917), in Romain Rolland – Stefan Zweig, Correspondance 1910-1919, Paris, Albin-Michel, 2014, p. 348.

4 Stefan Zweig, Le Monde d’hier. Souvenirs d’un Européen, p. 240.

5 Stefan Zweig, Le Monde d’hier. Souvenirs d’un Européen, p. 240.

6 Cette correspondance comprend plus de six cents lettres.

7 Stefan Zweig, Le Monde d’hier. Souvenirs d’un Européen, p. 243.

8 « Lettre 64. Stefan Zweig à Romain Rolland » (11.11.1914), in Romain Rolland – Stefan Zweig, Correspondance 1910-1919, p. 117 (les italiques sont de Zweig).

9 Cf. Robert Dumont, Stefan Zweig et la France, Paris, Didier, 1967, p. 143.

10 « Lettre 46. Romain Rolland à Stefan Zweig » (28.09.1914), in Romain Rolland – Stefan Zweig, Correspondance 1910-1919, p. 76.

11 Romain Rolland, « Lettre à ceux qui m’accusent », in Au-dessus de la mêlée, Paris, Payot, 2013, p. 121.

12 Cf. notamment dans la « Lettre 73. Romain Rolland à Stefan Zweig » (9.12.1914), in Romain Rolland – Stefan Zweig, Correspondance 1910-1919, p. 143.

13 « Lettre 49. Romain Rolland à Stefan Zweig » (10.10.1914), in Romain Rolland – Stefan Zweig, Correspondance 1910-1919, p. 81-82.

14 Stefan Zweig, Le Monde d’hier. Souvenirs d’un Européen, p. 288.

15 « Lettre 64. Stefan Zweig à Romain Rolland » (11.11.1914), in Romain Rolland – Stefan Zweig, Correspondance 1910-1919, p. 120.

16 Cf. par exemple la « Lettre 64. Stefan Zweig à Romain Rolland » (11.11.1914), in Romain Rolland – Stefan Zweig, Correspondance 1910-1919, p. 119.

17 Cf. Le « Livre de Jérémie » dans L’Ancien Testament.

18 Stefan Zweig, Jérémie, trad. par Olivier Mannoni, Paris, Payot, 2014, p. 61.

19 « Lettre 170. Stefan Zweig à Romain Rolland » (22.07.1916), in Romain Rolland – Stefan Zweig, Correspondance 1910-1919, p. 327.

20 « Lettre 181. Stefan Zweig à Romain Rolland » (4.09.1917), in Romain Rolland – Stefan Zweig, Correspondance 1910-1919, p. 346-347.

21 « Lettre 183. Romain Rolland à Stefan Zweig » (15.11.1917), in Romain Rolland – Stefan Zweig, Correspondance 1910-1919, p. 350.

22 Romain Rolland, « Vox clamantis » (écrit pour la revue Coenobium), in Les Précurseurs, Paris, Éditions de l’Humanité, 1920, p. 130.

23 « Lettre 257. Romain Rolland à Stefan Zweig » (25.10. 1918), in Romain Rolland – Stefan Zweig, Correspondance 1910-1919, p. 499.

24 Voir Stefan Zweig, Tagebücher, Frankfurt a.M., Fischer, 1984, p. 571.

25 « Lettre 216. Stefan Zweig à Romain Rolland » (23.03. 1918), in Romain Rolland – Stefan Zweig, Correspondance 1910-1919, p. 420.

26 Cf. « Lettre 207. Stefan Zweig à Romain Rolland » (15.02.1918), in Romain Rolland – Stefan Zweig, Correspondance 1910-1919, p. 406-407.

27 Stefan Zweig, Tagebücher, p. 279 (je traduis).

28 La brochure a d’abord été publiée à Vienne, dans la Neue freie Presse le 23.12.17, puis chez Rascher à Zurich en 1918 avant d’être publiée, également en 1918, en français dans le Carmel à Genève.

29 Stefan Zweig, Au cœur de l’Europe, Genève, Carmel, 1918, p. 18.

30 Stefan Zweig, Romain Rolland, Paris, Librairie générale française, 2000, p. 37, 90, 96, 87, 273.

31 « Lettre 229. Stefan Zweig à Romain Rolland » (31.05.1918), in Romain Rolland – Stefan Zweig, Correspondance 1910-1919, p. 444.

32 Stefan Zweig, « Episode am Genfer See », in Ausgewählte Novellen, Stockholm, Bermann-Fischer, 1946, p. 257-271.

33 Stefan Zweig, Der Zwang, Wien, Strom-Verlag, 1929, p. 13-14 (je traduis).

34 Cf. Isabelle Debran, Monsieur Romain Rolland initiateur du défaitisme, Genève, Henri Jarrys, 1918.

35 Revue fondée en 1899 par Alfred Fried, lauréat du Prix Nobel de la paix en 1911.

36 Stefan Zweig, « Bekenntnis zum Defaitismus », in Die Friedens-Warte, vol. 20, n.7/8, 1918, p. 215-216.

37 Cf. Stefan Zweig, Le Monde d’hier, p. 298.

38 « Lettre 240. Romain Rolland à Stefan Zweig » (14.07.1918), in Romain Rolland – Stefan Zweig, Correspondance 1910-1919, p. 467.

39 Cf. par exemple dans son Théâtre du peuple, où il écrit que « Le monde devient européen, car la nation n’y suffit pas […]. Et Goethe [disait] : "La littérature nationale n’a plus grande signification ; notre temps est l’époque de la littérature mondiale" ». Cité par Stefan Zweig, Romain Rolland, p. 126.

40 Stefan Zweig, Le Monde d’hier, p. 310.

41 Lettre de Stefan Zweig à Martin Buber du 24 janvier 1917, cité dans Romain Rolland – Stefan Zweig, Correspondance 1910-1919, p. 518 (note).

Bibliographie

Debran Isabelle, Monsieur Romain Rolland initiateur du défaitisme, Genève, Henri Jarrys, 1918.

Dumont Robert, Stefan Zweig et la France, Paris, Didier, 1967.

Niémetz Serge, Stefan Zweig : le voyageur et ses mondes : biographie, Paris, Belfond, 1996.

Rolland Romain, Au-dessus de la mêlée, Paris, Payot, 2013.

Rolland Romain, Les Précurseurs, Paris, Éditions de l’Humanité, 1920.

Rolland Romain et Zweig Stefan, Correspondance 1910-1919, Paris, Albin Michel, 2014.

Zweig Stefan, Le Monde d’hier. Souvenirs d’un Européen, trad. de Serge Niémetz, Paris, Librairie générale française, 1996.

Zweig Stefan, Jérémie, trad. par Olivier Mannoni, Paris, Payot, 2014.

Zweig Stefan, Au cœur de l’Europe, Genève, Carmel, 1918.

Zweig Stefan, Romain Rolland, trad. par Odette Richez, Paris, Librairie générale française, 2000.

Zweig Stefan, Tagebücher, Frankfurt a.M., Fischer, 1984.

Zweig Stefan, Ausgewählte Novellen, Stockholm, Bermann-Fischer, 1946.

Zweig Stefan, Der Zwang, Wien, Strom-Verlag, 1929.

Zweig Stefan, « Bekenntnis zum Defaitismus », in Die Friedens-Warte, vol. 20, n.7/8, 1918, p. 215-216.

Pour citer cet article

Corinne Fournier Kiss, « Solidarité franco-allemande en Suisse au cœur de la première guerre : Stefan Zweig (1881-1942) et Romain Rolland (1866-1944) », paru dans Loxias-Colloques, 8. Ecrire en Suisse pendant la grande Guerre, Ecrire en Suisse pendant la Grande Guerre, Solidarité franco-allemande en Suisse au cœur de la première guerre : Stefan Zweig (1881-1942) et Romain Rolland (1866-1944), mis en ligne le 22 août 2017, URL : http://revel.unice.fr/symposia/actel/index.html?id=943.


Auteurs

Corinne Fournier Kiss

Corinne Fournier Kiss est Maître-assistante à l’Université de Berne, où elle enseigne la littérature française et comparée. Ses travaux portent essentiellement sur la littérature fantastique européenne, la littérature francophone et la littérature féminine française et slave (russe, polonaise et tchèque). Elle est l’auteure d’une monographie intitulée La Ville européenne dans la littérature fantastique du tournant du siècle (1860-1915) [L’Age d’homme 2007, Prix européen du Grand Prix de l’Imaginaire 2009] et termine actuellement un ouvrage sur la réception de Mme de Staël et de George Sand en Pologne au XIXe siècle.