Allemagne dans Loxias


Articles


Loxias | Loxias 34 | Doctoriales VIII

Les Drames de princesses et de reines d’Elfriede Jelinek : déconstruction et impasse du discours genré

Parmi les textes canoniques véhiculant des discours figés et essentialistes, Elfriede Jelinek déconstruit de grands récits mythologiques antiques dans les Drames de princesses et de reines. Ainsi, son travail sur le mythe de Pygmalion, sur la Théogonie et sur la nekuia homérique révèle une idéologie implicite commune à ces textes, fondement de notre société occidentale, qui permet de pérenniser l’ordre patriarcal et de figer les relations de pouvoir. Mais peut-on dire que la dramaturge substitue un discours « genré » à un autre ? Elfriede Jelinek, réduite trop souvent et à tort à une écriture féminine et/ou féministe, questionne les rapports entre identité sexuelle et pouvoir. Son théâtre n’autorise pas l’instauration d’un nouveau discours autoritaire en lieu et place du discours masculin, il révèle bien plus l’impasse dans laquelle mène immanquablement tout discours genré. Among the canonical texts that convey set and essentialist views, Elfriede Jelinek deconstructs great ancient mythological stories in her Dramas ofPrincesses and Queens. Thus, her work on the Pygmalion myth, on the Theogony and on the Homeric neukia reveals a common and implicit ideology – a cornerstone of our Western civilization – which allows the patriarchal order to continue and stops relationships between people with power from evolving. However, can we say that the playwright substitutes one “gender-biased” view for another ? Elfriede Jelinek, too often and wrongly reduced to a feminine and/or feminist writer, questions the relationships between sexual identity and power. Her work does not encourage the establishment of a new, authoritarian view in place of the masculine one – it goes beyond this, and reveals the dead-end any gender-biased view is bound to lead to.

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Loxias | Loxias 38. | Doctoriales IX

Ein Volk, ein Reich, ein Führer : reflet et démantèlement du discours völkisch dans l’œuvre grassienne

Le « rouleau compresseur » de la propagande – pour emprunter une expression de Gabriel Marcel – a permis à Hitler, conscient du pouvoir de langage, de séduire tout un peuple. C’est cette séduction que Grass mettra plus tard en exergue dans Le Tambour puis, en 2006, dans son autobiographie, Pelures d’oignon. La pensée « völkisch », fil directeur de la « philosophie » nazie, fondatrice d’un véritable mythe, est ainsi mise en scène et démantelée par Grass tandis qu’il essaie dans le reste de son œuvre de témoigner de la difficile reconstruction du Volk allemand en tant que concept et en tant qu’entité. The “roadroller-like propaganda”, to use the phrase coined by Gabriel Marcel, enabled Hitler to seduce a whole nation, aware as he was of the power of language. It is the very seduction that Grass put foward first in Die Blechtrommel and then, in his 2006 autobiography Beim Häuten der Zwiebel. The völkish thought, a leading thread of nazi philosophy and the grounding principle of a full-fledged myth, has therefore been staged and undermined by Grass. Meanwhile in his subsequent works, he tried to testify to how the german “Volk” has been reconceptualized as an entity.

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Le problème de « l’écrivain au fouet » : Die Blendung, d’Elias Canetti

Dans Die Blendung (écrit en 1930, publié en 1935), Canetti met en scène un misanthrope qui s’isole dans sa bibliothèque : à travers ce personnage, il règle certains de ses comptes avec Karl Kraus, le grand écrivain et publiciste viennois qui l’a profondément marqué. Les critiques ont en effet montré que Peter Kien et Karl Kraus ont en commun d’être « sans-dialogue » (« dialoglos ») (G. Stieg). Pourtant, dans un volume de son autobiographie, Jeux de regard (1985), Canetti affirme rétrospectivement que son roman reste influencé par Kraus : le romancier s’y pose en effet en « écrivain au fouet » (« Schreiber mit der Peitsche ») châtiant ses créatures. Or Canetti, tout en assumant une éthique de la « responsabilité » qui hérite de Kraus, s’oppose désormais à toute position surplombante de l’écrivain par rapport au monde. Il n’est cependant pas sûr que l’œuvre tardive de Canetti se soit vraiment dégagée de l’union entre morale et écriture, qui fonde l’écriture satirique.

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Loxias | Loxias 39. | Autour des programmes d'agrégation 2013

Enfance et mimesis. Commentaire composé du groupement de textes « La commerelle » / « Les couleurs »

Au sein du recueil Enfance berlinoise de Walter Benjamin, les textes « La commerelle » et « Les couleurs » mettent en parallèle, sous le signe de l’activité mimétique et de la sensorialité, l’appropriation du monde par le jeune enfant et la création artistique. Ils nous éclairent ainsi sur l’enjeu de l’ouvrage de Benjamin, entre autobiographie, document historique et manifeste poétique, en mettant en particulier l’accent sur le statut de l’auteur dans le projet esthétique benjaminien.

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Loxias | Loxias 42 | Doctoriales X

Tieck et Hoffmann lecteurs de la fiction encadrée renaissante : du Décaméron aux contes nocturnes romantiques

Cet article propose de se pencher sur un aspect typique de la Novelle allemande romantique, à savoir que beaucoup des textes de l’époque se présentent comme enchâssés dans un cadre nocturne. Les prosateurs de l’Allemagne romantique empruntent ce dispositif à une tradition extrêmement ancienne, celle de la fiction à récit-cadre, très fréquente dans la littérature antique et tout particulièrement renaissante, et dont les deux matrices sont Les Mille et une nuits et Le Décaméron (qui ne se déroule pas dans un cadre nocturne, mais s’y apparente structurellement). La communication se concentre sur le modèle renaissant, et cherche à montrer, à travers l’étude d’Eckbert le Blond [Der Blonde Eckbert, 1797] de Ludwig Tieck et de La Maison déserte [Das Öde Haus, 1817] d’E. T. A. Hoffmann, comment certains auteurs déconstruisent le protocole renaissant du récit nocturne pour mieux souligner la spécificité de la nuit romantique, qui repose sur l’envahissement du monde humain par la « face nocturne de l’existence » (Gotthilf Heinrich von Schubert). Chez Tieck et chez Hoffmann, il ne s’agit pas de séparer des ordres pour témoigner de la puissance d’organisation du discours, mais au contraire de mélanger les niveaux du récit et des sphères de la réalité que le lecteur pensait séparés, et que les narrateurs croyaient séparer par leur art de la parole, afin de souligner l’activité de ce monde nocturne qui ne laisse pas domestiquer.

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Loxias | 49. | I.

L’invention de Charlot : corps politique, corps poétique

Le personnage de Charlot, mi-gentleman, mi-clochard, consacre à sa manière l’importance dérisoire du moi, un moi capricieux qui résiste à l’entreprise d’uniformisation que lui fait subir le réel. Tirant sa force des jeux de l’enfance et de la pantomime, son art du muet sert un humour « vagabond » qui procède d’un processus d’irréalisation poétique servi par le burlesque. Portée par une conjonction d’influences, la figure de Charlot est une figure mixte qui cristallise à la fois une spiritualité poétique proche du « Witz » romantique et la modernité de l’humour. Son jeu est une invite à préserver l’élan originel de la conscience, et par là-même, à échapper au conditionnement industriel, en particulier dans Les Temps modernes, où ses vagabondages cinématographiques sont autant de figurations poétiques de la résistance.

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Loxias | 52. | I.

« Alexander von Humboldt : un précurseur de l’écopoétique ? »

L’analyse de la littérature par la place qu’y occupe la Nature ou l’étude du rôle de la littérature dans la conception et la préservation des espaces naturels ne sont pas choses nouvelles. Elles dictaient déjà l’écriture des histoires du « sentiment » de la nature qui ont fleuri en Europe dans la seconde moitié du XIXe siècle. Ce « sentiment de la nature » préside aussi à la composition du Kosmos d’Alexander von Humboldt qui, dès 1845, inscrivait au sein d’une description physique du monde l’histoire des effets de la Nature sur l’art et, corrélativement, l’histoire de la littérature descriptive. Il peut être tentant de faire du naturaliste allemand l’un des précurseurs des études contemporaines d’écocritique. Cela suppose de mesurer alors les enjeux scientifiques et politiques de la définition, par Humboldt, de ce fameux « sentiment de la nature » et de l’analyse de ses manifestations, pour éviter autant que possible l’illusion rétrospective et pouvoir, en retour, mettre en évidence les présupposés de la nouvelle école critique. La recherche d’un modèle historique ne laisse indemnes ni la source décrétée, ni l’avenir des textes qui pourraient s’inscrire dans sa lignée. Ainsi, l’hypothèse suivant laquelle Alexander von Humboldt serait non seulement l’un des inventeurs de l’écologie scientifique mais aussi l’un des précurseurs de l’écocritique conduit à observer, à l’œuvre, l’élaboration de plusieurs voies critiques possibles, touchant autant à l’histoire littéraire qu’au renouvellement des principes poétiques.

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Loxias | 63. | Agrégation de Lettres

Conscience et vérité dans Richard III de Shakespeare, Cinna de Corneille, Boris Godounov de Pouchkine, et La Résistible Ascension d’Arturo Ui de Bertolt Brecht

Cet article traite des rapports entre la réalité, la vérité, et la conscience dans les œuvres au programme de littérature comparée intitulé « le pouvoir en scène ». Il commence par traiter de la question de la vérité au théâtre, pour passer ensuite en revue la question de la représentation sur la scène et en politique. La question du mensonge d’État est ensuite mise en relation avec celle de la conscience du souverain. On passe ensuite au rapport de la conscience avec la réalité, puis à celle de la maîtrise du monde par la conscience ainsi que de sa propre maîtrise. On aborde ensuite la question de la légitimité du pouvoir, et de la nature de son fondement, pour conclure sur l’importance dans l’ensemble des œuvres du programme du rôle de la conscience individuelle du chef d’État dans les développements de la réalité politique.

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Loxias | 72. | I.

Principales tendances dans l’évolution de la poésie visuelle russe actuelle : histoire et théorie

Cet article dresse un panorama historique et épistémologique de la poésie visuelle russe du début du XXe au début du XXIe siècle. La première partie décrit la production artistique (mouvements, artistes œuvres) et son organisation (revues, manifestes, expositions,) en trois temps : avant-garde (futurisme), passage de l’époque soviétique à l’essor post-Pérestroïka (poésie concrète, poésie visuelle, art postal), structures de valorisation. La seconde partie examine la production actuelle au crible des classifications proposées par les historiens (poésies post-figurée, post-concrète et post-poesia visiva), les critiques (poésie asémique, poésie post-conceptuelle) et les chercheurs (genre, forme, langue). En ressortent la capacité à se renouveler en exploitant la tradition, le métissage croissant des différents genres de poésie visuelle, la participation aux mouvements artistiques internationaux, et l’utilisation des outils numériques. This article provides a historical and epistemological overview of Russian visual poetry from the beginning of the 20th to the beginning of the 21st century. The first part describes artistic production (movements, artists’ works) and its organization (reviews, manifestos, exhibitions,) in three stages: avant-garde (futurism), transition from the Soviet era to the post-Perestroika boom (poetry concrete, visual poetry, postal art), valorization structures. The second part examines current production through the lens of classifications proposed by historians (post-figurative, post-concrete and post-poesia visiva), critics (asemic poetry, post-conceptual poetry) and researchers (genre, form, language). This shows the ability of Russian visual poetry to renew itself by exploiting tradition, growing blending of different genres of visual poetry, participation in international artistic movements, and the use of digital tools.

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Loxias | 77. | I.

La Cannibale : s’affirmer par la dévoration

Cet article propose une analyse de la Femme cannibale à travers quatre œuvres de la littérature classique : Les Bacchantes d’Euripide, le mythe de Procné et Philomène, La Belle au bois dormant de Charles Perrault et Hänsel und Gretel des frères Grimm. L’étude de ces figures permettra de mettre en lumière la façon dont l’acte anthropophage permet à la Femme de s’affirmer, d’acquérir du pouvoir en s’écartant de son rôle et de la société humaine. This article proposes an analysis of the cannibal Woman through 4 works of classical literature: The Bacchae by Euripide, the myth of Procne and Philomela, La belle au bois dormant by Charles Perrault and Hänsel und Gretel from the Brothers Grimm. The study of those figures will shed light on how the cannibalistic act allows the Woman to assert herself, to acquire power by deviating from her role and from the human society

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Loxias | 80. | I.

Editorial
le blackface ou la représentation de l’identité raciale dans les arts de la scène

Cette introduction présente les actes d’un séminaire de recherche intitulé « Le blackface ou la représentation de l’identité raciale dans les arts de la scène » du CTEL UPR 6307 qui a eu lieu à l’Université Côte d’Azur à Nice le 16 juin 2022. Elle s’attache tout d’abord à définir la race et le racisme comme une question viscérale qui est trop souvent mal conceptualisée. Cet article se propose ensuite de contextualiser le « blackface », considéré comme le reflet d’une société qui tolère l’intolérable. Enfin, nous nous poserons la question du « blackface » dans les arts vivants en prenant les exemples de la scène contemporaine française et allemande ainsi que le monde du ballet classique en soulevant la problématique du théâtre de la suprématie blanche. This introduction features the proceedings of a research seminar entitled « Blackface or the representation of racial identity in the living arts » of the research center CTELA UPR 6307 that took place at University Côte d’Azur in Nice on 16 June 2022. It first focuses on the definition of race and racism as a visceral issue that is too often poorly conceptualized. Blackface on stage will then be contextualized and considered as the reflection of a society that tolerates the intolerable. Eventually, this article explores blackface in the living arts taking the examples of French and German contemporary stages as well as the world of ballet to raise the question of the theater of white supremacy.

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