Loxias | 49. Charlot, ce poète ? | I. Charlot, ce poète? 

Émilien Sermier et Livia Lüthi  : 

« Quelle belle vie ! »
L’existence poétisée du Charlot de Philippe Soupault

Résumé

Dans Charlot (1931), Philippe Soupault narre la vie imaginaire du célèbre vagabond, à partir des films qu’il a vus et des souvenirs qu’il en a gardés. Mais il la retrace en la poétisant : tenant Charlot pour un « poète au sens le plus pur et le plus fort du terme », l’écrivain accorde son récit à l’image qu’il se fait du personnage. La figuration poétique s’effectue ainsi de manière à la fois thématique et formelle : non seulement le parcours de Charlot voisine par intermittence avec ceux de modèles emblématiques (Orphée, Croniamantal, Rimbaud, Cendrars), mais son existence elle-même est perçue à l’image d’un poème, structurée selon un schéma cyclique. Dès lors, dans tous les sens du terme, le récit de Soupault peut être défini comme une biographie poétique – par l’existence qu’il restitue, par le style qu’il emploie, par l’émotion qu’il procure.

Abstract

In Charlot (1931), Philippe Soupault tells the imaginary life of the famous tramp, drawing from the memories he has of the films he saw. But he retraces it poetically: presenting Charlot as a poet in the purest and strongest sense of the word, the writer matches his story to his perception of the character. The poetic representation thus occurs both thematically and formally: not only is Charlots journey near to those of emblematic figures (such as Orphée, Croniamental, Rimbaud or Cendrars), but his existence itself is seen as a poem, structured according to a cyclic pattern. Therefore, in every sense of the word, Soupaults story can be defined as a poetic biographythrough the existence he recounts, through his style, through the emotion he stirs.

Index

Mots-clés : Charlot , Soupault (Philippe)

Keywords : Charlot , poetry

Géographique : France

Chronologique : XXe siècle

Thématique : Poésie

Plan

Texte intégral

1Tout au long de l’entre-deux-guerres, Philippe Soupault s’est imposé comme l’un des admirateurs les plus fervents de Charlot. Loin cependant de mener à une sidération silencieuse, cette fascination a eu chez lui la vertu de déclencher l’acte d’écriture : avec la même intensité qu’il a pu écrire sur Rimbaud ou sur Lautréamont, le poète surréaliste a consacré plusieurs textes à Charlot. De fait : il rédige en 1919 un « poème cinématographique » à partir d’Une Vie de chien, puis il participe au numéro-hommage du Disque vert de 1924, avant de donner à la revue Europe, en 1928, une longue étude sur la vie et l’art de Charlie Chaplin. Tous ces articles ne font cependant que précéder – et peut-être préparer ? – l’ouvrage publié en 1931 chez Plon, puis réédité dans une version augmentée en 19571 : Charlot.

2Dans ce récit biographique, Philippe Soupault narre la vie imaginaire du célèbre vagabond ; à partir des films qu’il a vus et des souvenirs qu’il en a gardés, il reconfigure librement plusieurs scènes. Faisant écho à la vogue des « ciné-romans » des années 1910-1920, Charlot représente une forme de « novellisation2 » pour le moins singulière. Le récit révèle en outre la puissance transfictionnelle3 d’un personnage déjà bien connu, à qui l’écrivain confère une extension d’existence en prolongeant ses aventures au-delà des films de Chaplin – comme s’il était une figure autonome (voire un mythe) que chacun était libre de se réapproprier. Philippe Soupault se garde d’ailleurs bien d’assimiler le créateur (Charlie Chaplin) à la créature (Charlot), contrairement à plusieurs de ses contemporains et à ce que lui-même a pu écrire4 : dans Charlot, seul le personnage est convoqué. Et s’il intéresse tant l’écrivain, c’est peut-être précisément parce qu’il est perçu comme un poète « au sens le plus pur et le plus fort du terme5 ».

3Charlot, un poète ? Non pas dans l’acception générique du terme, bien sûr, mais en raison de son rapport au monde. À la lecture du récit, il est frappant de constater combien Soupault entoure le destin de Charlot d’une aura poétique, et combien il poétise le personnage : il le rapproche de modèles emblématiques (de façon thématique et intertextuelle), tout en figurant son existence dans une écriture suggestive et rythmée. Notre étude montrera dès lors de quelle manière l’écrivain, en accordant la vie du personnage et le style qui la raconte, dresse un portrait biographique de Charlot en poète.

Écrire Charlot

4L’enjeu, pour Soupault, est d’abord de dire la poésie du personnage. Rappelons en effet son but initial : désireux de « respecter dans toute la mesure du possible la merveilleuse poésie qui anime Charlot », il indique que « ce n’est pas une biographie qu’il aurait fallu écrire, mais un poème6 ». Ainsi, pour traduire une existence jugée poétique, la plume doit s’accorder à l’image du personnage. À la modestie de Charlot répond donc un certain dépouillement de l’écriture : la syntaxe est minimale, la phrase brève, le lexique réduit, le temps au présent simple :

Quelqu’un gratte à la porte. Peut-être a-t-il des provisions ? Charlot et son compagnon, tout joyeux, se précipitent et reculent effrayés. C’est un ours.
Mais la faim est plus forte que la peur. On tue l’ours et on le mange7.

5Bien loin d’être appauvrissante, cette simplicité participe à reconstruire, au sein du récit, le rythme rapide de la vie de Charlot. Mais surtout, elle a partie liée avec la poésie ; par sa concision extrême, l’écriture offre beaucoup de liberté à l’activité imageante du lecteur. Faisant explicitement confiance aux souvenirs cinématographiques de ce dernier pour combler les interstices du récit8, Soupault ne fait en effet que frôler ce dont il parle : il ne restitue pas, mais il esquisse, il évoque, il suggère, et le dépouillement stylistique engage chez lui une lecture fortement connotative. L’acte de nomination suffit par exemple à figurer, sans description, des éléments ou des objets :

Cabine de luxe. Cigares. Manucures, whisky. On se précipite autour d’eux. Les reporters leur demandent leur impression. Milliardaires. Un photographe qui pose des questions9.

6Par son style indicatif et elliptique, par la fréquence de ses phrases nominales, Charlot n’est pas sans rappeler l’esthétique des poèmes de l’écrivain, qui eux aussi, décapés de toute emphase, progressent par brèves notations suggestives – à l’image de ceux de Cendrars ou de Reverdy. Il arrive ainsi que le récit bascule quelquefois vers le poème, plus nettement :

Le bateau semble s’agiter. On entend des cloches, puis des coups de sifflet, enfin des hurlements de sirène.
Le bateau est secoué.
On est parti.
Enfin on leur ouvre la porte.
Les émigrants peuvent une dernière fois regarder les côtes de leur continent natal.
L’Europe s’éloigne.
Des femmes pleurent10.

7Ici le paragraphe se morcelle à la faveur du verset, et les blancs qui aèrent chaque ligne maintiennent, par leur vertu suspensive, le lecteur dans une disposition rêveuse. Serti dans le flux narratif, un embryon de poème surgit ainsi momentanément, témoignant bien de la porosité des frontières discursives et génériques. L’écriture se révèle malléable, et, dans cet extrait, tout se passe comme si la forme adoptait soudain l’allure d’un poème pour s’accorder à une thématique chère à la tradition poétique (et à Soupault) : le départ en mer.

8On l’aura dès lors constaté : ce style simple et suggestif rejoint l’idéal poétique de l’auteur. Rétif aux surenchères avant-gardistes, Soupault a en effet toujours privilégié une poésie dépouillée, modeste, limpide et sans grandiloquence, pour aller vers une émotion plus authentique. Lui-même ne se décrivait-il pas comme un « poète au sens le plus pur du mot », à la recherche d’une « poésie affranchie de tout plumage, de tout linceul, [jaillissant] comme une source d’eau fraîche, si nue qu’elle n’est qu’un élan brillant et fort11 » ? En ce sens, la fluide sobriété de Charlot confine à une pureté d’ordre poétique. Mais elle contribue surtout à nimber la vie du protagoniste d’une atmosphère de poésie, et il est frappant de constater combien le style épouse la nature du personnage – lui aussi qualifié de « poète au sens le plus pur du terme12 ». La pureté esthétique dont rêve Soupault s’accorderait-elle à la pureté existentielle du personnage ? Elle coïncide de toute évidence avec l’image qu’a l’écrivain de Charlot, et dès lors figure son caractère : par sa sobriété et son dénuement, l’écriture fait ressortir son humilité, sa candeur, sa fraîcheur, sa spontanéité, son innocence. Le style souligne, au plus près, la nature proprement poétique du personnage. Et il n’est à cet égard pas anodin que, par son ton, la voix du narrateur se rapproche si souvent de celle de Charlot, jusqu’à la confusion ; à plusieurs reprises, toutes les deux s’entremêlent au discours indirect libre, en particulier à travers des exclamations ou des interrogations restituées avec une fraîcheur quasi enfantine :

Au premier village Charlot jouera du violon et fera la quête. On lui donnera des sous, du pain, des œufs. Les paysans aiment la musique !
Quelle belle vie13 !

9Difficile, ici, de décider si les deux derniers énoncés sont pris en charge par le narrateur ou par le protagoniste, tant leurs voix fusionnent solidairement dans une même expression ingénue et spontanée. Ces exclamations participent ainsi à l’élaboration d’un ethos particulier chez Charlot qui, de fait, adopte très souvent l’attitude d’un enfant.

10Telle est peut-être l’origine de son caractère poétique : loin d’accepter le petit jeu des hypocrisies et des ambitions humaines, le protagoniste garde en lui les idéaux simples et fervents de l’enfance. Le début du récit le présente emblématiquement dans son plus jeune âge, étonné devant les beautés de la nature ; et tout au long de sa vie, Charlot saura préserver ce regard naïf et enchanté, car il « ne sait pas vieillir. Il est toujours aussi enthousiaste, aussi curieux, aussi inquiet que lorsqu’il était un enfant qui découvrait le monde et les étoiles14 ». Or cet être-au-monde se révèle éminemment poétique : il est une façon existentielle de sauvegarder une forme d’émerveillement dans le monde, et de sublimer une réalité décevante, celle de la société mesquine et industrieuse des temps modernes. Refusant un réel sans poésie et sans joie, Charlot préfère s’évader dans l’univers imaginaire de ses rêves – où les gens lui sourient aimablement15 – pour se construire des fictions plus lumineuses. En cela, son attitude n’est pas sans rappeler celle des nombreux enfants qui peuplent les récits poétiques du début du XXe siècle, ceux de Valery Larbaud (Enfantines), de Jules Supervielle (LEnfant de la haute mer) ou de Jean Cocteau (Les Enfants terribles) qui, eux aussi, substituent à un monde insatisfaisant leur propre univers féérique.

11Ainsi, l’auteur de Charlot et son protagoniste se révèlent tous deux des « poètes au sens le plus pur du terme », car tous deux – l’un par son écriture et l’autre par son rapport au monde – préservent une allure naturelle et spontanée presque enfantine. Cependant, si Charlot est poétisé dans le récit, ce n’est pas seulement par son regard d’enfant, ni par le recours à une écriture suggestive ; c’est aussi parce que, d’un point de vue plus thématique voire intertextuel, son parcours s’apparente par intermittence à ceux de quelques poètes emblématiques.

Une figure et un parcours de poète

12Dès le premier chapitre, le récit place résolument le personnage sous le signe des poètes. Alors que plusieurs villes « réclament l’honneur d’avoir vu naître Charlot16 » – comme ce fut le cas pour Homère –, la naissance du personnage fait aussi l’objet d’une hypothèse plus symbolique de la part du narrateur : « Peut-être un soir, à la tombée de la nuit, est-il descendu des nuages ?17 ». Commençant hors de tout cadre réaliste, l’enfance de Charlot est intimement liée à la nature : le premier chapitre expose un personnage qui découvre avec émerveillement les arbres, les fleurs, les oiseaux, l’eau, c’est-à-dire tous les éléments cosmiques, végétaux et animaux. Proche du je poétique qui dans l’Aube de Rimbaud éveille la nature à son passage, le jeune Charlot traverse un environnement qui se tourne affectueusement vers lui : la lune lui « lance son plus beau et son plus fidèle rayon », les étoiles lui « clignent de l’œil », une source lui prodigue des « conseils18». Vivant en synergie avec une nature qui le fête, Charlot est capable d’entendre et de comprendre, dans une sympathie sensible, le langage du cosmos. Toute sa vie durant, il gardera d’ailleurs cette faculté et aura le pouvoir magique de susciter la joie dans la nature ; dès qu’il apparaît,

une à une toutes les gaietés du monde s’éveillent. Il y a celle du matin et celle du crépuscule, celle des étoiles et des chevaux, celle des ballons rouges et celle des machines à vapeur […] La neige est éclatante, la mer miroite, un rayon de soleil se penche sur un arbre et chante à gorge déployée19.

13Par sa présence quasi enchanteresse, Charlot devient ici comme un avatar moderne d’Orphée. Son sourire bienveillant ne présente-t-il pas les mêmes vertus que le chant du poète antique ? Lumineux, il charme et revivifie la nature en lui apportant une harmonie heureuse. La figure d’Orphée ayant marqué plusieurs poètes du début du XXe siècle, Charlot n’est à cet égard pas sans rappeler certaines figures poétiques de la même période, et en particulier le Croniamantal du Poète assassiné d’Apollinaire (1916), inspiré du poète mythique. Une étude comparée de leur parcours révélerait de nombreuses similitudes : né on ne sait où20, Croniamantal dialogue lui aussi avec les forêts et les sources après que la lune et les collines lui ont servi de « mamelles » nourricières21. À l’image d’Orphée, Charlot et Croniamantal vivent en accord avec une nature qu’ils animent, et auprès de laquelle ils font l’expérience fondatrice de l’émerveillement.

14Mais, à l’image de celle de Croniamantal, la vie de Charlot a un revers plus sombre : d’emblée, le personnage est présenté comme un exclu de la communauté humaine. Venu au monde en dehors de la société, puis vite renvoyé de l’école, il « ne connaît pas les hommes22 ». Bien que son âme soit charitable, il sera très vite confronté à leur animosité, et son rapport à l’altérité s’avérera malgré lui toujours conflictuel, défectueux. Importuné par les gendarmes, raillé par ses semblables, Charlot subit un sort presque aussi funeste qu’Orphée et Croniamantal, violemment persécutés par des sociétés hostiles aux poètes. Le dernier chapitre n’explique-t-il pas qu’à défaut d’avoir été assassiné, il a sacrifié son bonheur pour une humanité qu’il devait faire rire ? « Il n’a qu’à s’en aller toujours, qu’à souffrir encore, qu’à tomber, qu’à être battu et poursuivi par le mauvais sort pour que tout le monde soit heureux23 ». Tel un martyr, Charlot aura généreusement voué sa vie aux autres, acceptant d’être moqué pour assurer une forme de rire dans un monde inquiété et progressivement marqué par la haine nazie. Le récit se termine dès lors dans une tonalité discrètement hagiographique – tout comme Le Poète assassiné –, la vie de saint étant un comparant fréquent dans les vies de poètes24. En écho à l’incipit qui annonçait que Charlot était peut-être descendu des nuages de manière divine, la conclusion laisse entrer le personnage, quasi sanctifié et canonisé, dans l’éternité : il restera en effet dans les mémoires de la postérité comme « l’homme qui fit rire le monde entier25 », ainsi que le résume une épitaphe imaginaire26.

15Marginal, inadapté, Charlot se voit voué à une existence en constant décalage avec les réalités humaines. La poésie tragique de son existence provient ainsi de son irréductible « différence27 », de son impossible intégration sociale – en somme : de sa posture de poète maudit. C’est que le personnage est condamné à la solitude, quand bien même il essaie de se fondre du mieux qu’il peut dans une société qui le repousse à chaque fois. Même le rire qu’il suscite ne suffit pas : loin d’attirer la sympathie de ses semblables, il se retourne presque toujours contre lui pour le rendre ridicule, misérable, malheureux. À la recherche de sa propre identité sociale, Charlot se déguise ainsi sans cesse, accumule les visages, pratique tous les métiers : il est « déménageur, accessoiriste, machiniste, pâtissier, garçon d’hôtel, cambrioleur, boxeur, marin, plombier, employé de banque…28 ». Cette énumération rapide, qui fait entrer le personnage dans le trépignement du début du XXe siècle, souligne son impossibilité d’adhérer aux cadres sociaux – mais, plus encore, de se fixer.

16Car sa vie présente la particularité de se déployer sous la forme mouvante d’une errance solitaire et perpétuelle. Se réappropriant le Charlot vagabond des films de Chaplin, Soupault oriente ainsi son personnage vers certains modèles poétiques – bien que la notion de « vagabond29 » prenne un sens variable selon la situation dans laquelle se trouve Charlot. Le terme revient à maintes reprises, et cette qualification contribue chez lui à rapprocher le personnage de certains modèles poétiques – bien que la notion de vagabond prenne un sens variable selon la situation dans laquelle se trouve Charlot. Quelquefois, l’errance est perçue positivement, lorsqu’elle est synonyme de liberté et d’indépendance : « Charlot flâne avec délices à travers les rues. Il se sent un peu seul, mais aussi délivré30 », et il aime à aller « vers le hasard31 ». Cette flânerie flexueuse n’est alors pas sans rappeler la déambulation capricante et aventureuse qu’ont exaltée les poètes surréalistes : proche des narrateurs-passants des Dernières Nuits de Paris (Soupault) ou du Paysan de Paris (Aragon), Charlot marche en laissant libre cours à ses rêveries, en quête d’inconnu, émerveillé devant les mystères nocturnes des villes : « ami de la nuit32 » à l’instar de Georgia qui « n’aimait que la nuit33 », il part volontiers « à la conquête de cette planète, de cet univers inconnu, une ville nouvelle34 ». Mais le vagabondage n’est pas toujours aussi enivrant : il finit presque toujours par s’assimiler, plus profondément et plus gravement, à une fuite. La marche a beau débuter sous la forme d’une promenade insouciante au premier chapitre, elle se mue peu à peu en une errance amère et contrainte. « Il marche. Il vit. Il rit35 » : cela ne peut suffire qu’un temps et, très vite, cet idéal s’étiole : « il fuit, il erre, il vit36 ». Le vagabondage de Charlot est surtout une fugue, une déroute : le personnage ne cesse de s’échapper et de s’évader.

17Rejeté par les hommes et désireux de préserver son indépendance, Charlot est ainsi sans cesse sur le départ. Se défaisant systématiquement de ce qu’il aime et de ce qu’il n’aime pas, il est « le passant37 » qui court – et qui ne peut s’arrêter de courir – vers l’inconnu et la liberté. Homme en partance, il éprouve à tout instant le désir d’un départ régénératif, en particulier au début du récit. Or ce trait le rapproche étroitement de certains poètes modernes, et en premier lieu de Philippe Soupault, lui aussi en perpétuel état de fuite pour éviter l’immobilité et l’attachement38. Mais il l’apparente également à d’autres poètes dont Soupault s’est toujours senti proche : Rimbaud, cet homme aux semelles de vent39, et surtout Blaise Cendrars, dont on se rappelle la fameuse morale « Quand tu aimes, il faut partir40 ». Hélas, Charlot ne connaît pas l’expérience exaltante de Rimbaud ou de Cendrars. Alors que ces poètes parviennent à se renouveler avec ferveur, lui échoue à changer de vie : il ne réussit jamais à rompre de façon définitive avec sa situation, ni à s’affranchir de son état. Le voyage et l’éloignement géographique ne suffisent pas pour changer d’identité, et il a beau partir à New York, il y retrouve une solitude, une cruauté, une infortune qu’il connaît déjà. La carte de son existence se déploie toujours à l’identique, et le personnage tourne en rond, enserré dans son destin de vagabond : « Il est las de ces retours et de ces départs qui le font tourner dans le même cercle. Il a peur de ne pouvoir jamais changer et de continuer sur cette route monotone, monotone41 ».

18Avatar tragique des figures de Rimbaud ou de Cendrars, Charlot ne peut se libérer de ses chaînes, ni devenir un autre : il est soumis à un sort qui le contraint à rester tel qu’il est. Sans se révolter, le personnage est mené par un destin qui le gouverne : « jouet des circonstances », il doit en effet « toujours se battre contre la destinée42 ».

Un destin en forme de répétitions

19Toute l’existence de Charlot est orientée par un destin impérieux. Ce fatum a toutefois la particularité d’évoluer cycliquement. La vie du protagoniste n’est-elle pas comparée tantôt à un « cercle43 », tantôt à un « refrain44 », et n’est-elle pas marquée par des événements qui perpétuellement font retour ? Le récit se caractérise quant à lui par sa structure itérative : sans cesse il est ponctué de scènes qui se réitèrent avec de légères variations, tels de lancinants leitmotive : combien de fois Charlot tombe-t-il amoureux de jeunes filles blondes, combien de fois se trouve-il aux prises avec un gros gendarme, combien de fois arrive-t-il au seuil d’une nouvelle ville ? Tels sont les signes de sa destinée. Le personnage est en outre condamné à toujours reprendre la route, ainsi que le soulignent les conclusions des chapitres qui se font écho les unes aux autres, comme des litanies :

Il s’éloigne quand même, toujours et toujours45.

Il se lève, il est seul et il marche, il marche vers l’éternité46.

20Afin de souligner les redondances monotones de l’existence de Charlot, de nombreuses répétitions formelles (structurelles, mais aussi syntaxiques et lexicales) marquent ainsi l’ensemble du récit. Insistantes, elles soulignent la difficulté d’un sort enlisant auquel le personnage serait implacablement soumis, et auquel il doit se résigner :

Marcher, marcher... 47

Il va falloir trouver un logement, il va falloir travailler et travailler pour deux48.

Il y a, malgré la pluie, malgré le vent, malgré la solitude, des chansons qui tournent dans l’air49.

21On notera que si toutes ces répétitions renforcent l’idée d’un destin ressassant, elles servent en outre à le poétiser. De fait, c’est assurément de ses reprises formelles et de son rythme que l’ouvrage de Soupault tire son principal pouvoir poétique ; souvent construites sur un mode binaire ou ternaire, les répétitions syntaxiques contribuent à cadencer le texte de manière très marquée. Ainsi de nombreuses figures de rhétorique comme l’épanalepse, l’anaphore ou l’énumération insufflent une scansion presque musicale à la narration – allant jusqu’à la faire dériver parfois sur le mode d’une rêverie éployée :

Il y a, là-bas, dans ce halo des hommes et des femmes, des pauvres garçons, des vagabonds, des orphelines. Il y a tous ceux qui l’ont oublié et que lui aussi a oubliés : les agents de police, les brutes, les curieux, les égoïstes, les rusés, les escrocs, les tricheurs. Il y a aussi ceux qui souffrent, ceux qui ont soif, ceux qui ont les mains vides et le cœur lourd50.

22Rythmé par des répétitions syntaxiques et construit sur des motifs structurels récurrents, Charlot s’apparente assez bien au récit poétique tel que l’a défini Jean-Yves Tadié dans son essai de 1978. Souvenons-nous : pour Tadié, le récit poétique se caractérise – structurellement et stylistiquement – par ses reprises et ses parallélismes internes qui forment l’équivalent, à une plus large échelle, des assonances ou des rimes dans un poème. Architecturé par symétries, ce type de récit adopte dès lors souvent une structure en forme de cycle ou de spirale et, par là même, se distingue du roman traditionnel et de sa progression linéaire51.

23Le destin de Charlot est ainsi perçu à l’image d’un poème ; il avance, mais par rappels, par échos, par assonances, dans une pulsation cyclique. Mais ne nous méprenons pas: sa dimension itérative ne signifie pas pour autant que le protagoniste traverse les événements de sa vie sans évoluer. Car le Charlot de Soupault n’a pas une structure circulaire fermée, et la fin du récit ne propose pas de retour à l’état initial : au fil de son destin, Charlot acquiert une conscience de plus en plus aiguë de la malveillance humaine. Progressivement, son sourire se teinte d’amertume, et ses yeux « ne voient plus de la même façon52 ».

Une vie « blanche et noire » : vers une émotion poétique

24Tout au long d’un parcours initiatique qui ressemble à une fable mélancolique, le regard que Charlot pose sur les hommes se modifie : désabusé, le protagoniste se défait de son innocence originelle pour devenir de plus en plus pessimiste et anxieux. Ce désenchantement progressif se révèle notamment à travers les quelques portraits qui ponctuent le récit : cinq chapitres de l’ouvrage53 suspendent en effet la trame narrative pour dépeindre le personnage à certaines étapes de sa vie. À chaque fois, de nouvelles facettes sont éclairées, et ces portraits successifs fondent au final un portrait plus vaste et plus mouvant de Charlot dans la durée. Leur mise en parallèle laisse apercevoir des modifications cruciales : alors qu’au chapitre XIII « l’inquiétude n’est pas à craindre54 », Charlot est décrit comme « inquiet55 » à la fin du récit. De fait, le personnage fait peu à peu le deuil de sa joie, de ses espoirs et il ne peut réprimer un écœurement envahissant : « Décidément il n’y a plus d’optimisme dans le cœur de Charlot. Une amertume sans méchanceté conquiert peu à peu son cœur avec la persévérance des taches d’huile56 ».

25Cette évolution du regard, liée au parcours initiatique du protagoniste, est aussi due au contexte historique tel qu’il est (discrètement) thématisé dans l’ouvrage. Car Charlot – « né aux environs de 190057 » et contemporain de la plupart des Surréalistes – appartient à l’époque troublée de l’entre-deux-guerres. Marqué par les désastres de la Grande Guerre, il pressent également la terrible menace des années 1930-1940, devenant « très inquiet » lorsque « tous les jours, à toutes les heures, passent des soldats vêtus de brun, qui font claquer leurs bottes sur la chaussée58 ». Aussi son inquiétude, son pessimisme et ses désirs d’évasion sont-ils caractéristiques d’une génération qui n’est souriante qu’en apparence, et le personnage exprime d’ailleurs au plus près, selon Soupault, « l’angoisse du monde d’aujourd’hui59 ».

26Le paradoxe peut étonner : en dépit de sa marginalité sociale, Charlot incarne l’état d’anxiété de ses contemporains. Serait-il ainsi, in fine, une figure emblématique – d’un point de vue non seulement historique, mais peut-être humain ? De fait, chaque homme se confond un peu en lui, et y retrouve une part de soi-même, une part souvent obscure et misérable – « tous le voient d’une façon différente et tous ont reconnu dans son ombre, leur ombre60 ». Le protagoniste porte sur lui les revers de l’humanité. Comme un miroir diffracté, son identité plurielle et morcelée reflète ceux qui le regardent :

– Qui est-il ?
– Un vagabond.
– Un voleur.
– Un malheureux.
– Un imbécile.
– Un enfant.
– Un débrouillard.
– Un sournois.
– Un illuminé.
– Il est tout cela à la fois et autre chose encore.
– Quoi donc ?
– Un bon garçon.
– Un fou.
– Un ami.
– Un peureux.
– Comment s’appelle-t-il ?
– Charlot.
– Charlie.
– Carlito.
– Karlchen61.

27Connu par le monde entier sous différents noms, Charlot représente dès lors ce « héros universel62 » désigné par Soupault dans sa « Dédicace ». Mais un héros qui n’en est pas vraiment un, et qui est d’abord un humain aussi fragile et instable que les autres, seulement « un peu moins vaniteux, puisqu’il refusait de se prendre au sérieux63 ».

28Nous comprenons dès lors que c’est en raison de cet aspect universellement humain – par sa faiblesse, sa maladresse, sa tristesse, ses échecs – que Charlot est aux yeux de Soupault si « émouvant64 ». Aussi le lecteur se prend-il d’affection pour cet être vulnérable qui est aussi notre « ami65 », notre semblable, notre frère, et qui suscite notre compassion par sa fragilité. Homme qui fait rire, Charlot est surtout celui qui « donne envie de pleurer66 » lorsque nous le voyons subir les coups du sort, et nous ne rions de fait guère à la lecture du récit – tout au plus sourions-nous, parfois. En faisant contraster l’envers lumineux et le revers mélancolique de sa vie, Charlot cherche moins à amuser qu’à émouvoir. Et il le fait par la poésie, précisément : « Sa vie, blanche et noire, n’est aussi émouvante que parce qu’elle s’alimente aux sources mêmes de la poésie67 », annonce Soupault dès sa « Dédicace ». Pour l’écrivain, l’émotion semble donc essentiellement poétique. Et s’il s’attache tant à poétiser la vie de Charlot, c’est bien dans la perspective de créer auprès du lecteur ce que Reverdy a nommé « cette émotion appelée poésie ». Par son écriture fluide et dépouillée, le récit ne cherche pas à sublimer Charlot sur le mode de l’épopée, ni à en dramatiser l’existence de façon romanesque, mais à en faire ressortir l’attachante simplicité, l’exemplaire sensibilité, la fragilité enfantine.

29***

30En somme, Charlot peut être défini, dans tous les sens du terme, comme une biographie poétique. Cette appellation est sans doute celle qui souligne, avec le plus de justesse, sa profonde originalité68. Poétique, Charlot l’est à la fois par l’existence qu’il restitue, par l’écriture qu’il emploie, par l’émotion qu’il provoque. Non seulement le parcours du protagoniste voisine par intermittence avec ceux de poètes emblématiques (d’Orphée à Cendrars), mais son existence elle-même est structurellement appréhendée à l’image d’un poème. Nous avons montré que les biographèmes retenus par Soupault résonnent les uns les autres de façon homogène, presque métronomique, selon un schéma cyclique ; son récit se distingue dès lors de ces biographies traditionnelles qui déroulent une vie sur le modèle d’un roman en recourant à ses procédés (tension narrative, introspection psychologique, scènes dialoguées). Aussi Charlot réoriente-t-il l’habituel paradigme de la biographie, à tel point qu’il occupe une place singulière dans l’histoire de la fiction biographique, telle qu’elle s’est constituée depuis les Vies imaginaires de Marcel Schwob et qu’elle se perpétue aujourd’hui encore69.

31Les biographies poétiques ne sont à coup sûr pas nombreuses. Charlot n’est cependant pas tout à fait un cas isolé : il peut être relié à d’autres vies de poète du même type. D’un point de vue historique, il rejoint des récits parus au début du XXe siècle, tels Le Poète assassiné d’Apollinaire (1916), mais aussi la Biographie de M. Barnabooth de Valery Larbaud (1908) ou le Saint Matorel de Max Jacob (1911), qui tous retracent la vie d’un poète exemplaire, selon des modalités poétiques qui varient d’un auteur à l’autre. Par ailleurs, symptomatiquement republié en 2014 par les éditions Gallimard, Charlot entre en résonance avec certaines rêveries biographiques plus récentes qui restituent, sur un mode souvent lyrique et incantatoire, des vies de poètes dont elles soulignent la vulnérabilité humaine – Rimbaud le fils de Pierre Michon (1991), Vies antérieures de Gérard Macé (1991), Verlaine dardoise et de pluie de Guy Goffette (1996). Assurément, le Charlot de Soupault appartient à un sous-genre particulier et très actuel, dont il reste cependant encore à établir l’histoire, le corpus, les singularités et les variantes.

Notes de bas de page numériques

1 La version définitive de l’ouvrage comporte quelques variantes et aménagements, mais elle est surtout augmentée de trois chapitres consacrés aux films d’après 1931 (Les Lumières de la ville, Les Temps modernes, Le Dictateur). À ce propos, voir : Jean-Carlo Flückiger, « Un poète nommé Charlot », in M.-P. Berranger & M. Boucharenc (dir.), À la rencontre… Affinités et coups de foudre, Nanterre, Presses Universitaires de Paris Ouest, 2012, p. 439-450.

2 Jan Baetens désigne la novellisation comme « le genre qui adapte un film original sous forme romanesque », tout en ajoutant aussi qu’il existe des « poèmes-novellisations ». À la croisée de ces deux catégories, le récit de Soupault s’apparente davantage à une novellisation poétisée. Voir : Jan Baetens, La Novellisation. Du film au roman, Bruxelles, Les Impressions Nouvelles, 2008.

3 Voir au sujet de cette notion : Richard Saint-Gelais, Fictions transfuges. La transfictionnalité et ses enjeux, Paris, Les Éditions du Seuil, « Poétique », 2011.

4 Dans ses articles sur Charlot/Chaplin, Soupault a en effet tendance à les amalgamer. Bien plus tard (en 1978), il avouera d’ailleurs avoir longtemps cru que « Charlot et Charlie Chaplin étaient un seul et même personnage ». Mais en 1978, il accentuera leurs différences : « Charlot est un personnage anticonformiste, malin, généreux, désintéressé, alors que Charlie Chaplin est exactement le contraire ». Vingt mille et un jours, Entretiens avec Serge Fauchereau, Paris, Pierre Belfond, 1980, p. 119-120.

5 Philippe Soupault, « Dédicace », Charlot, Paris, Gallimard, « L’Imaginaire », 2014, p. 9-10.

6 Philippe Soupault, « Dédicace », Charlot, p. 9-10.

7 Philippe Soupault, Charlot, p. 96.

8 Lui-même annonce dans sa « Dédicace » : « Si parfois, trop souvent sans doute, les mots lui paraissent trop faibles, je demande à mon lecteur de ranimer ses souvenirs ». Philippe Soupault, « Dédicace », p. 10.

9 Philippe Soupault, Charlot, p. 103.

10 Philippe Soupault, Charlot, p. 58.

11 Anthologie de la nouvelle poésie française, Paris, Le Sagittaire, 1923, p. 413.

12 Philippe Soupault, « Dédicace », p. 10.

13 Philippe Soupault, Charlot, p. 37.

14 Philippe Soupault, Charlot, p. 124.

15 Voir : Philippe Soupault, Charlot, p. 51 et p. 75-77.

16 Philippe Soupault, Charlot, p. 12.

17 Philippe Soupault, Charlot, p. 12.

18 Philippe Soupault, Charlot, p. 12-13.

19 Philippe Soupault, Charlot, p. 105-106.

20 L’incipit n’est pas très éloigné de celui de Charlot: « Cent vingt-trois villes dans sept pays sur quatre continents se disputent l’honneur d’avoir vu naître ce héros insigne ». Guillaume Apollinaire, Le Poète assassiné, Œuvres en prose, t. I, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de La Pléiade », 1977, p. 227.

21 Guillaume Apollinaire, Le Poète assassiné, p. 249.

22 Philippe Soupault, Charlot, p. 18.

23 Philippe Soupault, Charlot, p. 153.

24 C’est ce qu’explique Alexandre Gefen en étudiant notamment Le Poète assassiné, Saint Matorel de Max Jacob et Le Lotissement du ciel de Cendrars dans « Fictions du poète. Saint Matorel ou l’hagiographie moderniste », Max Jacob/François Cheng, Europe, n° 1019, mars 2014, p. 97.

25 Philippe Soupault, Charlot, p. 154.

26 Cette épitaphe imaginaire est déjà évoquée dans la version de 1931 de Charlot. Mais, en 1931 comme en 1957, elle reste purement prospective: Charlot ne meurt littéralement pas à la fin du récit, même si le personnage se défait d’une part de lui-même au fil de ses désillusions et de ses expériences. L’épitaphe renforce, à la fin de la biographie, l’aspect « hagiographique ».

27 Philippe Soupault, Charlot, p. 55.

28 Philippe Soupault, Charlot, p. 29.

29 La première occurrence intervient à la p. 20 de l’ouvrage. Notons d’ailleurs qu’un poème du recueil Étapes de lEnfer (1932-1934) s’intitule « Vagabond ».

30 Philippe Soupault, Charlot, p. 45.

31 Philippe Soupault, Charlot, p. 96.

32 Philippe Soupault, Charlot, p. 126.

33 Philippe Soupault, Les Dernières Nuits de Paris, Paris, Gallimard, « L’Imaginaire », 1997, p. 46.

34 Philippe Soupault, Charlot, p. 127.

35 Philippe Soupault, Charlot, p. 107.

36 Philippe Soupault, Charlot, p. 109.

37 Philippe Soupault, Charlot, p. 81.

38 C’est ainsi qu’il se définit lui-même, dans un autoportrait qui pourrait également convenir à Charlot : « Philippe Soupault est à la poursuite de lui-même. Les êtres et les choses ne sont pour lui que des instants que sa pensée chatoyante éclaire et laisse dans l’ombre avec une impitoyable rapidité. Pour fuir leur immobilité qui est encore une chaîne, il faut parcourir les pays et les villes, les villes surtout, si belles d’être inconnues et puis s’échapper encore avant d’avoir ouvert des yeux qui pourraient peut-être s’attacher ! Non pas voyager : fuir ». Anthologie de la nouvelle prose française, Paris, Éditions du Sagittaire, 1926, p. 385.

39 Claude Leroy a montré les similitudes et les divergences qui unissent ces deux figures de la modernité. Voir : Claude Leroy, « Sous le signe d’Arthur Rimbaud », Europe, n° 769, mai 1993, p. 61-69.

40 Blaise Cendrars, « Tu es plus belle que le ciel et la mer », Feuilles de route, Paris, Gallimard, « Poésie », 2006, p. 192.

41 Philippe Soupault, Charlot, p. 56. Voir également, à propos des faux départs de Charlot, les pages lumineuses que Myriam Boucharenc a consacrées à ce récit dans : Myriam Boucharenc, L’Échec et son double : Philippe Soupault romancier, Paris, Honoré Champion, 1997, p. 340-352.

42 Philippe Soupault, Charlot, p. 44.

43 Philippe Soupault, Charlot, p. 56.

44 Philippe Soupault, Charlot, p. 123.

45 Philippe Soupault, Charlot, p. 56.

46 Philippe Soupault, Charlot, p. 122.

47 Philippe Soupault, Charlot, p. 95.

48 Philippe Soupault, Charlot, p. 50.

49 Philippe Soupault, Charlot, p. 66.

50 Philippe Soupault, Charlot, p. 124.

51 Jean-Yves Tadié, Le Récit poétique, Paris, Gallimard, « Tel », 1994 (1978).

52 Philippe Soupault, Charlot, p. 83.

53 Voir les chapitres : I « La Source », VI « Les Échos », X « Le Miroir », XIII « L’Ombre du sourire » et XV « La Fin ».

54 Philippe Soupault, Charlot, p. 81.

55 Philippe Soupault, Charlot, p. 152.

56 Philippe Soupault, Charlot, p. 83.

57 Philippe Soupault, Charlot, p. 30.

58 Philippe Soupault, Charlot, p. 140-141.

59 Autour de cette inquiétude générationnelle qu’avaient déjà diagnostiquée en leur temps Marcel Arland ou Benjamin Crémieux, voir : Myriam Boucharenc, « Terrain vague de la modernité : l’inquiétude 1925 », in M. Boucharenc & E. Rubio (dir.), Réinventer le roman dans les années vingt, Revue des Sciences Humaines, n° 298, 2010.

60 Philippe Soupault, Charlot, p. 55.

61 Philippe Soupault, Charlot, p. 53-54.

62 Philippe Soupault, « Dédicace », p. 9. 

63 Philippe Soupault, Charlot, p. 155.

64 Philippe Soupault, « Dédicace », p. 10.

65 Philippe Soupault, « Dédicace », p. 9.

66 Philippe Soupault, Charlot, p. 108.

67 Philippe Soupault, « Dédicace », p. 10.

68 Gérard Farasse voyait également en Charlot une « biographie poétique », qu’il distinguait finement du « poème romanesque » incarné notamment par la Jeanne dArc de Joseph Delteil. Voir : Gérard Farasse, « Vies rêvées », Myriam. Boucharenc & Emmanuel Rubio (dir.), Réinventer le roman dans les années vingt, Revue des Sciences Humaines, n° 298, 2010, p. 51-74.

69 Au sujet de cette forme littéraire, voir : Dominique Viart, « Fictions biographiques », in Dominique Viart et Bruno Vercier, La Littérature française au présent, Paris, Bordas, 2011 et Alexandre Gefen, Inventer une vie. La fabrique littéraire de lindividu, Paris, Les Impressions Nouvelles, « Réflexions faites », 2015.

Bibliographie

Corpus

SOUPAULT Philippe, Charlot [1931], Paris, Gallimard, « L’Imaginaire », 2014

SOUPAULT Philippe, Les Dernières Nuits de Paris, Paris, Gallimard, « L’Imaginaire », 1997

SOUPAULT Philippe, Vingt mille et un jours, Entretiens avec Serge Fauchereau, Paris, Pierre Belfond, 1980

Études

BAETENS Jan, La Novellisation. Du film au roman, Bruxelles, Les Impressions Nouvelles, 2008

BOUCHARENC Myriam, L’Échec et son double : Philippe Soupault romancier, Paris, Honoré Champion, 1997.

BOUCHARENC Myriam, « Terrain vague de la modernité : l’inquiétude 1925 », in BOUCHARENC Myriam & RUBIO Emmanuel (dir.), Réinventer le roman dans les années vingt, Revue des Sciences Humaines, n° 298, 2010

FARASSE Gérard, « Vies rêvées », in BOUCHARENC Myriam & RUBIO Emmanuel (dir.), Réinventer le roman dans les années vingt, Revue des Sciences Humaines, n° 298, 2010, p. 51-74.

FLÜCKIGER Jean-Carlo, « Un poète nommé Charlot », in BERRANGER Marie-Paule & BOUCHARENC Myriam (dir.), A la rencontreAffinités et coups de foudre, Nanterre, Presses Universitaires de Paris Ouest, 2012, p. 439-450.

GEFEN Alexandre, Inventer une vie. La fabrique littéraire de lindividu, Paris, Les Impressions Nouvelles, « Réflexions faites », 2015.

LEROY Claude, « Sous le signe d’Arthur Rimbaud », Europe, n° 769, mai 1993, p. 61-69.

MOUSLI Béatrice, Philippe Soupault, Paris, Flammarion, « Grandes Biographies », 2010.

SAINT-GELAIS Richard, Fictions transfuges. La transfictionnalité et ses enjeux, Paris, Les Éditions du Seuil, « Poétique », 2011

TADIÉ Jean-Yves, Le Récit poétique, Paris, Gallimard, « Tel », 1994 (1978).

VIART Dominique et VERCIER Bruno, La Littérature française au présent, Paris, Bordas, 2011

Anthologie de la nouvelle poésie française, Paris, Le Sagittaire, 1923.

Pour citer cet article

Émilien Sermier et Livia Lüthi , « « Quelle belle vie ! »
L’existence poétisée du Charlot de Philippe Soupault
 », paru dans Loxias, 49., mis en ligne le 15 juin 2015, URL : http://revel.unice.fr/loxias/index.html?id=7990.


Auteurs

Émilien Sermier

Assistant-doctorant à l’Université de Lausanne, Émilien Sermier prépare une thèse autour du renouvellement du roman dans les années 1920, sous la direction du Professeur Antonio Rodriguez. Travaillant en parallèle sur la littérature contemporaine, il est également l’auteur d’un essai sur Jean Echenoz : Variations sur un standard. Jeux et métamorphoses dans les trois romans biographiques de Jean Echenoz (Lausanne, Archipel Essais, 2013).

Livia Lüthi

Assistante-doctorante à l’Université de Neuchâtel, Livia Lüthi prépare une thèse en littérature française, sous la direction du Professeur Jean-Pierre van Elslande. Elle a travaillé pendant plusieurs années pour la revue Les Lettres et les Arts. Cahiers de Critique littéraire et artistique, dont elle est devenue la rédactrice en chef en 2012. Elle y a publié divers articles et comptes rendus sur la littérature, mais aussi sur la photographie ou l’art contemporain.