théâtre de boulevard dans Loxias
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Loxias | Loxias 14 | Doctoriales
La piece bien défaite : physique et pragmatique du drame
Le théâtre de boulevard est souvent identifié comme un sous-genre de la comédie, fondé sur le modèle dramaturgique de la « pièce bien faite », qu’on a érigée en physique du drame : une force est lancée jusqu’à épuisement contre divers obstacles. Cependant, le boulevard possède aussi un versant sérieux, dont l’ambition est d’agir avec force sur le public, en lui proposant des intrigues cruelles. Le récit est l’une des armes de cette entreprise avant tout pragmatique. Or, l’utilisation de séquences narratives conduit à l’altération profonde de la pièce bien faite, de sorte que les formes dramatiques hybrides qui en découlent pourraient être désignées par l’expression de « pièce bien défaite ». Trois exemples illustrent cette tendance : le drame concentré, le drame romanisé et le drame décomposé. The théâtre de boulevard is often identified with second-class comedies, a sub-sort based on the dramatic model of the « well-made play », itself established as a physical type of drama : a force is set in motion until worked out by various obstacles. The théâtre de boulevard however has a serious face the ambition of which is to act strongly on the audience through the exhibition of cruel plots. The narrative is one of the weapons of that enterprise, above all pragmatic. The use of narrative sequences leads to a deep alteration of the well-made play so that the resulting hybrid dramatic forms might be referred to as « well-unmade plays ». Three examples illustrate that dramatic trend : the concentrated drama, the novelized drama and the dismantled drama.
Loxias | 57. | I.
Faire table rase des préjugés contre le boulevard : l’exemple de Marcel Pagnol
Cet article s’intéresse au genre du théâtre de boulevard à partir du cas de Marcel Pagnol. Nous montrerons que les critères définitionnels du boulevard sont moins esthétiques que topographiques. La séparation entre le boulevard et le reste de la production dramatique se fait dès lors moins nette que l’opposition entre théâtre privé et public ne le laisse présager. Pagnol souhaite que ses pièces s’adressent aux classes populaires et pas seulement bourgeoises ; il renoue ainsi avec les origines du genre. Cette ouverture vers un public plus diversifié n’implique pas nécessairement une rénovation esthétique qui brave le conformisme bourgeois. Pagnol est en quête de la respectabilité de la pièce bien faite en tentant de situer le boulevard dans le sillage de la comédie de mœurs moliéresque. This article takes an interest in the form of théâtre de boulevard from the case of Marcel Pagnol. We will show that definitional criteria of boulevard are less aesthetic than topographical. The division between boulevard and the rest of the dramatic production is then less clear than the opposition between private and public theater can lead to predict. Pagnol wishes that his plays are aimed to lower classes and not only to the higher; thus he revives the gender’s origins. This widening of the public spectrum does not necessary mean that an aesthetic reform will defy bourgeois’ conformity. Pagnol goes in search of the respectability of a well-done play, trying to place boulevard in the wake of Molière’s comedy of manners.
La valse des étiquettes : références, clichés, stéréotypes et dramaturgie boulevardière chez Françoise Dorin
Dans son Dictionnaire du théâtre, Michel Corvin affirme que « L’ambition – réalisée – de Dorin est de donner un second souffle au théâtre de Boulevard ». L’un des moyens privilégiés de cette refondation est la métathéâtralité. La dramaturgie de Françoise Dorin est en effet puissamment réflexive, à la fois brillante et consciente, même si le premier terme tend à l’emporter largement sur le second. Maîtrisant toutes les subtilités de la pièce bien faite, l’auteur exhibe et commente les ficelles et recettes du répertoire dans un dédoublement jouissif. Elle présente le genre à travers une collection de clichés – dramaturgiques et/ou critiques – et de stéréotypes qui contribuent à figer son image : au mieux, un genre clair, brillant, virtuose, qui requiert tout le savoir-faire de son auteur ; au pire, un théâtre digestif, convenu, périmé. Ce faisant, elle joue sur les deux tableaux de l’héritage et de l’ironie ; elle fait jouer les étiquettes autant qu’elle interroge leur pertinence. Elle embrasse le boulevard mais c’est pour le rafraîchir.
« Il n’y a pas de bon théâtre sans caractères ». Rencontre avec Pierre Barillet
“Entretien réalisé par Claire Poirson Pierre Barillet entame sa carrière d’auteur dramatique en 1945 avec Les Héritiers1, drame sombre d’inspiration mauriacienne, avant de co-signer, entre 1950 et 1994, une vingtaine de comédies avec Jean-Pierre Gredy. Certaines de leurs pièces connaissent un triomphe : Le Don d’Adèle, Folle Amanda, ou encore Potiche, adaptée au cinéma en 2010 par François Ozon, avec Catherine Deneuve en tête d’affiche. Pour ne citer que son théâtre2, Pierre Barillet écrit six pièces qu’il signe seul, entre 194...”