éthique dans Loxias
Articles
Loxias | Loxias 22 | Doctoriales V
L’éthique au-delà du politique. Étude comparative des relations de voyage en URSS de Panaït Istrati et d’André Gide
Panaït Istrati (1884-1935), écrivain roumain d’expression française au parcours atypique, et André Gide (1869-1951), l’un des plus célèbres auteurs de sa génération, avaient tous deux adhéré à l’idéal incarné par la révolution bolchévique de 1917 et fondé un grand espoir sur l’avènement du communisme en Russie. Profondément déçus par la réalité soviétique qu’ils découvrirent à l’occasion de leur voyage en U.R.S.S., ils décidèrent l’un et l’autre de faire connaître au monde, à sept ans d’intervalle, le véritable visage du pays des soviets qu’une propagande efficace magnifiait alors aux yeux de l’Occident. Privilégiant les valeurs morales face aux principes idéologiques, Istrati, dans un pamphlet intitulé Vers l’autre flamme paru en 1929, et Gide, dans son essai Retour de l’U.R.S.S. complété par Retouches à mon « Retour de l’U.R.S.S. » publiés respectivement en 1936 et1937, prenaient fermement le parti de l’éthique contre le politique, plaçant le dévoilement de la vérité au centre de leur démarche. Ce choix et cette attitude si différents de celui d’un grand nombre d’intellectuels de l’entre-deux-guerres, invite dès lors à s’interroger sur cette surprenante rencontre réunissant, dans une commune appréhension des idées et des événements de leur temps, deux esprits par ailleurs si dissemblables.
Loxias | Loxias 34 | Doctoriales VIII
En cheminant en s’écrivant : parcours d’écrivain et éthique de voyageur dans L’Usage du monde de Nicolas Bouvier
Partir puis écrire… pour le voyageur que fut Nicolas Bouvier, le déplacement est toujours premier. Ensuite vient l’écriture, et dans l’écriture, émerge la continuité d’un être. Le récit de voyage oblige à se poser la question de la dimension autobiographique du texte, et de l’identité de ce « je » problématique dont nous lisons le périple, et qui naît peut-être bien plus qu’il ne préexiste au voyage. Voyageur, personne biographique, écrivain ? Personne ou persona ? Quelle est cette figure subjective qui se forge à l’usage du monde et apparaît sous nos yeux, au détour de la route et dans les lacets du récit ? To leave then to write… for the traveller Nicolas Bouvier, the great affair is to move. Then comes the time to write, and to let the being appear. Travel writing forces one to question the text as an autobiography, and to examine the problematic identity of the subject whose journey is told : this subject may arise from the text more than it existed before. Is this subject the traveller, the biographic person or the writer Nicolas Bouvier ? A person or a persona ? Who is “I”, this figure which springs from the loops of the road and the laces of the story ?
Loxias | Loxias 38. | Doctoriales IX
Le problème de « l’écrivain au fouet » : Die Blendung, d’Elias Canetti
Dans Die Blendung (écrit en 1930, publié en 1935), Canetti met en scène un misanthrope qui s’isole dans sa bibliothèque : à travers ce personnage, il règle certains de ses comptes avec Karl Kraus, le grand écrivain et publiciste viennois qui l’a profondément marqué. Les critiques ont en effet montré que Peter Kien et Karl Kraus ont en commun d’être « sans-dialogue » (« dialoglos ») (G. Stieg). Pourtant, dans un volume de son autobiographie, Jeux de regard (1985), Canetti affirme rétrospectivement que son roman reste influencé par Kraus : le romancier s’y pose en effet en « écrivain au fouet » (« Schreiber mit der Peitsche ») châtiant ses créatures. Or Canetti, tout en assumant une éthique de la « responsabilité » qui hérite de Kraus, s’oppose désormais à toute position surplombante de l’écrivain par rapport au monde. Il n’est cependant pas sûr que l’œuvre tardive de Canetti se soit vraiment dégagée de l’union entre morale et écriture, qui fonde l’écriture satirique.
Loxias | Loxias 40. | Panaït Istrati, « l’homme qui n’adhère à rien »
Droiture éthique et vérité d’un carrefour thématique – La famille Perlmutter
La Famille Perlmutter (1927) écrit par Panaït Istrati en collaboration avec Josué Jehouda est la chronique d’une famille juive, un roman de la formation et à la fois un carrefour thématique : l’errance, la générosité et son pendant « le généreux absurde », l’injustice, l’amour, l’amitié, le clivage Orient/Occident. On y retrouve la convivialité et la chaleur humaine, la droiture éthique et la rigueur politique du « chardon déraciné » amant de la Méditerranée qui a projeté les facettes de sa personnalité incandescente dans chacun des personnages de cette écriture polyphonique. Écrit peu avant le voyage en URSS et le grand tournant dans la vie et l’œuvre d’Istrati, ce texte sur les vaincus et les vainqueurs, sur les écorchés de la vie tel Isaac préfigure en quelque sorte le destin de l’auteur.
Loxias | 75. | I.
Les Regrets de Du Bellay : une écriture de la véhémence ?
La véhémence est une qualité du style qui donne force et énergie au discours. Notre article met en évidence son importance dans les sonnets des Regrets, à l’opposé des principes de simplicité et de modération pourtant affichés par le poète. Il étudie les différentes modalités énonciatives, poétiques et stylistiques de la véhémence dans le recueil. Il s’interroge enfin sur ses enjeux poétiques, éthiques et politiques, et met ainsi en évidence la dimension fondamentalement agonistique de l’écriture dans Les Regrets. Vehemence is a quality of style that gives force and energy to the discourse. Our article highlights its importance in the sonnets of the Regrets, in contrast to the principles of simplicity and moderation that the poet claims. It studies the different enunciative, poetic and stylistic modalities of vehemence in the volume. Finally, it examines the poetic, ethical and political issues at stake, thus revealing the fundamentally agonistic dimension of the writing in Les Regrets