Valentine Meydit-Giannoni


Agrégée de lettres modernes, doctorante contractuelle et chargée de cours à l’université Paris IV Sorbonne. Thèse de poésie contemporaine consacrée aux rapports entre l’écriture poétique après 1945 et les concepts de morale et d’éthique, et l’éventualité d’une posture moraliste chez Michaux, Char, Jabès et Jaccottet. Auteur d’un essai consacré aux vertus thérapeutiques sinon cathartiques du paysage chez Philippe Jaccottet, paru aux éditions Marie Delarbre en 2017, « Grignan : le paysage comme cahier de verdure chez Philippe Jaccottet, pour une habitation poétique du monde et de la langue », Valentine Meydit-Giannoni a récemment communiqué dans le cadre du 22e colloque international de L’Association Européenne François Mauriac, « Solitaire et Solidaire », en proposant une étude sur « René Char, le fer ou l’ivoire » consacrée à la posture de l’écrivain moderne, qui paraîtra à L’Harmattan en 2018. Elle est également l’auteur d’un article sur l’herméneutique du témoignage chez Philippe Jaccottet, paru dans la revue dirigée par Philippe Lejeune, Les Cahiers de l’autobiographie et d’autres communications tenues dans le cadre de colloques internationaux qui donneront lieu à des actes publiés en 2018.

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Loxias | 58. | I.

À travers un verre, obscurément : Michaux ou l’opacité de la langue

Écrivant contre la nécessité de clarté et de transparence qui permettrait l’intelligibilité des productions écrites, garante de leur sens comme de leur valeur, Michaux revendique donc la pratique d’une langue opaque, volontairement « barbare », qui appelle une lecture authentique et désintéressée de toute élucidation, préservant ainsi l’individu de toute assimilation dans un universel fallacieux mais aussi et surtout des infiltrations d’Autrui par le biais de sa parole. Michaux ne cherche pas la confidence, l’aveu et l’exposition de soi-même ; s’il écrit pour se parcourir et s’exorciser, il accueille toutefois la possibilité qu’un lecteur-frère, aux épreuves communes, puisse l’entendre. Ainsi, l’éthique et l’esthétique de l’opacité qui le caractérisent n’en font pas pour autant un poète taciturne ou volontairement hermétique. Very early in his career, Henri Michaux has written against the necessity of transparency and clarity, both western traditional standards, supposed to convey intelligibility to writings as guarantee of their meaningfulness and value. The poet claims the opacity of his language, willingly barbaric. Such an opaque writing should guarantee the poet the authenticity and selflessness of the reading and averts any temptation of elucidation; here is the most efficient safety against the risk of alienation and assimilation of the individual into a fallacious universality, but also against any risk of the other’s intrusion into its consciousness, through the transparency of the word. Michaux does not seek confidence, avowal and self-exposure; he writes for self-exploration, exorcism, and yet he surely accepts the possibility of being understood and seen by some happy few, some fraternal reader, bound together by common scars. Despite his search for ethic and aesthetic opacity, surely the most significant trademark of his poetic, Michaux can’t be read as a hermetic poet.

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