Loxias-Colloques |  8. Ecrire en Suisse pendant la grande Guerre |  Ecrire en Suisse pendant la Grande Guerre 

Marie-Noëlle Brand Crémieux  : 

Introduction historique.
1914-1918 : la Suisse, un îlot dans la tourmente ?

Résumé

Pendant la Première Guerre mondiale, la neutralité de la Suisse est respectée et son intégrité territoriale est préservée. Néanmoins, la Suisse n’est pas épargnée par le conflit. Elle vit une situation de guerre totale. Sa cohésion nationale est menacée par une fracture culturelle aggravée par le poids des influences étrangères, puis par une fracture sociale. La neutralité apparaît comme un concept flou, sujet à interprétations multiples, avec lequel jouent les individus, la société fracturée, les autorités fédérales, les belligérants et les intellectuels.

Index

Mots-clés : cohésion nationale , Histoire, neutralité, Première Guerre mondiale, Suisse

Géographique : Jura , Suisse

Chronologique : 1914-1918 , Période contemporaine, XXe siècle

Plan

Texte intégral

Introduction

Il faut que dans la tempête, elle [la Suisse] se dresse comme une île de justice et de paix, où, tels les grands couvents du premier Moyen Age, l’esprit trouve un asile contre la force effrénée, et où viennent aborder les nageurs fatigués de toutes les nations, tous ceux que lasse la haine et qui, malgré les crimes qu’ils ont vus et subis, persistent à aimer tous les hommes comme leurs frères1.

1Romain Rolland, établi en Suisse durant les années de guerre, voit en ce pays un refuge pour tous ceux qui refusent le conflit européen, un havre pour l’esprit, un lieu où serait préservé un reste de civilisation et d’humanité.

2La métaphore de la Suisse « île de paix », employée par l’écrivain pacifiste dans son célèbre réquisitoire contre la guerre engagée en août 1914, est largement utilisée pour caractériser la Suisse pendant la Première Guerre mondiale. Une série de cartes postales éditées en Suisse diffuse cette image : le Palais fédéral sur un rocher au milieu d’une mer agitée ; un chalet suisse perché sur un alpage, entouré de soldats qui protègent la frontière, avec tout autour de lourds nuages menaçants portant les noms des belligérants ; « Die Friedeninsel » surmontée d’un gigantesque phare qui éclaire le ciel orageux par ses actions bienfaisantes, une Suisse humanitaire au milieu d’un monde d’inhumanité, une Suisse qui défend et porte les valeurs de la civilisation. Cette métaphore sert d’outil de propagande pour les autorités fédérales dans le but d’assurer l’unité nationale. Elle perdure pendant l’entre-deux-guerres et devient un élément justifiant la politique de défense patriotique au moment de la Seconde Guerre mondiale. L’« île » est encore utilisée en 2014 par l’historien bâlois G. Kreis dans son ouvrage au titre très évocateur Insel der unsicheren Geborgenheit2. Ce livre qui s’inscrit dans les nouvelles recherches historiographiques déconstruit le mythe de l’« île » Suisse.

3Dans quelle mesure la Suisse neutre mais située au cœur d’un continent embrasé, frontalière de la France et de l’Allemagne, constitue-t-elle un élément isolé et présente-t-elle une unité et un caractère particulier au sein de ce vaste espace qu’est l’Europe en guerre ? L’analyse croise plusieurs échelles qui se superposent et interagissent entre elles : l’échelle globale, l’échelle nationale souvent indissociable d’une approche transnationale et l’échelle individuelle.

4À partir d’août 1914, bien que la neutralité et l’intégrité du territoire aient été respectées par les belligérants, l’armée suisse doit assurer la protection des frontières, tandis que la société tout entière se mobilise autour de la guerre. Durant quatre ans, la Suisse vit à sa manière une situation de « guerre totale ». La cohésion nationale est menacée dès le début du conflit par une fracture culturelle, le « Röstigraben », sur laquelle jouent les influences étrangères. Puis, à mesure que la guerre se prolonge, une fracture sociale s’installe et atteint son apogée en novembre 1918.

1. La Suisse est neutre mais elle est en guerre 

1.1. Menaces, front, occupation des frontières

5Le 1er août 1914, le gouvernement suisse annonce la mobilisation générale. Le 3 août, l’Assemblée fédérale confère les pleins pouvoirs au Conseil fédéral afin qu’il prenne « toutes les mesures propres à assurer la sécurité, l’intégrité et la neutralité de la Suisse3 ». Ulrich Wille est nommé général en chef des armées, Theophil von Specher von Bernegg chef d’état-major. Le 4 août, la déclaration de neutralité stipule une « stricte impartialité » et la nécessité d’éviter toute action susceptible de favoriser l’un ou l’autre des pays en guerre4.

6La Suisse se trouve prise en tenaille entre l’Allemagne au Nord, l’Autriche à l’Est, la France à l’Ouest, puis, à partir de 1915, l’Italie au Sud. Elle représente une position stratégique surtout pour l’Allemagne et pour la France et court le risque que l’un des belligérants ne tente de passer par son territoire en vue d’attaquer l’ennemi. En 1912, lors de sa visite en Suisse, l’empereur Guillaume II a pu se rendre compte de la force de l’armée helvétique – bien mieux organisée, à ses yeux, que l’armée belge – et de ses capacités à se défendre et à contenir une éventuelle contre-offensive française par le Sud pouvant faire échouer le plan Schlieffen5. Du côté français, on envisage une offensive par l’Alsace-Lorraine en cas de violation de la neutralité suisse6. La ligne du front occidental arrive sur la frontière suisse au niveau du saillant du Largin, dans la région de Porrentruy. Les Vosges constituent un front secondaire mais néanmoins théâtre d’âpres et sanglantes batailles.

7En août 1914, la Suisse mobilise 238 000 hommes pour défendre les frontières. Les effectifs évoluent au cours des quatre années en fonction des opérations de guerre sur le front de l’Ouest, les soldats effectuant en moyenne entre 550 et 600 jours de service actif7. L’essentiel des troupes est stationné en Ajoie. Le saillant du Largin est occupé durant toute la durée du conflit et sert de poste d’observation et de renseignement : sur la droite, les Suisses peuvent observer les Allemands, sur la gauche, les Français. Des fortifications de terre et de bois sont construites.

8De nombreuses incursions aériennes ont lieu sur le territoire helvétique : un rapport recense 1004 violations de la frontière par 803 avions (357 français, 238 allemands, 248 inconnus) en raison de mauvaises conditions météorologiques ou de la négligence des pilotes ; Porrentruy subit plusieurs bombardements, si bien que la population finit par installer une croix de bois peinte en blanc et éclairée la nuit pour signaler la ville8.

9L’armée suisse, dans sa position défensive, est épargnée par le conflit. En quatre ans de guerre on dénombre environ 2000 victimes dont 1895 à cause de la grippe espagnole. Le soldat à la frontière vit la guerre en observateur, à distance. Il entend la violence du canon :

[L]’artillerie du transformateur tape dur sur le plateau 417-ouest Bisel. Les Allemands continuent méthodiquement l’arrosage de Seppois. Le spectacle est extraordinaire. Cette sombre orgie finirait par exalter l’homme le mieux trempé du monde9.

10Il croise les déserteurs effarés. Il est témoin des incursions aériennes. Le soldat suisse ne connaît pas l’expérience extrême des tranchées. Il n’empêche qu’il souffre du « cafard », de la monotonie du service de garde, du mépris de ses supérieurs, de l’inquiétude de laisser son entreprise ou son exploitation agricole, de la séparation d’avec sa famille, de la chaleur, du froid, de l’inconfort, et surtout à partir de 1917, du manque de nourriture. En outre, la tâche peut être rude quand il s’agit de travailler aux fortifications ou lors des marches de plusieurs heures en montagne, muni du paquetage et du matériel de construction à transporter.

11Dans la région frontalière, les civils sont confrontés à la proximité du conflit. À la crainte des bombardements aériens s’ajoutent des tracasseries et désagréments vécus au quotidien. Dès les premiers mois de la guerre, la frontière est étroitement contrôlée par crainte des espions. Entre la Suisse et la France, son franchissement est rendu difficile. Pour cultiver les champs situés de l’autre côté, il faut présenter un passeport assorti d’un laissez-passer et n’utiliser que les routes et les points de passage autorisés. Du côté allemand, la frontière est totalement fermée. Les relations habituelles entre individus de part et d’autre de la frontière se trouvent donc extrêmement compliquées, voire stoppées par la guerre10. En revanche, sous d’autres aspects, la ligne de démarcation est poreuse. Ainsi, en 1917, des bûcherons travaillant près du Largin sont indisposés par des gaz allemands.

1.2. Une société mobilisée pour la guerre

12Pendant les quatre années que durent les hostilités, l’intégrité territoriale de la Suisse est préservée et son armée reste à l’écart des combats. Néanmoins, le pays subit de plein fouet les répercussions de la conflagration. Le passage à l’économie de guerre se fait rapidement, tandis que la population dans son ensemble, hommes, femmes et enfants, est mobilisée pour l’« effort de guerre ».

13Le déclenchement de la guerre perturbe les circuits commerciaux. La Suisse, dépendante de ses voisins pour son approvisionnement en denrées alimentaires et en matières premières, se retrouve brutalement dans une situation extrêmement délicate : en août 1914, elle dispose de réserves de céréales d’environ deux mois pour les civils, de 95 jours pour l’armée11. Le Conseil fédéral intervient aussitôt pour juguler la hausse des prix des produits alimentaires. Par ailleurs, conformément à la politique de neutralité et pour garantir au mieux le potentiel de son armée, il interdit la vente d’armes, de chevaux et d’appareils de communication. Il prend également le contrôle du commerce d’autres marchandises stratégiques (fourrage, explosifs). Un Office fédéral de l’alimentation est créé, dépendant directement du Département de l’économie. Les titres de ses sous-divisions révèlent les préoccupations du moment : Offices des pains, Service pour le ravitaillement en bétail de boucherie, Ravitaillement en pommes de terre, Service pour l’augmentation de la production agricole, Office du lait, Service des denrées monopolisées, Division des marchandises. Au sein du Département de l’économie sont ajoutés une Division de l’économie industrielle de guerre, ainsi qu’un Office central des transports à l’étranger12.

14En 1913, la Suisse importe autant des pays de l’Entente que des Puissances centrales. Elle doit, dès lors, jouer au mieux de sa neutralité pour assurer son ravitaillement et, dans le même temps, préserver des marchés pour son industrie d’exportation. De leur côté, les belligérants veulent avoir la garantie qu’elle ne fasse pas office d’intermédiaire pour l’approvisionnement de l’ennemi. Ils imposent des organismes de surveillance chargés de contrôler le commerce, s’ingérant ainsi dans l’économie suisse et empiétant sur la souveraineté des autorités fédérales. L’Allemagne inaugure la pratique en juin 1915, par la création de la Schweizerische Treuhandstelle à Zurich. Les pays de l’Entente suivent en fondant à Berne, en novembre de la même année, la Société Suisse de Surveillance économique.

15La Confédération obtient les produits qui lui sont nécessaires par un système de compensations. L’industrie horlogère, dont les ventes à l’étranger ont considérablement chuté depuis l’été 1914, se reconvertit dans la production de compteurs d’avions ou de minuteurs d’obus très appréciés des puissances en guerre. La métallurgie, l’industrie mécanique, l’industrie textile, l’industrie chimique, l’agroalimentaire voient leurs ventes augmenter, stimulées par les besoins de l’armée suisse et surtout par les exportations qui croissent fortement en 1915 et en 1916, et restent importantes jusqu’à la fin de la guerre13. En 1917, le Conseil fédéral fait le constat : « peu à peu, une grande partie de l’industrie mécanique suisse est en fait devenue une véritable industrie de guerre » et « des commandes colossales des deux camps sont en cours d’exécution en Suisse14 ». À partir de 1917, c’est surtout l’Entente qui en bénéficie, ayant plus à exporter que les Puissances centrales.

16Globalement l’économie suisse ne souffre pas trop de la guerre. L’industrie maintient une activité qui génère d’importants revenus et sauvegarde des emplois. L’hôtellerie, d’abord fortement touchée, survit grâce à l’accueil des internés. La paysannerie, devenue le « pilier du système » voit ses revenus augmenter considérablement jusqu’en 191715.

17Pourtant la guerre plonge toute une partie de la population dans la misère. Très vite, les prix des produits alimentaires, des vêtements, du charbon et des loyers augmentent tandis que les salaires baissent de 25 à 30 %. Les cartes de rationnement s’imposent pour les produits de première nécessité. La mobilisation des soldats, qui ne bénéficient que d’une faible solde lorsqu’ils sont en service actif, contribue aussi à appauvrir les ménages et désorganise les entreprises familiales. En 1916-1917, la situation se dégrade de façon dramatique, surtout pour les ouvriers et les employés. En raison du blocus imposé à l’Allemagne par l’Entente, les importations de charbon allemand diminuent considérablement. Puis, après l’entrée en guerre des Etats-Unis, l’achat de céréales et de matières premières outre-Atlantique devient plus difficile. À Berne, à Thoune, à Bienne, à Zurich, les femmes réagissent contre la cherté des prix par les « manifestations des marchés ». Un arrêté du Conseil fédéral garantit la vente de lait et de pain à prix réduit pour les plus pauvres. Un prix plafond est fixé pour les pommes de terre. Les communes ou les cantons mettent en culture les moindres parcelles non-exploitées ; les terrains de foot et places d’armes sont réquisitionnés16.

18On estime, qu’à la fin de l’année 1918, 18,5% de la population bénéficie d’une aide sociale. Dans la ville de Berne, un quart des habitants ont droit aux denrées à prix réduit17. Les municipalités et les associations caritatives mettent en place des soupes populaires fréquentées par un nombre toujours croissant de nécessiteux, parmi lesquels de nombreux enfants.

19En dépit des difficultés, chacun contribue à l’effort de guerre. Dans les exploitations agricoles ou dans les entreprises familiales, les femmes, les enfants, les parents âgés doivent pallier l’absence des soldats partis défendre les frontières. La main-d’œuvre féminine est fortement sollicitée, surtout dans les services ou dans les usines de confection et d’armement. Par ailleurs, les œuvres de bienfaisance en faveur des soldats ou des indigents, ainsi que l’action humanitaire à l’égard des victimes de guerre font appel au devoir de chacun. Dès lors, une bonne partie des civils se trouve engagée pour soulager les maux de la guerre ou soutenir la troupe.

20La Croix-Rouge suisse, ainsi que de nombreuses autres associations caritatives, parmi lesquelles les organisations féminines issues tant de la bourgeoisie que des milieux ouvriers, sont très actives pour venir en aide aux soldats ou aux civils suisses : distribution de colis, collectes de vêtements, mise en place du « don national suisse pour les soldats et leurs familles » en avril 1918. Des femmes se chargent de l’entretien du linge militaire : raccommodage, lessive, tricotage de chaussettes.

21L’action humanitaire mobilise les énergies. Elle permet à la population de s’engager, à sa manière, dans la guerre généralisée. Le CICR, sous l’impulsion de son président Gustave Ador, et la Croix-Rouge suisse se lancent dans une opération d’envergure au service des prisonniers de guerre. L’Agence internationale des prisonniers de guerre est créée dès les premières semaines du conflit. Elle transmet des listes de captifs d’un belligérant à l’autre, achemine les correspondances et colis et organise des campagnes de dons. Pendant les quatre années que dure le conflit, elle établit 4 805 000 fiches. Elle reçoit environ 3000 lettres par jour, jusqu’à 30 000 pendant les grandes batailles18. En octobre 1914, l’Agence occupe plus de 12 000 personnes, pour la plupart des bénévoles. Le CICR organise également des échanges de grands invalides prisonniers de guerre. Les convois transitent par la Suisse. Aux passages des trains, la population découvre la brutalité du conflit à la vue des blessures et des mutilations dont souffrent les soldats. Des rassemblements se forment dans les gares-étapes pour accueillir les blessés et leur apporter des dons, tandis que les infirmières de la Croix Rouge pansent les plaies.

22À partir de 1916, des internés sont recueillis en Suisse pour recevoir des soins. 67 000 prisonniers de guerre séjournent ainsi dans le pays : 38 000 Français, 4000 Belges, 4000 Britanniques, 21 000 Allemands, 600 Autrichiens et 600 Hongrois19. Dans l’ensemble, la population les accueille très favorablement. Ainsi, à Saint-Imier,

[à] l’arrivée de l’express de 8h39, le Corps de musique entonne La Marseillaise qu’il joue deux fois. Vingt bannières sont arborées en ligne sur le quai. Les sociétés françaises et italiennes sont là. Un groupe d’une dizaine d’enfants costumés attend avec des bouquets énormes ou des paniers de fleurs aux couleurs françaises. […] Voici le train arrêté. Des bravos et de cris de Vive la France ! éclatent dans la multitude des grands et des petits, massés jusque dans les arbres et sur les toits des maisons […]20.

23Des œuvres d’entraide se chargent de quêtes ou proposent des concerts et des conférences afin d’obtenir des fonds en faveur des internés. Même les enfants participent :

[o]n se prive de petites douceurs, on fait le sacrifice de quelques centimes destinés autrefois à l’achat de friandises, on gagne quelques sous en faisant des commissions, et on apporte spontanément, joyeusement, avec des yeux brillants de plaisir et le cœur débordant de bonheur son obole […]21.

24Les femmes s’occupent de l’entretien du linge tandis que les enfants préparent des charpies pour les blessés.

25Toutefois, l’élan de générosité et l’enthousiasme de la population à l’égard des internés s’essoufflent à mesure que la guerre s’allonge et que les difficultés d’approvisionnement s’accroissent.

2. La guerre menace la cohésion nationale

26Dès le début de la guerre des dissensions apparaissent, notamment entre Romands et Alémaniques, à propos de la politique du Conseil fédéral et de l’orientation de l’armée. Les actions des belligérants sont également interprétées différemment selon les régions linguistiques. Les journalistes, les intellectuels, les hommes politiques de part et d’autre de la Sarine s’affrontent violemment, surtout par voie de presse. La cassure sur le plan culturel est amplifiée par les influences, voire les pressions venant de l’extérieur. La cohésion nationale est gravement menacée. Le gouvernement tente par différents moyens de ressouder le pays autour d’une identité suisse. L’enlisement du conflit et les difficultés économiques croissantes entraînent, en outre, une fracture sociale.

2.1. La fracture culturelle

27Au début du XXe siècle, les relations culturelles et économiques entre la Suisse alémanique et l’Allemagne sont étroites. Par ailleurs, les Allemands sont nombreux en Suisse et occupent des positions importantes dans les grandes entreprises, dans les rédactions journalistiques et dans les universités alémaniques. De son côté, la Suisse romande est naturellement tournée vers la France et nombre d’intellectuels et journalistes diffusent un discours de méfiance, si ce n’est de franche hostilité, vis-à-vis de l’impérialisme wilhelmien. En 1909, l’« affaire du Gothard », avec le projet d’octroyer des tarifs ferroviaires préférentiels à l’Allemagne et à l’Italie, fait éclater les dissentiments entre régions linguistiques. Lorsque la Convention est ratifiée en 1913, les Romands accusent les autorités fédérales de complaisance à l’égard du voisin germanique. Les soupçons romands sont aussi attisés par la venue de Guillaume II à Berne en 1912. À l’inverse, outre-Sarine, la visite du Président Fallières, deux ans plus tôt, avait suscité une certaine rancœur contre la France et les Suisses francophones, tandis que les oppositions romandes sur la question du Gothard irritent profondément.

28Les tensions se cristallisent avec le déclenchement du conflit. La nomination au titre de général d’Ulrich Wille, ouvertement germanophile, formé aux méthodes prussiennes et de surcroît marié à une von Bismarck – bien que de parenté éloignée avec l’ancien chancelier d’Empire – laisse aux Romands l’impression que la Berne fédérale a choisi son camp. La polémique enfle au moment de l’invasion de la Belgique et de la destruction de Louvain. La violation de la neutralité belge, les exactions commises par les troupes allemandes et les explications avancées par Bethmann-Hollweg pour les justifier sont perçues comme scandaleuses en Suisse romande. Du côté de la Suisse alémanique, les réactions sont plus mitigées et les désapprobations tempérées par des excuses. Dans les journaux francophones, les courriers des lecteurs trahissent les ressentiments et la colère. À Fribourg, ville bilingue, les esprits s’échauffent entre partisans de la France et partisans de l’Allemagne22.

29La presse prend position et devient le principal vecteur de la fracture culturelle et linguistique. Le parti pris est total pour des quotidiens comme la Tribune de Genève, la Gazette de Lausanne ou le Zürcherpost, ainsi que pour les journaux satiriques LArbalète (Lausanne) et le Nebelspalter (Zurich). La Neue Zürcher Zeitung est plus impartiale. La question belge est au cœur de l’actualité. Les journaux romands dénoncent avec véhémence la lâcheté allemande, ainsi que les atteintes portées au droit et à la civilisation, photos à l’appui. Les articles publiés par le Zürcherpost évoquent, quant à eux, la « prétendue » destruction de Louvain et insistent sur la nécessité pour les soldats allemands de se défendre contre les « francs-tireurs » belges. Une telle interprétation des événements soulève incompréhension et animosité du côté romand.

30La mobilisation est intense aussi chez les intellectuels et les hommes politiques qui animent le débat à travers des articles de presse, des conférences ou des publications. Face à l’absence de dénonciation officielle de la violation de la Belgique par le Conseil fédéral, le professeur lausannois Maurice Milloud publie dans La Gazette de Lausanne un article au titre éloquent « Neutres mais pas pleutres ». L’homme politique zurichois Oskar Wettstein réplique que « [l]a Suisse n’est pas le tribunal de l’histoire23 ». Le 14 décembre, dans une conférence intitulée « Notre point de vue suisse », prononcée à Zurich, à l’invitation de la Nouvelle société helvétique, Carl Spitteler appelle ses compatriotes à rester unis. Au sujet de la Belgique, Spitteler ne peut toutefois s’empêcher de condamner l’Allemagne. Ses propos sont alors vivement critiqués en Suisse alémanique.

31L’emploi des gaz lors de la Bataille d’Ypres puis le naufrage du Lusitania en 1915 ravivent la controverse. Le point d’orgue est atteint en 1916 avec l’« affaire des colonels » : le sous-chef de l’état-major Egly et le chef du service de renseignements von Wattenwyl échangent des données avec des militaires allemands et autrichiens. La révélation de l’affaire choque profondément les Romands qui dénoncent « la collusion entre le gouvernement à majorité alémanique, la caste militaire suisse et les empires centraux24 ». D’importantes manifestations s’organisent dans les villes romandes. À Lausanne, le drapeau du consulat allemand est arraché par les manifestants. Pour désamorcer la crise, une procédure militaire est ordonnée mais les colonels ne reçoivent qu’une peine disciplinaire. Le Conseil fédéral redoutant des échauffourées projette d’envoyer des troupes en Suisse romande. Les manifestations reprennent avec force. À l’Assemblée fédérale, des députés genevois attaquent violemment le Conseil fédéral et l’état-major. En septembre 1916, la Ligue patriotique romande, nouvellement créée, s’en prend aux « menées tendant à enrôler la Suisse au service d’une cause [celle des puissances centrales] qui n’est pas celle du droit et qui fait courir au pays les plus graves dangers ». La ligue dénonce la méthode prussienne du drill en vigueur dans l’armée suisse, la « subordination de l’autorité civile à l’autorité militaire », la « servilité devant l’Allemagne ». Elle récuse la mise à l’écart croissante des Romands du gouvernement, de l’armée, de l’administration. En réaction, des Alémaniques fondent la Fédération des sociétés suisses allemandes qui accuse les Welsches de « pousser la guerre contre l’Allemagne » et d’être responsables de la crise nationale. La Fédération met en garde contre le danger que l’agitation romande fait courir à la Suisse alémanique25.

32En mai 1917, une nouvelle affaire survient : le conseiller fédéral Arthur Hoffmann, en charge de la diplomatie, envoie au conseiller national Robert Grimm alors en voyage à Petrograd, un télégramme apportant son soutien à une éventuelle paix séparée entre la Russie et les Puissances centrales. Hoffmann, dans sa volonté de promouvoir la paix, a agi à titre individuel sans avertir le Conseil fédéral mais les Alliés voient là une preuve de collusion avec l’Allemagne. La presse romande crie au déshonneur. Hoffman est contraint à la démission. L’Assemblée fédérale élit, pour lui succéder, le genevois Gustave Ador, conseiller d’État et président du CICR, connu pour sa francophilie – bien que le CICR soit resté neutre durant le conflit. Le choix d’Ador permet de désamorcer la crise entre Romands et Alémaniques. Par ailleurs, il rassure les Alliés et contribue à « rétablir la crédibilité d’une politique de neutralité jugée à Paris et à Londres trop attentive au point de vue allemand26 ».

2.2. Les influences étrangères

33Outre les tensions internes, la cohésion nationale se trouve menacée par les influences étrangères qui jouent elles-mêmes du fossé culturel. Les belligérants se lancent dans une propagande active sur le territoire suisse :

[s]ituée au cœur de l’Europe, multilingue, la Suisse devient une plate-forme centrale, spécialement pour la France et l’Allemagne. Ces deux puissances se livrent une lutte acharnée, soutenue au second plan par les dispositifs mis en place par l’Autriche-Hongrie, l’Angleterre, plus tardivement par l’Italie ou les États-Unis27.

34Les ambassades à Berne abritent les antennes du War Propaganda Bureau britannique, de la Zentrale für Auslanddienst allemande et de la Maison de la presse française. Les liens tissés avant-guerre par les élites suisses dans les pays voisins et la présence de nombreux intellectuels et opposants politiques réfugiés en Suisse facilitent la tâche.

35Pour chaque camp, l’objectif est autant de faire basculer l’opinion publique suisse en sa faveur que de contrer toute influence ennemie en terre helvétique. Zurich, Bâle et Genève offrent un terrain privilégié. La presse, l’édition, la scène culturelle constituent des cibles de choix. Au début de la guerre, avant que les autorités fédérales n’imposent la censure, les périodiques allemands, autrichiens et français sont largement diffusés. En 1915, l’Allemagne et la France s’assurent le contrôle respectivement du Zürcher Post et de la Tribune de Genève, journaux pourtant déjà acquis à leur cause. Les Allemands créent l’Illustrierter Kriegs-Kurier à Zurich, les Français Mars à Bâle, les Britanniques Le mois illustré à Zurich. Les agences de presse sont aussi un instrument efficace : en 1915, l’Entente ouvre la Neue Korrespondenz à Bâle ; à Zurich, l’Autriche fonde la Schweizerische Telegraphen-Information et l’Allemagne l’Allgemeiner Pressedienst.

Au total, 46 agences de presse sont fondées en Suisse entre 1914 et 1918, dont plus d’une trentaine peuvent être rattachées à la propagande, institutionnelle ou non, d’un groupement étranger28.

36L’interventionnisme français ou allemand se fait également à travers des revues suisses. Fin 1914, la France subventionne et alimente en photos un double numéro des Cahiers vaudois consacré aux bombardements de Reims et de Louvain. Les Allemands recourent abondamment aux Stimmen im Sturm du pasteur Blocher, notoirement germanophile et anti-romand ; une traduction en français de plusieurs pamphlets est même proposée par l’Indépendance helvétique, organe de propagande allemande à Genève29. Les maisons d’éditions suisses sont aussi convoitées :

Les exportations de livres édités en Suisse doublent entre 1914 et 1918. Sur le marché international, les chances de succès d’une brochure issue d’un pays neutre semblent plus importantes que celles d’une œuvre éditée d’un pays belligérant30.

37Wyss à Berne et Orell Füssli à Zurich servent les intérêts des Puissances centrales, tandis que Payot à Lausanne travaille pour l’Entente. Les actualités cinématographiques sont aussi marquées de l’empreinte de la Kriegsfilmpropaganda et des Services de l’armée français.

38À partir de 1916, la propagande s’élargit à tous les domaines artistiques. La surenchère pratiquée par les puissances en guerre participe au combat qui se joue entre la Kultur allemande et la Civilisation française. Chaque camp prend la population suisse à témoin pour la convaincre de sa supériorité morale. La France inaugure le mouvement par une tournée de la Comédie française. Puis c’est au tour du Deutsches Theater de se produire devant le public helvétique. La Philharmonie de Vienne concurrence l’Orchestre du Conservatoire de Paris. Le Kunsthaus de Zurich expose successivement Ludwig Richter et Max Liebermann, puis Edgar Degas, Paul Cézanne et Auguste Renoir. Rodin est présenté à la Kunsthalle de Bâle31.

2.3. Ressouder la fracture culturelle et lutter contre les influences étrangères

39Pour assurer le respect de la neutralité par les citoyens et maintenir la cohésion nationale, menacée à la fois de l’intérieur et de l’extérieur, les autorités fédérales prennent une série de mesures.

40Le 1er août, le Conseil fédéral suspend la liberté de la presse pour toutes les informations d’ordre militaire qui dépendent désormais du Bureau de presse de l’état-major et enjoint les journalistes à « veiller à la modération et à la réserve » dans leur traitement de l’information32. Le 30 septembre, un nouvel arrêté permet d’interdire tout imprimé susceptible de nuire aux relations avec les belligérants. La censure se renforce en 1915 avec la création de la Commission fédérale de contrôle de la presse qui vise directement les publications étrangères en Suisse. Pour raviver l’« esprit national » et lutter contre les « cultures de guerre » étrangères, les autorités fédérales se lancent elles-mêmes dans la propagande. C’est ainsi que sont éditées des séries de cartes postales glorifiant l’armée protectrice des frontières, présentant la Suisse comme une île de paix, ou mettant en avant le rôle humanitaire du pays. En 1917, l’état-major se lance dans la production cinématographique à destination du grand public avec la réalisation de l’Armée suisse, un documentaire sur l’occupation des frontières, tandis que la diffusion de la chanson La petite Gilberte tente de mobiliser le moral et le patriotisme des troupes.

41Dans sa tentative de sauver l’unité du pays, le Conseil fédéral trouve le concours de la Nouvelle société helvétique, un concours de circonstance entre un Conseil fédéral à dominante radicale et alémanique, et une association patriotique genevoise et vaudoise rassemblant un éventail d’intellectuels et d’hommes politiques, des libéraux modérés jusqu’à la droite réactionnaire, parmi lesquels Paul Seippel, William Rappard, René Payot, Georges Oltamare33. Dès 1914, la « NSH », partisane de l’« helvétisme » s’engage pour l’unité nationale et l’indépendance de la Suisse, s’adressant aussi bien aux élites qu’à la population, aux Romands qu’aux Alémaniques, par le biais de conférences ou d’articles de presse. En réalité, la société est traversée par la fracture culturelle, divisée entre Genevois, autour du Journal de Genève où s’exprime plutôt la tendance pacifiste et consensuelle, Lausannois, autour de la Gazette de Lausanne, quotidien pro-alliés, et patriotes conservateurs autour de Gonzague de Reynold. De Reynold parvient à s’imposer à Berne et se voit confier, en novembre 1914, le Bureau de Conférence des armées.

42Enfin, les autorités fédérales apportent leur soutien à l’œuvre engagée par le CICR. Outre le fait qu’il permette de conduire une politique de neutralité active et de positionner la Suisse dans le conflit mondial, l’humanitaire offre un terrain d’entente incontesté et permet de diffuser un imaginaire national porteur de consensus.

2.4. La fracture sociale

43Alors que l’élection de Gustave Ador au Conseil fédéral semble calmer la crise entre Romands et Alémaniques, les dissensions sur le plan social s’accentuent et font craindre l’éclosion d’un mouvement révolutionnaire. Les forces contestataires sont durement réprimées.

44En août 1914, les socialistes avaient voté les pleins pouvoirs au Conseil fédéral mais l’« Union sacrée » est vite rompue, le Parti socialiste suisse s’engageant dans le renouveau du mouvement internationaliste. Deux Congrès sont réunis en Suisse, à Zimmerwald en 1915 et à Kiental en 1916, rassemblant une quarantaine de délégués de l’Internationale socialiste parmi lesquels Lénine et Trotsky. En 1917, le PSS devient plus combatif, affirme son antimilitarisme et dénonce la guerre provoquée et prolongée par la bourgeoisie. Le principe de la défense nationale est rejeté34. Depuis 1915, les critiques contre l’armée et le général Wille se multiplient, stigmatisant une organisation de type prussien qui impose un rapport de subordination autoritaire entre la troupe et ses chefs35. Des comités de soldats antimilitaristes se forment et des manifestations hostiles à l’armée ou à la fabrication de matériel de guerre s’organisent. Les autorités fédérales réagissent par la manière forte : occupation militaire de la Chaux-de-Fonds en mai 1917, mort de trois ouvriers et d’un policier à Zurich en novembre 191736.

45Parallèlement, la contestation sociale s’amplifie et sa base s’élargit. Les tensions deviennent fortes à partir de 1916. À cause de la misère croissante et des difficultés d’approvisionnement, les classes moyennes se joignent aux revendications traditionnelles du mouvement ouvrier. La crise se durcit en février 1918 : en réaction au projet du Conseil fédéral de créer un service civil obligatoire, le Comité d’Olten est fondé. Le Comité brandit la menace d’une grève générale. Dans le contexte de la Révolution russe, les milieux conservateurs craignent une contagion révolutionnaire et des actions dirigées en sous-main par la Russie de Lénine ou par Berlin37. Le 9 août, le Conseil fédéral sous influence de l’état-major, se laisse convaincre de « déployer immédiatement toute l’armée » en cas de grève générale38. L’appel à la grève est lancé le 11 novembre. Aussitôt 100 000 soldats originaires des cantons ruraux sont envoyés dans les principales villes pour maintenir l’ordre face aux 250 000 grévistes et assurer la protection des bâtiments publics et des lieux stratégiques. Les affrontements font trois victimes à Granges. Le 14 novembre, le Comité d’Olten s’incline et décide la reprise du travail.

Conclusion

46De 1914 à 1918 la Suisse, bien qu’épargnée par les combats, vit l’expérience de la guerre totale. La population subit les conséquences du conflit au quotidien : occupation des frontières, passage à l’économie de guerre, pénurie, paupérisation. L’« effort de guerre » mobilise les énergies. Le gouvernement intervient de plus en plus dans l’économie et dans la société. La censure, la propagande, voire la culture de guerre, tentent de formater les esprits. Les tensions sociales s’aggravent jusqu’à l’affrontement armé.

47Dès l’été 1914 la cohésion nationale s’effrite. Si dans les pays belligérants l’ennemi est clairement identifié, en Suisse sa perception change selon que l’on se trouve d’un côté ou de l’autre de la frontière linguistique. De part et d’autre, les prises de positions sont très marquées. Par ailleurs, la Suisse constitue un enjeu pour les puissances en guerre qui s’ingèrent dans les affaires du pays et s’efforcent de contrôler l’opinion. Dans ce contexte de guerre totale et de trouble identitaire, la neutralité devient un concept mouvant, sujet à des interprétations multiples, qui place les autorités fédérales dans une position d’équilibriste, et avec lequel jouent la population, les intellectuels et les belligérants. Les autorités fédérales cherchent à conforter le patriotisme et l’unité nationale. Elles usent pour cela du mythe de l’« île ». Elles soutiennent également l’action humanitaire qui fait l’objet d’un consensus et permet un engagement à la fois individuel et collectif dans le conflit mondial.

48De 1914 à 1918 la Suisse est une terre d’accueil pour les exilés politiques, pour les « dissidents », pour les pacifistes. La tradition d’avant-guerre perdure, favorisée par la situation intérieure confuse : les opinions multiples et l’affrontement des propagandes laissent une place à la dissidence. Dans ces conditions, quel espace, quelle marge de manœuvre trouver pour écrire et publier, quelle audience escompter ?

Notes de bas de page numériques

1 Romain Rolland, « Au-dessus de la mêlée », [Journal de Genève, 15 septembre 1914], L’esprit libre, Paris, Albin Michel, 1953, p. 88.

2 Georg Kreis, Insel der unsicheren Geborgenheit. Die Schweiz in den Kriegsjahren 1914-1918, Zürich, Verlag Neue Zürcher Zeitung, 2014, 299 p.

3 Olivier Schneider, « Une dictature de la bureaucratie ? », in Roman Rossfeld, Thomas Buomberger, Patrick Kury (éd.), 14/18. La Suisse et la Grande Guerre, Baden, Hier und Jetzt, 2014, p. 49.

4 Georg Kreis, Insel der unsicheren Geborgenheit. Die Schweiz in den Kriegsjahren 1914-1918, Zürich, Verlag Neue Zürcher Zeitung, 2014, p. 62.

5 François Walter, Histoire de la Suisse. La création de la Suisse moderne (1830-1930), Neuchâtel, Alphil-Presses universitaires suisses, 2013, t. 3, p. 122-123 ; Voir aussi Jean-Jacques Langendorf et Pierre Streit, Face à la guerre, l’armée et le peuple suisses, 1914-1918 / 1939-1945, Gollion, Infolio, 2007.

6 François Walter, Histoire de la Suisse. La création de la Suisse moderne (1830-1930), Neuchâtel, Alphil-Presses universitaires suisses, 2013, t. 3, p. 122.

7 Rudolf Jaun, « La mutinerie du Gothard », in Roman Rossfeld, Thomas Buomberger, Patrick Kury (éd.), 14/18. La Suisse et la Grande Guerre, Baden, Hier und Jetzt, 2014, p. 24-25.

8 Hervé de Weck, « La menace sur le saillant de Porrentruy vue par l’Etat-major général suisse, mesures prises, guerre et défense aériennes (1913-1918) », Des deux côtés de la frontière : le Jura bernois, les régions françaises et alsaciennes avoisinantes pendant la Première Guerre mondiale, Actes du Colloque franco-suisse du 22 octobre 2011 à Lucelle, 2012, Porrentruy, Société jurassienne des officiers, p. 153.

9 Charles Gos, cité par Jean-Jacques Langendorf et Pierre Streit, Face à la guerre, l’armée et le peuple suisses, 1914-1918 / 1939-1945, Gollion, Infolio, 2007, p. 110-111.

10 André Dubail, « Les relations transfrontalières entre le Jura bernois et les pays belligérants dans les secteurs des trois frontières (1914-1918) », Des deux côtés de la frontière : le Jura bernois, les régions françaises et alsaciennes avoisinantes pendant la Première Guerre mondiale, Actes du Colloque franco-suisse du 22 octobre 2011 à Lucelle, 2012, Porrentruy, Société jurassienne des officiers, p. 83.

11 Jean-Jacques Langendorf et Pierre Streit, Face à la guerre, l’armée et le peuple suisses, 1914-1918 / 1939-1945, Gollion, Infolio, 2007, p. 106.

12 Organigramme de l’administration fédérale en 1919, Olivier Schneider, « Une dictature de la bureaucratie ? », in Roman Rossfeld, Thomas Buomberger, Patrick Kury (éd.), 14/18. La Suisse et la Grande Guerre, Baden, Hier und Jetzt, 2014, p. 64-65.

13 Roman Rossfeld, « Seul le puissant a des droits », in Roman Rossfeld, Thomas Buomberger, Patrick Kury (éd.), 14/18. La Suisse et la Grande Guerre, Baden, Hier und Jetzt, 2014, p. 145-171.

14 Cité par Roman Rossfeld, « Seul le puissant a des droits », in Roman Rossfeld, Thomas Buomberger, Patrick Kury (éd.), 14/18. La Suisse et la Grande Guerre, Baden, Hier und Jetzt, 2014, p. 154.

15 François Walter, Histoire de la Suisse. La création de la Suisse moderne (1830-1930), Neuchâtel, Alphil-Presses universitaires suisses, 2013, t. 3, pp. 131-132.

16 Peter Moser, « Bien plus qu’une transition », in Roman Rossfeld, Thomas Buomberger, Patrick Kury (éd.), 14/18. La Suisse et la Grande Guerre, Baden, Hier und Jetzt, 2014, p. 180-184.

17 François Walter, Histoire de la Suisse. La création de la Suisse moderne (1830-1930), Neuchâtel, Alphil-Presses universitaires suisses, 2013, t. 3, p. 132.

18 Cédric Cotter et Irène Hermann, « Quand secourir sert à protéger », in Roman Rossfeld, Thomas Buomberger, Patrick Kury (éd.), 14/18. La Suisse et la Grande Guerre, Baden, Hier und Jetzt, 2014, p. 250.

19 Thomas Bürgisser, « L’humanité comme raison d’Etat », in Roman Rossfeld, Thomas Buomberger, Patrick Kury (éd.), 14/18. La Suisse et la Grande Guerre, Baden, Hier und Jetzt, 2014, p. 270.

20 Article du Jura bernois du 17 mai 1916, cité par Patrick Bondallaz, « La mobilisation humanitaire de Saint-Imier en faveur des victimes de guerre », Des deux côtés de la frontière : le Jura bernois, les régions françaises et alsaciennes avoisinantes pendant la Première Guerre mondiale, Actes du Colloque franco-suisse du 22 octobre 2011 à Lucelle, 2012, Porrentruy, Société jurassienne des officiers, p. 228.

21 Article du Jura bernois du 13 avril 1916, cité par Patrick Bondallaz, « La mobilisation humanitaire de Saint-Imier en faveur des victimes de guerre », Des deux côtés de la frontière : le Jura bernois, les régions françaises et alsaciennes avoisinantes pendant la Première Guerre mondiale, Actes du Colloque franco-suisse du 22 octobre 2011 à Lucelle, 2012, Porrentruy, Société jurassienne des officiers, p. 232.

22 Pierre du Bois, Union et division des Suisses. Les relations entre Alémaniques, Romands et Tessinois au XIXe et au XXe siècle, Lausanne, Éd. de l’Aire, 1983, p. 66-67.

23 « Sous le feu des propagandes. La Suisse face à la Première Guerre mondiale », Exposition, Bibliothèque nationale suisse, Berne, 21 août–9 novembre 2014.

24 François Walter, Histoire de la Suisse. La création de la Suisse moderne (1830-1930), Neuchâtel, Alphil-Presses universitaires suisses, 2013, t. 3, p. 129.

25 Concernant la Ligue patriotique et la Fédération des sociétés suisses allemandes, voir Berner Tagblatt, 25 septembre 1916, cité par Pierre du Bois, Union et division des Suisses. Les relations entre Alémaniques, Romands et Tessinois au XIXe et au XXe siècle, Lausanne, Éd. de l’Aire, 1983, p. 82-85.

26 Jean-Claude Favez, « La Suisse pendant la guerre », in Stéphane Audoin-Rouzeau et Jean-Jacques Becker, Encyclopédie de la Grande Guerre, Paris, Perrin, 2012, t. 2, p. 448.

27 Alexandre Elsig, « Entre discorde et concorde », in Roman Rossfeld, Thomas Buomberger, Patrick Kury (éd.), 14/18. La Suisse et la Grande Guerre, Baden, Hier und Jetzt, 2014, p. 73.

28 Alexandre Elsig, « Entre discorde et concorde », in Roman Rossfeld, Thomas Buomberger, Patrick Kury (éd.), 14/18. La Suisse et la Grande Guerre, Baden, Hier und Jetzt, 2014, p. 89.

29 Alain Clavien, « Les intellectuels suisses dans la Grande Guerre », in Roman Rossfeld, Thomas Buomberger, Patrick Kury (éd.), 14/18. La Suisse et la Grande Guerre, Baden, Hier und Jetzt, 2014, p. 114.

30 Alexandre Elsig, « Entre discorde et concorde », in Roman Rossfeld, Thomas Buomberger, Patrick Kury (éd.), 14/18. La Suisse et la Grande Guerre, Baden, Hier und Jetzt, 2014, p. 91.

31 « Sous le feu des propagandes. La Suisse face à la Première Guerre mondiale », Exposition, Bibliothèque nationale suisse, Berne, 21 août – 9 novembre 2014.

32 François Walter, Histoire de la Suisse. La création de la Suisse moderne (1830-1930), Neuchâtel, Alphil-Presses universitaires suisses, 2013, t. 3, p. 128.

33 Sur la « Nouvelle société helvétique », voir Eric Santschi, Par delà la France et l’Allemagne, Gonzague de Reynold, Denis de Rougement et quelques lettrés libéraux suisses face à la crise de la modernité, Neuchâtel, Editions Alphil – Presses universitaires suisses, 2009, 655 p.

34 François Walter, Histoire de la Suisse. La création de la Suisse moderne (1830-1930), Neuchâtel, Alphil-Presses universitaires suisses, 2013, t. 3, p. 133.

35 Rudolph Jaun, « La mutinerie du Gothard », in Roman Rossfeld, Thomas Buomberger, Patrick Kury (éd.), 14/18. La Suisse et la Grande Guerre, Baden, Hier und Jetzt, 2014, p. 42.

36 Roman Rossfeld, « Seul le puissant a des droits », in Roman Rossfeld, Thomas Buomberger, Patrick Kury (éd.), 14/18. La Suisse et la Grande Guerre, Baden, Hier und Jetzt, 2014, p. 158.

37 Pierre du Bois, Union et division des Suisses. Les relations entre Alémaniques, Romands et Tessinois au XIXe et au XXe siècle, Lausanne, Éd. de l’Aire, 1983, p. 88.

38 Thomas Buomberger, « Rhétorique de combat, peur de la révolution et gardes civiques », in Roman Rossfeld, Thomas Buomberger, Patrick Kury (éd.), 14/18. La Suisse et la Grande Guerre, Baden, Hier und Jetzt, 2014, p. 342.

Pour citer cet article

Marie-Noëlle Brand Crémieux, « Introduction historique.
1914-1918 : la Suisse, un îlot dans la tourmente ?
 », paru dans Loxias-Colloques, 8. Ecrire en Suisse pendant la grande Guerre, Ecrire en Suisse pendant la Grande Guerre, Introduction historique.
1914-1918 : la Suisse, un îlot dans la tourmente ?
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mis en ligne le 22 août 2017, URL : http://revel.unice.fr/symposia/actel/index.html?id=895.


Auteurs

Marie-Noëlle Brand Crémieux

Docteur en relations internationales de l’Université de Genève (HEID), Marie-Noëlle Brand Crémieux est historienne des relations internationales contemporaines et des relations franco-allemandes. Elle a publié chez L’Harmattan, en 2004, Les Français face à la réunification allemande. Automne 1989 – automne 1990. Elle enseigne actuellement l’histoire à l’École française de Berne.