Loxias-Colloques |  13. Lettres d'exil. Autour des Tristes et des Pontiques d’Ovide |  Mélancolie de la disgrâce: échos génériques 

Ida Gilda Mastrorosa  : 

Un chevalier romain sur la mer Noire’ : regards sur l’exil d’Ovide et les fautes d’Auguste au XVIIIe siècle

Résumé

Cette contribution analyse l’interprétation de l’exil d’Ovide dans la culture française entre la fin du XVIIe siècle et celle du XVIIIe à partir d’attestations tirées d’œuvres d’intellectuels, d’érudits, d’historiens aux intérêts différents. On voit comment, à l’âge des Lumières, Ovide n’était pas uniquement rappelé et apprécié sur le plan artistique et littéraire comme l’auteur des Métamorphoses mais incarnait l’exemple de l’exilé victime d’Octavien Auguste. À ce propos, une attention particulière est réservée aux réflexions de Voltaire qui, s’appuyant sur des passages des Pontiques et des Tristia, mettait en lumière la triste condition d’Ovide contraint de vivre loin de sa patrie parmi des peuples d’une langue différente mais contre lesquels il n’éprouvait pas d’hostilité. Par ailleurs, Voltaire saisissait, dans son éloignement, la preuve du déclin de la liberté sous le Principat d’Auguste à qui il attribuait la faute de l’avoir éloigné pour cacher sa conduite dépravée. D’autre part, certains passages de son ouvrage montrent que Voltaire jugeait trop soumise la ligne d’Ovide exilé au point de lui reprocher d’avoir exagéré dans ses louanges envers de prince et de soutenir qu’il aurait dû réagir courageusement en rentrant à Rome pour ordonner l’assassinat d’Octavien. Cette lecture différente de celle des érudits et des historiens qui, dans l’ensemble, plus ou moins à la même époque ne virent en Ovide qu’une victime, reflète des positions et des états d’âme propres aux décennies qui précédèrent la Révolution Française.

Abstract

This contribution analyses how latter 17th and 18th century French Culture interpreted Ovid’s exile examining texts from works of intellectuals, scholars and historians with various interests. What emerges is that in the Age of the Enlightenment Ovid was not remembered and appreciates simply for his artistic merits as the author of the Metamorphoses, but rather as the embodiment of the exile, victim of Octavian Augustus. In this sense, noteworthy are reflections of Voltaire who focussing on some passages from the Black Sea Letters and Tristia highlighted the sad situation of the poet condemned to live far from his homeland among people speaking a different language, even if felt no hostility toward them. Moreover, in his exil Voltaire found proof that liberty had declined under Augustus’ rule, blaming him for exiling Ovid to cover his own depraved behaviour. Furthermore, some passages of his work show that Voltaire considered Ovid’s attitude while in exile too docile, reproaching him for effusively praising the prince, declaring he should have been courageous enough to return to Rome and have Octavian assassinated. In Voltaire’s stance, which stood out from that of the more or less contemporary scholars and historians who saw him only as a victim, one can recognize a reflection of the attitudes and moods of the decades leading up to the French Revolution.

Index

Mots-clés : exil , Ovide, réception, relégation, Saint-Évremond, Voltaire

Plan

Texte intégral

Avant-propos

De nombreux spécialistes appartenant à différentes disciplines ont remarqué l’intérêt suscité par la relégation1 d’Ovide (8 après J.-C.) à partir du Moyen Âge jusqu’à nos jours2.

Parmi eux Simone Viarre a mis en évidence comment « la métamorphose spatiale s’inscrit dans la vie du poète de manière brutale par l’exil au bord de la Mer Noire » et a noté qu’il « a transformé le pays, lointain pour lui, mais bien réel de son exil en une sorte de mythe, par une métamorphose psychologico-poétique3 ». Elle soulignait en outre comment l’épisode avait favorisé le développement de « récits légendaires’, de sorte qu’au début du dix-septième siècle on discutait de l’existence de « plusieurs lacs d’Ovide, avec une île d’Ovide, sans omettre une tour d’Ovide ». Rainer Godel aussi, dans une contribution sur des romans concernant la biographie du poète dans le XXe siècle4, s’est focalisé sur ce sujet. Après avoir remarqué la ‘résurrection’ d’Ovide dans les trente dernières années et l’attraction de ses affaires personnelles dès le XIIe siècle, il a justement reconnu dans sa disparition aux confins de l’empire romain et dans l’insuffisance d’informations sur ses dernières années de vie, deux facteurs qui ont influencé l’intérêt pour le déroulement réel des faits inhérents à son eloignement. D’autre part, Godel a noté comment l’attention accordée à Ovide au siècle dernier s’est dirigée sur quatre « different literary motifs », c’est-à-dire, sur l’événement politique qui impliqua un dictateur capable de contraindre un artiste libertin à quitter son pays ; sur la recherche des raisons inconnues de sa relégation et sur la signification de son erreur ; sur le cas d’un poète doué qui, par sa disparition de la scène publique, réussit à remettre en circulation le thème central de ses œuvres, à savoir le changement ; enfin, sur l’idée que l’exil et la séparation de ses propres racines puissent faciliter la recherche de valeurs importantes comme la loi, la moralité et une nouvelle conception du moi.

Au-delà de suggestions offertes par les contributions ci-dessus, le premier des points valorisé par Godel peut être exploité aussi pour analyser le portrait du poète exilé à l’époque des Lumières. Il s’agit, par ailleurs, d’une phase laissée de côté encore par l’historiographie récente sur l’épisode, malgré d’importants approfondissements sur les biographies du poète composées au XVIIe siècle en aire française5. Outre les thèmes topiques qui émergent à propos de la relégation d’Ovide de cette catégorie des textes, les œuvres de lettrés et d’érudits du siècle suivant nous offrent des évaluations sur l’épisode très significatives, particulièrement par rapport au lien du poète avec Octavien Auguste et à la punition que ce dernier lui infligea6.

1. La culpabilité du prince et la responsabilité du poète chez Voltaire

Parmi les autres, une place significative est occupée par Voltaire (1694-1778) dont on peut préliminairement rappeler des allusions au poète dans son traité sur la Philosophie de l’Histoire, publié sous le pseudonyme d’abbé Bazin en 1765. Ici, après une assertion d’ouverture en faveur d’une histoire antique écrite par des philosophes, vu la nécessité de rechercher des vérités utiles sans tomber sur d’inutiles erreurs7, le savant mentionnait Ovide en passant comme auteur de beaux vers tirés de récits à caractère mythologique, capables d’attirer même des figures comme Philippe Quinault et les peintres de l’époque8. Par ailleurs, Voltaire le rappelait aussi dans un chapitre expressément consacré à son apport en tant que poète des Métamorphoses, c’est-à-dire d’un genre littéraire à son avis basé sur le principe que n’importe quelle idée qui frappe et sollicite l’imagination conquiert bien vite le monde9.

Au-delà de références qui impliquent une réception sur le plan artistico-littéraire de la figure d’Ovide et de cet ouvrage en particulier, dont Montesquieu nous avait déjà donné un exemple dans ses Pensées10, remarquons que l’intérêt de Voltaire pour le dossier concernant l’exil du poète remonte aux décennies précédentes, voire à ses Lettres Philosophiques élaborées durant les années Trente du XVIIIe siècle et publiées en Angleterre en 1733.

Dans ce recueil dont la complexité d’élaboration et la stratégie éditoriale de l’auteur de multiplier les éditions quasi simultanées pour des raisons d’ordre biographique et historique ont été amplement étudiées11, la dix-neuvième Sur la Comédie présentait une section, ajoutée plus tard, où Voltaire mettait en cause le sort du poète victime de l’empereur en s’inspirant d’une comédie intitulée Le Mari négligent12. Pointant une scène où un homme se faisait gratter la tête par une jeune servante à ses côtés, suscitant la réaction irritée de sa femme qui n’hésitait pas à utiliser une expression vulgaire, l’auteur en tirait l’occasion pour censurer ceux qui défendaient ce comportement mettant en cause l’exemple d’Horace habitué à faire référence aux parties honteuses et aux aspects de caractère sexuel.

Dans ce cadre, Voltaire jugeait le poète adapté aux mauvaises relations et à la cour, avant d’articuler une réflexion plus générale sur les mœurs des Romains. Ainsi, après en avoir souligné le raffinement pas inférieur à celui des Parisiens et rappelé les éloges réservés précisément par Horace à l’activité réformatrice des mœurs promue par Auguste, il remarquait comment il se conformait, en tout cas, aux mauvaises pratiques de son temps jusqu’à noter ironiquement que, quoiqu’il parlât « le langage de la débauche » le poète de Venouse avait été « le favori d’un réformateur » à la différence d’Ovide. L’allusion au sort de ce dernier, envoyé en exil, bien qu’il eût utilisé « le langage de la galanterie », lui offrait l’opportunité de condamner l’artisan du Principat, sans appel, c’est-à-dire de le définir « un débauché, un fourbe, un assassin nommé Octave, parvenu à l’empire par des crimes qui méritaient le dernier supplice ».

D’autre part, deux décennies plus tard, en 1756, dans la Suite des Mélanges13, Voltaire concédait de la place au sujet dans un opuscule intitulé D’Ovide. Ici, conscient de l’existence d’une littérature importante, produite par des lettrés qui s’étaient interrogés pour établir avec exactitude le lieu d’exil du poète, le savant le rappelait immédiatement au début de son exposé. Ainsi, après avoir évoqué la naissance du poète à Sulmone et sa formation à Rome, il en remarquait avant tout la décennie de permanence sur la rive droite du Danube, près de la Mer Noire et déduisait que malgré la définition ovidienne de cette terre comme barbare, on ne pouvait pas l’imaginer comme un lieu de sauvages du moment qu’il y avait des sujets comme le roi de Thrace, Cotys, auteur de vers composés pour enseigner à Ovide la langue gétique et l’amener à se mettre à l’utiliser pour sa propre production14.

Outre ces indications qui prouvaient une connaissance ponctuelle des Pontiques15, dans la suite du raisonnement Voltaire soulignait que dans la patrie d’Orphée où l’on aurait dû écouter des vers grecs, étaient installés des peuples du nord qui parlaient probablement « un dialecte tartare, une langue approchante de l’ancien slavon », tout à fait étranger au poète de Sulmone16. Ainsi, au-delà d’identifier la plus grande peine de sa relégation dans l’obligation de résider dans une terre étrangère avant tout pour des raisons linguistiques17, avec ses considérations l’auteur exprimait un intérêt particulier pour des landes peuplées de sujets distingués par un idiome inconnu18. Dans cette perspective, notons que s’occuper d’Ovide pour Voltaire signifiait aussi de s’attarder sur les coordonnées topographiques de la localité où il fut envoyé, c’est-à-dire de préciser la collocation du centre de Tomis19 dans la province de Mésie. Par ailleurs, d’autres détails lui permettaient de noter l’âpreté du climat de l’endroit et combien elle avait pesé sur la santé du poète l’empêchant de vivre longtemps :

Le pays des Tomites où il fut relégué, était une partie de la Mésie, province romaine, entre le mont Hémus et le Danube. Il est situé au quarante-quatrième degré et demi, comme les plus beaux climats de la France ; mais les montagnes qui sont au sud, et les vents du nord et de l’est qui soufflent du Pont-Euxin, le froid, et l’humidité des forêts et du Danube, rendaient cette contrée insupportable à un homme né en Italie : aussi Ovide n’y vécut-il pas longtemps ; il y mourut à l’âge de soixante années. Il se plaint dans ses élégies du climat, et non des habitants : « Quos ego, cum loca sim vestra perosus, amo »20.

En exploitant des témoignages d’Ovide21 Voltaire soulignait en fait qu’il n’entendait exprimer aucune critique contre les habitants du lieu et notait le bon accueil qu’ils lui avaient accordé en lui concédant un couronnement et des privilèges insuffisants toutefois pour l’empêcher de regretter Rome.

Il s’agit, en fait, d’un aspect qui n’avait pas échappé à Montesquieu22 pour qui le poète méritait en plus d’être mentionné aux côtés de Roger de Rabutin, comte de Bussy, comme exemple d’exilé incapable de supporter le sort adverse23. Malgré l’attention initiale pour de détails de saveur géographique et ethnographique, certainement indicatifs de la doctrine de Voltaire, la suite du discours montre que son intérêt pour le cas d’Ovide ne se limitait pas au plan culturel mais reflétait son intention de prendre position en termes politiques sur l’éloignement du poète. De cette manière, le savant se ménageait l’espace pour stigmatiser la décision d’Auguste en en tirant une preuve du déclin de la liberté et des lois chez les Romains, dans sa perspective d’autant plus blâmable qu’elle était infligée par l’empereur à un sujet de rang équestre24 comme lui et sans avoir préventivement acquis des avis différents du sien à propos des raisons de sa culpabilité :

C’était un grand exemple de l’esclavage des Romains, et de l’extinction de toutes les lois, qu’un homme né dans une famille équestre comme Octave exilât un homme d’une famille équestre, et qu’un citoyen de Rome envoyât d’un mot un autre citoyen chez les Scythes. Avant ce temps il fallait un plébiscite, une loi de la nation, pour priver un Romain de sa patrie. Cicéron exilé par une cabale, l’avait été du moins avec les formes des lois25.

Inspirée aussi par la conviction que le choix des Scythes comme peuples auprès duquel confiner le poète aggravait la décision d’Auguste, cette reconstruction s’avère un véritable acte d’accusation contre la souche de la dynastie julio-claudienne, jugée non seulement coupable d’un acte extrême au détriment d’un propre concitoyen mais essentiellement d’un bouleversement du régime institutionnel.

Par ailleurs, remarquons que cette position de Voltaire ne focalisait pas la nouveauté causée par la montée au pouvoir d’Auguste26 mais venait de la connaissance et de la comparaison du cas d’Ovide avec un autre cas célèbre. En fait, elle naissait de la constatation que, à l’égard du poète, le prince avait utilisé une procédure différente que celle adoptée dans les années précédentes quand, pour édicter l’exil, il fallait préventivement évaluer la volonté populaire avec un plébiscite ou bien s’appuyer sur une loi de la nation, comme le savant déduisait du cas de Cicéron exilé avec une loi en 58, d’ailleurs à la suite d’un complot ourdi contre lui27.

D’autre part, s’occuper de l’exil d’Ovide sur les bords de la Mer Noire comportait, pour Voltaire, de s’interroger sur sa cause. Persuadé d’après ce qu’il avait lu dans un fameux passage des Tristia28 que la faute du poète résidait dans le fait d’avoir été involontairement le témoin oculaire de quelque chose de « honteux » liée à la famille d’Octavien29, le savant tergiversait sur la question d’une manière qui n’était pas servile. Nous le tirons d’une section suivante du discours, conçue comme revue des diverses hypothèses avancées par les sources parmi lesquelles outre le fait qu’Ovide ait été mêlé à quelque affaire liée au rival du jeune Mannius, refusé par l’empereur à cause de son physique désagréable, on trouvait évoquée la possibilité que le poète ait été au courant d’une relation extraconjugale de Livie ou d’un lien incestueux de l’empereur avec sa fille ou avec sa nièce ou encore de ses tendances homosexuelles30.

Intéressé à faire la lumière sur les causes probables de la punition réservée à Ovide, dans la suite Voltaire en profitait pour continuer à donner une image négative de la conduite d’Auguste, voire soulignait qu’il avait épousé une femme qu’il avait soustraite à son mari et qu’il s’agissait, en tout cas, d’un sujet qui méritait des insinuations. Il n’hésitait pas encore à en rappeler les attitudes moralement condamnables grâce aussi à un témoignage extrait de Virgile31. En plus, voulant présenter l’épisode en termes dignes de foi, le savant ne renonçait pas à prendre position en faveur de la possibilité que le sort terrible qui avait frappé Ovide était lié au fait d’avoir été surpris dans quelque comportement incestueux, s’autorisant pour cela d’un témoignage attribué à l’Antiquité32. Au-delà du choix d’offrir une documentation à l’appui de son hypothèse, il faut noter que Voltaire la tirait d’un certain Minutianus Apuleius à ce qu’il dit contemporain d’Octavien. Il s’agissait en fait d’une donnée rapportée dans les Antiquarum lectionum libri trenta de Lodovico Maria Ricchieri (1469-1525)33, un illustre humaniste actif au début du XVIe siècle, connu aussi avec le nom de Caelius Rhodiginus.

Bien qu’il soit impossible d’établir par quelle voie Voltaire a acquis l’information transmise dans l’ouvrage de ce dernier34, il est indubitable qu’outre l’exigence de proposer au public une évocation digne de foi sous un angle historiographique, le rappel d’un témoin contemporain du prince lui permettait de formuler de manière plus ponctuelle son attaque contre Auguste. Ainsi, il pouvait insister sur les fautes d’un prince capable d’envoyer « un chevalier romain sur la mer Noire » avec l’accusation d’avoir offert avec son Ars amatoria une preuve de cette conduite lascive dont il avait lui-même donné le pire exemple35. En exploitant des informations remontant aux siècles précédents Voltaire ne se limitait cependant pas à les attester mais se ménageait l’occasion pour critiquer l’empereur finalement condamnable aussi pour le traitement tout à fait différent qu’il avait adopté à l’égard du poète Horace, dont la veine littéraire n’avait pas été – c’est connu – moins licencieuse que celle d’Ovide36.

Articulée de façon en rien doctrinaire, le portrait d’Ovide ciselé dans la Suite des Mélanges révèle, dans l’ensemble, l’effort de l’auteur pour parcourir à nouveau un événement en discussion depuis des siècles afin d’en donner sa lecture ; ce que démontre son choix de s’exprimer finalement en faveur de l’hypothèse que la relégation d’Ovide était due à la découverte d’un inceste, confirmée par le prolongement de la mesure contre le poète sous le principat de Tibère. Pointant son attention sur le successeur d’Auguste qui se retira à Capri pour se dédier comme lui à toutes les débauches, à la moitié du XVIIIe siècle Voltaire déduisait de son intervention manquée en faveur du retour du poète à Rome, l’expression d’une inertie adaptée pour soutenir son interprétation de l’épisode37.

D’autre part, après avoir trouvé l’occasion pour censurer Tibère comme monstre de lascivité et aussi champion de dissimulation et de cruauté, responsable de la mort de Germanicus, le savant concluait en remarquant la conduite différente qu’adoptait l’Europe de son temps quand aucun chef d’état ou magistrat de premier plan n’aurait eu le droit d’envoyer en exil quiconque l’aurait vu plus ou moins par hasard commettre un péché38. Néanmoins, après avoir enregistré comparativement l’absence de garanties individuelles sous le principat, il s’autorisait à critiquer le poète coupable, à son avis, d’avoir loué les deux princes :

On peut faire à Ovide un reproche presque aussi grand qu’à Auguste, et qu’à Tibère, c’est de les avoir loués. Les éloges qu’il leur prodigue sont si outrés, qu’ils exciteraient encore aujourd’hui l’indignation, s’il les eût donnés à des princes légitimes ses bienfaiteurs ; mais il les donnait à des tyrans, et à ses tyrans. On pardonne de louer un peu trop un prince qui vous caresse, mais non pas de traiter en dieu un prince qui vous persécute39.

Convaincu que son comportement flatteur méritait de l’indignation même s’il était adressé à des princes, ses bienfaiteurs, Voltaire à la moitié du XVIIIe siècle accusait Ovide de s’être confondu en louanges de gouvernants capables de montrer un visage tyrannique aux autres et aussi à lui. Ainsi arrivait-il à soutenir qu’au lieu d’écrire les Tristia, du Pont il aurait poursuivre son voyage au-delà de la Mer Noire jusqu’en Perse, apprenant le persan et se retirant chez le maître d’Ecbatane40.

Outre le fait d’imaginer Ovide réfugié mais libre dans la cité qui, au Ier siècle de la Rome impériale, hébergeait le roi des Parthes et, pour les lecteurs du XVIIIe siècle, évoquait les merveilles de la Perse, Voltaire allait jusqu’à proposer qu’il aurait pu rentrer secrètement à Rome pour ordonner aux assassins de César une nouvelle conspiration contre Auguste. Dans ce sens, grâce à un raisonnement, ici ponctuel dans l’utilisation d’une information de Suétone à propos des complots dont Auguste avait été victime41, il finissait par critiquer Ovide pour avoir réagi à la limitation de la liberté en louant en vers celui qui l’avait provoqué mais contre lequel il ne pouvait évidemment que souhaiter l’intervention d’un nouveau Brutus, libérateur de la patrie42.

Enrichi d’un rappel à une figure appréciée par la culture des Lumières43 et complété par une vaste défense contre les attaques adressées par Bayle à la philosophie du chaos énoncée dans les Métamorphoses, l’exposé inclus dans la Suite des Mélanges nous livre indéniablement un acte d’accusation contre l’artisan du Principat.

C’est à la lumière de positions comme les précédentes, déjà mûries aux cours de décennies à cheval sur la moitié du XVIIIe siècle, qu’il faut examiner certaines affirmations exprimées par Voltaire à propos de l’exil d’Ovide plus tard, dans les Questions de l’Encyclopédie (1770)44 dont les passages suivantes méritent une lecture :

On ne peut connaître les mœurs que par les faits, et il faut que ces faits soient incontestables. Il est avéré que cet homme, si immodérément loué d’avoir été le restaurateur des mœurs et des lois, fut longtemps un des infâmes débauchés de la république romaine. Son épigramme sur Fulvie faite après l’horreur des proscriptions, démontre qu’il avait autant de mépris des bienséances dans les expressions, que de barbarie dans sa conduite45. [...] Presque tous les auteurs latins qui ont parlé d’Ovide, prétendent qu’Auguste n’eut l’insolence d’exiler ce chevalier romain, qui était beaucoup plus honnête homme que lui, que parce qu’il avait été surpris par lui dans un inceste avec sa propre fille Julia, et qu’il ne relégua même sa fille que par jalousie. Cela est d’autant plus vraisemblable, que Caligula publiait hautement que sa mère était née de l’inceste d’Auguste et de Julie ; c’est ce que dit Suétone dans la vie de Caligula. On sait qu’Auguste avait répudié la mère de Julie le jour même qu’elle accoucha d’elle [...]46.

Ainsi, Voltaire non seulement accusait Auguste d’avoir fait périr la république romaine mais il censurait les mauvaises mœurs de ce prince loué pour sa conduite moralisatrice, utilisant de manière précise certains témoignages tirés de la tradition littéraire ancienne pour formuler ses critiques. Finalement, dans ce portrait de l’artisan du Principat aux teintes sombres47 il y avait place une fois de plus pour une référence à l’insolence dont il avait fait preuve, de l’avis de tous les auteurs latins, en exilant un homme aux mœurs certainement meilleures que les siennes, coupable seulement de l’avoir surpris à commettre des actes incestueux avec sa fille Julie soumise par conséquent à la même mesure.

Si, d’une part, ces dernières réflexions dans les années soixante-dix soulignaient qu’Ovide avait été victime d’un souverain licencieux et de caractère tyrannique, le portrait du poète déjà compris dans la Suite des Mélanges révèle, d’autre part, que Voltaire ne justifiait pas son attitude et en tirait un jugement où ne se reflétait pas seulement le souvenir d’un homme contraint à subir les décisions d’Auguste.

2. Ovide exilé dans les pages d’érudits et historiens

Par rapport à cette évaluation en clair-obscur donnée par le savant quelques décennies avant la Révolution, l’historiographie nous restituait dans la deuxième moitié du XVIIe siècle une image d’Ovide sensiblement différente, comme elle émerge de l’œuvre de Charles de Marguetel de Saint-Denis, seigneur de Saint-Évremond (1614-1703).

Quant à ce dernier, il suffit de rappeler ici qu’après avoir achevé ses humanités à Paris et entrepris des études de droit à Caen, il se dédia à la carrière militaire. Plus tard, ayant encouru la disgrâce du roi Louis XIV à la suite de la circulation d’une de ses lettres, où il s’était exprimé contre Mazarin, Saint-Évremond se retira d’abord en Normandie, puis à partir de 1661, partit définitivement en exil, en Angleterre, où il resta même quand le roi lui eut concédé le droit de regagner sa patrie. Durant cette période, il se dévoua à l’élaboration entre autres d’ouvrages à caractère historico-littéraire, parmi lesquels les Réflexions sur les divers génies du peuple romain dans les divers temps de la République48, rédigées pour l’essentiel en Hollande, après 1665. Dans ce traité, composé vers la fin des années Soixante, puis inclus dans ses œuvres imprimées en 1686, l’auteur accordait un espace significatif à la figure d’Auguste au sein d’une interprétation globale de l’histoire romaine archaïque et républicaine.

Convaincu que malgré le rôle de plus en plus fort manifesté par la prise du titre d’imperator, de tribunus et de princeps du sénat, il avait cependant été un restaurateur admirable de la vieille république, à même de sauvegarder les intérêts du peuple, de rétablir l’ancienne splendeur du sénat, Saint-Évremond avait identifié en lui un sujet disposé à se contenter d’une puissance tempérée, exercée en forme de pouvoir absolu pas pour faire du mal mais pour amener les autres à faire le bien49. Dans ce cadre, la relégation réservée à Ovide était apparue à Saint-Évremond comme un exemple du caractère susceptible d’un prince face auquel il était seulement dangereux de parler des amours de sa fille :

Auguste alla plus loin en certaines choses, et demeura fort au dessous en quelques autres. Je vois des injures oubliées, je le voi si hardi dans sa clemence, qu’il ose pardonner une conspiration non seulement véritable, mais toute prête à s’exécuter. Cependant quelques vertueux que soient les hommes, ils ne donnent jamais tant à la vertu, qu’il ne laissent beaucoup à leur humeur. Il n’est pas croyable combien il fut délicat sur son domestique ; rien n’étoit si dangereux que de parler des amours de Julie, si ce n’étoit d’avoir quelque intérêt avec elle. Ovide en fut chassé, sans retour ; et ce qui me paroît extraordinaire, le mari même eut à se ressentir de cette méchante humeur50.

Mais au-delà du témoignage de Saint-Évremond, pour saisir la signification de la position de Voltaire il convient de tenir compte aussi de la reconstruction du cas d’Ovide offert par l’historiographie de la moitié du XVIIIe siècle, en particulier par Charles Rollin (1661-1741)51.

Ancien recteur de l’Université de Paris, Professeur d’éloquence au Collège Royal, membre de l’Académie Royale des Inscriptions et Belles Lettres, il fut auteur aussi d’ouvrages historiques sur l’Antiquité en plusieurs volumes, parmi lesquels l’Histoire ancienne publiée à Paris en 1738. Dans le livre XXV de ce traité Rollin s’arrêtait sur l’affaire du poète confiné à Tomis par Auguste, y reconnaissant un prétexte derrière lequel se cachait quelque scandale capable de troubler Ovide mais destiné à rester obscur pour toujours, comme nous le voyons dans le passage suivant :

Ovide (Publius Ovidius Naso) Chevalier Romain, est né sous le Consulat d’Hirtius et de Pansa l’année de Rome 709, aussi bien que Tibulle [...]. Il avoit reçu de la nature une si forte inclination à versifier, qu’il renonca, pour la satisfaire, à tout soin de fortune. Mais si l’inclination à la poésie éteignit en lui tout le feu de l’ambition, elle nourrit au contraire & augmenta celui de l’amour, passion funeste à laquelle il se livra tout entier [...]. Il composoit avec une facilité étonnante, et ne pouvoit se donner la peine de retoucher ses vers, tout de feu dans la composition, tout de glace dans la correction, comme il le marque lui-même. On lui passeroit sa négligence dans le stile, si elle n’étoit point accompagnée d’une licence effrénée par rapport aux mœurs, et s’il n’avoit point rempli ses poésies d’ordures et de saletés. Ce fut le prétexte que prit Auguste pour l’exiler : très louable dans cette conduite, si véritablement il l’eût relegué pour ce sujet. De tels Poétes sont des empoisonneurs publics, auxquels il faut interdire tout commerce ; et de telles poésies doivent être abhorrées comme la peste du genre humain. Mais ce ne fut là qu’un prétexte. Un mécontentement secret, dont Ovide parle souvent dans ses vers, mais en général et sans l’expliquer, et qui est toujours demeuré inconnu, fut la cause de son malheur. Il fut relegué à Tomes, ville d’Europe sur le Pont-Euxin, vers les embouchures du Danube. L’Empereur lui laissa la jouissance de ses biens. Il ne le fit point condanner par un Arrêt du Sénat, et il se servit du terme de releguer, qui, dans le droit Romain, étoit plus doux que le terme de bannir. Il couroit sa cinquante et uniéme année lorsqu’il partit de Rome pour aller à Tomes52.

Par ailleurs, dans la suite de son exposé, Rollin montrait la souffrance qu’un climat trop rigide avait infligé à un citoyen italique habitué à des climats tempérés mais aussi sa fidélité à l’égard d’Octavien, restée inchangée malgré le sort qu’il avait subi. Ainsi, s’appuyant sur les vers flatteurs que lui avait offerts Ovide, l’historien y reconnaissait l’expression du culte réservé à l’empereur et nullement la manifestation d’une attitude guère appréciable car servile, comme on peut tirer du passage suivant :

Le lieu où il étoit relegué, fut pour lui un vrai lieu de supplice : il en fait en plusieurs endroits de ses poésies des descriptions affreuses. Ce qu’il y trouvoit de plus fâcheux, c’est qu’il étoit exposé aux rigueurs du froid et voisin d’un peuple féroce, qui avoit toujours les armes à la main, et lui donnoit de continuelles allarmes : situation triste pur un Italien délicat qui avoit passé sa vie sous un climat doux et agréable et qui avoit toujours joui d’un tranquille repos. Quoiqu’il n’eût pu obtenir ni son rappel, ni un changement d’exil, il ne manqua jamais de respect pour l’Empereur ; et il continua invariablement à le louer avec des excès qui tenoient de l’idolâtrie. On peut dire même qu’il en devint au pié de la lettre et réellement idolâtre, quand il eut appris sa mort. Non seulement il fit son éloge par un poème en langue Gétique, pour le faire connoitre et respecter par ces nations barbares, mais il l’invoqua aussi, et lui consacra une Chapelle où il l’alloit encenser et adorer tous les matins [...]. Le successeur et la famille de ce Prince avoient une bonne part à tout ce culte, et en étoient apparemment le véritable objet. Néanmoins Ovide n’y trouva point le reméde de ses infortunes. La Cour fut inexorable sous Tibére comme auparavant. Il mourut dans son exil la 4e année du régne de cet Empereur, et l’an de Rome 771 âgé d’environ soixante ans. Son exil avoit duré neuf ou dix ans. Il avoit demandé, qu’en cas qu’il mourût dans le pays des Gétes, ses cendres fussent portées à Rome, afin de ne point demeurer encore exilé même après sa mort [...]53.

Pour conclure

En récupérant des informations tirées de passages des Tristia et des Pontiques, utilisées d’une manière différente aussi dans les pages d’érudits et d’historiographes précédents comme Saint-Évremond et Rollin, Voltaire s’en servit pour ciseler dans l’ensemble une image d’Ovide confiné sur la Mer Noire en tant que victime d’un tyran dont il n’avait pas su découvrir la vraie nature.

Par cette voie, peut-être pas due au hasard à l’aube de la Révolution, il désignait à ses lecteurs les plus avertis le cas de ce chevalier romain, maître de poésie mais pas de courage, incapable du moindre sursaut contre qui l’avait privé de sa patrie et de sa liberté.

Notes de bas de page numériques

1 Il faut rappeler que sur le plan juridique la punition infligée à Ovide constituait une relegatio pas un exilium : sur la différence entre les deux mesures, par rapport à la préservation de la citoyenneté et des biens admises seulement pour la première, voir Matthew McGowan, Ovid in Exile : Power and Poetic Redress in the Tristia and Epistulae Ex Ponto, Leiden-Boston, Brill, 2009, p. 51-52, et récemment Luigi Labruna, « “Relegatus, non exul” : Ovidio e il diritto », dans Lorenzo Gagliardi (éd.), Antologia giuridica romanistica ed antiquaria, II, Milano, Giuffrè Francis Lefebvre, 2018, p. 117-137.

2 Par rapport au Moyen Âge, voir Simone Viarre, « Exil ovidien, exil médiéval », dans Raymond Chevallier (dir.), Colloque Présence d’Ovide, Paris, Les Belles Lettres, 1982, p. 261-271, ici p. 264 selon laquelle « Il semble, en effet, que beaucoup des auteurs médiévaux qui citent le nom d’Ovide ou lui font des emprunts à propos de l’exil aient été eux-mêmes des exilés ou se soient considérées comme tels » ; pour cette époque cf. aussi Ralph J. Hexter, « Ovid in the Middle Ages : Exile, Mythographer, Lover », dans Barbara Weiden Boyd (éd.), Brill’s Companion to Ovid, Leiden-Boston-Köln, Brill, 2002, p. 413-442, ici p. 416-424 ; Ralph J. Hexter, « Ovid and the Medieval Exilic Imaginary », dans Jan Felix Gaertner (éd.), Writing Exile : The Discourse of Displacement in Greco-Roman Antiquity and Beyond, Leiden-Boston, Brill, 2007, p. 209-236 ; Catherine Keen, « Ovid’s Exile and Medieval Italian Literature : The Lyric Tradition », dans John F. Miller et Carole E. Newlands (éd.), A Handbook to the Reception of Ovid, Malden-Oxford, Wiley-Blackwell, 2014, p. 144-160. Quant à nos jours, entre autres, cf. Theodore Ziolkowski, Ovid and the Moderns, Ithaca, N.Y.-London, Cornell University Press, 2005 ; Jennifer Ingleheart (éd.), Two Thousand Years of Solitude : Exile After Ovid, Oxford, Oxford University Press, 2011 ; Rainer Godel, « Ovid’s Biography : Novels of Ovid’s Exile », dans John F. Miller et Carole E. Newlands (dir.), A Handbook to the Reception of Ovid, op. cit., p. 454-468 ; Nicola Gardini, « Quattro ovidiani di lingua inglese », dans Paolo Fedeli et Giampiero Rosati (éd.), Ovidio 2017. Prospettive per il terzo millennio. Atti del Convegno Internazionale (Sulmona, 3/6 aprile 2017), Teramo, Ricerche e Redazioni, 2018, p. 475-490, ici p. 477-480.

3 Cf. Simone Viarre, « Ovide et ses métamorphoses dans l’espace et dans le temps », dans Hélène Casanova-Robin et Perrine Galand (éd.), Écritures latines de la mémoire, de l’Antiquité au XVIe siècle, Paris, Classiques Garnier, 2010, p. 43-58, ici p. 47.

4 Cf. R. Godel, « Ovid’s Biography : Novels of Ovid’s Exile », op. cit., p. 454-455.

5 Cf. Helena Taylor, The Lives of Ovid in Seventeenth-Century French Culture, Oxford-New York, Oxford University Press, 2017.

6 Pour une revue générale sur ce sujet et les raisons de la relégation ovidienne, parmi une très riche bibliographie, voir surtout Salvatore d’Elia, « L’Esilio di Ovidio e alcuni aspetti della storia augustea », Annali della Facoltà di Lettere e Filosofia dell’Università di Napoli, 5, 1955, p. 95-157 ; John C. Thibault, The Mystery of Ovid’s Exile, Berkeley-Los Angeles, University of California Press, 1964 ; Raoul Verdière, Le Secret du voltigeur d’amour ou le Mystère de la relégation d’Ovide, Bruxelles, Latomus, 1992 ; Ronald Syme, History in Ovid, Oxford, Oxford University Press, 1978, p. 215-229, et parmi les interventions récentes Thomas Habinek, « Ovid and empire », dans Philip Hardie (éd.), The Cambridge Companion to Ovid, Cambridge, Cambridge University Press, 2002, p. 46-61 ; Peter J. Davis, Ovid and Augustus : A political reading of Ovid’s erotic poems, London, Duckworth, 2006, p. 9-22 ; Aldo Luisi et Nicoletta Francesca Berrino (éd.), Carmen et error : nel bimillenario dell’esilio di Ovidio, Bari, Edipuglia, 2008 ; Laurel Fulkerson, « Sad Ovid, Angry Augustus », dans Carl Deroux (éd.), Studies in Latin Literature and Roman History, XVI, Bruxelles, Latomus, 2012, p. 339-366 ; Laurel Fulkerson, Ovid : A Poet on the margins, London, Bloomsbury, 2016, p. 1-28 ; Eileen Lohka, « Mémoire et texte : écrire pour dire, pour cacher ou pour comprendre ? », dans Pierre-Yves Mocquais (dir.), Langages et écritures de l’exil. L’Ouest canadien, terre d’asile, terre d’exil, Québec, Presses de l’Université Laval, 2018, p. 279-292.

7 Cf. Voltaire, La Philosophie de l’histoire, I, dans Voltaire, La philosophie de l’histoire, éd. John Henry Brumfitt, Genève-Toronto, Institut et Musée Voltaire-University of Toronto Press, 19692 (Les Œuvres Complètes de Voltaire, 59), p. 89-92, particulièrement p. 89. Sur la composition et les sujets considérés dans le texte voir John Henry Brumfitt, « Introduction », dans Voltaire, La philosophie de l’histoire, op. cit., p. 13-78 ; par rapport au Pyrrhonisme historique, voir Riccardo Campi, « Introduzione », dans Voltaire, Il pirronismo della storia e altri scritti storici, cur. Riccardo Campi, Milano, Medusa, 2005, p. 5-24 ; Pierre Force, « Croire ou ne pas croire. Voltaire et le pyrrhonisme de l’histoire », dans Éric Méchoulan (dir.), Érudition et fiction. Troisième rencontre internationale Paul-Zumthor, Montréal, 13-15 octobre 2011, Paris, Classiques Garnier, 2014, p. 57-70 ; Rolando Minuti, « Voltaire storico, tra passato e presente », Annali della Scuola Normale Superiore di Pisa – Classe di Lettere e filosofia, s. V, 2014, 6/2, p. 565-585 ; Roberto Bordoli, « Introduzione del curatore », dans Voltaire, La filosofia della storia, cur. Roberto Bordoli, Milano-Udine, Mimesis, 2016, p. 9-42.

8 Cf. Voltaire, La Philosophie de l’histoire, op. cit., XXVIII, p. 183.

9 Cf. Voltaire, La Philosophie de l’histoire, op. cit., XXIX, p. 186-187. Pour d’utiles approfondissements et de précisions sur les emprunts et l’héritage d’Ovide chez Voltaire, cf. Jean Deprun, « D’Ovide à Voltaire : source et fortune de deux vers-axiomes », dans Christiane Mervaud et Sylvain Menant (éd.), Le Siècle de Voltaire. Hommage à René Pomeau, Oxford, The Voltaire Foundation, 1987, p. 393-401 ; Jacques Cormier, « La survie littéraire d’Ovide », Cahiers de l’Association internationale des études françaises, 58, 2006, p. 251-275, ici p. 264-266, selon lequel dans l’« allusion au sort du poète exilé sur les bords du Danube » : on peut voir « l’image que Voltaire veut donner de lui-même, exilé sur les bords du lac de Genève à cause des Lettres ».

10 Cf. Montesquieu, Pensées, dans Montesquieu, Pensées. Le Spicilège, éd. Louis Desgraves, Laffont, 1991, n. 1337, p. 464. Sur le poète dans cette œuvre voir aussi Pensées, n. 2180 : « On dit qu’Ovide a trop d’esprit, c’est-à-dire s’abandonne trop à son esprit [...] » (op. cit., p. 643-644), avec les considérations de Catherine Volpilhac-Auger, « L’homme d’esprit selon Montesquieu : pour une définition de “l’esprit des Lumières” », Diciottesimo Secolo, 2, 2017, p. 201-215, ici p. 208. Sur la présence d’ouvrages ovidiens parmi les livres de Montesquieu, cf. Louis Desgraves et Catherine Volpilhac-Auger, avec la collab. de Françoise Weil, Catalogue de la bibliothèque de Montesquieu à La Brède, Napoli-Paris-Oxford, Liguori-Universitas-Voltaire Foundation, 1999, n. 2113.

11 Cf. Voltaire, Lettres Philosophiques, éd. Olivier Ferret et Antony McKenna, Paris, Classiques Garnier, 2010, p. 19.

12 Cf. Voltaire, Lettres Philosophiques, op. cit., p. 222-223.

13 Cf. Voltaire, D’Ovide, dans Voltaire, Œuvres de 1753-1757. II. Mélanges de 1756, éd. Jean Mayer, Oxford, Voltaire Foundation, 2010 (Les Œuvres Complètes de Voltaire, 45b), p. 353-370.

14 Cf. Voltaire, D’Ovide, op. cit., p. 361 : « On y faisait des vers. Cotis petit roi d’une partie de la Thrace fit des vers gètes pour Ovide. Le poète latin apprit le gète, et fit aussi des vers dans cette langue ».

15 À propos des qualités et du goût pour les lettres et pour la poésie du roi Cotys voir Ovide, Pontiques II, 9, 47-62 ; quant à la connaissance de la langue gétique par le poète cf. Ovide, Pontiques IV, 13, 17-22 : « Nec te mirari, si sint vitiosa, decebit / carmina quam faciam paene poeta Getes. / A ! pudet et Getico scripsi sermone libellum / structaque sunt nostris barbara verba modis : / et placui – gratare mihi ! – coepique poetae / inter inhumanos nomen habere Getas » (Ovide, Pontiques, texte établi et traduit par Jacques André, Paris, CUF, 1977, p. 148 : « In ne faudra pas s’étonner si mes vers ont des défauts : je suis presque un poète gète. Ah ! j’en ai honte, j’ai écrit un livre en langue gétique et j’ai disposé des mots barbares selon nos rythmes. Et j’ai plu – félicite-moi ! et j’ai déjà un renom de poète chez les Gètes grossiers »). Pour la valeur de ce témoignage, voir Nicolae I. Herescu, « Poeta Getes », dans Ovidiana. Recherches sur Ovide. Publiées à l’occasion du bimillénaire de la naissance du poète, dir. Nicolae I. Herescu, Paris, Les Belles Lettres, 1958, p. 404-405 ; Nicolae I. Herescu, « Ovide, le Gétique (Pont. IV.13.18 paene poeta getes) », dans Atti del convegno internazionale ovidiano. Sulmona, maggio 1958, Roma, Istituto di Studi Romani, 1959, p. 55-80 ; Francesco Della Corte, « Il “geticus sermo” di Ovidio », dans Scritti in Onore di Giuliano Bonfante, vol. I, Brescia, Paideia, 1976, p. 205-216, réimpr. in Id., Opuscula, 6, Genova, Istituto di Filologia Classica e Medievale, 1978, p. 281-292, et plus récemment, entre autres, Gareth D. Williams, Banished Voices : Readings in Ovid’s exile poetry, Cambridge, Cambridge University Press, 1994, p. 93-94 ; Alessandro Barchiesi, The Poet and the Prince. Ovid and Augustan Discourse, Berkeley-Los Angeles-London, University of California Press, 1997, p. 37-39.

16 Cf. Voltaire, D’Ovide, op. cit., p. 361.

17 Pour la mise en valeur de cet aspect dans l’ouvrage ovidien cf. Gareth Williams, « Ovid’s exile poetry : Tristia, Epistulae ex Ponto and Ibis », dans P. Hardie (éd.), The Cambridge Companion to Ovid, op. cit., p. 233-245, ici p. 238 : « As for many exiles ancient and modern, Ovid’s linguistic isolation in Tomis compounds his estrangement from home with a secondary form of alienation from his new cohabitants ».

18 Pour plus d’approfondissements sur l’intérêt muri dans la culture du XVIII siècle pour la Scythie, outre Jean David, « Les Scythes et les Tartares dans Voltaire et quelques-uns de ses contemporains », Modern Language Notes, 53, 1938, p. 1-10, cf. Rolando Minuti, Oriente barbarico e storiografia settecentesca. Rappresentazioni della storia dei Tartari nella cultura francese del XVIII secolo, Venezia, Marsilio, 1994, p. 95-139.

19 Fondée vers le milieu du viie siècle av. J.-C. par des Ioniens de Milet, la cité de Tomis (actuelle Constanţa en Roumanie), était située sur la rive gauche de la Mer Noire, dans la région conquise en 29 av. J.-C. par les Romains et en 6 ap. J.-C. devenue province de Scythie mineure (actuelle Dobroudja). Pour plus d’informations sur cette région habitée par les Gètes et encerclée par d’autres peuples barbares (Scythes, Sarmates, Bastarnes, etc.) voir Radu Vulpe, « Una città di provincia al limite dell’impero romano : Tomi al tempo di Ovidio », Studi Romani, 6, 1958, p. 629-648 ; Radu Vulpe, « Ovidio nella città dell’esilio », Studi Ovidiani, 1959, p. 39-62 ; Krzysztof Nawotka, « Tomos, Ovid, and the Name Tomis », dans Carl Deroux (ed.), Studies in Latin Literature and Roman History, VII, Bruxelles, Latomus, 1994, p. 406-415.

20 Cf. Voltaire, D’Ovide, op. cit., p. 361-362 et parallèlement Ovide, Pontiques IV, 14, 24.

21 Pour d’autres références à la gêne provoquée par l’obligation de résider dans les landes inhospitalières autour de la Mer Noire, cf. surtout Pontiques I, 3, 51-52 ; Tristia III, 10, 71-78. Sur la représentation ovidienne des lieux sauvages de son relégation, parmi plusieurs contributions, outre Charles Favez, « Les Gètes et leur pays vus par Ovide », Latomus, 10, 1951, p. 425-432 ; Antoine Boireaud, « Les Gètes chez Ovide (d’après les Tristes et les Pontiques) », Caesarodunum, 3, 1969, p. 147-154 ; Francesco Della Corte, « Ovidio e i barbari danubiani », Romanobarbarica, 1, 1976, p. 57-69, réimpr. dans Id., Opuscula, op. cit., p. 293-305 ; voir surtout Bruno Poulle, « Le regard porté par Ovide sur les Gètes », BAGB, 49, 1990, p. 345-355 ; G. D. Williams, Banished Voices, op. cit., p. 8-25 ; Thomas N. Habinek, The Politics of Latin Literature. Writing, Identity, and Empire in Ancient Rome, Princeton, N.J., Princeton University Press, 1998, p. 151-169 ; Gareth Williams, « Ovid’s exile poetry », op. cit., p. 235-238 ; Gareth Williams, « Ovid’s Exilic Poetry : Worlds Apart », dans B. Weiden Boyd (éd.), Brill’s Companion to Ovid, op. cit., p. 337-381, ici p. 340 ss., et récemment Dimitrios Mantzilas, « Le témoignage d’Ovide sur les peuples de la région du Pont-Euxin », dans Petr Březina (éd.), Pontus Euxinus. Commentarii Pilsnenses, Srní, 2014, p. 15-36 ; Nicoletta Francesca Berrino, « Le Pontus Euxinus dans le miroir d’Ovide : entre la topique élégiaque et la donnée ethno-géographique », dans Pontus Euxinus. Commentarii Pilsnenses, op. cit., p. 37-49 ; Christoph Pieper, « Polyvalent Tomi : Ovid’s Landscape of Relegation and the Romanization of the Black Sea Region », dans Jeremy McInerney et Ineke Sluiter (éd.), Valuing Landscape in Classical Antiquity : Natural Environment and Cultural Imagination, Leiden-Boston, Brill, 2016, p. 408-430 ; Teresa R. Ramsby, « Ovid as Ethnographer in the Epistulae ex Ponto », Bulletin of the Institute of Classical Studies, 61, 2018, 2, p. 33-44.

22 Cf. Montesquieu, Pensées, op. cit., p. 487, n. 1517 : « On peut juger du séjour enchanteur de Rome par les Lettres de Cicéron dans son exil, et par les Tristes d’Ovide et ses Lettres du Pont ».

23 Cf. Montesquieu, Pensées, op. cit., p. 409, n. 1202 : « Ovide et Bussy, deux exilés qui n’ont su soutenir la mauvaise fortune ».

24 Pour plus de précisions sur le rang équestre du poète voir Ovide, Tristia II, 114 ; IV, 10, 7-8 ; Pontiques IV, 8, 17 et à ce propos R. Syme, History in Ovid, op. cit., p. 113 ; 182.

25 Cf. Voltaire, D’Ovide, op. cit., p. 362.

26 Dans ce sens, voir Montesquieu, Considérations sur les Romains…, XIII et à ce propos Ida Gilda Mastrorosa, « Le visage d’Auguste chez Montesquieu : les manifestations ambiguës du pouvoir autocratique dans la Rome antique », dans Pascale Hummel (éd.), De Fama. Études sur la construction de la réputation et de la postérité, Paris, Philologicum, 2012, p. 79-99 ; Ida Gilda Mastrorosa, « Octavien-Auguste à l’« ombre » des Lumières : Saint-Évremond, Montesquieu et Mably », dans Anne Daguet-Gagey et Sabine Lefebvre (éd.), L’empereur Auguste et la mémoire des siècles, Arras, Artois Presses Université, 2018, p. 281-299, ici p. 290-294, où se trouvent d’autres références bibliographiques.

27 Cf. Voltaire, D’Ovide, op. cit., p. 362.

28 Cf. Ovide, Tristia II, 1, 103-104 : « Cur aliquid vidi ? Cur noxia lumina feci ? / Cur imprudenti cognita culpa mihi ? » (Ovide, Tristes, texte établi et traduit par Jacques André, Paris, CUF 1968, p. 40 : « Pourquoi ai-je vu ? Pourquoi ai-rendu mes yeux coupables ? pourquoi n’ai-je compris ma faute qu’après mon imprudence ? »).

29 Il faut noter la même référence à « quelques honteuses actions d’Auguste » qu’on peut lire dans l’Avertissement au lecteur dans les Regrets d’Ovide de Binard (1625) : cf. H. Taylor, The Lives of Ovid in Seventeenth-Century French Culture, op. cit., p. 49-50, qui soulignait : « He puts the blame entirely on Augustus and exonerates Ovid by suggesting he was exiled because he witnessed Augustus in certain shameful acts ».

30 Cf. Voltaire, D’Ovide, op. cit., p. 362.

31 Cf. Voltaire, D’Ovide, op. cit., p. 362 : « [...] ou enfin s’il avait vu cet empereur Auguste faisant quelque chose de pis, torva tuentibus hircis. Il est de la plus grande probabilité qu’Ovide surprit Auguste dans un inceste » et parallèlement Virgile, Bucoliques III, 8.

32 Cf. Voltaire, D’Ovide, op. cit., p. 362-363 : « Un auteur presque contemporain nommé Minutianus Apuleius, dit : “Pulsum quoque in exilium quod Augusti incestum vidisset” » ; et pour le texte voir L. Caecilii Minutiani Apuleii De orthographia fragmenta et Apuleii minoris De nota aspirationis et De diphthongis libri duo, edidit... Fridericus Osann, Darmstadii, sumptibus L. G. Leske, 1826, p. XXV-XXVI.

33 Pour des approfondissements sur l’œuvre de cet humaniste publiée à Venise par Aldo Manutius en 1516, Michela Marangoni, L’armonia del sapere : i Lectionum antiquarum libri di Celio Rodigino, Venezia, Istituto Veneto di Scienze, Lettere ed Arti, 1997.

34 Cf. Lodovici Caelii Rhodigini Lectionum antiquarum libri XXX, Basileae, Froben, 1566, XIII, 1, p. 466-467.

35 Cf. Voltaire, D’Ovide, op. cit., p. 363 : « Octave Auguste prit le prétexte du livre innocent de l’Art d’aimer, livre très-décemment écrit, et dans lequel il n’y a pas un mot obscène, pour envoyer un chevalier romain sur la mer Noire. Le prétexte était ridicule. Comment Auguste, dont nous avons encore des vers remplis d’ordures, pouvait-il sérieusement exiler Ovide à Tomes, pour avoir donné à ses amis plusieurs années auparavant des copies de l’Art d’aimer ? Comment avait-il le front de reprocher à Ovide un ouvrage écrit avec quelque modestie, dans le temps qu’il approuvait les vers où Horace prodigue tous les termes de la plus infâme prostitution ».

36 Cf. Voltaire, D’Ovide, op. cit.

37 Cf. Voltaire, D’Ovide, op. cit., p. 363.

38 Cf. Voltaire, D’Ovide, op. cit., p. 364 : « Si un gentilhomme hollandais, ou polonais, ou suédois, ou anglais, ou vénitien, avait vu par hasard un stathouder, ou un roi de la Grande-Bretagne, ou un roi de Suède, ou un roi de Pologne, ou un doge, commettre quelque gros péché, si ce n’était pas même par hasard qu’il l’eût vu, s’il en avait cherché l’occasion, si enfin il avait l’indiscrétion d’en parler, certainement ce stathouder, ou ce roi, ou ce doge, ne seraient pas en droit de l’exiler ».

39 Cf. Voltaire, D’Ovide, op. cit., p. 364.

40 Cf. Voltaire, D’Ovide, op. cit., p. 364.

41 Cf. Suétone, Vie d’Auguste, 19.

42 Cf. Voltaire, D’Ovide, op. cit., p. 364 : « Quelque esprit dur dira qu’il y avait encore un parti à prendre : c’était d’aller secrètement à Rome, s’adresser à quelques parents de Brutus et de Cassius, et de faire une douzième conspiration contre Octave ; mais cela n’était pas dans le goût élégiaque. Chose étrange que les louanges ! Il est bien clair qu’Ovide souhaitait de tout son cœur que quelque Brutus délivrât Rome de son Auguste, et il lui souhaite en vers l’immortalité. Je ne reproche à Ovide que ses Tristes ».

43 Comme l’a bien souligné Andrea Giardina, « Dalla rivoluzione francese alla prima guerra mondiale : miti repubblicani e miti nazionali », dans Andrea Giardina et André Vauchez (éd.), Il mito di Roma. Da Carlo Magno a Mussolini, Rome-Bari, Laterza, 2000, p. 117-211 : ici p. 127-129. Pour d’autres exemples sur l’usage du personnage au xviiie siècle, voir Catherine Volpilhac-Auger, « Brutus au carrefour des genres : à quoi sert Brutus ? », dans Franco Piva (éd.), Bruto il Maggiore nella letteratura francese e dintorni, Fasano, Schena, 2002, p. 157-171.

44 Cf. Voltaire, Questions sur l’Encyclopédie, ‘Auguste Octave’, dans Voltaire, Questions sur l’Encyclopédie, par des amateurs, dir. Nicholas Cronk et Christiane Mervaud, III, Aristote-Certain, Oxford, Voltaire Foundation, 2008 (Les Œuvres Complètes de Voltaire, 39), p. 211-222.

45 Cf. Voltaire, Questions sur l’Encyclopédie, ‘Auguste Octave’, op. cit., p. 214 ; pour la référence à l’épigramme sur Fulvia voir Martial, Epigrammata XI, 20, 3-4 ; 7-8.

46 Cf. Voltaire, Questions sur l’Encyclopédie, ‘Auguste Octave’, op. cit., p. 216 et sur l’inceste d’Auguste et de Julie, cf. Suétone, Vie de Caligule 23.

47 Cf. Voltaire, Questions sur l’Encyclopédie, ‘Auguste Octave’, op. cit., p. 218 : « Il n’est que trop certain que le monde fut ravagé [...] par un homme sans pudeur, sans loi, sans honneur, sans probité, fourbe, ingrat, avare, sanguinaire, tranquille dans le crime, et qui dans une république bien policée aurait péri par le dernier supplice au premier de ses crimes ». Sur l’évaluation globalement négative d’Auguste chez Voltaire, aussi a rappelé l’attention Frédéric Hurlet, Auguste. Les ambiguïtés du pouvoir, Paris, Armand Colin, 2015, p. 201.

48 Pour le texte de cette œuvre voir Charles de Saint-Évremond, Réflexions sur les divers génies du peuple romain dans les divers temps de la république, Paris, 1795, repris en facsimilé avec une note de lecture par B. Hemmerdinger, Napoli, Jovene, 1982 ; sur la lecture de l’histoire romaine proposée par l’auteur, voir Vittorio De Caprariis, « I “Romani” del Saint-Évremond », Rivista storica italiana, 67, 1955, p. 5-30 ; 148-181 (ré-impr. dans Id., Scritti, 1. Storia delle idee : da Socrate a Mann, éd. Giuseppe Buttà, Messina, P & M, 1986, p. 357-426) ; Jürgen von Stackelberg, « Saint-Evremonds Gedanken über den Charackterwandel der Römer », Archiv für Kulturgeschichte, 43, 1961, p. 317-328, et parmi les études les plus récentes et significatives : Patrick Andrivet, « L’Auguste de Saint-Évremond et l’Octave de Montesquieu », dans Alberto Postigliola (éd.), Storia e ragione. Les Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence di Montesquieu nel 250° della pubblicazione, Napoli, Liguori, 1987, p. 139-158 ; Patrick Andrivet, Saint-Évremond et l’histoire romaine, Orléans, Paradigme, 1998 ; Quentin Manning Hope, Saint-Evremond and his friends, Genève, Droz, 1999, p. 291-320 ; Jean-Charles Darmon, « L’intérêt, la politique et l’histoire selon Saint-Évremond : effets de sens néo-épicuriens », dans Suzanne Guellouz (éd.), Entre Baroque et Lumières : Saint-Évremond (1614-1703), Caen, Presses Universitaires de Caen, 2000, p. 147-172 ; Jean-Charles Darmon, « Le juste et l’utile à la épreuve de l’histoire : Saint-Évremond », dans Gianni Paganini et Edoardo Tortarolo (éd.), Der Garten und die Moderne. Epikureische Moral und Politik vom Humanismus bis zur Aufklärung, Stuttgart-Bad Cannstatt, Frommann-Holzboog, 2004, p. 215-246.

49 Sur la biographie du personnage dans le contexte historique, outre Albert-Marie Schmidt, Saint-Évremond ou l’humaniste impur, Paris, Éditions du Cavalier, 1932 ; Vittorio De Caprariis, « Religione e politica in Saint Évremond », Rivista storica italiana, 66, 1954, p. 204-239 (réimpr. dans Id., Scritti, 1. Storia delle idee : da Socrate a Mann, op. cit., p. 315-356) ; Henry Thomas Barnwell, Les Idées morales et critiques de Saint-Évremond, Paris, Presses Universitaires de France, 1957 ; Luigi De Nardis, Il cortegiano e l’eroe. Studio su Saint-Évremond, Firenze, La Nuova Italia, 1964 ; Paolo Carile, Aspetti e motivi delle lettere di Saint-Évremond, Bologna, Esculapio, 1970 ; Enrico Nuzzo, « L’ultimo Saint-Évremond della critica. Per un’introduzione al Saint-Évremond storico », dans Ida Cappiello (éd.), Tra antichi e moderni. Antropologia e Stato tra disciplinamento e morale privata, Napoli, Edizioni Scientifiche Italiane, 1989, p. 223-309 ; Enrico Nuzzo, « Da Hobbes a Saint-Évremond. Fra tradizioni libertine e moralistiche e declino dell’aristotelismo politico », dans Gianfranco Borrelli (éd.), Thomas Hobbes. Le ragioni del moderno tra teologia e politica, Napoli, Morano, 1990, p. 193-202 ; Enrico Nuzzo, « Ripensando Saint-Évremond storico. Le Réflexions sur les divers génies du peuple romain tra ‘esprit d’intérêt’ e storia della ‘politesse’ », Archivio di storia della cultura, 3, 1990, p. 9-124 ; Q. M. Hope, Saint-Evremond and his friends, op. cit. ; S. Guellouz (éd.), Entre Baroque et Lumières : Saint-Évremond (1614-1705), op. cit. ; Denys Pott (éd.), Saint-Évremond : A Voice from Exile : Newly Discovered Letters to Madame de Gouville and the Abbé de Hautefeuille (1697-1701), Oxford, Legenda, 2002 ; Suzanne Guellouz (éd.), Saint-Évremond au miroir du temps. Actes du colloque du tricentenaire de sa mort, Caen - Saint-Lô (9-11 octobre 2003), Tübingen, Narr, 2005.

50 Cf. Saint-Évremond, Réflexions, op. cit., XVI, p. 125 et Suétone, Vie d’Auguste 65, 2. Sur cet épisode voir, Francesca Rohr Vio, Le voci del dissenso. Ottaviano Augusto e i suoi oppositori, Padova, Il Poligrafo, 2000, p. 208-250 ; avec d’autres références bibliographiques ; parmi les contributions les plus récentes voir aussi Lorenzo Braccesi, Giulia, la figlia di Augusto, Roma-Bari, Laterza, 2012, p. 115-130 ; Francesca Rohr Vio, « Simulazioni e dissimulazioni augustee : Giulia Maggiore, una principessa in esilio », dans Sergio Roda et Gabriella De Blasio (éd.), Atti del Colloquium Augusteum. Il ‘perfetto inganno’. Augusto e la sua politica nel bimillenario della morte, Torino, Loescher, 2014, p. 74-88.

51 Sur cette figure et son intérêt pour l’antiquité romaine, voir surtout Mouza Raskolnikoff, Histoire romaine et critique historique dans l’Europe des Lumières. La naissance de l’hypercritique dans l’historiographie de la Rome antique, Rome, École française de Rome, 1992, p. 499-509.

52 Charles Rollin, Histoire ancienne des Égyptiens, des Carthaginois, des Assyriens, des Babyloniens, des Mèdes et des Perses, des Macédoniens, des Grecs, t. XII, Paris, Veuve Estienne & fils, 1752, liv. XXV, Des belles lettres, cap. I, Des poètes, art. II, Des poètes latins, p. 131-136.

53 Cf. Charles Rollin, Histoire ancienne, op. cit., liv. XXV, p. 131-138, particulièrement p. 131-136.

Pour citer cet article

Ida Gilda Mastrorosa, « Un chevalier romain sur la mer Noire’ : regards sur l’exil d’Ovide et les fautes d’Auguste au XVIIIe siècle », paru dans Loxias-Colloques, 13. Lettres d'exil. Autour des Tristes et des Pontiques d’Ovide, Mélancolie de la disgrâce: échos génériques, Un chevalier romain sur la mer Noire’ : regards sur l’exil d’Ovide et les fautes d’Auguste au XVIIIe siècle, mis en ligne le 17 août 2019, URL : http://revel.unice.fr/symposia/actel/index.html?id=1260.

Auteurs

Ida Gilda Mastrorosa

Ida Gilda Mastrorosa enseigne 'Histoire romaine' et Antiquités romaines dans la culture moderne' à l'Université de Florence ; elle est membre associé de l'UMR ArTeHis de l'Université de Dijon. Ses recherches portent sur des aspects culturels et politiques de l'Antiquité romaine et leur interprétation à l'époque moderne, en particulier dans le siècle des Lumières.

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