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Stéphane Hervé  : 

Le deuil de la réalité : l’écriture théâtrale selon Pier Paolo Pasolini

Résumé

L’esthétique théâtrale pasolinienne est traversée par un paradoxe fondamental : le théâtre de Pasolini se définit comme « Théâtre de la Parole » alors que la parole y est disqualifiée du fait de son inauthenticité au regard du langage de l’action physique et du corps, et par conséquent, de son impuissance à être « vraie ». L’auteur italien, de fait, forge le mythe d’un théâtre identique à la réalité, une Idée du théâtre comme langage silencieux et non symbolique du monde sensible. Mais cet archétype permet à l’auteur de dégager en négatif la spécificité de l’écriture dramatique (contemporaine) et de la parole théâtrale : le théâtre s’écrit dans le manque de corps et d’action, dans le renoncement à la vérité des corps. C’est dans ce mouvement disjonctif que réside sa puissance esthétique et politique, à savoir la reconfiguration sensible du rapport du discours verbal au monde des choses, la reformulation de l’agencement, consubstantiel au théâtre, des paroles et des corps.

Index

Mots-clés : corps , parole, Pasolini, théâtre, Vérité

Plan

Texte intégral

Dans le programme de salle des représentations de Orgie1, Pier Paolo Pasolini énonce et commente les implications formelles de son esthétique théâtrale, ainsi que les possibles significations politiques de sa pièce. Ce texte bref, qui était accompagné du Manifeste pour un nouveau théâtre, déjà paru en janvier 1968 dans la revue Nuovi Argumenti, dans lequel Pasolini définit son théâtre comme « théâtre de la parole », est remarquable en ce que l’auteur y constate les défauts dramaturgiques de l’œuvre, comme la prédominance malheureuse des monologues ou la subsistance néfaste de traces d’action dramatique. Bien plus, il y affirme que le texte de Orgie possède une « double nature », ce qui constitue, selon lui, un autre défaut, mais plus fondamental, de la pièce, voire de son théâtre. Cette dualité est en fait une contradiction interne à l’œuvre : Orgie est un « texte entièrement fondé sur la parole, dans son moment le plus expressif, celui de “la langue de la poésie” », répondant par cela aux principes du Manifeste, mais cette parole poétique exalte « continuellement la primauté de l’action, comme mystère pragmatique à travers lequel la conscience s’exprime avec une plus grande authenticité, bien qu’elle soit d’une totale irrationalité »2. Les termes employés pourraient nous autoriser à lire cette description comme un aveu d’impuissance, en ce sens que son théâtre achopperait à montrer l’action, ou plus précisément le langage de l’action ou de la présence physique, langage premier, puisque celui-ci ne serait que formulé, théorisé dans et par la parole théâtrale. Or, cette substitution de la parole à l’action est problématique, puisque la parole est suspectée, malgré sa poéticité, d’être moins authentique que l’action, et de venir après. Pasolini résume cette défiance à l’égard de la parole dans cette formule lapidaire et paradoxale, toujours dans le programme de salle : « Si bien qu’on a jamais autant violemment polémiqué, dans  ce texte de “théâtre de la parole”, contre la parole ».

L’esthétique théâtrale pasolinienne est donc traversée par un important paradoxe : il s’agit, pour l’auteur italien, d’élaborer un nouveau théâtre, qu’il nomme « Théâtre de la parole », dans lequel la parole sera exaltée, glorifiée, et dans le même temps, les pièces de ce nouveau théâtre s’écriront contre la parole, contre l’inauthenticité essentielle du langage verbal au regard de la présence physique, du langage de l’action. Ce paradoxe premier, dont Pasolini, nous l’avons dit, était conscient, peut connaître des variations, des inversions. Ainsi, alors qu’il n’est quasiment question que du langage de l’action et du corps (du mystère de sa présence, de sa sacralité) dans la bouche des personnages de toutes les pièces pasoliniennes, les textes dramatiques soulignent son absence de la scène, puisqu’il est renvoyé dans le hors-scène ou dans les ellipses temporelles, et les textes théoriques la préconisent, puisque une des caractéristiques fondamentales du théâtre de la parole est « le manque quasi-total de l’action scénique 3». Ou encore : la réalité est seulement saisie, évoquée verbalement quand bien même l’impuissance de la parole à représenter la réalité est avancée, comme par les protagonistes de Orgie, lorsque, dans un mouvement autoréflexif sur leur propre comportement, ils affirment : « Notre réalité n’est donc pas celle/ que nous avons exprimée par nos paroles/ mais elle est celle que nous avons dite/ à travers nous-mêmes, en usant de nos corps ! comme de figures !»4 et « N’étant pas nous-mêmes, elles [nos paroles] ne sont pas la réalité:/ les mots de la langue ne sont donc /que les instruments du rêve… »5. Le théâtre de la parole, pourrions-nous dire, s’écrit à partir d’un manque, celui de l’action scénique, du corps agissant, manque à la fois revendiqué, au moins dans les discours théoriques6, et déploré par les personnages. Or, à travers ce manque apparaissant en creux des textes dramatiques, se déploie une reformulation, récente et assez peu connue, de la problématique de la vérité de la représentation théâtrale.

La singularité de cette formulation est qu’elle pose, de façon à première vue naïve, l’identité du théâtre à la réalité, tout en récusant tout naturalisme. En fait, si le naturalisme est écarté, en plus d’être une esthétique bourgeoise selon l’auteur, c’est qu’il consiste en une reconstitution mimétique fictionnelle. Pour affiner la définition du critère de vérité, nous pourrions dire, à partir des citations données plus haut, qu’il porte sur l’articulation des paroles et des corps agissant sur la scène théâtrale, sur les modalités de l’agencement scénique des actes de discours verbal et des postures et mouvements corporels, et non sur l’exactitude et la minutie de l’imitation de la réalité. Si la réalité des personnages se situe dans leur corps, suivant ce qu’en disent l’homme et la femme de Orgie, il s’agit de s’interroger sur la nature des paroles qu’ils pourraient prononcer, pour qu’elles ne soient pas des « instruments du rêve », des énoncés incorporels, et donc faux, et sur la manière dont elles peuvent s’agencer aux corps réels, sans trahir, annuler la matérialité de ceux-ci. En fait, nous pouvons affirmer que la question de la vérité au théâtre posée par Pasolini, porte avant tout sur la parole, et par conséquent, sur l’écriture dramatique, puisque l’action physique est première, et authentique en soi.

Jacques Rancière, dans Le Destin des images, en définissant ainsi le théâtre comme « l’espace de visibilité de la parole, l’espace des traductions problématiques de ce qui se dit dans ce qui se voit »7, pose également comme problématique l’agencement des corps (ou choses) et des paroles (le texte dramatique) au théâtre. Or, en fait, le philosophe français, en identifiant la pratique théâtrale à celle de la mise en scène, condense en cette courte phrase les grandes questions de l’esthétique théâtrale du vingtième siècle concernant le passage à la scène d’un texte. Mais le discours théorique de Pasolini fait naître un autre mouvement problématique, inverse à celui décrit par Rancière, qui va du corps (« ce qui se voit ») à la parole (« ce qui se dit »). Dans l’esthétique pasolinienne, ce n’est pas la mise en scène qui pose problème, puisque d’ailleurs l’auteur souhaite sa disparition8, mais l’écriture dramatique, qui, pour accéder à une certaine vérité, doit se confronter à la réalité corporelle, doit se penser dans son rapport au corps. Mais alors, pourrions-nous dire, dans le cas de l’écriture des six tragédies, la confrontation se serait soldée par un échec, et les répliques citées plus haut témoigneraient de l’impuissance de Pasolini à écrire du théâtre pour des corps agissant. Il semble que l’agencement pasolinien est problématique, voire qu’une disjonction radicale se substitue à lui. Il nous faut donc parcourir et explorer, dans un même mouvement, les écrits théoriques et les textes dramatiques, pour pouvoir analyser la (ou les) conception(s) pasolinienne(s) de l’agencement des corps et des paroles, pour préciser les fondements nécessaires de la vérité théâtrale, et dans le même temps, les raisons de l’évitement (ou impuissance) à écrire pour les corps, fondement paradoxal de l’esthétique théâtrale pasolinienne.

Si, à la lecture du Manifeste pour un nouveau théâtre, il semble que le théâtre se résume à la seule profération de la parole, il en va autrement dans d’autres textes, essentiellement consacrés à l’art cinématographique, qui développent une « Idée » du théâtre, idée étant à comprendre dans un sens quasi platonicien. En quoi consiste ce théâtre idéel ?

Pasolini souligne, toujours dans le programme de Orgie, la contemporanéité de la genèse de son œuvre dramatique et de son paratexte théorique, de celle de ses contributions à l’élaboration d’une sémiologie du cinéma : « Pendant que j’écrivais la première version de Orgie, j’écrivais en même temps mon premier essai sur le cinéma, qui s’insérait dans le cadre d’une pansémiologie »9. Or, il ne s’agit pas pour Pasolini de faire remarquer une simple coïncidence temporelle, qui pourrait passer pour anecdotique, mais de mettre en évidence des phénomènes d’interférences entre les deux arts, de circulation de thématiques, de transposition. Bien plus, théâtre et cinéma semblent être dans un rapport de similitude, Pasolini posant pratiquement une définition commune aux deux media. Comment expliquer cet étonnant rapprochement ? Dans un article intitulé « Le Code des codes » faisant partie du recueil L’expérience hérétique, Pasolini propose une énigme à résoudre à Umberto Eco, avec qui il polémique au sujet de la pertinence intellectuelle de l’idée d’un langage de la réalité. Il lui décrit la vision qu’il a d’un jeune homme blond marchant la rue et lui demande s’il le voit dans le réel ou sur un écran cinématographique. Après un développement théorique qui tente de démontrer la validité de la notion de langage de la réalité, il donne en conclusion la réponse à sa question préliminaire : « Eh bien, ce jeune homme blond du début, présenté à travers les signes du système écrit-parlé italien et décodé selon le code de ce dernier, n’est ni un jeune homme blond dans la réalité, ni un jeune homme blond sur l’écran. Il est un jeune homme blond sur la scène »10. La légèreté du ton n’atténue pas l’audace de la proposition de Pasolini, à savoir l’indistinction entre perception réelle, perception théâtrale, et perception cinématographique. La perception est analysée, dans cet article, comme déchiffrement d’un langage. Réalité, théâtre et cinéma ont en commun un même langage, qui s’articule à l’aide d’unités premières, qui seront appelées « cinèmes » ou « imsignes », les objets, formes ou actes de la réalité. Le théâtre, tout comme le cinéma, emploie le même régime de signes que celui de la réalité pour la signifier, un régime de signes non symboliques, qui défierait la notion d’arbitraire de la linguistique saussurienne. C’est ce qui permet à Pasolini d’énoncer une définition sémiologique du théâtre qui pourrait également valoir pour le cinéma :

Sémiologiquement le théâtre est un système de signes, non symboliques, mais iconiques, vivants, lesquels sont les signes de la réalité. Le théâtre représente un corps par l’intermédiaire d’un corps, un objet par l’intermédiaire d’un objet, une action par l’intermédiaire d’une action.
Naturellement, le système de signes du théâtre a ses propres codes, à un niveau esthétique. Mais à un niveau purement sémiologique, il ne diffère pas (comme le cinéma) du système de signes de la réalité11.

Le processus de contamination touche également le texte des tragédies. Certains personnages prononcent de véritables discours sémiologiques, tel que le Spectre de Sophocle dans Affabulazione, qui vient enseigner au personnage du Père ce qu’est le théâtre :

Mais je suis plus qu’un poète ; aussi/ les mots ne me suffisent-ils pas ; il faut que toi, ton fils, tu le voies comme au théâtre ; il faut que tu le complètes ce qu’évoquent les mots par sa présence à lui, en chair et en os, même quand, nu, il fait l’amour […] Le théâtre n’évoque pas la réalité des corps avec seulement les mots mais aussi avec ces corps-là, eux-mêmes12.

Pasolini réactive alors le topos du monde comme scène, mais non pour signifier que tout est illusion, fiction, et que tout le monde joue un rôle prédéterminé, comme dans le théâtre baroque. Au contraire, il indique que la relation spectaculaire est la modalité d’appréhension du réel partagée par tous. Le théâtre ne serait que le prolongement artistique du rapport commun au réel, et sert de modèle d’intelligibilité au processus de déchiffrement de la réalité.

Nous retrouvons ainsi dans ces efforts de théorisation du théâtre la question de l’identité du théâtre à la réalité, soulevée en introduction. Si nous en restons au niveau des corps et des objets, cette identité est le présupposé de tout théâtre, et ne pose pas problème. Mais, comme le dit dans le Spectre de Sophocle dans la citation précédente, le théâtre est également est un art des mots. La question de la vérité ne porte donc pas sur le visible de la représentation, mais se situe à l’endroit de l’articulation d’une parole écrite à ce visible. Il s’agit, pour Pasolini, de problématiser l’insertion de la parole dans le régime des signes visibles du théâtre, c’est-à-dire de penser la nature de la parole écrite dans son rapport à l’action. Pour cela, il va distinguer deux types de situation énonciative, toujours dans la pièce Orgie. Les deux protagonistes, l’Homme et la Femme, alors qu’ils évoquent avec nostalgie le temps de leur enfance, encore archaïque, vierge, pas encore souillé par les objets et comportements de la société de consommation, répètent inlassablement, et paradoxalement, que personne ne parlait alors, quand bien même ce monde résonnait de voix :

Homme : Mais elles te disaient quelque chose ? Quoi alors ?
Femme : Oh non, ce n’était que des voix. Elles disaient
Mon nom, c’est vrai, et montraient
Toutes les choses qui nous entouraient et dont nous nous servions
Dans ce monde : MAIS ELLES NE PARLAIENT PAS13.

Les deux types diffèrent donc de par leur rapport à la réalité. Ce que nous expliquent les personnages de Orgie, c’est que la voix est une composante ou un prolongement de l’action, qu’elle s’insère dans le schéma pragmatique de l’existence. La parole, au contraire, est disjointe de la réalité. Les voix, puisqu’elles sont des actes, relèveraient du langage performatif, et agiraient sur les corps, alors que les paroles seraient des « traductions par évocation »14, c’est-à-dire qu’elles supposent une distance à la réalité, ou, qu’elles désignent indirectement l’absence de la chose « traduite ». De plus, la voix est elle-même corps, matérielle, est un signe concret de la réalité, alors que la parole est, nous l’avons dit, est « instrument du rêve », immatérielle. La voix s’insère dans le régime des signes visibles, non symboliques, de la réalité, au contraire de la parole.

Par ailleurs, dans Affabulazione, L’Ombre de Sophocle, dans ce long passage métathéâtral déjà mentionné, explique que la parole théâtrale possède une double nature :

Au théâtre, le mot vit d’une double gloire,/nulle part il n’est à ce point glorifié. Pourquoi ? Parce qu’il est à la fois écrit et proféré. Il est écrit, comme le mot d’Homère/ mais dans le même temps, il est parlé, comme les mots/ que s’échangent entre eux deux hommes au travail,/ou une bande de garçon, ou des filles au lavoir, ou des femmes au marché – comme les pauvres mots, en somme, qui se disent tous les jours et s’envolent avec la vie:/ ces mots-là non écrits qui sont plus beaux que tout. Aujourd’hui, au théâtre, on parle comme dans la vie15.

Le Spectre de Sophocle, dans cette dernière phrase, pose comme principe théâtral une équivalence ou une similitude entre la parole proférée sur scène et la conversation quotidienne (le choix des images n’est pas anodin). Par conséquent, il n’y aurait aucune différence, dans l’Idée du théâtre pasolinienne, « entre la parole écrite du texte théâtral (écrite et donc littéraire) et parole dite de la représentation »16 et, in fine, la parole quotidienne. La parole quotidienne devrait donc de servir de modèle au texte écrit théâtral. En quelque sorte, le texte écrit doit faire résonner les voix dont parlent les personnages de Orgie, et non les paroles, disqualifiées à cause de leur éloignement de la réalité, de leur non-inscription dans les actions, pour répondre à l’exigence de la vérité.

L’ « Idée » du théâtre pasolinienne a pour principale caractéristique l’identité supposée du théâtre et de la réalité, au niveau des corps (actions, objets) comme au niveau des paroles. Rien ne distinguerait en fait les actions et les perceptions théâtrales de celle de la vie. En d’autres termes, le théâtre idéel est pensé par analogie avec la réalité. Mais Pasolini écrit son théâtre de la parole « en réaction »17, dit-il, aux réflexions sur le langage de la réalité. En effet, le Manifeste pour un nouveau théâtre développe une vision du théâtre très éloignée de la modélisation sémiologique idéale évoquée plus haut, voire même, il la récuse. Paradoxalement, le théâtre pasolinien s’écrit donc contre l’Idée du théâtre, en se dissociant radicalement du régime signifiant de l’expérience vécue et de l’action, en rompant net d’avec la sphère pragmatique de la réalité. Que ce soit dans le Manifeste ou dans les pièces, la parole est sacralisée, et dès lors, perd de sa naturalité. La parole dramatique pasolinienne est, en effet, à l’opposé du modèle de la parole quotidienne et commune. Les personnages s’expriment dans de longues répliques ou monologues, lyriques pour la plupart, qui font résistance à la compréhension immédiate. Pasolini avance comme motivation de ce choix esthétique la fonction sociale de son théâtre de la parole. Les représentations de ce théâtre sont qualifiées de rite culturel, durant lequel seront débattus des thèmes « typiques d’une conférence, d’une réunion idéale, ou d’un débat scientifique »18. Le théâtre de la parole aspire à être « échange d’opinions et d’idées »19, et d’ailleurs les représentations seront prolongées par un débat « totalement désintéressé et idéaliste, sur les problèmes posés et débattus (à canon suspendu !) par le texte »20. Or, la fonction sociale d’un tel théâtre induit, selon l’auteur, une nécessaire désincarnation de la représentation. Ici, ce n’est plus le langage physique de l’action qui détient la primauté, mais le sens des paroles. Le théâtre de la parole est certes une pratique artistique mais il est également une pratique intellectuelle, théorique (« les idées, qui sont les véritables personnages »21), et en cela, l’écoute est importante que la vue. Pasolini, d’ailleurs, précise que la visibilité de l’espace scénique peut compliquer la compréhension des paroles. Enfin, si l’Idée du théâtre supposait indirectement l’importance de l’espace, puisqu’elle s’appuyait avant tout sur le visible et sur la matière, le théâtre de la parole entame un mouvement d’abstraction de l’espace lui-même, proche de l’esthétique symboliste : « Le théâtre de la Parole » cherche son « espace théâtrale » non dans l’environnement concret mais dans l’esprit »22. Nous voyons donc en quoi l’éloignement de la réalité, tant regretté par les personnages de Orgie, est la conséquence inéluctable d’une telle conception de l’événement de la représentation.

Un autre trait important de l’esthétique pasolinienne, que nous appellerons la tentation lyrique, vient déjouer le modèle idéel du théâtre. Une première constatation évidente va dans ce sens : les tragédies sont écrites en vers libres. Mais plus fondamentalement, Pasolini semble considérer ses pièces comme de longs poèmes. Il n’avait plus alors publié de recueil de poèmes depuis Poésie en forme de rose, paru en 1964 et semblait traverser une crise poétique, s’interroger sur les possibles nouveaux mandats du poète et de l’intellectuel dans la société italienne des années soixante. Or, dans certains textes, il définit les six tragédies comme une réponse à cette crise, comme dépassement, inscrivant du même coup, ces textes théâtraux dans son corpus poétique : « ces tragédies sont écrites en vers, j’avais probablement besoin d’un prétexte, de personnes interposés, c’est-à-dire de personnages, pour écrire des vers »23. Dans une même perspective, il dit s’adresser prioritairement aux lecteurs de poésie, espérant que ceux-ci consisteront la majorité des spectateurs assistant aux représentations de ses textes, et va jusqu’à regretter l’absence de critiques littéraires (les critiques théâtraux n’étant pas suffisamment qualifiés pour apprécier la valeur de cette « poésie orale »24) lors de la première de Orgie. En outre, il écrit un prologue à Affabulazione, dans lequel intervient le Spectre de Sophocle, ici porte-parole déclaré de l’auteur, affirmant sans détour la poéticité du texte :

Je suis ici arbitrairement appelé à inaugurer/ un langage à la fois difficile et facile:/ difficile pour une société qui vit le pire moment de son histoire,/ facile pour les rares lecteurs de poésie./ Votre oreille devra s’y faire25.

Un tel avertissement liminaire perturbe le modèle intellectuel revendiqué avec force par le Manifeste. En effet, la tentation lyrique trouble les aspirations théoriques du théâtre de la parole, puisque la forme poétique vient concurrencer la primauté de la signification, la parole lyrique résiste à la compréhension. Il n’en reste pas moins que, même si cette parole lyrique est dite, prise en charge par des acteurs, même si elle devient orale le temps de la représentation, elle trahit la littérarité du texte théâtral. En d’autres termes, nous pouvons affirmer que la tentation lyrique pasolinienne induit l’impossibilité d’intégration de la parole dans le système des corps et de objets, puisqu’elle reste un langage littéraire qui évoque la réalité, un langage sans attache à la réalité. La parole théâtrale pasolinienne, sans commune mesure avec la parole quotidienne du fait de son intellectualité ou de sa littérarité (poéticité), défait l’agencement authentique du modèle théâtral idéel, elle ne peut s’accorder aux signes physiques de la réalité. Ayant conscience de cette déliaison, Pasolini fait le choix esthétique de la désincarnation scénique, du renoncement à la part littérale et concrète de la représentation.

L’irréalité du langage théâtral pasolinien ne tient pas seulement à son appartenance au champ littéraire, mais à la nature même de la langue. Pasolini élabore également une importante réflexion linguistique au sujet du théâtre. Ce qui est en jeu, c’est le choix de la langue. En effet, l’Italie se caractérise par la survivance de dialectes qui résistent, encore aujourd’hui au moins pour les régions périphériques, au processus d’uniformisation linguistique, qui a été entamé sous le fascisme et s’accentue dans les années 60 (du fait de l’influence de la télévision et de la société de consommation, selon Pasolini). Dans le Manifeste pour un nouveau théâtre, l’auteur italien fait une brève généalogie de l’italien fréquemment utilisé sur les scènes de la péninsule. Le théâtre pratiqué à l’époque constituerait une aberration dans le système linguistique italien en ce qu’il a adopté cette convention d’un italien parlé moyen, « qui n’existe pas »26, puisque, dit-il, un italien parlé à la prononciation normalisé n’a pas réussi à s’imposer parallèlement à l’uniformisation relativement rapide de l’italien écrit. Pasolini insiste à de nombreuses reprises sur l’échec de l’uniformisation de la prononciation. Les acteurs italiens utilisent donc une langue et une prononciation de pure convention, qu’ils apprennent lors de leur formation. Dans le même temps, existe un théâtre qui participe pas à cette aberration linguistique, le théâtre régional, dialectal, dont le principal représentant est le napolitain Eduardo De Filippo, un des rares hommes de théâtre que Pasolini respecte dans le paysage théâtral italien. Nous retrouvons dans cette distinction la question de l’authenticité. Nous avons d’une part, une langue dont Pasolini affirme, dans une enquête sur les raisons de la fracture entre les écrivains italiens et le monde du théâtre, paru en 1965 dans Sipario, antérieure donc à l’écriture des tragédies, qu’elle est « entièrement académique », qu’elle « n’a aucune trace de réalité »27. D’ailleurs, il l’invoque pour expliquer le refus des auteurs italiens d’écrire pour le théâtre (Moravia et Morante expriment la même idée dans leur réponse à l’enquête). D’autre part, le dialecte est pensé comme une langue purement instrumentale, pragmatique. Nous pouvons voir que cette opposition recouvre en quelque sorte l’opposition envisagée plus haut en voix et parole. D’un côté, nous avons une langue irréelle, de l’autre une langue de l’action. Le critère discriminant est encore une fois celui de l’identité à la réalité. Nous pourrions dire que la langue académique italienne, cet italien parlé, ne peut s’intégrer dans le système des signes physiques, peut s’accorder à des corps, au contraire du dialecte28. Mais Pasolini, qui a composé dans sa jeunesse, une pièce en frioulan I Turcs tal Friul (1947), ne choisit pour autant pas cette voie dialectale : il aspire à créer un théâtre national, qui peut être compris de tous, hors des frontières linguistiques régionales.

Pasolini se tourne alors pour résoudre cette aporie linguistique vers la langue écrite, c’est-à-dire littéraire. La littérarité de la langue lui permet de dépasser l’irréalité de la langue parlé moyen, en ce sens qu’elle assume son artificialité, son inauthenticité (elle ne s’origine pas dans la parole commune) et ne prétend pas être mimétique. Demeure la question de la prononciation : la décision sera laissée aux acteurs, qui devront éviter « tout purisme de prononciation ». Il apparaît assez clairement que ce choix linguistique est contraint : Pasolini est confronté au manque d’une langue, qui peut être comprise par le plus grand nombre d’italiens, et qui, dans le même temps, peut s’insérer dans le système des signes physiques et pragmatiques.

Que ce soit pour des raisons esthétiques ou pour des contraintes linguistiques, le théâtre pasolinien renonce à représenter la réalité, et s’écrit à partir d’un manque, d’un déficit de corps et d’actions. Pourquoi alors avoir forgé une « Idée » du théâtre, opposée à cette esthétique ? Et surtout pourquoi la réaffirmer sans cesse dans les pièces, alors que justement l’écriture de celles-ci la contredit ?

Nous avons dit que l’idée même de l’absence du corps et de l’action scénique dans l’œuvre pasolinienne témoignait d’une ligne de partage entre l’écriture théâtrale et la réalité, qu’elle signifiait la coupure de l’écriture d’avec la véracité et l’authenticité du monde des corps. Cette coupure va prendre une signification politique. Il n’est pas anodin que les six tragédies se déroulent majoritairement dans le monde bourgeois ou petit-bourgeois contemporain (même Pylade qui est sensé se dérouler en Grèce pendant l’Antiquité renvoie allégoriquement à la société occidentale). L’espace dramatique pasolinien est un espace bourgeois. Au contraire, la réalité que mentionnent les personnages de Orgie, le Spectre de Sophocle dans Affabulazione, comme Pylade dans la pièce homonyme, est bien particulière : celle d’un monde rural, archaïque, pauvre, hors de l’histoire. Même dans les réflexions métalinguistiques, pourtant à valeur générale, le monde évoqué se situe toujours dans un ailleurs. Le monde des corps et des actions peut être également celui de la transgression scandaleuse des interdits, sans qu’il soit montré sur scène : la villa de Orgie dans laquelle le couple se livre à des rituels sadomasochiste, la porcherie où Julian, le héros de Porcherie, en satisfaisant ses désirs zoophiles, s’exprime silencieusement par ses actes monstrueux. En quelque sorte, Pasolini intègre dans ses intrigues la contradiction formelle interne à l’écriture pour créer une polarisation politique. Le monde bourgeois et le monde des exclus (personnages prolétaires, transgressifs, pervers) s’opposent de par leur attribut : au premier revient la parole irréelle, immatérielle, au second le corps et l’action. Dans le même temps, le fait que soit seulement visible le monde de la parole rend manifeste le processus historique, déploré par l’auteur, d’homologation des comportements dans la matrice d’être-au-monde petite-bourgeoise. La parole ne se substitue pas seulement formellement aux corps, comme nous l’avons dit en introduction. Elle les fait disparaître également dans l’Histoire. Il est, par exemple, significatif que l’extrait de Orgie, cité plus haut, qui oppose parole et voix, est écrit au passé : le monde ne résonne plus de ces voix pragmatiques, il n’y a plus que de la parole. Parallèlement, les tentatives contemporaines de sortie de l’Histoire par la transgression échouent. L’écriture théâtrale est un art de l’affabulation : la parole tente d’intégrer les corps dans des récits, et partant, les recouvre de ses propres signes incorporels pour finalement les évacuer. Il y aurait donc comme une impossibilité historique et politique29 à montrer des actions et des corps sur la scène du théâtre. En évoquant (et non en montrant) la réalité des corps et des actions, Pasolini fait le deuil du monde archaïque tant aimé, comme de toute tentative subversive.

Parallèlement à cette dimension politique de la disjonction, cette question du deuil engage à repenser la spécificité de l’écriture théâtrale. Ainsi, l’évocation insistante d’un langage des corps, des actions, l’évocation quasi obsessionnelle d’un théâtre du monde, qui pourrait se passer de la parole, signifie, de façon détournée, que le théâtre ne peut s’écrire qu’en faisant le deuil de l’agencement immédiat et non-problématique des corps et des mots, que dans le manque du corps, que dans l’adieu à la réalité. Pasolini nomme ce travail du négatif à l’œuvre dans l’écriture théâtrale «tragédie linguistique »30.  En quelque sorte, Pasolini élabore une « Idée » du théâtre, comme il construit un monde archaïque idéal, selon laquelle il y aurait une continuité entre les actions et les paroles, il n’y aurait que des corps et des mots réels sur scène, pour mieux signaler l’immatérialité et l’irréalité de l’écriture dramatique, son mouvement de disjonction. L’utopie d’un théâtre qui pourrait se passer de paroles, qui aspirerait à sa propre suppression, comme celui dont rêve le Spectre de Sophocle,

Ah, je regretterai toujours/de ne pas avoir représenté plus souvent dans mes tragédies/cette volonté/ inanimée/ de la terre à revivre ; cette touche de rose,/ cette légèreté de l’air – des choses, pas des mots31

dessine en creux la spécificité de toute parole théâtrale, la déliaison d’avec le monde des corps, puisqu’elle ne s’origine pas dans le corps qui la profère. Par conséquent, il serait abusif de parler d’échec ou d’impuissance à propos de l’esthétique du théâtre de la parole. Il serait plus pertinent de voir en elle une hyperbolisation des traits distinctifs de la parole théâtrale, contemporaine, faut-il préciser, une mise à l’épreuve et une expérience des limites de sa spécificité. En d’autres termes, c’est en constituant un dispositif32 théâtral qui creuse, accentue les défauts (les impuissances) de la parole théâtrale, que Pasolini rend éclatante la véritable puissance, à la fois esthétique et politique, de cette dernière : la création d’un autre rapport des mots aux actions, la reconfiguration sensible de l’agencement de l’écriture et des corps.

Les acteurs du spectacle Orgie, mis en scène par l’auteur en novembre 1968 à Turin, se trouvaient dans une boîte blanche aux dimensions réduites dans laquelle ils étaient reclus, et débitaient leur texte sur un ton neutre, didactique. Leurs voix étaient amplifiées pour créer un effet d’objectivisation, proche de la désincarnation. Pasolini suivait ainsi les principes énoncés dans le Manifeste pour un nouveau théâtre. Les premières représentations furent catastrophiques, se déroulèrent sous les huées et les sifflets, suscitèrent au mieux l’incompréhension des spectateurs. Suite à cet échec cinglant, Pasolini abandonna sa tentative de réforme du théâtre, revenant à l’écriture poétique ou au cinéma. De cette unique expérience résulta l’idée que les textes dramatiques de l’auteur n’étaient pas théâtraux, qu’ils étaient injouables, idée sur laquelle les hommes de théâtre, italiens ou français, sont revenus aujourd’hui. L’outrance des réactions (provoquée sans doute également par la thématique sadomasochiste de la pièce) témoigne que l’esthétique théâtrale participe d’une certaine radicalité. Or, cette radicalité, nous semble-t-il, procède moins d’un supposé mouvement de dé-théâtralisation que de l’exposition maximale du régime contemporain de l’écriture théâtrale. Pasolini n’écrit pas contre le théâtre, il rend manifeste, théâtrale, la fracture tragique (au sens de la « tragédie linguistique » dont il parle) opérant entre l’écriture et la scène.

Notes de bas de page numériques

1 Ces représentations eurent lieu en novembre et décembre 1968, au Deposito d’Arte Presente de Turin. Il s’agit de l’unique mise en scène de Pasolini.
2 Pier Paolo Pasolini, Prologo [dal programma di sala], in Teatro, Milano, Mondadori, “I Meridiani”, 2001 p.319. Nous traduisons.
3 Pier Paoli Pasolini, Manifesto per un nuovo teatro, in Saggi sulla letteratura et sull’arte, Milano, Mondadori, “I Méridiani”, vol. 2, 1999, p.2485. Nous traduisons.
4 Pier Paolo Pasolini, Orgie, in Théâtre, Arles, Actes-Sud, “Babel”, 1995, p.423.
5 Pier Paolo Pasolini, Orgie, p.424.
6 Il est possible de rapprocher ce postulat théorique pasolinien du nombre excessivement limité de didascalies dans le corpus des six tragédies, auquel on réduit souvent l’œuvre théâtral de Pasolini. Cette quasi-absence apparaît comme un choix significatif au regard des textes dramatiques antérieurs de l’auteur, qu’ils soient écrits durant la jeunesse de l’auteur ou au début des années 60, lesquels abondent en didascalies. Dans la pièce 1946 !, Pasolini écrit de longs passages didascaliques pour décrire un dispositif scénique très précis (projections d’images fixes et animées, jeux de lumières, musique off, décors). Nous pourrions alors dire que la quasi-absence des didascalies dans les six tragédies induit également un dispositif scénique particulier. Voir Pier Paolo Pasolini, 1946 ! Histoire intérieure, in Théâtre 1938-1965, Besançon, Les Solitaires intempestifs, 2005, pp.235-327.
7 Jacques Rancière, Le Destin des images, Paris, La Fabrique, 2003, p.101.
8 Pier Paolo Pasolini, Manifesto per un nuovo teatro, p.2485.
9 Pier Paolo Pasolini, Prologo, pp.318-319.
10 Pier Paolo Pasolini, L’expérience hérétique, Paris, Ramsey, 1989,  p.141.
11 Pier Paolo Pasolini, Manifesto per un nuovo teatro, p.2497.
12 Pier Paolo Pasolini, Affabulazione, in Théâtre, p.176.
13 Pier Paolo Pasolini, Orgie, pp.400-401.
14 Pier Paolo Pasolini, L’expérience hérétique, p.121.
15 Pier Paolo Pasolini, Affabulazione, p.176.
16 Pier Paolo Pasolini, L’expérience hérétique, p.124.
17 Pier Paolo Pasolini, Prologo, p.319.
18 Pier Paolo Pasolini, Manifesto..., p.2499.
19 Pier Paolo Pasolini, Manifesto..., p.2487.
20 Pier Paolo Pasolini, Manifesto..., p.2483
21 Pier Paolo Pasolini, Manifesto..., p.2484.
22 Pier Paolo Pasolini, Manifesto..., p.2500.
23 Jean-Michel Gardair, « Un discorso di Pasolini sul teatro e sulla poesia », Il Corriere del Ticino, 13 novembre 1971. Nous traduisons.
24 Voir A teatro con Pasolini, in Teatro, p.347.
25 Pier Paolo Pasolini, Affabulazione, p.123.
26 Pier Paolo Pasolini, Manifesto..., p.2490.
27 Pier Paolo Pasolini,  «Gli scrittori e il teatro», in Sipario, anno XX, n°229, mai 1965, repris in Gualtera De Santi, Massimo Puliani (sous la direction de), Il mistero della parola, Rome, Il Cigno, 1995, p.96 (nous traduisons). Nous pouvons également faire référence à une description du monde théâtral que Pasolini fait pour un journal polonais en 1962, restée inédite, dans laquelle il parle de la langue théâtrale comme d’une langue « inhumaine, c’est-à-dire privée de toute nécessaire concrétude. » (Pier Paolo Pasolini, Il teatro in Italia, in Saggi sulla letterature et sull’arte, p.2362.)
28 Voir également Jean-Michel Gardair, « Un discorso di Pasolini sul teatro et sulla poesia » : «La convention théâtrale est totalement fausse. Donc, qu’un acteur doive dire “Donne-moi le chapeau, Pietro”, ou qu’il doive lire une poésie de Leopardi, le problème reste le même. »
29 Il faut également mentionner l’importance du motif récurrent du génocide dans les six tragédies, qui sert d’ailleurs de schème d’intelligibilité de la société de consommation. La fin de Calderon amène à penser que le camp est devenu le paradigme de nos sociétés modernes. Dans les deux cas, il est question de disparition des corps, selon Pasolini.
30 Pier Paolo Pasolini, Prologo, p.319.
31 Pier Paolo Pasolini, Affabulazione, p.178.
32 Dispositif est à entendre ici au sens que lui donne Giorgio Agamben : « j’appelle dispositif tout ce qui a, d’une manière ou d’une autre, la capacité de capturer, d’orienter, de déterminer, d’intercepter, de modeler, de contrôler et d’assurer les gestes, les conduites, les opinions et les discours des êtres vivants. » in Giorgio Agamben, Qu’est-ce qu’un dispositif ?

Pour citer cet article

Stéphane Hervé, « Le deuil de la réalité : l’écriture théâtrale selon Pier Paolo Pasolini », paru dans Loxias, Loxias 18, mis en ligne le 04 juillet 2007, URL : http://revel.unice.fr/loxias/index.html?id=1787.

Auteurs

Stéphane Hervé

ATER en Etudes Théâtrales, département des Arts du Spectacle, à l’université de Haute-Bretagne, Rennes 2. Thèse en cours sur « Théâtre de la cruauté et politique, Rainer Werner Fassbinder et Pier Paolo Pasolini », sous la direction de Didier Plassard. Membre du laboratoire « La Présence et l’image », Rennes 2