Maurice dans Loxias-Colloques


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Loxias-Colloques | 3. D’une île du monde aux mondes de l’île : dynamiques littéraires et explorations critiques des écritures mauriciennes

De l’ethnicité populaire à l’ethnicité nomade : Amal Sewtohul ou la ‘fabrique’ d’une nouvelle mauricianité

L’ethnicité participe depuis longtemps à structurer l’imaginaire littéraire mauricien. La rupture apportée par la littérature postcoloniale aura toutefois permis d’ébranler certaines représentations essentialistes et statiques de cette thématique, et d’interroger le modèle politique multiculturel mauricien qui entretient une définition à la fois compartimentée et linéaire de l’ethnicité. Ainsi, dans leur tentative de penser ‘autrement’ le rapport entre identité ethnique et mauricianité, nombre d’écrivains rendent compte, d’une part, de la superposition des clivages en contexte mauricien (appartenances ethnique, socio-économique, sexuelle, etc.) et interrogent, d’autre part, les dimensions essentialistes généralement associées à l’ethnicité à Maurice. Cet article propose d’analyser l’œuvre du romancier mauricien, Amal Sewtohul, qui, représentant stratégiquement les dimensions populaire et nomadique de l’ethnicité, remet en question l’idée même d’une mauricianité (voire d’une nationalité) qui serait celle d’un ancrage définitif de l’appartenance ethnique au sein du modèle national. Ethnicity has since long been inspiring Mauritian literature. Yet, the change brought about by postcolonial generations of authors has undermined essentialist and static representations of ethnicity and questioned the multicultural political model of Mauritius which perpetuates a compartmentalized and linear definition of ethnic identity. In their attempt to rethink the correlation between ethnicity and Mauritianness, several writers have tried, on the one hand, to represent the complexity of overlapped forms of discrimination and cleavages in force in the Mauritian society (divisions related to ethnicity, social class, gender, etc.) ; and to challenge, on the other hand, essentialist views generally associated to ethnicity in Mauritius. This paper presents and analyses the works of the Mauritian novelist Amal Sewtohul who, strategically representing the popular and nomadic dimensions of ethnicity, questions the very concept of Mauritianness (and nationality) as the anchoring and fixing state of ethnic belonging within a national model.

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Récits postcoloniaux, retour colonial et diaspora indienne à Maurice

Cet article s’intéresse aux textes mauriciens postcoloniaux qui évoquent des situations de la période coloniale de l’Île Maurice. Si les auteurs des romans coloniaux avaient des objectifs précis, ceux de la postcolonie se démarquent de leurs prédécesseurs en refusant l’apologie de l’entreprise coloniale et en montrant un autre visage des colons certes, mais surtout des Indiens. Le travail de mémoire chez ces auteurs repose ainsi sur une description réaliste de la société de l’époque qui nous amène à comprendre ce que l’Indien a perdu en venant s’installer à Maurice et comment il a dû s’adapter dans un pays aliénant. Abandonner la mère patrie constitue en effet une transgression dans laquelle l’Indien sera voué à vivre. This article lays emphasis on postcolonial Mauritian texts which are grounded in the colonial period of the island. If the colonial authors had clear cut objectives, those of the postcolonial era try to differentiate themselves from their predecessors, by refraining from justifying what was done during colonisation in Mauritius. They rather offer a different representation of the colonizer and especially of the Indians. Postcolonial authors show how the Indians, coming to Mauritius, have lost everything and have had to adapt themselves in an alienating environment. In leaving India, they have committed a transgression with which they would have to live.

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Lectures de l’écriture mauricienne à la lueur des penseurs canadiens

Comme toutes les littératures dites « nationales », la littérature mauricienne contemporaine est déterritorialisée, prise dans la mouvance mondiale des gens et des idées. Dans un même temps, elle est littérature minoritaire, « de l’exiguïté » comme le dit François Paré, une littérature subversive, résistante à l’hégémonie du centre. L’évolution chronologique perçue au fil des changements idéologiques historiques permet une mise au point sur l’écriture mauricienne contemporaine, dès lors qu’elle s’ancre dans le terreau des idées socioculturelles postmodernes. De plus, les théories canadiennes du nomadisme et de l’itinérance, telles qu’elles sont appliquées aux littératures minoritaires et à celles dites « migrantes », peuvent nous aider à considérer une littérature née dans la violence et dans le mythe de nos multiples origines, une écriture forgée au gré de sa diaspora. Une littérature îlienne, paradoxalement insulaire et ouverte sur le monde ? We will examine Mauritian literature in the light of theories developed by Canadian thinkers on minority and migrant writing, nomadism and interstitial space.

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Le mauricianisme et l’indianocéanisme : deux projets de définition de la littérature mauricienne

Cet article présente deux approches théoriques de la littérature mauricienne : le mauricianisme et l’indianocéanisme, néologismes et concepts forgés par la critique locale dans le but de définir, d’une part, l’identité mauricienne et, d’autre part, l’identité régionale. Se révèle, à travers ces deux perspectives de l’identité insulaire, une tension entre les appartenances nationale et régionale. Toutes deux cherchent pourtant à saisir et à définir une production littéraire locale, en articulant et en mettant en valeur des grilles de lectures issues du terroir et non pas empruntées d’ailleurs. En présentant les apports et les limites de ces deux concepts, c’est à la définition même du champ littéraire mauricien que notre article s’intéresse et à la manière dont la critique locale se positionne face à celui-ci. This paper presents two local theoretical approaches to Mauritian literature, namely ‘mauricianisme’ and ‘indianocéanisme’, terms and concepts coined by local critics to explore Mauritian and regional identities. The difference between the two concepts lies in the fact that the first one allows for a definition as well as a questioning of what Mauritian national identity means, while the second rather relates to similar concerns in the Indian Ocean region. While trying to capture the essence of local literary works, both concepts favour local lenses rather than those imported from other contexts. In addressing the potential of these two concepts, while at the same time pointing to their limitations, this paper focuses on what actually makes the Mauritian literary field and the way that the local critical discourse relates to the latter.

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Nationalisme, transnationalisme et postnationalisme dans Made in Mauritius d’Amal Sewtohul

La formation d’une identité nationale est un processus long et complexe qui obéit à de nombreuses conditions et contraintes. Nous connaissons sans conteste la difficulté de définir une identité nationale à Maurice. La nécessité de toujours qualifier le Mauricien par Indo-, Sino-, Franco-, etc. nous révèle bien l’absence de cristallisation d’une identité homogène. Le discours idéologique consistant à vouloir composer une nation uniforme et égalitaire n’est pas près de se réaliser car le Mauricien n’est pas disposé à desserrer sa prise sur les éléments d’identification ethniques, traces de ses origines ancestrales. Rivé en amont, le Mauricien est aussi interpellé en aval puisqu’il est aujourd’hui souvent pris dans le mouvement de l’émigration. Il s’inscrit alors dans le processus que Homi Bhabha nomme la « dissémiNation », une notion contraire à celle de la nation, une forme de déploiement transnational qui lui fait affronter d’autres défis identitaires. Dans cet article, j’étudierai en particulier Made in Mauritius d’Amal Sewtohul, qui soulève un grand nombre de réflexions sur l’identité et son articulation au territoire. Successivement voire simultanément traversé par les problématiques du nationalisme, du transnationalisme et du postnationalisme, ce roman nous donne des clés pour penser tout à la fois la continuité et le changement dans le parcours de ceux qui, pris dans les flux globalisants, se retrouvent à un moment de leur existence rattachés à Maurice, avant de se redéployer ailleurs. The construction of a national identity is a long and complex process, conditioned by various imperatives and requirements. National identity is problematic in the island-state of Mauritius as Mauritians feel the need to hold on to ethnic or ancestral identifiers and think of themselves as Indo-, Sino-, Franco- Mauritians, etc. In parallel though, they are increasingly engaged in what Homi Bhabha terms “dissemiNation” – a dynamic process which challenges the linear concept of Nation –, as they are swept into migrating and transnational flows which raise further complex and multimodal identity challenges. My study focuses on Made in Mauritius, a francophone novel of the Mauritian writer Amal Sewtohul, which questions the link between identity and territory. Concepts such as nationalism, transnationalism and postnationalism will be discussed as essential keys which help explore and understand the dynamics of identity in an age of global migration, as represented by Sewtohul.

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