Loxias | 53. Littérature et communauté III | I. Paroles singulières 

Hugo Hengl  : 

Écriture et schizophrénie : traduire les poètes de Gugging

Résumé

La traduction d’écrits « de la folie » peut sembler redoubler la gageure que constitue en soi toute traduction. Elle présente à mon sens un triple intérêt : premièrement, ce type de traduction ravive la vieille question, toujours irrésolue, des rapports entre la création artistique et la folie. En second lieu, elle rappelle au traducteur l’état d’aliénation, de dépossession, de transe qu’implique depuis l’origine son activité, qui ne pourra jamais être réduite à une technique, ni entièrement circonscrite par une approche prétendument scientifique. Enfin, elle met au jour de façon particulièrement frappante des problématiques et des impératifs propres à toute traduction et que ceux qui s’occupent aujourd’hui du « traduire » au sens d’Henri Meschonnic ne peuvent guère plus se permettre d’éluder.

Abstract

Poetry and schizophrenia: translating the poets of Gugging.
Translating « Writings of madness » offers interesting insights into the stakes of all translation work. While reviving the never resolved issue of the links between artistic creation and madness, this endeavour reminds the translator of the state of depossession implied by his activity, which can never be fully reduced by a scientific approach, and stresses the importance of a rhythmic approach to translation as described by Henri Meschonnic.

Index

Mots-clés : poésie , schizophrénie

Plan

Texte intégral

La conviction qu’il existe des relations entre le génie artistique et certaines formes de pathologies mentales, qu’on qualifierait aujourd’hui de psychose ou de dépression, remonte au moins à l’Antiquité. On la relève de manière célèbre dans les écrits de Démocrite, tels que rapportés par Horace et Cicéron, ou encore ceux de Platon. Platon, dans Phèdre et Ion, développe une théorie de l’inspiration poétique axée sur la dépossession de l’artiste, en proie à une sorte de transe. La parabole des aimants, dans l’Ion, montre de plus que l’exaltation du rhapsode est contagieuse, pointant – pour le condamner – le facteur déterminant de la fascination du récipiendaire de l’œuvre artistique.

De tout temps, en Occident, l’artiste inquiète et fascine, si bien que réduire son activité à un diagnostic pathologique ne peut jamais être satisfaisant. Aristote décrit l’interaction entre le génie, notamment artistique, et la mélancolie, décrite comme un trouble de l’équilibre des fluides corporels, pouvant éventuellement mener à des crises graves, mais aussi aux plus grandes œuvres. Ses réflexions suggèrent déjà toute l’ambiguïté de ce qu’on appellera au Moyen âge et à l’époque classique le tempérament saturnien : maladif et en même temps porté vers le sublime, celui qui en est affligé jouirait en même temps d’une mystérieuse supériorité vis-à-vis du commun des mortels.

Au xixe siècle, des travaux à visée scientifique (ou scientiste), en particulier ceux du médecin Jacques-Joseph Moreau de Tours (1859), puis de l’aliéniste et criminologue Cesare Lombroso (L’homme de génie, 1864) s’appliquent à établir un lien de causalité entre troubles psychopathologiques, infirmités diverses et génie créateur. Dans la foulée de ces travaux, naîtront de nombreuses théories assimilant le génie, notamment artistique, à la maladie mentale :

De même que les géants payent la rançon de leur haute taille par la stérilité et par la faiblesse relative de l’intelligence et des muscles, ainsi, les géants de la pensée expient, par la dégénérescence et par les psychoses, leur grande puissance intellectuelle1.

Du point de vue de la connaissance actuelle, qui n’accorde plus grand crédit à la notion de normalité, ce type d’approche matérialiste, réductionniste, hygiéniste, qu’on peut encore occasionnellement voir exprimée de nos jours, est largement dépassée. On notera cependant qu’elles ont tout au moins le mérite de subsumer, quoique assez grossièrement, une fonction réparatrice et compensatoire de la pratique artistique, notion sur laquelle nous reviendrons et qui conserve toute son actualité aujourd’hui.

La discussion des liens entre psychopathologie et production artistique pose, encore et toujours, de considérables problèmes méthodologiques. Corrélation ne signifie en effet pas causalité : crée-t-on grâce à ou malgré des problèmes psychiques ? L’œuvre est-elle un symptôme ou une tentative de dépassement de celui-ci ? Toute simplification, tout schématisme peut ici conduire à l’impasse.

Sur les deux versants de sa mission, thérapeutique et théorique, la psychanalyse, depuis ses origines, s’est intéressée aux œuvres d’art. Elle a longtemps été employée comme grille de lecture des œuvres, ambitionnant de déchiffrer les rapports entre la vie de l’artiste et son travail. Les excès d’une telle méthode nous paraissent aujourd’hui flagrants. L’approche psychobiographique d’artistes, un temps massivement pratiquée dans le cadre de la psychanalyse dite « appliquée », est aujourd’hui largement discréditée par les analystes comme les universitaires.

Certes, de l’aveu même de nombre de grands artistes, l’œuvre est inséparable de la biographie de son créateur, dont elle contiendrait toute la configuration psychique2. Ainsi Wilde, dans le Portrait de Dorian Gray, fait-il déclarer au peintre Basil que « Tout portrait peint avec ferveur est un portrait de l’artiste, et non du modèle » (every portrait that is painted with feeling is a portrait of the artist, not of the sitter). Léonard de Vinci, déjà, affirmait que « tout peintre se peint lui-même » (Ogni dipintore dipinge se medesimo).

Mais l’œuvre n’est jamais entièrement assimilable à son créateur, de même que les rapports entre vie et œuvre sont bien plus complexes que certains auteurs ont pu le faire croire. En tout état de cause, d’un point de vue méthodologique, il n’est guère défendable de plaquer la méthode psychanalytique sur des détails biographiques collectés extérieurement, et non en situation d’analyse. La parenté supposée entre rêve, symptôme et œuvre d’art est certes intéressante, mais présente une évidente limite : celle de l’élaboration et de la mise en forme active dont l’œuvre d’art fait, par définition, l’objet. Une telle approche poussera à privilégier le contenu au détriment de la forme et du style, et revient donc à amputer artificiellement la totalité que constitue l’œuvre d’art.

La psychanalyse « appliquée » ne s’inscrit d’ailleurs pas absolument dans la lignée de Freud, dont on se souvient des célèbres citations sur l’art : « Les poètes et les romanciers sont de précieux alliés, et leur témoignage doit être estimé très haut, car ils connaissent, entre ciel et terre, bien des choses que notre sagesse scolaire ne saurait encore rêver », dit-il ainsi dans Gradiva de Jensen, 1907, citant Hamlet I,V, « Ils sont, dans la connaissance de l’âme, nos maîtres à nous hommes du commun, car ils s’abreuvent à des sources que nous n’avons pas encore rendues accessibles à la science3 ». Il s’agit bien pour Freud, non pas expliquer l’art par la psychanalyse, mais de parvenir grâce à l’art à obtenir de nouvelles connaissances sur le psychisme humain. Contrairement à nombre de ses prédécesseurs, il existe pour Freud une continuité entre le normal et le pathologique. Entre les réalisations artistiques les plus abouties et la formation de symptômes, il n’y a pas une différence de nature, mais seulement de degré. Historiquement, on peut s’avancer à dire que Freud participe ainsi à une valorisation « romantique » de l’art et de l’artiste, pour lui détenteur d’un « savoir » intuitif précédant celui du psychanalyste. Fidèle à cet esprit, Lacan inverse, en particulier dans ses écrits consacrés à James Joyce, l’approche de la psychanalyse appliquée : c’est l’art qui permet à la psychanalyse de « s’approcher de sa propre énigme4 ». Selon Freud, « l’estimation esthétique de l’œuvre d’art, de même que l’explication du don artistique ne sont pas des tâches pour la psychanalyse5 » (Court abrégé de psychanalyse, 1923). Son but est de sonder l’énigme de la créativité artistique, et de mieux saisir l’impact affectif (Affektwirkung) de l’œuvre auprès du spectateur. La démarche freudienne reste remarquable en particulier par sa prise en compte du double enjeu de l’œuvre d’art, envisagé par l’aspect de la création aussi bien que de sa réception.

Dépassant les études sur les psychopathologies des auteurs, ou axées majoritairement sur le contenu des œuvres, la tendance plus récente consiste à prendre pour objet d’étude les processus de la création par une approche plus résolument pluridisciplinaire, portant de manière accrue l’attention sur les discours des artistes sur eux-mêmes. Il apparaît que, bien souvent, l’artiste cherche à dépasser un traumatisme, ce qu’il réussit plus ou moins bien en s’appuyant sur des capacités particulières de sublimation et de résilience. Plus ou moins bien, car il s’agit là certes d’un processus qui ne suffit pas toujours à éviter à certaines personnalités artistiques fragilisées de connaître par ailleurs symptômes, décompensation psychotique, voire le suicide. L’accent est ainsi mis aujourd’hui sur la fonction auto-thérapeutique de l’art. Le processus artistique constituerait (à l’instar du symptôme) une solution à un conflit intra-psychique portant notamment sur une perte et mobilisant les capacités du sujet à élaborer son deuil à l’aide de l’expression des affects et de la symbolisation. C’est en ce sens que Lacan attribue à la pratique artistique une « fonction de suppléance (sinthôme) », ou que Cyrulnik qualifie la création artistique de « tuteur de résilience ».

2. L’art des aliénés

Les premiers décryptages d’œuvres artistiques à travers une grille psychiatrique sont le fait de Charcot et de ses élèves (Jean-Martin Charcot & Paul Richer : Les Démoniaques dans l’art, 1887 ; Les Difformes et les Malades dans l’art, 1899). Au début du xxe siècle, les productions artistiques des aliénés ouvrent un nouveau champ d’étude. Les travaux de patients schizophrènes, en particulier, souvent d’une grande qualité esthétique, vont profondément influencer ce domaine, et marquer durablement la pratique de l’art moderne. L’intérêt accru pour ce genre d’œuvres parmi les avant-gardes artistiques contribue à l’essor de l’art brut défendu par Jean Dubuffet et Michel Thevoz. Notons que ceux-ci considèrent l’art asilaire comme une déclinaison parmi d’autres de ce qu’on appelle maintenant aussi art singulier ou outsider art, un art qui ne répondrait pas aux critères des circuits culturels traditionnels : pas de distinction pour eux entre l’art « des fous » et celui d’autres créateurs marginaux ou hors-circuit. « Il n’y a pas plus d’art des fous que d’art des dyspeptiques ou des malades du genou », déclarait fameusement Dubuffet, rappelant par ailleurs que nombre de créations d’aliénés sont extrêmement conventionnelles et tributaires de traditions académiques.

Dès 1907, l’aliéniste Paul Meunier, sous le pseudonyme Marcel Réjà, rapproche dans l’ouvrage L’Art chez les fous les dessins et l’écriture des schizophrènes avec le dessin d’enfant et l’art dit primitif. Dans le domaine germanique en particulier, la curiosité pour l’art aliéné est alors importante au sein du corps médical et du monde intellectuel : citons les travaux de Walter Morgenthaler (Adolf Wölfli, malade mental et artiste, de 1921) ou Hans Prinzhorn (Expressions de la folie, 1922).

La valorisation des productions de patients psychiatriques va de pair avec les premières tentatives de traitement de pathologies de ce type à l’aide de la pratique artistique. Des cliniciennes d’obédience psychanalytique, telles que Sophie Morgenstern, Mélanie Klein et Anna Freud théorisent le dessin d’enfant comme outil thérapeutique. Sous une multitude de déclinaisons différentes, l’art-thérapie se met en place à partir des années 1930. Cette discipline protéiforme, jamais réellement systématisée, recouvre à ce jour des pratiques très diverses. Fondamentalement, elle diffère d’autres types de psychothérapies en ce qu’elle met en œuvre un triple processus entre patient, thérapeute et produit artistique, ce qui n’est pas toujours sans soulever des problèmes, voire des controverses.

3. L’expérience de Gugging

Une expérience pionnière d’art-thérapie menée dans le cadre du traitement de pathologies mentales lourdes a eu lieu dans les années 1960-80, en Autriche. Son initiateur est le psychiatre Leo Navratil (1921-2006), chef de service à l’hôpital psychiatrique Maria Gugging, auteur de plusieurs ouvrages sur les rapports entre la schizophrénie, le langage et l’art (Schizophrenie und Kunst, 1965, Schizophrenie und Sprache, 1966 ; Die Künstler aus Gugging, 1983), qui, dans une visée thérapeutique, a favorisé différents modes d’expression artistique chez ses patients. Extrait d’une interview de 2002 :

J’utilisais des fiches de carton blanc fin, de la taille de cartes postales. Le carton a quelque chose de plus solide que le papier et incite de ce fait à se donner de la peine. Le petit format aussi était important, un plus grand format aurait souvent demandé trop d’effort aux patients. Avec les patients qui me paraissaient avoir un intérêt artistique particulier, je suis passé progressivement à des formats plus importants. Au début, je ne fournissais qu’un crayon, puis plus tard des crayons de couleur, des craies de cire [...] et puis je donnais un sujet : dessine un animal, un soleil. Parfois aussi : dessine n’importe quoi6.

À propos des résultats obtenus au moyen de ces travaux, il explique :

Johann M., par exemple, avait été admis à l’hôpital à cause d’une manie. Il dessinait chaque jour un animal qu’il choisissait librement. L’atténuation graduelle de sa manie s’observait dans le fait que les animaux qu’il dessinait devenaient de plus en plus inoffensifs. D’abord un énorme taureau, puis un cochon, puis une chèvre, puis un chat, et finalement un pigeon. Ou encore Lorenz E. Il souffrait d’une dépression endogène récidivante. Au début, il dessinait quelque chose de minuscule, d’à peine visible, censé représenter un homme. Après une certaine durée de traitement, son personnage a pris davantage de place.

À la remarque que beaucoup de ses patients n’auraient jamais créé de leur propre initiative :

C’est exact. Et cela montre que la créativité ne résulte pas nécessairement d’un élan intérieur. Souvent, elle a besoin d’une impulsion de l’extérieur.

Frappé par la valeur artistique de certaines productions de ses patients, Navratil en encourage la diffusion dans les milieux culturels. Son action énergique et obstinée aboutit à la consécration internationale de patients tels que Johann Hauser, Oswald Tschirtner et August Walla. Les plasticiens de Gugging découverts par Navratil font aujourd’hui partie du canon classique de l’art brut, leurs œuvres gravitent dans un système entre-temps établi de marchands, d’expositions, de foires annuelles et de ventes aux enchères dédiées. Cette institutionnalisation de l’art brut, certes bien éloignée de l’esprit de Dubuffet, se manifeste dans l’évolution du « centre d’art- et de psychothérapie » (Zentrum für Kunst- und Psychotherapie), plus tard rebaptisé « maison des artistes », conçu par Navratil pour permettre aux patients d’exprimer leur créativité. L’ancien hôpital psychiatrique a aujourd’hui cédé la place à une fondation privée et un centre d’exposition, la recherche de nouveaux artistes à la logique de gestion propre aux institutions culturelles.

L’expérience de Gugging, étroitement liée à la personnalité de Navratil, ne pouvait se poursuivre indéfiniment : si elle a bénéficié d’une forte sympathie intellectuelle et publique au cours des années 60-80, depuis, ce type d’initiatives a suscité un certain nombre de réserves et de remises en question au sein du corps médical. On a pu contester l’intérêt thérapeutique de faire croire à des patients aux pathologies lourdement handicapantes qu’ils pouvaient faire partie du monde artistique officiel, en leur organisant vernissages et expositions. La reconnaissance publique atteinte dans le meilleur des cas n’entraîne pas forcément une amélioration de l’état, voire pourrait causer des perturbations supplémentaires. Le rôle de médiation et d’instigation du thérapeute, par ailleurs, n’est pas sans poser des problèmes de fond. Selon quels critères de qualité certaines œuvres seront-elles déclarées dignes d’être proposées au public (une fois les questions de droits d’utilisation résolue auprès des autorités de tutelle), et l’objectif ne risque-t-il pas de devenir de repérer les artistes bankable ? De manière évidente, l’essentiel des innombrables œuvres créées en atelier thérapeutique restent inassimilables par le « vrai » marché de l’art (qui d’ailleurs fait face à des problèmes de saturation), ou ne peuvent y prétendre du fait de la piètre qualité des matériaux utilisés. A quel titre le talent particulier d’un patient justifie-t-il un traitement de faveur en termes de conditions de travail et de matériel, qui plus est au frais du contribuable, dans une conjecture économique défavorable, etc.

Dans la mesure où la tendance actuelle consisterait plutôt à axer le recours à la pratique artistique chez les patients sur une visée purement thérapeutique, s’appuyant sur une perspective médicale plus pragmatique et des médicamentations plus performantes, l’expérience de Gugging évoque une époque révolue, empreinte d’une certaine candeur des débuts. Depuis le départ de Navratil, et sans son engagement, il est intéressant de remarquer qu’aucun créateur d’exception n’est venu s’ajouter à la trentaine d’artistes qu’il a fait découvrir.

4. Au sein de l’art « brut », l’écriture

Quoique les arts plastiques occupent dans l’art brut la vedette, y compris dans le cas des artistes de Gugging, l’écriture des aliénés présente un intérêt privilégié pour le corps médical. Freud (et plus généralement la psychanalyse), en étudiant l’expression artistique, s’est concentré principalement sur la littérature, qui présente avec la psychanalyse la parenté essentielle du primat de la langue. Selon Boris Cyrulnik, l’écriture rassemble « en une seule activité un maximum de mécanismes de défense : l’intellectualisation, la rêverie, la rationalisation et la sublimation7 ». Leo Navratil a également appliqué sa méthode de fiches bristol à la pratique littéraire, et révélé plusieurs auteurs talentueux, le plus célèbre étant Ernst Herbeck (1920-1991). Extrait d’une préface de Leo Navratil :

Un matin, à la fin de l’été 1960, je faisais ma visite au Haschhof, une dépendance de notre clinique. Là, vivait une trentaine de patients qui s’occupaient à des travaux agricoles [...] Parmi eux, Ernst Herbeck qui était malade depuis vingt ans et patient de la clinique depuis quinze ans. Je l’invitai à venir dans mon cabinet, posai devant lui un de mes bristols pour dessiner [...], lui donnai mon stylo et dis : « Monsieur Herbeck, voulez-vous bien écrire un court poème avec pour titre Le matin. »8

Cependant, au niveau de sa réception publique, l’écriture des malades mentaux présente un statut plus problématique que les arts plastiques. D’emblée, ce type de littérature apparaît comme un art pour artistes, qui sont prompts à en tirer une matière première pour leurs propres écrits. Ainsi, Breton et Éluard, pour L’Immaculée conception ou Les Possessions s’inspirent de travaux psychiatriques ou se livrent à la réécriture de textes d’aliénés publiés dans des livres de psychiatrie, sans jamais citer leurs auteurs, certes souvent présentés de façon anonyme dans la littérature scientifique.

Pour ce qui est de Herbeck, ses poèmes, que Navratil publie d’abord sous un pseudonyme pour des raisons de secret médical9, rencontrent un accueil enthousiaste de la part d’écrivains autrichiens de renom comme Ernst Jandl (qui loue les « trésors linguistiques » produits par Herbeck sous l’impulsion de Navratil) Friederike Mayröcker, ou Elfriede Jelinek. Heinar Kipphardt, principal représentant du théâtre documentaire allemand, consacre à Herbeck une pièce radiophonique, une pièce de théâtre, et un roman sous le nom de März, citant des textes de Herbeck sans mentionner son vrai nom.

La désinvolture vis-à-vis de l’individualité auctoriale des aliénés, de la part d’écrivains, montre de façon troublante à quel point la parole de ces malades n’est pas considérée comme leur propre bien, mais comme une sorte de bien commun, qui ne serait qu’accidentellement associé à la personne qui n’en est que le réceptacle, à l’exemple du poète antique décrit par Platon. Elle est d’autant plus dramatique que les malades en question ont généralement un sentiment très fort d’avoir été floués, niés, privés de leur existence même, thème qui apparaît de façon récurrente dans leurs écrits, et qui fait étrangement écho à la célèbre « mort de l’auteur » dont la malédiction pèse tant sur la littérature moderne. A quoi vient s’ajouter, comme dans le cas de Herbeck, que le patient n’écrit souvent qu’à l’incitation et quasi sous la direction de son médecin (suggestion de titres, selon la méthode de Navratil), ce qui complique encore l’attribution auctoriale. Le psychiatre devient ainsi une sorte de co- ou méta-auteur de l’œuvre.

Cependant, indéniablement, le type d’écriture que nous évoquons présente des caractéristiques communes, parmi lesquelles on peut noter :

- une tension mettant en balance une certaine revendication d’exemplarité et des formes souvent savoureuses de déviance par rapport sens commun : ainsi l’emploi d’un ton apodictique, d’explication résultant en un travestissement de la « doxa » scolaire, livresque ou télévisuelle.

- une distance générale par rapport au langage permettant de renouveler de façon inattendue des poncifs littéraires et sentimentaux, et d’exprimer un saisissement poétique originel.

- l’évocation, rapportée à soi-même, de contenus politiques, l’association de catastrophes historiques (dans le cas des auteurs découverts par Navratil, la deuxième Guerre mondiale) avec la catastrophe personnelle que constitue pour le patient l’irruption de la maladie.

- la représentation « baroque » d’un monde à l’envers, reflet de l’intérieur scindé du patient, mais aussi expression de son effort de rétablir une unité intérieure.

Ces traits communs, comme encore l’usage chronique d’une forme d’ironie noire, d’un humour souvent grinçant, désespérant autant que libérateur, ou encore la description inévitablement répétée de scènes et de lieux d’hôpital, incitent à considérer l’écriture des malades mentaux comme un corpus commun, alors qu’il est si éminemment constitué d’une série de tragédies individuelles. Et en définitive, c’est peut-être le seul moyen que nous ayons de l’appréhender pour essayer, rationnellement, de lui rendre justice : la considérer comme une littérature mineure au sens deleuzien, porteuse, dans son ensemble, d’un redoutable potentiel de subversion. C’est l’attitude qu’adopte le grand écrivain Winfried Georg Sebald, qui consacre plusieurs textes à Herbeck, et en fait l’« ambassadeur » d’une expression, qui pour être marginale, serait peut-être la seule à pouvoir éviter ce qu’il appelle la « karstification » de la littérature, victime d’une langue « numérisée » et d’une culture « administrée10 ».

De tels enjeux, possiblement capitaux, sont loin d’avoir été assimilés par l’opinion publique. S’il est maintenant admis que des groupes scolaires assistent à des visites spécialement aménagées de collections d’art brut pour les sensibiliser aux mystères de la création, la littérature « brute » peine traditionnellement à toucher un plus large public, même si quelques rares éditeurs ont à cœur d’y confronter les lecteurs, par exemple la maison Harpo &, en rendant accessibles les écrits de Jeanne Tripier, Stéphane Godard, Gaston Chaissac, ainsi que d’auteurs étrangers (des poètes de Gugging) sous forme de traduction : pari doublement risqué, qui soulève des questions peu abordées : que signifie, qu’implique en effet traduire ce type d’écrits ?

5. Traduire l’art brut ?

Si l’on admet que l’écriture « brute », tout comme ses équivalents en art plastique, nous met en quelque sorte en contact avec les sources même de la création artistique, il en résulte pour le traducteur une responsabilité accrue, et qu’à mon sens seul Henri Meschonnic a formulée de manière probante. Je récapitule de manière forcément expéditive ses principaux arguments en termes de traductologie (terme qu’il refuse d’ailleurs expressément) :

- refus de la binarité « sourcier / cibliste » : c’est-à-dire d’un mode de pensée selon lequel les traducteurs seraient soit soucieux de respecter au maximum le texte d’origine, soit de l’assimiler le mieux possible aux contraintes de la langue d’arrivée.

- refus de la traductologie comme discipline calquée sur la linguistique opérant selon le mode duel signifiant / signifié, excluant la littérature au profit de la communication. Meschonnic parle du « traduire » : infinitif substantivé unissant la théorie et la pratique de la traduction.

- La poétique du traduire revendiquée par Meschonnic exige une approche historique de la traduction, qui prend place dans une théorie d’ensemble du sujet et de la société. Il s’agit, au sens de Horkheimer et Adorno, d’une théorie critique par opposition à la théorie traditionnelle, parcellaire, qui ne peut aboutir qu’à préserver l’état des choses existant.

- elle revendique le primat « de la rythmique, de la prosodie », qu’implique l’appréhension du texte littéraire en tant que discours et figure de l’oralité.

Traduire ne peut plus être l’activité pensée dans le signe comme elle est pratiquée couramment. Tout ce qui précède était nécessaire préalablement pour situer et transformer le traduire, transformer la pensée du traduire, transformer les pratiques du traduire, transformer l’évaluation sociale et politique du traduire. Autrement dit, plus que ce qu’un texte dit, c’est ce qu’il fait qui est à traduire ; plus que le sens, c’est la force, l’affect11.

Pour ma part, j’avoue m’être longtemps compté, esquivant les laborieux débats traductologiques, parmi ce que Meschonnic nomme les praticiens, en particulier pour affronter la redoutable question de l’« intraduisible » qui guette tout traducteur de poésie moderne, et a fortiori de poésie « brute ». Praticien dans le sens « on s’attelle à la tâche », on « va au charbon », sans états d’âme inutiles. Non sans un certain malaise, cependant, car, comme Meschonnic le rappelle fort à propos, le soi-disant praticien opère lui aussi selon une certaine idéologie ou certaines théories de la traduction, d’autant plus insidieuses qu’elles ne sont pas formulées et assumées.

Or, en nous penchant sur la réflexion de Meschonnic, il nous apparaît que s’il est un domaine de l’écriture où elle paraît inattaquable, où ses catégories sont confirmées pour ainsi dire jusqu’au paroxysme, c’est précisément celui de cette « littérature mineure » que constituent les écrits schizophrènes, domaine que Meschonnic lui-même n’a pas spécifiquement abordé. Dans ce domaine, pour le traducteur, faire preuve d’une excessive fidélité aux termes du texte d’origine s’avère immédiatement aussi peu opérant que de se laisser aller, faute de repères tangibles, à sa propre veine lyrique. Des repères existent pourtant, en premier lieu dans le caractère éminemment oral de ces écrits, dont témoignent de manière insistantes leurs déviances par rapport aux règles langagières, qu’on est souvent machinalement tenté de corriger en traduction. Par ailleurs, ce type d’écriture illustre magistralement l’idée d’un effet produit par le rythme du discours, parfois indépendamment du sens des mots, sens d’ailleurs complètement relativisé (ou ramené à sa juste valeur ?) du fait d’une approche obstinément concrète du matériau verbal. Enfin, il n’est probablement pas d’autre type de littérature où la question traductologique du rapprochement à l’altérité, à l’autre radicalement autre se pose dans une telle intensité.

6. Un exemple

Reprenons la préface déjà citée de Navratil, où celui-ci cite le poème originel de Herbeck, Le matin. Nous nous pencherons ensuite sur une traduction de ce texte, qui illustre bien les écueils qui guettent le traducteur pour ce qui est des questions de fidélité et de liberté appréhendées sans concept d’ensemble.

« Monsieur Herbeck, voulez-vous bien écrire un court poème avec pour titre Le matin. » Herbeck se concentra un instant et écrivit :

Der Morgen

Im Herbst da reiht der
Feenwind
da sich im Schnee die
Mähnen treffen.
Amseln pfeiffen heer
im Wind und fressen.

et voici la traduction que nous nous proposons de commenter :

Le matin

En automne, là, échelonne
le vent des fées
alors dans la neige les
crinières se rencontrent. Des
merles sifflent claironnent
dans le vent et mangent.

Remarques :

1. La lecture du poème allemand dénote une régularité rythmique, qui n’est pas rendue en français, et que les sauts à la ligne que fait Herbeck ne peuvent annuler : ces sauts paraissent de ce fait accessoires (peut-être dus au format réduit du bristol ?). Il apparaît que dans ce premier essai poétique officiel, Herbeck se montre profondément tributaire des notions de métrique et de versification assimilées pendant son parcours scolaire (Herbeck n’a pas pu faire d’études supérieures).

Selon la métrique allemande, les deux premiers vers

Im Herbst da reiht der Feenwind
da sich im Schnee die Mähnen treffen.

correspondent à des vers iambiques (rythme ascendant) à quatre accents, l’un à terminaison masculine (accent sur la dernière syllabe), l’autre féminine (accent sur l’avant-dernière syllabe). Selon ce schéma, le troisième vers à prendre en compte est :

Amseln pfeiffen heer im Wind

qui constitue un vers trochéique (rythme descendant) à quatre accents (et à terminaison masculine). La fin de phrase « und fressen » correspond du coup métriquement à un vers isolé, fait tout à fait signifiant et sur lequel nous reviendrons.

L’essentiel est que Herbeck déploie ici une imagerie hallucinatoire, à la limite de l’incohérence, sur une structure rythmique initialement solide et éprouvée, qui peut et doit servir de base au traducteur. Il est difficile de trouver un meilleur exemple de vers où le rythme prime sur le sens, ou plutôt, se chargeant de la « respectabilité » du poème, laisse les mots libres de chanter à leur guise. Pour rendre tout ceci, il ne s’agit certes pas de recourir à un prétendu équivalent des formes classiques allemandes, tel que l’alexandrin français. Mais, tout au moins, de rendre par la forme, une notion de régularité rythmique, quitte à sacrifier certains mots trop longs en français (comme « crinières »).

Image 1000000000000111000000BF54819D54.jpg

Schéma rythmique du poème « Der Morgen »

2. im : la triple occurrence de ce mot dans un poème aussi bref rend à peu près incontournable, dans la mesure du possible, le triple emploi d’un même mot dans la traduction (en l’occurrence : « dans »).

3. reiht : se fier au verbe « reihen » (mettre en rangée) est ici très peu convaincant, « échelonner » est bien trop abstrait (et comporte beaucoup trop de syllabes par rapport à « reiht »). Quelles sont les alternatives possibles ? Nous opterions pour un verbe qui suggère un son (que produirait le vent en automne). « Reiher » signifie héron, oiseau qui pousse un cri rauque, sorte de croassement (le verbe « reihern », qui donne « reihert » à la 3e personne du singulier, signifie par ailleurs en langue populaire dégueuler, dégobiller). Sans aller jusqu’à détourner à nos fins le verbe « héronner », on peut opter pour « croasser », qui évoque un son tout aussi disgracieux et présente en outre l’intérêt d’une diphtongue, qui avec « fées » et « neige » rend à peu près l’accumulation de voyelles longues dans le texte allemand.

4. da : la première occurrence de ce mot ne nécessite pas strictement une traduction. Il s’agit de l’usage de « da » en tant que particule illocutoire et non en tant qu’adverbe de lieu. Son registre d’utilisation relève ici du langage enfantin et son rôle est, comme dans certaines comptines, d’assurer la régularité du vers (et non de l’allonger démesurément par une incise !) La deuxième occurrence, à nouveau, est mal appréciée : il ne s’agit pas d’une utilisation de « da » en tant qu’adverbe de temps, mais plutôt en tant que préposition temporelle, exprimant la simultanéité au sens de « comme », « alors que ».

5. heer : substantif qui signifie « armée ». Apposé au verbe « pfeifen », on est amené à l’entendre d’une façon adverbiale. Si la facilité d’une « armée de merles » s’oppose à la rugosité syntaxique du texte, le redoublement du verbe (sifflent claironnent) n’en rend pas davantage l’étrangeté.

6. fressen : ce verbe, appliqué aux animaux, se traduit effectivement simplement par « manger » en français. Appliqué aux humains en revanche, il correspond au registre de « bouffer », pouvant aussi signifier bâfrer, s’empiffrer. Comme nous l’avons signalé en 1., les mots « und fressen » sont rythmiquement isolés du reste du poème, ce qui leur confère un relief et une charge agressive particuliers, que ne rendent pas (d’autant plus si on considère l’idée d’une nuée menaçante de merles), les mots « et mangent ». Par ailleurs, la structure rythmique du poème met en association, d’une part « -wind » et « Wind », d’autre part « treffen » et « fressen ». S’il ne s’agit pas à proprement parler de rime dans le deuxième couple, l’assonance est manifeste, et doit être rendue d’une façon ou d’une autre dans la sonorité de la traduction.

7. Contre-proposition :

Le matin

Dans l’automne croasse le
vent des fées
quand dans la neige les
mèches s’effleurent.
Des merles sifflent en bataille
dans le vent et dévorent.

7. Lecture

Je voudrais dans la foulée vous proposer, sans cette fois en énumérer les enjeux, deux autres textes de Herbeck traduits par mes soins : « La machine » et « L’écureuil » ; puis vous présenter deux autres auteurs de Gugging sur lesquels j’ai travaillé : Edmund Mach (1929-1996), dont l’écriture porte davantage sur la prose et à qui il arrivait aussi de proposer spontanément des textes, parfois assez longs, au Dr. Feilacher ; et Arnold Schmidt (né en 1959), qui compte plutôt parmi les plasticiens de Gugging. Les seuls textes publiés de lui sont ses contributions à une revue interne de l’hôpital animée par un objecteur de conscience au milieu des années 80. Ils ont été livrés sous forme de dictée. Schmidt est particulièrement intéressant par son emploi de la forme épistolaire ainsi que par de courts dialogues souvent très réussis. Le fait que, chez des personnalités qui, une fois « lancées », apparaissent comme d’inépuisables trésors de trouvailles littéraires, le temps de l’écriture soit souvent aussi rare et éphémère n’est pas le moindre paradoxe. Le traducteur ne peut que rendre grâce d’avoir l’occasion de traduire de tels « accidents », qui le ramènent aux principes même de son activité et devraient en ce sens être soumis comme exercice obligatoire à tout aspirant à la profession.

Ernst Herbeck12 :

La machine

J’aimerais bien aussi écrire.
Comme elle se tient sage et brossue.
« C’est là que nous nous effondrons.
quand – « l’homme » – aperçoit les hommes
j’aimerais écrire, toi volontiers
quand ils aperçoivent qu’elle marche.
Machine diesel.

*

L’écureuil

Dans les landes et dans les bois
j’ai trouvé ma joie.
Le garde forestier frémit,
lorsqu’il était sur l’arbre, l’écureuil.
Il bondit du Tout à la branche,
et se calcina. Le
garde forestier gela. Et son fusil.
Le garde forestier vit comme il arriva
et le piqua dans la fourrure et tomba
de l’arbre comme neige.
L’écureuil avait un semi-
pelage de tsar marron. Le pelage était
au poil.
Le renard regarda de temps à autre et
le dévora. Chercher à manger. L’
écureuil était mort. Le renard était
long. Comme le fusil au garde forestier
et tira. Il ne le toucha pas.

 

Arnold Schmidt13 :

« Ça y est, tu l’as abattu. » « Qui ? » « Celui avec des lunettes, qui était devant la porte. » « Je n’ai rien remarqué. » « Tu l’as abattu avec ton deuxième corps, qui était dehors. » « Et où est ton deuxième corps en ce moment ? » « Mon deuxième corps roule en mobylette. Le corps conscient est à Gugging, l’autre roule en mobylette. » « Que se passerait-il si l’autre était ici également ? » « C’est impossible, ce serait un accident, un accident, ce serait. »

 *

L’hiver, l’été, l’automne, le printemps,
La neige, le soleil, la lune, l’oasis –
qu’y a-t-il d’autre ?

Le ciel, l’horizon, les pierres,
Pierres de lune et poussière de lune.
Mars, la base lunaire –
qu’y a-t-il d’autre ?
Pluton, l’âme, le corps,
La plante, l’esprit –
qu’y a-t-il d’autre ?
La tête, le cerveau, le front,
La psyché, la pfuché (le corps),
L’âme corporelle, les mains, les pieds, les ongles –
il n’y a rien d’autre.

 

Edmund Mach14 :

Le chat et la souris

Le chat et la souris sont généralement à la
cave. Ils jouent ensemble. Pour le chat
la souris est trop petite en quelque sorte. Mais la
souris se positionne dans la cave, tandis que
le chat remonte dans la pièce. Dans laquelle
il trouve un verre de lait. A midi
ils ont du pain.
La souris mange pommes et plum-pudding
après-midi elle joue avec elle-même.
Elle (sur) vient à travers l’eau
noire.
Le soir le chat & la souris mangent
ensemble. Le repas près des meubles fut
sans doute ce qu’il y eut de mieux.
La nuit ils attendent le sommeil.

 *

Bohême

Le fleuve mi-sonnait.
Un doux délice d’allure éternelle.
Comment poussent les champignons
dans les bois la menace forestière,
l’équipage est ancien.

Les visites que nous fîmes
en Bohême attellent notre
carosse. Nous étions près de Praha,
Prague, en visite chez l’oncle.
Le village s’appelait Srny.

Des canards et des oies voilaient
la région. Car tout est
mort là-bas. Aujourd’hui plus
qu’une miette d’être.

Notes de bas de page numériques

1 C. Lombroso, L’Homme de génie, trad. F. Colonna d’Istria, Paris, Alcan, 1889, p. XX.

2 Jeannine Chasseget-Smirgel, Pour une psychanalyse de l’art et de la créativité, Paris, Payot, 1971, p. 45.

3 S. Freud, Délires et rêves dans la « Gradiva » de Jensen [Der Whan und die Traüme in W. Jensens « Gradiva », 1907], trad. Marie Bonaparte, Paris, Gallimard, 1971, p. 127.

4 Selon l’expression de Sylvie Le Poulichet, in L’Art du danger ; de la détresse à la création, Paris, Anthropos, 1996, p. VI.

5 Freud, Œuvres complètes / Psychanalyse, André Bourguignon, Pierre Cotet et Jean Laplanche (dir.), vol. XVI, Paris, PUF, 1991, p. 331-354 [350].

6 Neue Zürcher Zeitung, suppl. Folio, 8 février 2002. Nous traduisons.

7 B. Cyrulnik, Un merveilleux malheur, Paris, Odile Jacob, 1999, p. 195.

8 Ernst Herbeck, 100 poèmes, Marseille, Harpo &, p. 5.

9 Alexanders poetische Texte, Hg. v. Leo Navratil, Munich, DTV, 1977.

10 W. G. Sebald, « Eine kleine Traverse. Das poetische Werk Ernst Herbecks », in Die Beschreibung des Unglücks. Zur österreichischen Literatur von Stifter bis Handke, Salzbourg, Residenz Verlag, 1985, p. 31-48.

11 H. Meschonnic, Poétique du traduire, Paris, Verdier, 1999, p. 54.

12 Revue Grèges, n° 8, hiver 2002, p. 15 (trad. modifiée).

13 Arnold Schmidt, de 111, trad. Hugo Hengl, Marseille, Harpo &, 2007.

14 Edmund Mach, Triomphe d’un choqué, trad. Hugo Hengl, Marseille, Harpo &, 2005.

Notes de la rédaction

Conférence tenue au CTEL le 3 février 2014

Pour citer cet article

Hugo Hengl, « Écriture et schizophrénie : traduire les poètes de Gugging  », paru dans Loxias, 53., mis en ligne le 24 juin 2016, URL : http://revel.unice.fr/loxias/index.html?id=8382.

Auteurs

Hugo Hengl

Hugo Hengl est traducteur (notamment de Jakob M. R. Lenz, Ernst Meister, Friederike Mayröcker, Rose Ausländer, Oskar Pastior, Anja Utler, Christine Lavant) et enseignant (PRAG) à l’université Clermont-Auvergne. Docteur en littérature comparée de l’Université de Nice, il est aussi membre associé du CTEL.