Loxias-Colloques |  2. Littérature et réalité 

Valerio Vittorini  : 

Littérature de voyage et réalité: le cas de Marocco, de E. De Amicis

Résumé

La relation de voyage s’affirme, au cours du XIXe siècle, comme une construction autonome par rapport au réel, elle n’est plus considérée comme une entité factuelle, mais fictionnelle, elle donne, tout au plus, à voir les modèles de la culture du voyageur et leurs effets sur la perception de l’altérité et de l’identité. On ne peut jamais y avoir accès à l’altérité de l’autre, mais seulement à des représentations configurées dans et par la culture d’origine. Au XXe siècle cette thèse a été confirmée par la théorie postmoderniste selon laquelle la « vérité » n’existe pas et la rechercher, l’affirmer peut être un mal. C’est l’idée qui s’exprime d’une façon paradigmatique dans la célèbre phrase de Nietzsche : « les faits n’existent pas ; seules les interprétations existent ». Toutefois « le radicalisme de ces thèses les condamne, bien qu’elle soient à peu de choses près au fondement des études postcoloniales » (C. Reichler). En effet, comme U. Eco l’affirme, il n’est pas vrai que toutes les interprétations ont la même valeur : « Il y a des interprétations que l’objet à interpréter refuse » (U. Eco). Bien que d’une façon négative nous avons donc un critère d’orientation pour distinguer entre les différentes « interprétations ». Dans le vaste corpus de la littérature de voyage pouvons-nous donc espérer trouver quelques informations qui ne concernent pas que nous-mêmes, quelque chose de l’Autre ? Dans quelle mesure ? Par quel moyen ? Je développerai cette perspective par l’exemple de Marocco, d’Edmondo De Amicis (1846-1908).

Index

Mots-clés : De Amicis , littérature comparée, littérature de voyage, Littérature italienne, Maroc.

Plan

Texte intégral

I. Littérature de voyage et réalité

Dans la littérature de voyage, bien davantage que dans n’importe quel autre genre littéraire, le rapport au réel est crucial. En fait la littérature de voyage se pose, à partir de ses origines, en genre hybride, qui a pour but d’amuser ses lecteurs autant que de les informer sur la réalité du monde tel qu’il est.

Cette ambiguïté épistémique a valu à la littérature de voyage un succès extraordinaire pendant les XVIIIe et XIXe siècles autant qu’une méfiance persistante. Dans la célèbre note X de son Discours sur l’origine de l’inégalité parmi les hommes, Rousseau critique très âprement les « excès », c’est-à-dire les imprécisions et les erreurs grossières dont les récits des voyages étaient pleins :

Depuis trois ou quatre cents ans que les habitants de l’Europe inondent les autres parties du monde et publient sans cesse de nouveaux recueils de voyages et de relations, je suis persuadé que nous ne connaissons d’hommes que les seuls Européens ; encore paraît-il aux préjugés ridicules qui ne sont pas éteints, même parmi les gens de lettres, que chacun ne fait guère sous le nom pompeux d’étude de l’homme que celle des hommes de son pays. Les particuliers ont beau aller et venir, il semble que la philosophie ne voyage point, aussi celle de chaque peuple est-elle peu propre pour un autre. La cause de ceci est manifeste, au moins pour les contrées éloignées : il n’y a guère que quatre sortes d’hommes qui fassent des voyages de long cours : les marins, les marchands, les soldats et les missionnaires. Or, on ne doit guère s’attendre que les trois premières classes fournissent de bons observateurs et quand à ceux de la quatrième, occupés de la vocation sublime qui les appelle, quand ils ne seraient pas sujets à des préjugés d’état comme tous les autres, on doit croire qu’ils ne se livreraient pas volontiers à des recherches qui paraissent de pure curiosité et qui les détourneraient des travaux plus importants auxquels ils se destinent1.

Pour Rousseau donc, la cause de ces erreurs réside dans le fait que « la philosophie ne voyage point » et que la majorité des récits de voyage ont été écrits par des illettrés ou bien par des religieux, dans les deux cas par des hommes dépourvus du nécessaire esprit critique. Rousseau, dans le texte cité, considère que seuls les philosophes, les savants pourraient nous donner des récits de voyage dignes de foi.

Supposons un Montesquieu, un Buffon, un Diderot, un Duclos, un d’Alembert, un Condillac, ou des hommes de cette trempe, voyageant pour instruire leurs compatriotes, observant et décrivant comme il savent faire […] ; supposons que ces nouveau Hercules, de retour de ces courses mémorables, fissent ensuite à loisir l’histoire naturelle, morale et politique, de ce qu’ils auraient vu, nous verrions nous-mêmes sortir un monde nouveau de dessous leur plume, et nous apprendrions ainsi à connaître le nôtre. Je dis que quand de pareils observateurs affirmeront d’un tel animal que c’est un homme, et d’un autre que c’est une bête, il faudra les en croire ; mais ce serait une grande simplicité de s’en rapporter là-dessus à des voyageurs grossiers, sur lesquels on serait quelquefois tenté de faire la même question qu’ils se mêlent de résoudre sur d’autres animaux2.

En fait, à partir du XVIIIe siècle,

les récits vont se diversifier grossièrement en deux branches : les uns vont répondre à une vocation scientifique, les autres, écrits par des voyageurs moins systématiques, vont envisager la relation de voyage comme un genre littéraire3.

Dans la première branche nous pouvons ranger les œuvres de La Condamine4, Lapérouse5 etc. Dans la seconde branche nous avons, au XIXe siècle, des récits de voyage de grande qualité littéraire tels que l’Itinéraire de Paris à Jérusalem de Chateaubriand, le Voyage en Orient de Lamartine, etc. La relation de voyage s’affirme ainsi, au cours du XIXe siècle, comme une construction autonome par rapport au réel et la critique, d’abord axée sur la véracité des faits, se tourne peu à peu vers la facture du récit, ses rapports avec les autres genres, la subjectivité du relateur qui filtre toutes les informations, les procédés de rhétorique, de dramatisation ou de mise en intrigue de la trame etc.6. La relation de voyage n’est plus considérée comme une entité factuelle, mais fictionnelle. Elle donne, tout au plus, à voir les modèles de la culture du voyageur et leurs effets sur la perception de l’altérité et de l’identité. On ne peut jamais y avoir accès à l’altérité de l’autre, mais seulement à des représentations configurées dans et par la culture d’origine. Au XXe siècle cette thèse a été confirmée par la théorie postmoderniste.

Postmodernisme et littérature de voyage

Le terme « postmodernisme » a fait son entrée en philosophie en 1979 avec un livre de J. F. Lyotard, La condition postmoderne7dont la thèse centrale est quela fin des « métarécits » de la modernité (Lumières, Idéalisme, Marxisme, etc.) a rendu impossibles toutes les explications englobantes et totalisantes de l’histoire humaine et de son savoir. Le savoir, par conséquent, ne peut que se révéler partiel, limité, fragmentaire. Essentiel à la philosophie postmoderniste est la « déconstruction » proposée par Derrida8 c’est-à-dire l’idée qui s’exprime d’une façon paradigmatique dans la célèbre phrase de Nietzsche : « il n’y a pas de faits ; seulement des interprétations ».9

Selon Roland Barthes, par exemple, la littérature (et donc, forcément, la littérature de voyage aussi) n’a aucune fonction référentielle, aucune valeur cognitive :

l’écrivain conçoit la littérature comme fin, le monde la lui renvoie comme moyen : et c’est dans cette déception infinie, que l’écrivain retrouve le monde, un monde étrange d’ailleurs, puisque la littérature le représente comme une question, jamais, en définitive, comme une réponse. La parole n’est ni un instrument, ni un véhicule : c’est une structure, on s’en doute de plus en plus ; mais l’écrivain est le seul, par définition, à perdre sa propre structure et celle du monde dans la structure de la parole. Or cette parole est une matière (infiniment) travaillée ; elle est un peu comme une sur-parole, le réel ne lui est jamais qu’un prétexte (pour l’écrivain, écrire est un verbe intransitif) ; il s’ensuit qu’elle ne peut jamais expliquer le monde, ou du moins, lorsqu’elle feint de l’expliquer, ce n’est jamais que pour mieux en reculer l’ambiguïté : l’explication fixée dans une œuvre (travaillée), elle devient immédiatement un produit ambigu du réel, auquel elle est liée avec distance ; en somme la littérature est toujours irréaliste […]10

Même les textes les plus strictement « scientifiques » de l’ethnologie moderne ont été soumis à la critique déconstructiviste. L’anthropologie ne serait que « textes », tous ses objets, les autres hommes, les autres cultures, ne possédant aucune réalité en dehors du texte et la littérature de voyage « ne peut donner lieu à autre chose qu’une anthropologie de la culture propre »11.

Les « faits » de l’anthropologie, les matériaux que l’ethnologue est allé chercher sur le terrain, sont déjà en eux-mêmes des interprétations. Elles sont déjà, ces données de base, culturellement médiatisées par les gens dont nous sommes venus, en notre qualité d’ethnologues, étudier la culture. Les faits sont faits – le mot vient du latin factum, « fait », « fabriqué » – et les faits que nous interprétons sont faits et refaits12.

Il s’agit d’une thèse qui a joué un rôle très stimulant dans la réflexion et qui a eu, en multipliant les perspectives, une très forte valeur libératoire puisque elle a démasqué les liens entre la prétendue « vérité objective » et le pouvoir. Ce n’est pas par hasard que la thèse est aussi à la base d’œuvres célèbres telles que L’Orientalisme d’E. Saïd ainsi que des études postcoloniales modernes. Toutefois il faut reconnaître qu’« elle manque toute une dimension de la littérature de voyage, celle qui est tendue vers les rencontres effectuées et l’appréhension de l’inconnu. »13

Pour Maurizio Ferraris la thèse postmoderne est aussi une thèse dangereuse :

contrairement à d’autres courants de pensées, bien davantage que les essais de Platon à Syracuse, mais aussi du marxisme, le postmoderne a trouvé une large réalisation politique et sociale. Les dernières années nous ont appris une vérité amère. C’est-à-dire que la primauté des interprétations sur les faits, le dépassement du mythe de l’objectivité a été achevé, mais il n’a pas eu les résultats d’émancipation prophétisés par les professeurs. Le « monde réel » n’est pas devenu un « conte de fées », on n’a pas assisté à la libération des contraintes posées par une réalité trop monolithique, compacte, péremptoire, à une multiplication et déconstruction des perspectives qui semblaient reproduire, au niveau social, la multiplication et la libéralisation radicale (dans les années 70 du siècle dernier, croyait-on) des chaînes de télévision. Le monde réel est devenu un « conte de fées » […] une « télé-réalité », mais le résultat a été le populisme médiatique, un système dans lequel (pourvu qu’on en ait le pouvoir) on peut prétendre faire croire n’importe quoi. Dans les journaux télévisés et dans les talk show « les faits n’existent pas ; seules les interprétations existent » a triomphé et nous a montré – par le biais de ce qui malheureusement est un fait et non pas une interprétation – sa signification authentique : « La raison du plus fort est toujours la meilleure »14 .

Toutefois nous ne sommes sans doute pas obligés de nous résigner à ce relativisme absolu si dangereux. Ce n’est pas que le simple bon sens qui nous suggère qu’une thèse si extrême est fausse.

Un nouveau réalisme ?

Dans un article récent Umberto Eco a répondu à Richard Rorty qui affirmait, en défendant la primauté des interprétations sur les faits, que « nous pouvons sans doute interpréter un tournevis comme un instrument utile à visser les vis, mais qu’il serait tout à fait légitime de le voir et l’utiliser comme un outil pour ouvrir un colis »15. U. Eco affirme que :

Ce qui est fort déconseillé c’est de l’utiliser pour se gratter l’oreille. En outre – et cela peut paraître évident mais ça ne l’est pas – je ne peux pas l’utiliser comme verre car il n’a pas de cavités qui puissent recevoir du liquide. Le tournevis répond OUI à beaucoup de mes interprétations, mais à beaucoup d’entre elles et à une au moins, il répond NON.

Réfléchissons sur ce NON, qui est à la base de ce que j’appellerai mon Réalisme Négatif. Le vrai problème de toute argumentation « déconstructiviste » du concept classique de vérité n’est pas de démontrer que le paradigme sur la base duquel nous raisonnons pourrait se révéler faux. Sur ce point, désormais, nous sommes tous d’accord. Le monde tel que nous nous le représentons est certainement le résultat d’une interprétation […] Le vrai problème est plutôt dans la recherche des garanties qui nous autorisent à imaginer un nouveau paradigme que les autres ne considèrent pas comme un délire, une pure imagination de l’impossible. Quel critère nous permet de distinguer entre rêve, invention poétique, trip de LSD et affirmations acceptables à propos du monde physique ou historique qui nous entoure ?16

Voilà un point certain : ce n’est pas vrai que toutes les interprétations d’un certain objet sont possibles et équivalentes. Il y a des interprétations que l’objet refuse et qu’il faut considérer comme fausses.

D’où l’idée d’un Réalisme Négatif qu’on pourrait résumer, en parlant de textes autant que d’aspects du monde, dans la formule suivante : chaque hypothèse est toujours susceptible d’être revue […] mais, si on ne peut jamais dire de façon définitive si une interprétation est exacte, on peut toujours dire quand elle est fausse. Il y a des interprétations que l’objet à interpréter n’admet pas17.

Pour revenir à la littérature de voyage l’ancienne pratique qui a permis, pendant des siècles, de séparer, d’une façon peut-être un peu empirique, dans le vaste corpus des récits de voyage, le vrai du faux n’est pas évidemment dépourvue de bases théoriques. Même Rousseau, après les âpres critiques touchant les récits de voyages des jésuites que nous avons citées plus haut, reconnaît que « la Chine paraît avoir été bien observée par les Jésuites18 ». Encore aujourd’hui d’ailleurs les historiens et les ethnologues étudient leurs relations.

Elles constituent une des sources majeures dans les études historiques sur la Nouvelle-France et dans les recherches sur les cultures indigènes disparues. Les ethnohistoriens américains […] les utilisent abondamment. En extrayant ces connaissances, en les analysant, on a une chance de faire entendre la voix de l’autre, cette voix d’avant la disparition, dont le XVIIIe siècle déplore ou magnifie le deuil sous la forme du « bon sauvage »19.

Buffon, de sa part, n’avait pas accueilli la suggestion de Rousseau à voyager et à partager ses observations dans un récit de voyage crédible. A l’instar de Linné, il connaissait très bien la littérature de voyage dans laquelle il a abondamment puisé afin de rédiger son Histoire naturelle (surtout la partie consacrée à l’espèce humaine) et, autant que Rousseau, il n’ignore pas les problèmes liés à la lecture des relations de voyage dans lesquellesil déplore souvent l’état peu satisfaisant des renseignements apportés par les voyageurs20. Toutefois

Buffon, au lieu d’inciter ses contemporains, ou encore lui-même, à préparer des expéditions scientifiques, se propose de développer une méthode de lecture qui s’appliquerait à la littérature de voyage déjà existante afin d’en extraire le vrai du faux. La solution ne se trouve donc pas dans le voyage, mais dans la lecture. Buffon souligne que la question est de savoir comment il faut lire ces textes. Il faut, bien sûr, savoir séparer « le faux du vrai »21.

En effet entre la science et la littérature de voyage il y a toujours eu une circulation bénéfique. En ce qui concerne la géographie, par exemple :

les voyageurs ont montré aux savants restés dans leur cabinet ce que c’était que la terre en grandeur nature. Quoique parfois impuissants à bien analyser, décrire, évoquer, par manque de concepts et de lexique adéquat, les voyageurs ont cependant accéléré le travail théorique et fourni un vocabulaire qui manquait aussi, faute d’expérience, aux géographes patentés. Les navigateurs sont donc partis sur la foi des premières spéculations scientifiques et ont rapporté des documents irremplaçables. La philosophie des Lumières s’inspire largement de l’apport scientifique, idéologique et esthétique des voyages de Découverte. À la fin du XVIIIe siècle, on maîtrise suffisamment les grilles de lecture géographique des paysages pour y prendre goût et les recréer aussi au point de vue artistique : c’est l’une des caractéristiques du romantisme dans ses prémices22.

Il est donc peut-être possible que la littérature de voyage nous donne à voir autre chose que les modèles de la culture du voyageur et leurs effets sur la perception de l’altérité et de l’identité.

La littérature étant aujourd’hui un discours (prétendument) sans règles, celle-ci devient mécaniquement l’autre du discours de savoir, ce qui par essence n’a pas de place ou ce qui se dérobe à la classification.
Pourtant, il est possible que sinon la littérature dans son ensemble, en tout cas certaines œuvres qui, pour nous, aujourd’hui, en relèvent, soient dans un rapport plus complexe et plus profond avec les savoirs23.

Il est peut-être possible d’envisager une « anthropologie des zones de contact », c’est-à-dire des œuvres dans lesquelles

La rencontre des cultures est abordée non plus comme une entreprise unilatérale, mais comme un mouvement complexe d’interpénétrations et d’échanges, qui varie selon les contextes, les protagonistes et les moments historiques24.

On sait d’ailleurs que l’une des œuvres les plus importantes du XXe siècle, Tristes tropiques25 de Claude Lévi-Strauss, est tout à fait une relation de voyage dont la forme autobiographique, le récit de l’aventure individuelle, « cet Itinéraire de Paris à Jérusalem de l’autre bout du monde26 » loin d’être perçu comme une limitation « littéraire » de la véridicité du discours, au contraire a bien ajouté de la vérité, de l’évidence aux discours « scientifiques » et savants.

II. Le cas de De Amicis

J’essaierai de démontrer, dans les pages suivantes, la présence de ces « zones de contact » dans le récit de voyage d’un auteur italien célèbre à son époque, mais aujourd’hui quelque peu méconnu à cause de son image de champion du nationalisme moraliste et paternaliste de la seconde moitié du XIXe siècle.

En 1875 Edmondo De Amicis fut invité, ainsi que deux peintres Stefano Ussi et Cesare Biseo, par M. Stefano Scovasso, à cette époque-là Consul Général d’Italie à Tanger, à se joindre à la première mission diplomatique du jeune Royaume d’Italie auprès du Sultan du Maroc Moulay el Hassan à Fez. Marocco27, paru en 1876, est le récit du voyage, fait en grande pompe par la caravane de l’Ambassade, de Tanger jusqu’à la capitale chérifienne. De Amicis n’était pas encore l’écrivain célèbre qu’il deviendra après le succès de son œuvre majeure : le roman Cuore28 (1886), mais, en tant que journaliste et envoyé spécial de la Nazione de Florence, il avait déjà publié des récits de voyage : Spagna29 (1872), Ricordi di Londra30 (1873), Olanda31 (1874). Dans le panorama vaste, mais assez méconnu de la littérature de voyage italienne du XIXe siècle De Amicis occupe une place tout à fait particulière. La majorité des voyageurs italiens auteurs de récits de voyage ne sont pas des écrivains, mais des « écrivants », c’est-à-dire, pour s’en tenir à la taxinomie barthienne32, ce ne sont pas des professionnels de la littérature et leurs œuvres, souvent fruit d’un hasard ou d’une improvisation, ne répondent pas à des attentes précises de la part du public des lecteurs. Au contraire, De Amicis est un « écrivain » reconnu ; Spagna a été vendu 30 000 exemplaires, ce qui est, pour l’Italie de l’époque (22 millions d’habitants dont 2,5% seulement parle l’italien) un succès extraordinaire. M. Scovasso, qui l’a invité à se joindre à l’Ambassade, avec l’assentiment du Gouvernement italien évidemment, ne l’a pas choisi au hasard. De Amicis, né en Ligurie en 1846, était un bon et loyal sujet de la dynastie de Savoie ; en 1866 il avait participé, en tant qu’officier, à la bataille de Custoza engagée par l’armée piémontaise contre l’armée autrichienne. Ensuite il avait dirigé La vita militare, le journal officiel du Ministère de la guerre du jeune Royaume d’Italie.

Quoiqu’il ait manifesté, dans le reportage sur l’Espagne un certain scepticisme sur l’opportunité que le fils du roi d’Italie Vittorio Emanuele II, devienne roi d’Espagne, à cette époque-là De Amicis n’avait pas encore manifesté les sentiments socialistes qui, en 1896, le conduisirent à l’adhésion au Parti Socialiste Italien ; il était encore animé d’un élan patriotique ardent qu’il partageait d’ailleurs avec la classe dirigeante italienne de l’époque. M. Scovasso et le Gouvernement italien pouvaient légitimement attendre de lui un récit de voyage en accord avec la ligne politique officielle. Son éditeur, Emilio Treves, qui annonçait dans sa revue l’Illustrazione Italiana la nouvelle de ses voyages ainsi que ses reportages, édités successivement sous forme de livres, pouvait s’attendre à un nouveau best-seller.

L’auteur lui-même est conscient de son rôle : dans les premières pages du récit, lorsque De Amicis, qui vient de débarquer à Tanger, est attablé à l’hôtel en compagnie de plusieurs européens de différentes nationalités, l’attitude du narrateur dans la conversation révèle une certaine complaisance bien que mitigée par l’autodérision :

Enfin on mit sur le tapis la question du départ de l’ambassade italienne pour Fez, et j’eus le plaisir de savoir que cet événement était beaucoup plus important que je ne l’avais cru, qu’on en parlait dans tout Tanger et dans tout Gibraltar, à Algésiras, à Cadix et à Malaga, que la caravane aurait un mille de long, qu’il y aurait avec l’ambassade des peintres italiens et que peut-être y serait-il adjoint un représentant de la presse. À cette nouvelle, je me levai modestement de table et m’éloignai d’un pas majestueux33.

L’engagement de l’écrivain est évident surtout si on le compare aux autres récits de voyage italiens du XIXe siècle. Dans les œuvres de Filippo Pananti34 ou de Felice Caronni35, par exemple, les villes d’Alger et de Tunis dans lesquelles les deux auteurs séjournèrent quelque temps, sont décrites d’une façon très hâtive. Dans l’œuvre de Jacop Graberg36, ancien consul suédois et piémontais au Maroc, la description de la ville de Tanger, ainsi que celles des autres villes du pays, révèle un souci de précision scientifique, mais aucun charme littéraire. Au contraire la description de la ville de Tanger et de ses habitants qu’on trouve au début de Maroc est très soignée et efficace. De Amicis y dévoile, par exemple, une palette de couleurs ainsi que de sons et d’odeurs, très riche. Nous y trouvons : « petites maisons carrées, blanchies […] la blancheur des murailles et l’azur du ciel […] blancheur éblouissante […] quelque bande rouge au pied des murs, quelque main peinte en noir sur une porte et servant à conjurer les influences […] « faces blanches, noires, jaunâtre ou bronzées »37, etc. Nous trouvons aussi des sensations olfactives : « …on sent une odeur d’ail, de fumée du kif, d’aloès brulé, de benjoin, de poisson… »38ainsi que des sensations auditives « quelque groupe d’enfants arabes encapuchonnés qui jouent ou chantonnent d’une voix nasillarde des versets du Coran […] les harmonies vibrantes d’un piano qui s’échappent par les fenêtres d’un consulat et la cantilène lamentable qui sort par la porte de la mosquée ».39

C’est clair dès le début du récit : nous avons affaire, cette fois-ci et peut-être pour la première fois dans la littérature de voyage italienne à un écrivain professionnel pour qui la découverte du monde se fait avant tout grâce à la revalorisation du beau, par le biais d’une sensibilité qui confère une dignité esthétique à des objets précédemment privés de qualités. C’est ainsi qu’« on réalise […] une institutionnalisation esthétique du paysage – y compris du paysage humain – qui change la conception de l’environnement et du territoire, précédemment considéré de façon utilitariste comme un espace anthropique qui peut être modifié »40 .

Mais l’importance du récit de voyage de De Amicis n’est pas exclusivement esthétique ou littéraire. Ce n’est pas un hasard si les premiers récits de voyage italiens d’une qualité littéraire comparable aux récits de voyages français ou anglais apparaissent tout juste quelques années après l’unification politique de la péninsule. Si, comme l’a très bien montré Francesco Orlando41, rien n’est plus indispensable à la connaissance de soi même ainsi qu’à la construction de sa propre identité que la confrontation plus ou moins conflictuelle avec l’« altérité » et si quelque chose de semblable semble arriver même aux entités nationales dans le moment historique de leur édification et renforcement,

Avec ses récits de voyages De Amicis contribue à la construction de l’identité de l’Italie unie. Le processus d’auto-identification se fait dans la confrontation avec la diversité familière des autres pays européens – la Hollande, l’Angleterre et la France – et dans la rencontre/conflit avec l’altérité oppositive des pays de l’Afrique du Nord (Marocco) et du Moyen-Orient (Costantinopoli)42.

Le locuteur de Marocco, à l’instar des autres écrits de voyage de De Amicis, est un narrateur autobiographique et homodiégetique qui cependant garde « une distanciation qui n’est pas seulement le signe du professionnalisme journalistique de l’envoyé spécial, mais qui suggère également l’absence totale d’identification, la parfaite divergence ».43 Davantage que dans Sur l’océan44, récit d’un voyage entrepris en 1889 sur le paquebot Galileo pour témoigner de ce nouveau phénomène qu’était l’émigration, dans lequel la divergence entre l’auteur et les émigrants italiens est surtout sociale et cultural, dans Maroc la « divergence » entre l’auteur et les habitants du pays africain ne saurait être plus grande puisqu’elle est aussi ethnique.

Le regard de De Amicis est déjà et davantage que dans Sur l’océan :

celui d’un observateur masculin et bourgeois, présomptueux, détaché mais curieux, sérieux, mais amusé. Le regard de l’observateur est le vecteur d’un jugement moral, reflet d’un sentiment commun, c’est-à-dire de la doxa normative dominante. La description de l’objet observé souligne avec insistance son altérité, sa diversité, son anormalité. Prend forme ainsi une connivence tacite entre l’auteur et le lecteur, fondée sur une communauté à la fois sociale, idéologique et culturelle, de la quelle l’objet d’observation est exclu. L’organisation des écrits de De Amicis postule de façon implicite une répartition des rôles rigidement axiologique dans laquelle le rôle du je (auteur, lecteur, alter ego littéraire) et le rôle de l’autre sont opposés, le premier confortablement assis à la place du spectateur, l’autre au contraire poussé sous les feux de la rampe45.

De ce point de vue De Amicis observe et décrit, avec une maîtrise des moyens expressifs et une vivacité sans égale dans la littérature italienne de voyage du XIXe siècle une quantité de personnages, d’événements, d’architectures, de paysages, etc. Les personnages qu’il rencontre représentent un large éventail social qui va du « monstre » de Tanger (« une de ces créatures qu’on ne saurait regarder en face, et qui sème pendant un moment l’effroi du doute jusque dans l’âme d’un croyant. On dit que c’est une femme ; mais elle ne semble être ni femme ni homme. C’est une tête d’orang-outang, mulâtre, aux cheveux courts et hirsutes, la peau sur les os, couverte de haillons noirs, presque toujours allongée comme un cadavre au beau milieu de la petite place, ou assise dans un coin, immobile et muette comme une insensée, quand elle n’est pas importunée par des enfants contre lesquels elle se retourne en hurlant ou pleurant. Elle pourrait avoir quinze ans ou bien trente : sa monstruosité cache son âge. Elle n’a ni parents, ni maison, on ne sait ni son nom ni d’où elle vient. Elle passe la nuit accroupie dans les rues, au milieu des ordures et des chiens46 ») au sultan Mulay Hassan (« c’est le jeune homme le plus beau et le plus sympathique dont une odalisque puisse rêver. Grand et mince, avec de grands yeux très doux, un beau nez aquilin, le visage brun d’un ovale parfait, orné d’une courte barbe noire ; une physionomie tout à fait noble et pleine d’une douce tristesse47 ») en passant par des gouverneurs de province, des ministres, des marchands, des officiers, des soldats, des paysans et des serviteurs. Les événements sont tout aussi variés : de la fête populaire pour la naissance du Prophète à Tanger, à la réception solennelle de la part du Sultan de Fez, du repas dans une demeure aristocratique, à la danse religieuse des Aïssaua (« Les possédés de Rubens, les morts ressuscités de Goya, les cadavres galvanisés de Poe, pourraient seuls donner l’idée de ces faces livides et convulsives, de ces yeux hors de leurs orbites, et de ces bouches écumantes ; quelques-uns paraissaient illuminés par un sourire indéfinissable, d’autres ne montraient que le blanc de l’œil, d’autres semblaient contractés par un spasme atroce, ou pâles et immobiles comme la figure d’un cadavre. De temps à autre, ils se faisaient les uns aux autres un geste étrange avec les bras ballants, ils répétaient tous ensemble le même cri strident et douloureux, comme quelqu’un qui recevrait un coup mortel ; puis ils s’avançaient de quelques pas et recommençaient la danse, gémissant, soufflant avec colère48 »), du lab al barode de l’escorte de Larache (« Ils s’élançaient à fond de train deux ou dix ensemble ou bien chacun isolément au fond de la vallée, sur les collines, en avant ou sur les flancs de la caravane, dans la direction que nous suivions ou dans la direction contraire, déchargeant leurs armes et poussant des hurlements sans interruption. En quelques minutes la vallée fut pleine de fumée et d’odeur de poudre comme un champ de bataille. De tous côtés les chevaux tourbillonnaient, les fusils scintillaient, les haïks voltigeaient, les burnous flottaient au vent, les cafetans rouges, jaunes, verts, bleus, orangés, ondulaient, les sabres et les poignards flamboyaient. Ils passaient à côté de nous un à un comme des fantômes ailés, vieux, jeunes, hommes de formes colossales, figures étranges et terribles, dressés sur leurs étriers, la tête haute, les cheveux au vent, le fusil tendu en avant ; et chacun, en tirant, lançait un cri sauvage49 ») au spectacle « interdit » des femmes arabes sur les terrasses de Fez (« Il y avait des vieilles femmes, des jeunes, des fillettes de huit ou dix ans ; toutes avec des vêtements aux formes bizarres et aux couleurs éclatantes. La plupart portaient des tresses qui descendaient sur les épaules, un foulard de soie rouge ou verte serré autour du visage comme un bandeau, une sorte de cafetan de couleurs variées, aux manches larges, serré à la taille par une ceinture bleue ou rouge vermeil, un corset de velours ouvert sur la poitrine, des pantalons, des babouches jaunes et de gros anneaux en argent qui encerclaient leurs chevilles50. »)

L’originalité par rapport à la tradition littéraire italienne, l’intérêt sincère envers un monde humain si différent et si lointain, finit par donner une image d’ensemble du monde arabo-marocain qui, comme l’auteur le reconnaît lui-même, ne s’éloigne pas beaucoup des stéréotypes offerts par la littérature de voyage anglaise et française depuis près d’un siècle.

Plus j’étudie ces Maures, et plus je suis disposé à croire près de la vérité, malgré mes illusions des premiers jours, les jugements des voyageurs, qui s’accordent tous à les appeler une race de vipères et de renards ; faux, lâches, humbles vis-à-vis des forts, insolents vis-à-vis des faibles ; rongés par l’avarice, dévorés par l’égoïsme, brûlés par les passions les plus abjectes qui puissent naître dans le cœur de l’homme. Comment pourrait-il en être autrement ? La nature du gouvernement et l’état de la société ne leur permettant aucune ambition virile, ils trafiquent et travaillent, mais ne connaissent pas le travail qui fatigue et réjouit ; ils sont sevrés complètement de tout plaisir qui dérive de l’exercice de l’intelligence ; ils ne se soucient pas de l’éducation de leurs propres fils, et n’ont aucun noble but dans la vie. Ils s’adonnent de toute leur âme et pendant toute leur vie à la jouissance d’amasser de l’argent, et partagent le temps que leur laisse ce soin entre une oisiveté somnolente qui les amollit et des plaisirs grossiers qui les abrutissent. Dans une existence aussi efféminée, ils deviennent naturellement cancaniers, vaniteux, mesquins, pervers ; ils se déchirent mutuellement avec une rage impitoyable ; ils mentent par habitude, avec une impudence incroyable ; ils affectent un esprit de charité et de religion, et sacrifient un ami pour un écu ; ils méprisent la science, et accueillent les superstitions les plus vulgaires ; ils se baignent tous les jours, et laissent dans les coins de leurs maisons des monceaux d’immondices. Que l’on ajoute à tout cela un orgueil diabolique dissimulé, selon l’occurrence, sous des dehors humbles et dignes en même temps, qui paraissent l’indice d’une âme noble51.

Toutefois une telle conclusion ne semble pas rendre justice à la complexité du point de vue de De Amicis qui apparaît, dans plusieurs endroits du texte, beaucoup plus nuancé que ce qu’on pourrait imaginer d’après cette synthèse.

L’émergence du regard de l’autre

Dès le début du récit la certitude de l’européen civilisé, de l’intellectuel positiviste qui rationnellement observe, étudie, distingue et classe, est battue en brèche. Peu après son arrivée le narrateur écrit ceci :

Je ne sais pas pourquoi, mais devant ce spectacle j’éprouvai le besoin d’abaisser les yeux sur moi-même et de me dire : « Je suis un tel, fils d’un tel ; le pays où je me trouve est l’Afrique, et ceux-là sont des Arabes ; » il me fallut réfléchir un moment pour me fixer cette idée dans la tête52.

Le spectacle kaléidoscopique de la ville marocaine provoque chez le « spectateur » une sorte de « crise d’identité » qui révèle une certaine difficulté à soutenir la rigide répartition des rôles définie au départ, « une fissure dans le système d’attribution des rôles53 ». Les signes de cette difficulté se succèdent dans tout le texte ; la « honte » est l’une des plus fortes

J’ai honte de moi-même quand passe à côté de moi un de ces beaux Maures en habits de gala. Je compare mon vulgaire chapeau à son large turban de mousseline, ma misérable jaquette à son cafetan couleur de jasmin ou de rose, l’étroitesse enfin de mon habillement gris et noir à l’ampleur, à la blancheur éclatante, à la noblesse simple et élégante du sien, et je me fais l’effet d’un scarabée à coté d’un papillon54.

La « honte » signale ici l’émergence du regard de l’« autre » qui, d’« acteur », devient « spectateur » et observe et juge à son tour selon des critères complètement différents devant lesquels c’est l’« européen civilisé » qui n’est plus à la hauteur.

Le regard de l’« autre » qui, dans ce passage, n’est encore qu’imaginé par le narrateur, émerge explicitement pendant le voyage entre Tanger et Fez.

Ce soir-là, au coucher du soleil, j’accompagnais le commandant, pour voir les soldats de l’escorte qui s’exerçaient à charger dans le vaste pré situé près du campement.
Assis en un seul rang au bord d’un fossé, il y avait là une centaine d’Arabes qui regardaient. Dès qu’ils nous aperçurent quelques-uns d’abord, puis cinquante, puis tous se levèrent et peu à peu s’amassèrent derrière nous.
Nous fîmes semblant de ne pas les voir.
Pendant un certain temps personne ne souffla mot ; puis l’un d’eux commença à dire je ne sais quoi qui fit rire tout le monde. Après celui-ci un autre parla, puis un troisième et ainsi de suite et à chaque mot tout le monde riait. Il était évident qu’ils riaient de nous, et nous ne tardâmes pas à nous apercevoir que les remarques et les rires correspondaient justement à nos mouvements et à certaines inflexions de notre voix. C’était naturel : ils nous trouvaient ridicules. Mais que disaient-ils ? Cela excitait notre curiosité. A ce moment-là monsieur Morteo passa par là, je l’appelai d’un signe furtif et le priai de tendre l’oreille, sans qu’on s’en aperçoive, et de me traduire littéralement les moqueries de ces vauriens. Il fut parfait.
L’un d’eux fit tout de suite une remarque qui, comme d’habitude, provoqua un éclat de rire.
– Il dit – traduisit Morteo – qu’il n’arrive pas à comprendre à quoi servent les pans de nos vêtements à moins que ce ne soit pour cacher la queue.
Peu après, une autre remarque, un autre éclat de rire.
– Il dit que la division des cheveux sur votre nuque est la voie où les poux font le lab el barod.
Troisième remarque, troisième éclat de rire.
– Il dit que les chrétiens sont bizarres, pour paraître plus grands ils mettent un vase sur la tête et deux supports sous les talons.
A ce moment-là un chien vint s’accroupir à nos pieds. Une quatrième remarque et cette fois tous se tordirent de rire.
– C’est trop fort ! – dit Morteo. – Il dit que ce chien est venu s’accroupir auprès d’autres chiens. Maintenant ils vont avoir affaire à moi.
Aussitôt il se tourna brusquement et prononça quelques mots en arabe sur un ton menaçant. Ce fut comme un coup de tonnerre. En quelques instants on ne vit plus personne.
Mais, pauvres gens, soyons justes ! En laissant de côté les charges des poux et la fraternité avec les chiens, n’avaient-ils pas raison de penser de nous ce que nous pensions de nous-mêmes, comparés à eux ? Dix fois par jour, tandis que ces superbes cavaliers nous tournaient autour, nous nous disions mutuellement : – C’est vrai, nous sommes civilisés, nous représentons une grande nation, tous les dix nous avons en tête davantage de savoir, qu’il n’y en a dans tout l’Empire des Chérifs ; mais plantés sur ces mulets, vêtus de ces habits, avec ces couleurs, avec ces chapeaux, au milieu d’eux, mon Dieu, que nous étions laids ! Ah, comme c’était vrai ! Le dernier de ces gueux à cheval était plus noble, plus majestueux, plus digne qu’une femme le regarde, que tous les dandies d’Europe55.

Dans ce passage la raillerie, de la part des Arabes, est évidente bien avant que les réparties ne soient traduites. Les rôles se sont complètement renversés et d’« acteurs » les Arabes se sont transformés en « spectateurs » et leur désir de dialoguer, leur point de vue ironique, sarcastique et, par moments franchement agressif même si c’est de façon débonnaire, émerge clairement. Dans ce cas le narrateur n’éprouve pas de « honte » mais il intègre le point de vue des Arabes dans sa culture bourgeoise et paternaliste et il est amené à se regarder de l’extérieur, dans un mouvement salutaire de conscience de soi, et à reconnaître effectivement qu’il est plutôt ridicule dans cette situation. C’est sans doute une de ces « zones de contact » dont parle Claude Reichler56, un de ces rares moments pendant lesquels il nous est possible de voir, au-delà des représentations et des projections, la « réalité » du regard et de la voix de l’« autre ».

Une nouvelle alliance ?

Dans l’épisode décrit l’interaction est indirecte, elle se produit par l’intermédiaire d’un interprète et elle est brusquement interrompue à cause de la vulgarité et de la basse extraction des Arabes ; le narrateur n’engage jamais un rapport direct, ni n’ébauche aucun dialogue. Vers la fin du texte nous trouvons un véritable dialogue auquel le narrateur participe directement. Il s’agit du premier et du seul véritable dialogue, présent dans le texte, entre le narrateur et un Marocain. Qu’il soit placé à la fin du texte, que plus de trois pages soient consacrées à cet épisode, la forme même du dialogue direct (alors que tous les autres dialogues sont rapportés, dans le texte, sous forme indirecte et synthétique) témoignent de l’importance que l’auteur attribuait à ce passage. Le narrateur dialogue avec un commerçant aisé de Fez « un beau maure d’une quarantaine d’années, à la physionomie honnête et sévère57 » qui parle l’espagnol et a voyagé dans les principales capitales européennes. De l’achat d’une étoffe on passa rapidement à la confrontation entre la civilisation « arabo-musulmane » et celle « occidentale ». Le narrateur presse son interlocuteur pour savoir ce qu’il pense de l’« occident » qu’il a pu visiter mais il n’obtient pas la reconnaissance de la suprématie indiscutable de la civilisation européenne à laquelle il s’attendait. Le commerçant reconnaît qu’il y a dans les villes européennes des rues plus grandes, des magasins plus riches, des ateliers plus productifs, etc., mais il est bien loin d’admettre, à cause de cela, une quelconque supériorité de la civilisation européenne.

Le discours tomba ensuite sur les industries européennes, sur les voies ferrées, sur le télégraphe, sur les grandes œuvres d’utilité publique ; il me laissa en parler sans m’interrompre, en acquiesçant même de temps en temps d’un signe de tête. Quand j’eus fini, toutefois, il soupira et dit : – Mais à la fin... à quoi servent toutes ces choses si nous sommes tous destinés à mourir ?
– En somme – conclus-je – vous ne changeriez pas votre situation contre la nôtre ! Il réfléchit un moment et répondit :
– Non car vous ne vivez pas plus longtemps que nous, vous n’êtes pas en meilleure santé, ni plus gentils, ni plus religieux, ni plus contents. Laissez-nous donc en paix. Ne prétendez pas que tous vivent comme vous et soient heureux comme vous le voulez. Restons tous dans le cercle qu’Allah nous a assigné. Ce n’est pas pour rien qu’il a placé la mer entre l’Afrique et l’Europe. Respectons ses lois.
– Et vous croyez – demandai-je – que vous resterez toujours comme vous êtes ? que peu à peu nous ne vous ferons pas changer ?
– Je ne sais pas – répondit-il. – Vous avez la force, vous ferez ce que vous voulez. Tout ce qui doit arriver est déjà écrit. Mais quoi qu’il arrive, Allah n’abandonnera pas ses fidèles.
Sur ce, il me prit la main droite, la serra sur son cœur et s’en alla d’un pas majestueux58.

Il est clair que le commerçant est non seulement sympathique au narrateur mais qu’il jouit aussi de son estime. Même le Sultan n’a pas eu un tel honneur, il a simplement été l’objet d’une admiration « esthétique » intense mais superficielle. Ce n’est pas par hasard qu’après des phrases pleines d’admiration le narrateur rapporte le commentaire sarcastique et dialectal d’un membre de rang inférieur de l’Ambassade59. Aucun sarcasme, aucune ironie, au contraire, envers le commerçant de Fez, mais considération et respect envers un représentant de l’élite marocaine qui exprime franchement le conservatisme, veiné de fatalisme, typique d’une grande partie des classes dirigeantes du monde arabe. Le rapport privilégié que De Amicis instaure avec le commerçant, semble dépasser complètement la rigide dichotomie initiale : dans ce cas l’« autre » n’est plus un simple « acteur » du spectacle, il devient un interlocuteur valable, presque un égal, qui exprime un point de vue original qui ne peut pas être considéré comme une simple projection de la culture de l’auteur, mais plutôt comme une projection réciproque. Le dépassement de la barrière qui séparait l’« européen civilisé » du « barbare africain » pendant une grande partie du texte, semble devoir être attribué à une sorte de reconnaissance de classe. En y regardant de près, le commerçant exprime une ignorance et un refus de la modernité en définitive peu différent de ce qu’a exprimé le groupe d’arabes avec lequel le narrateur n’a pas engagé de dialogue. Mieux, son refus est sans doute pire car le commerçant connaît l’Europe et il est vraisemblablement capable d’évaluer avec précision les bénéfices que la modernité pourrait apporter à une population objectivement opprimée, à l’époque, par l’ignorance et la misère. Son conservatisme est donc beaucoup plus malhonnête et cynique que celui de l’escorte arabe, mais il est exprimé dans une langue européenne, sans insultes et dans une forme plus acceptable, qui n’exclut pas les rapports diplomatiques et les échanges commerciaux. On ne connaît ni le nom ni le prénom du personnage, on sait seulement qu’il appartient à la bourgeoisie commerçante de Fez qui restera pendant longtemps la classe sociale la plus cultivée et la plus évoluée du Maroc, promotrice d’une certaine ouverture envers l’Occident pourvu que cela ne remette pas en question sa suprématie.

Quelques années plus tard, Pierre Loti qui fit le même voyage de Tanger à Fez à la suite d’une Ambassade française, adoptera sans réserves le point de vue du commerçant de Fez. Dans la préface d’Au Maroc (1890) nous retrouvons pratiquement les mêmes paroles mais dans la bouche de l’auteur :

À quoi bon se donner tant de peine pour tout changer, pour comprendre et embrasser tant de choses nouvelles, puisqu’il faut mourir, puisque forcément un jour il faut râler quelque part, au soleil ou à l’ombre, à une heure que Dieu seul connaît ? Plutôt, gardons la tradition de nos pères, qui semble un peu nous prolonger nous-mêmes en nous liant plus intimement aux hommes passés et aux hommes à venir. Dans un vague songe d’éternité, vivons insouciants des lendemains terrestres, et laissons les vieux murs se fendre au soleil des étés, les herbes pousser sur nos toits, les bêtes pourrir à la place où elles sont tombées. Laissons tout, et jouissons seulement au passage des choses qui ne trompent pas, des belles créatures, des beaux chevaux, des beaux jardins et des parfums de fleurs….60

La divergence entre « européen civilisé » et « barbare africain » semble ici complètement effacée pour donner lieu à une synthèse d’un romantisme tardif et conservateur, une sorte d’allégeance mystique contre le progrès.

C’est pratiquement la préfiguration de l’alliance entre les classes conservatrices européennes et les classes conservatrices arabes qui, avec des hauts et des bas, a déterminé une grande partie de l’histoire des rapports entre le Monde arabe et l’Europe jusqu’à nos jours. 61

Notes de bas de page numériques

1  J.-J. Rousseau, Discours sur l’origine et les fondements del’inégalité parmi les hommes [1755], Paris, Garnier-Flammarion, 1971, p. 180.

2  J.-J. Rousseau, Discours sur l’inégalité parmi les hommes [1755], Paris, Garnier-Flammarion, 1971.

3  Odile Gannier, La littérature de voyage, Paris, Ellipses, 2001, p. 80.

4  Charles-Marie de La Condamine, Voyage sur l’Amazone, éd. Hélène Minguet, Paris, F. Maspero, 1981.

5  Jean-François de Galaup, La Pérouse, Voyage autour du monde sur « L’Astrolabe » et « La Boussole » 1785-1788, éd. Hélène Minguet, Paris, F. Maspero, 1980.

6  Voir à ce sujet : Yasmine Marcil, « Voyage écrit, voyage vécu ? La crédibilité du voyageur, du Journal encyclopédique au Magasin encyclopédique » Société & Représentation, Publications de la Sorbonne, n° 21, 1/2006, pp. 23-43.

7  Jean-François Lyotard, La condition postmoderne : rapport sur le savoir, Paris, Éd. de Minuit, 1979.

8  Jacques Derrida, De la grammatologie, Paris, Éd. de Minuit, 1997.

9  « Contre le positivisme, qui en reste au phénomène, “il n’y a que des faits”, j’objecterais : non, justement il n’y a pas de faits, seulement des interprétations. Nous ne pouvons constater aucun factum “en soi” : peut-être est-ce un non-sens de vouloir ce genre de chose. “Tout est subjectif”, dites-vous : mais ceci est déjà une interprétation, le “sujet” n’est pas un donné, mais quelque chose d’inventé en-plus, de placé-par-derrière. – Est-ce finalement nécessaire de poser en plus l’interprète derrière l’interprétation ? C’est déjà de l’invention, de l’hypothèse. Dans la mesure exacte où le mot “connaissance” possède un sens, le monde est connaissable : mais il est interprétable autrement, il n’a pas un sens par-derrière soi, mais d’innombrables sens : “perspectivisme”. Ce sont nos besoins qui interprètent le monde : nos instincts, leur pour et leur contre. Chaque instinct est un certain besoin de domination, chacun possède sa perspective qu’il voudrait imposer comme norme à tous les autres instincts. » Friedrich Nietzsche, Fragments posthumes : 1885 – 1887, Œuvres philosophiques complètes, éd. Giorgio Colli et Mazzino Montinari, trad. Julien Hervier, Vol. XII, 7 [60], Paris, Gallimard, 1988, pp. 304-305.

10  Roland Barthes, « Écrivains et écrivants » dans Essais critiques, Paris, Éd. du Seuil, 1964, p. 149 (nous soulignons). Les italiques sont de Barthes.

11  Claude Reichler, « Littérature et anthropologie, De la représentation à l’interaction dans une Relation de la Nouvelle-France au XVIIIe siècle », L’Homme, Éditions de l’E.H.E.S.S., n° 164, 2002/4, pp. 37-55.

12  Paul Rabinow, « Fantasia dans la bibliothèque. Les représentations sont des faits sociaux : modernité et post-modernité en anthropologie », Études rurales 97-98, 91-114. Cité par Vincent Debaene, « Ethnographie/Fiction, À propos de quelques confusions et faux paradoxes », L’Homme, Éditions de l’E.H.E.S.S., n°175-176, n° 3, 2005/7, pp. 219-232.

13  Claude Reichler, « Littérature et anthropologie, De la représentation à l’interaction dans une Relation de la Nouvelle-France au XVIIIe siècle », L’Homme, Éditions de l’E.H.E.S.S., n° 164, 2002/4, pp. 37-55.

14  « diversamente da altre correnti e sette, infinitamente più dei tentativi di Platone a Siracusa, ma anche del marxismo, il postmoderno ha trovato una piena realizzazione politica e sociale. Gli ultimi anni hanno infatti insegnato una amara verità. E cioè che il primato delle interpretazioni sopra i fatti, il superamento del mito della oggettività si è compiuto, ma non ha avuto gli esiti emancipativi profetizzati dai professori. Il “divenir favola” del mondo non c’è stato, non si è vista la liberazione dai vincoli di una realtà troppo monolitica, compatta, perentoria, una moltiplicazione e decostruzione delle prospettive che sembrava riprodurre, nel mondo sociale, la moltiplicazione e la radicale liberazione (si credeva negli anni Settanta del secolo scorso) dei canali televisivi. Il mondo vero certo è diventato una favola, anzi […] è diventato un reality, ma l’esito è stato il populismo mediatico, un sistema nel quale (purché se ne abbia il potere) si può pretendere di far credere qualsiasi cosa. Nei telegiornali e nei talk show si è assistito al regno del “Non ci sono fatti, solo interpretazioni”, che – con quello che purtroppo è un fatto e non un’interpretazione – ha mostrato il suo significato autentico : “La ragione del più forte è sempre la migliore” » Maurizio Ferraris, Manifesto del nuovo realismo, Bari, Laterza, 2012, pp. 5-6 (notre trad.).

15 « Richard Rorty – allargandoil discorso dai testi ai criteri d’interpretazione delle cose che stanno nel mondo – ricordava che noi possiamo certo interpretare un cacciavite come strumento per avvitare le viti, ma che sarebbe altrettanto legittimo vederlo e usarlo come strumento per aprire un pacco », Umberto Eco, « Ci sono delle cose che non si possono dire », Alfabeta (Alfabeta Edizioni), n° 17, 2012, p. 188 (notre trad.).

16 « Quello che è sconsigliabile farne è usarlo per grattarmi l’orecchio. Per non dire (il che sembra ovvio ma non è) che non posso usarlo come bicchiere perché non contiene cavità che possano ospitare del liquido. Il cacciavite risponde di SI a molte delle mie interpretazioni, ma a molte e almeno a una risponde di NO. Riflettiamo su questo NO, che sta alla base di quello che chiamerò il mio Realismo Negativo. Il vero problema di ogni argomentazione “decostruttiva” del concetto classico di verità non è di dimostrare che il paradigma in base al quale ragioniamo potrebbe essere fallace. Su questo pare che siamo d’accordo tutti, ormai. Il mondo quale ce lo rappresentiamo è certamente un effetto d’interpretazione […]. Il problema è piuttosto quali siano le garanzie che ci autorizzano a tentare un nuovo paradigma che gli altri non debbano riconoscere come delirio, pura immaginazione dell’impossibile. Qual è il criterio che ci permette di distinguere tra sogno, invenzione poetica, trip da acido lisergico […] e affermazioni accettabili sulle cose del mondo fisico o storico che ci circonda ? » Umberto Eco, « Ci sono delle cose che non si possono dire », Alfabeta (Alfabeta Edizioni), n° 17, 2012, pp. 194-195, (notre trad.)

17  « Di lì l’idea di un Realismo Negativo che si potrebbe riassumere, sia parlando di testi che di aspetti del mondo, nella formula ; ogni ipotesi interpretativa è sempre rivedibile […] ma, se non si può mai dire definitivamente se una interpretazione sia giusta, si può sempre dire quando è sbagliata. Ci sono interpretazioni che l’oggetto da interpretare non ammette » Umberto Eco, « Ci sono delle cose che non si possono dire », Alfabeta, Alfabeta Edizioni, n° 17, 2012 p. 197 (notre. trad.).

18  J.-J. Rousseau, Discours sur l’inégalité parmi les hommes [1755], Paris, Garnier-Flammarion, 1971, p. 181.

19  Claude Reichler, « Littérature et anthropologie. De la représentation à l’interaction dans une Relation de la Nouvelle-France au XVIIIe siècle », L’Homme, Éditions de l’E.H.E.S.S., n° 164, 2002/4, pp. 37-55.

20  Voir à ce sujet : Odile Gannier, « De l’usage des notes dans le Discours sur l’inégalité de Rousseau : récits de voyages et ethnographie », paru dans Loxias, Loxias 27, mis en ligne le 20 décembre 2009, URL : http://revel.unice.fr/loxias/index.html?id=3169 .

21  Martin Wahlberg, « Littérature de voyage et savoir : la méthode de lecture de Buffon » Dix-huitième siècle, La Découverte, n° 42, 2010/1.

22  Odile Gannier, La Littérature de voyage, Paris, Ellipses, 2001, p. 109.

23  Vincent Debaene, « La littérature face aux savoirs : frontière ou objet ? » Critique, Paris, Éd. de Minuit, n° 767, 2011/4, pp. 276-292.

24  Claude Reichler, « Littérature et anthropologie. De la représentation à l’interaction dans une Relation de la Nouvelle-France au XVIIIe siècle » L’Homme, Éditions de l’E.H.E.S.S., n° 164, 2002/4, pp. 37-55.

25  Claude Lévi-Strauss, Tristes tropiques, Paris, Plon, 1987.

26  Pierre Nora, « Tristes Tropiques, un moment de la conscience occidentale », Le Débat, Paris, Gallimard, n° 158, 2010/1, pp. 3-8.

27 Edmondo De Amicis, Marocco, Milano, Fratelli Treves Editori, 1877.

28  Edmondo De Amicis, Cuore [1886], Milano, Fabbri, 2005 (en français : Edmondo De Amicis, Du Coeur, trad. de l’italien par Gérard Du Puy, La Chaux-de-Fonds, F. Zahn, 1891).

29  Edmondo De Amicis, Spagna, Milano, Treves, 1872 (en français : Edmondo De Amicis, L’Espagne, Paris, Hachette, 1888).

30  Edmondo De Amicis, Ricordi di Londra, Milano, Treves, 1873 (en français : Edmondo De Amicis, Souvenirs de Paris et de Londres, Paris, Hachette, 1880).

31  Edmondo De Amicis, Olanda, Milano, Treves, 1874 (en français : Edmondo De Amicis, La Hollande, Paris, Hachette, 1885).

32  Roland Barthes, « Écrivains et écrivants » in Essais critiques, Paris, Éd. du Seuil, 1964.

33  Edmondo De Amicis, Le Maroc, trad. de l’italien par Henri Belle, Paris, Les lettres modernes, 1879, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k84619n.r=de+amicis+maroc.langFR, p. 148. Je fais référence, pour la traduction en français, à l’édition parue en 1879, deux ans à peine après l’édition italienne. Étant numérisée sur gallica.bnf.fr. , cette édition est la traduction en français qui circule le plus largement. Quoique incomplète, elle témoigne de l’intérêt du public français pour l’œuvre de De Amicis, intérêt à la fois empressé et quelque peu sélectif vu que le traducteur et son éditeur n’ont offert à leurs lecteurs que les morceaux les plus agréables et pittoresques de son récit de voyage.

34  Filippo Pananti, « Avventure e osservazioni sopra le coste di Barberia [1817] » in Scrittori italiani di viaggio 1700-1861, a cura di L. Clerici, Milano, Mondadori, 2008.

35 Felice Caronni, Ragguaglio del viaggio compendioso d’un dilettante antiquario sorpreso da’ corsari condotto in Barberia e felicemente ripatriato [1805], a cura di Salvatore Bono, Milano, Ed. S. Paolo, 1993.

36 Jacob Graberg, Specchio geografico e statistico dell’impero di Marocco : del cavaliere conte Jacopo Graberg di Hemso, Genova, Pellas, 1834.

37  Edmondo De Amicis, Le Maroc, trad. de l’italien par Henri Belle, Paris, Les lettres modernes, 1879, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k84619n.r=de+amicis+maroc.langFR , p. 146.

38  Edmondo De Amicis, Le Maroc, trad. de l’italien par Henri Belle, Paris, Les lettres modernes, 1879, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k84619n.r=de+amicis+maroc.langFR , p. 146.

39  Edmondo De Amicis, Le Maroc, trad. de l’italien par Henri Belle, Paris, Les lettres modernes, 1879, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k84619n.r=de+amicis+maroc.langFR , p. 147.

40 « …si realizza […] un’istituzionalizzazione estetica del paesaggio – anche umano – che cambia la concezione dell’ambiente e del territorio, prima inteso utilitaristicamente come spazio antropico modificabile . » L. Clerici, Viaggiare e raccontare, in Scrittori italiani di viaggio, Volume primo 1700-1861, Milano, A. Mondadori Editore, 2008, p. X (notre traduction).

41 Francesco Orlando, L’altro che è in noi : arte e nazionalità, Torino, Bollati Boringhieri, 1996.

42 Valentina Bezzi, De Amicis in Marocco. L’esotismo dimidiato - Scrittura e avventura in un reportage di fine Ottocento, Padova, Il Poligrafo, 2001, p. 36 (notre traduction).

43  Edwige Comoy Fusaro, « Le spectateur controversé : réflexions sur les modalités de la narration dans Sull’oceano de Edmondo De Amicis », Cahiers de Narratologie, REVEL, n° 14, 2008, p. 2, http://narratologie.revues.org/627 .

44  Edmondo De Amicis, Sur l’océan : émigrants et signori de Gênes à Montevideo [1889], trad. Olivier Favier, Paris, Payot & Rivages, 2009.

45  «…quello di un osservatore maschile e borghese, presuntuoso, distaccato ma incuriosito, serio ma divertito. Lo sguardo dell’osservatore è il vettore di un giudizio morale, riflesso del comune sentire, ovvero della doxa normativa imperante. La descrizione dell’oggetto di osservazione sottolinea insistentemente l’alterità di esso, la sua diversità, la sua anormalità. Si forma così una tacita connivenza tra autore e lettore, fondata su una comunanza insieme sociale, ideologica e culturale, dalla quale l’oggetto di osservazione è escluso. L’impostazione delle prose deamicisiane postula implicitamente un’assegnazione delle parti rigidamente assiologia, in cui vengono contrapposte la parte dell’io (autore, lettore, alter ego letterario) e la parte dell’altro, il primo comodamente sistemato nella posizione dello spettatore, l’altro invece posto sotto le luci della ribalta. » Edwige Comoy Fusaro, Forme e figure dell’alterità, Studi su De Amicis, Capuana e Camillo Boito, Ravenna, Giorgio Pozzi Editore, 2009, p. 17 (notre trad.).

46  «…una di quelle creature su cui non si può fissare lo sguardo, e che gettano per un momento anche nell’anima d’un credente lo sgomento del dubbio. Si dice che è una donna ; ma non sembra né donna né uomo. È una testa d’urango, mulatta, coi capelli corti e irsuti, uno scheletro colla pelle, coperta di cenci neri, quasi sempre distesa come un corpo morto nel mezzo della piazzetta, o seduta in un angolo, immobile e muta come un’insensata, quando non la molestino i ragazzi, ai quali si rivolta urlando o piangendo. Può avere quindici anni può averne trenta : la sua mostruosità nasconde l’età. Non ha parenti, non ha casa, non si sa come si chiami né donde venga. Passa la notte accovacciata per le strade, in mezzo alle immondizie e ai cani », Edmondo De Amicis, Marocco, Milano, Fratelli Treves Editori, 1877, pp. 31-32, (notre trad.).

47 « … il più bello e più simpatico giovane che possa brillare alla fantasia d’una odalisca. È alto di statura e snello, ha gli occhi grandi e soavi, un bel naso aquilino, il viso bruno d’un ovale perfetto, contornato d’una corta barba nera ; una fisionomia nobilissima e piena di dolce mestizia », Edmondo De Amicis, Marocco, Milano, Fratelli Treves Editori, 1877, p. 248 (notre trad.).

48  Edmondo De Amicis, Le Maroc, trad. de l’italien par Henri Belle, Paris, Les lettres modernes, 1879, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k84619n.r=de+amicis+maroc.langFR , p. 166.

49  Edmondo De Amicis, Le Maroc, trad. de l’italien par Henri Belle, Paris, Les lettres modernes, 1879, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k84619n.r=de+amicis+maroc.langFR , p. 191.

50  « C’erano vecchie, giovani, bambine di otto o dieci anni, tutte con vestiti di forme bizzarre e di colori vivissimi. Le più avevano le trecce giù per le spalle, un fazzoletto di seta rossa o verde stretto intorno al capo a modo di benda, una specie di caffettano di vario colore, con larghe maniche, serrato introno alla vita da una cintura azzurra o vermiglia ; un corpettino di velluto aperto sul petto ; calzoncini, babbucce gialle e grossi anelli d’argento sopra la noce del piede », Edmondo De Amicis, Marocco, Milano, Fratelli Treves Editori, 1877, p. 258 (notre trad.).

51  Edmondo De Amicis, Le Maroc, trad. de l’italien par Henri Belle, Paris, Hachette, 1882, dans L’Afrique pittoresque, Lectures choisies par Victor Tissot, Paris, Librairie Ch. Delagrave, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k206481d.r=l%27afrique+pittoresque.langFR , pp. 78-79.

52  Edmondo De Amicis, Le Maroc, trad. de l’italien par Henri Belle, Paris, Les lettres modernes, 1879, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k84619n.r=de+amicis+maroc.langFR , p. 146.

53  Edwige Comoy Fusaro, « Le spectateur controversé : réflexions sur les modalités de la narration dans Sull’oceano de Edmondo De Amicis » Cahiers de Narratologie, REVEL, n° 14, 2008, http://narratologie.revues.org/627 .

54  Edmondo De Amicis, Le Maroc, trad. de l’italien par Henri Belle, Paris, Les lettres modernes, 1879, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k84619n.r=de+amicis+maroc.langFR , p. 151.

55  Quella sera, al tramonto del sole, andai col comandante a vedere i soldati della scorta che facevano le cariche in un vasto prato vicino all’accampamento. C’era un centinaio d’arabi, seduti in una sola fila sulla sponda d’un fosso, che guardavano. Appena ci videro, prima alcuni, poi cinquanta, poi tutti, si levarono da sedere e a poco a poco si vennero ad affollare dietro di noi. Noi fingemmo di non vederli. Per qualche momento, nessuno fiatò ; poi cominciò uno a dir un non so cosa, che li fece ridere tutti. Dopo quello, parlò un altro, e poi un terzo, e via via, e ad ogni parola, tutti ridevano. Evidentemente ridevano di noi, e non tardammo ad accorgerci che le osservazioni e le risate corrispondevano per l’appunto ai nostri movimenti e a certe inflessioni della nostra voce. La cosa era naturalissima : ci trovavano ridicoli. Ma che cosa dicevano? Questa era la nostra grande curiosità. Passò in quel momento il signor Morteo, lo chiamai con un cenno furtivo, e lo pregai di star coll’orecchio teso, senza farsi scorgere, e di tradurmi letteralmente le canzonature di que’ furfanti. Mi servì a meraviglia. Uno fece subito un’osservazione che, al solito, provocò una risata. – Dice – tradusse il Morteo – che non sa capire a che cosa serva la falda di dietro del nostro vestito, a meno che non sia fatta per nascondere la coda.... Un momento dopo, un’altra osservazione, un’altra risata.– Dice che la divisa dei capelli che lei ha sulla nuca è la strada dove i pidocchi fanno il lab el barod. Una terza osservazione, un terzo scoppio di risa. – Dice che son curiosi questi cristiani, che per l’ambizione di parere alti di statura, si mettono un vaso sulla testa e due puntelli sotto le calcagna.... In quel punto un cane dell’ accampamento venne a accovacciarsi ai nostri piedi. Una quarta osservazione, e questa volta una risata sgangherata. – Questa è forte ! – disse il Morteo. – Dice che questo cane è venuto ad accovacciarsi vicino agli altri cani.... Ora li accomodo io. Così dicendo, si voltò indietro bruscamente e disse qualche parola araba in tuono di minaccia. Fu un colpo di fulmine. In un momento non se ne vide più uno. Ma, povera gente, siamo giusti ! Lasciando da parte le cariche dei pidocchi e la fratellanza coi cani, non avevan ragione di pensare di noi quello che pensavamo noi stessi, paragonandoci con loro? Dieci volte il giorno, mentre ci scorazzavano intorno quei superbi cavalieri, ci dicevamo gli uni agli altri : – Sì, siamo civili, siamo i rappresentanti d’una grande nazione, abbiamo più scienza nella testa, noi dieci, che non ce ne sia in tutto l’Impero dei Sceriffi ; ma piantati su queste mule, vestiti di questi panni, con questi colori, con questi cappelli, in mezzo a loro, per dio, siamo brutti ! Ah ! quant’era vero ! L’ultimo di quegli straccioni a cavallo era più gentile, più maestoso, più degno dello sguardo d’una donna, che tutti, messi in un fascio, i bellimbusti d’Europa » Edmondo De Amicis, Marocco, Milano, Fratelli Treves Editori, 1877, pp. 191-193, (notre trad.).

56  Claude Reichler, « Littérature et anthropologie, De la représentation à l’interaction dans une Relation de la Nouvelle-France au XVIIIe siècle », L’Homme, Éditions de l’E.H.E.S.S., n° 164, 2002/4, pp. 37-55.

57  Edmondo De Amicis, Marocco, Milano, Fratelli Treves Editori, 1877, p. 336 (notre trad.).

58  « Cadde poi il discorso sulle industrie europee, sulle strade ferrate, sul telegrafo, sulle grandi opere d’utilità pubblica ; e di questo mi lasciò parlare senza interrompermi, assentendo anzi, di tratto in tratto, con un cenno del capo. Quand’ebbi finito, però, mise un sospiro e disse :--Infine poi... a che servono tante cose se dobbiamo tutti morire? – Insomma, – conclusi, – voi non cangereste il vostro stato col nostro ! Stette un po’ pensando e rispose : – No, perché voi non vivete più di noi, né siete più sani, né più buoni, né più religiosi, né più contenti. Lasciateci dunque in pace. Non vogliate che tutti vivano a modo vostro e sian felici come volete voi. Rimaniamo tutti nel cerchio che Allà ci ha segnato. Con qualche fine Allà ha disteso il mare fra l’Africa e l’Europa. Rispettiamo i suoi decreti. – E credete, – domandai, – che rimarrete sempre quello che siete? che a poco a poco non vi faremo cangiare? – Non lo so, – rispose. – Voi avete la forza, voi farete ciò che vorrete. Tutto quello che deve accadere, è già scritto. Ma qualunque cosa accada, Allà non abbandonerà i suoi fedeli. Ciò detto, mi prese la destra, se la strinse sul cuore e se n’andò a passi maestosi » Edmondo De Amicis, Marocco, Milano, Fratelli Treves Editori, 1877, pp. 342-343 (notre trad.).

59  « Quand on lui demanda ce qu’il avait remarqué chez l’Empereur, il resta un moment pensif et répondit en souriant : "J’ai remarqué que dans ce pays, même le Roi ne porte pas de chaussettes !" » (« Domandato che cosa avesse osservato nell’Imperatore, stette un po’ sopra pensiero e rispose sorridendo : “Aggio osservato ch’a stu paese manc’u Re porta i’calzette !” ») Edmondo De Amicis, Marocco, Milano, Fratelli Treves Editori, 1877, p. 254,(notre trad.).

60  Pierre Loti, Au Maroc (1890) Saint-Cyr-sur-Loire, C. Pirot, 2000, p. 19.

61  Voir à ce propos : Benjamin Stora, Le 89 arabe – Dialogue avec Adwy Plenel, Paris, Éditions Stock, 2011.

Bibliographie

Bibliographie

Corpus

Caronni Felice, Ragguaglio del viaggio compendioso d’un dilettante antiquario sorpreso da’ corsari condotto in Barberia e felicemente ripatriato [1805], Milano, Ed. S. Paolo, 1993.

De Amicis, Edmondo,  Cuore. Milano, Fabbri, 2005.

De Amicis, Edmondo, Du Cœur, traduit de l’italien par Gérard Du Puy. La Chaux-de-Fonds, F. Zahn, 1891.

De Amicis, Edmondo, Marocco, Milano, Fratelli Treves Editori, 1877.

De Amicis, Edmondo, Le Maroc, traduit de l’italien par Henri Belle, Paris, Hachette, 1882.

De Amicis, Edmondo, Le Maroc, traduit de l’italien par Henri Belle, Paris, Les lettres modernes, 1879.

De Amicis, Edmondo, Olanda [1874], Milano, Treves, 1909.

De Amicis, Edmondo, La Hollande, Paris, Hachette, 1885.

De Amicis, Edmondo, Ricordi di Londra [1873], Milano, Treves, 1914.

De Amicis, Edmondo, Souvenirs de Paris et de Londres, Paris, Hachette, 1880.

De Amicis, Edmondo, Spagna, Milano, Treves, 1872.

De Amicis, Edmondo, L’Espagne, Paris, Hachette, 1888.

De Amicis, Edmondo, Sull’oceano, Milano, Treves, 1889.

De Amicis, Edmondo, Sur l’océan : émigrants et signori de Gênes à Montevideo [1889], traduit de l’italien par Olivier Favier, Paris, Payot & Rivages, 2009.

Graberg Jacob, Specchio geografico e statistico dell’impero di Marocco : del cavaliere conte Jacopo Graberg di Hemso, Genova, Pellas, 1834.

La Condamine Charles-Marie de, Voyage sur l’Amazone, Éd. Hélène Minguet, Paris, F. Maspero, 1981.

La Pérouse Jean-François de Galaup, Voyage autour du monde sur « L’Astrolabe » et « La Boussole » 1785-1788, Éd. Hélène Minguet, Paris, F. Maspero, 1980.

Loti Pierre, Au Maroc [1890], Saint-Cyr-sur-Loire, C. Pirot, 2000.

Pananti Filippo, « Avventure e osservazioni sopra le coste di Barberia » [1817] In Scrittori italiani di viaggio 1700-1861, a cura di L. Clerici, Milano, Mondadori, 2008.

RousseauJean-Jacques, Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes [1755], Paris, Garnier, coll. « GF ».

Études

Barthes Roland, « Écrivains et écrivants » dans Essais critiques, Paris, Éd. du Seuil, 1964, pp. 147-154.

Bezzi Valentina, De Amicis in Marocco. L’esotismo dimidiato Scrittura e avventura in un reportage di fine Ottocento, Padova, Il Poligrafo, 2001.

Clerici Luca, « Viaggiare e raccontare » In Scrittori italiani di viaggio 1700-1861, Milano, Mondadori, 2008.

Comoy Fusaro Edwige, Forme e figure dell’alterità, Studi su De Amicis, Capuana e Camillo Boito, Ravenna, Giorgio Pozzi Editore, 2009.

Comoy Fusaro Edwige, « Le spectateur controversé : réflexions sur les modalités de la narration dans Sull’oceano de Edmondo De Amicis. » Cahiers de Narratologie, REVEL, n° 14, 2008, http://narratologie.revues.org/627 .

Debaene Vincent, « Ethnographie/Fiction, À propos de quelques confusions et faux paradoxes » L’Homme, Éditions de l’E.H.E.S.S.,qqqq n° 3, 2005, pp. 219-232.

Debaene Vincent, « La littérature face aux savoirs : frontière ou objet ? » Critique, Éditions de Minuit, n° 767, 2011, pp. 276-292.

Derrida Jacques, De la grammatologie, Paris, Éditions de Minuit, 1997.

Eco Umberto, « Ci sono delle cose che non si possono dire » Alfabeta (Alfabeta Edizioni), n° 17, 2012.

Ferraris Maurizio, Manifesto del nuovo realismo, Bari, Laterza, 2012.

Gannier Odile, La Littérature de voyage, Paris, Ellipses, 2001.

GANNIER Odile, « De l’usage des notes dans le Discours sur l’inégalité de Rousseau : récits de voyages et ethnographie », paru dans Loxias, Loxias 27, mis en ligne le 20 décembre 2009, URL : http://revel.unice.fr/loxias/index.html?id=3169 .

Lévi-Strauss Claude, Tristes tropiques [1955], Paris, Plon, 1987.

Lyotard Jean-François, La condition postmoderne : rapport sur le savoir, Paris, Éd. de Minuit, 1979.

Marcil Yasmine, « Voyage écrit, voyage vécu ? La crédibilité du voyageur, du Journal encyclopédique au Magasin encyclopédique » Société & Représentation (Publications de la Sorbonne), n° 21, 2006, pp. 23-43.

Nietzsche Friedrich, Fragments posthumes : 1885 1887,Œuvres philosophiques complètes. Éd. Giorgio Colli et Mazzino Montinari, trad. par Julien Hervier, Vol. XII, Paris, Gallimard, 1988.

NORA Pierre, « Tristes Tropiques, un moment de la coscience occidentale » Le Débat (Gallimard), n° 158, 2010, pp. 3-8.

Orlando Francesco, L’altro che è in noi : arte e nazionalità, Torino, Bollati Boringhieri, 1996.

Reichler Claude, « Littérature et anthropologie, De la représentation à l’interaction dans une Relation de la Nouvelle-France au XVIIIe siècle » L’Homme, Éditions de l’E.H.E.S.S., n° 164, 2002/4, pp. 37-55, Flammarion, 1971.

Saïd Edward W., L’Orientalisme [1978], trad. par C. Malamoud, Paris, Éditions du Seuil, 1980.

Stora Benjamin, Le 89 arabe Dialogue avec Adwy Plenel, Paris, Éditions Stock, 2011.

Wahlberg Martin, « Littérature de voyage et savoir : la méthode de lecture de Buffon » Dix-huitième siècle, La Découverte, n° 42, 2010.

Pour citer cet article

Valerio Vittorini, « Littérature de voyage et réalité: le cas de Marocco, de E. De Amicis », paru dans Loxias-Colloques, 2. Littérature et réalité, Littérature de voyage et réalité: le cas de Marocco, de E. De Amicis, mis en ligne le 30 janvier 2013, URL : http://revel.unice.fr/symposia/actel/index.html?id=335.

Auteurs

Valerio Vittorini

Professeur agrégé de Langue et Littérature Italienne en Italie, Valerio Vittorini a travaillé pendant cinq ans pour les services culturels de l’Ambassade d’Italie au Maroc et pour l’Ambassade d’Italie en France. Auteur de quelques publications en matière d’Histoire de la Littérature italienne, doctorant en Littérature générale et comparée à l’Université de Nice-Sophia Antipolis et de Gênes (Italie) sous la direction de Madame Odile Gannier et M. Stefano Verdino, il travaille sur l’image du monde arabe dans la littérature italienne et française du XIXe siècle.