politique dans Loxias


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Loxias | Loxias 3 (févr. 2004) | Fondements mythiques des nations

Mythes d’origine, fondation nationale et résurgences contemporaines : le cas de l’Italie

Tout peuple a ses mythes d’origine qui, souvent, changent au gré des circonstances historiques. Sans doute cette instabilité des mythes d'origine pourrait-elle fournir quelques arguments permettant de conclure à une certaine contingence, mais la prolifération que suscite cette instabilité est aussi la preuve d'un fabuleux dynamisme et, par là, de la nécessité du mode de pensée mythique. Si bien que l’on peut poser que toute fondation de cité, de royaume ou d'empire appelle un fondement mythique. Et il n’en va pas différemment pour les nations modernes qui, quand bien même elles s'organiseraient autour de l'idée de l'individu et des valeurs individualistes, ne peuvent, malgré tout, se passer d'un lien social qui autorise et fonde la vie collective. Si, comme bien d’autres pays, l'Italie a revendiqué des origines à la fois païennes et chrétiennes, c'est d'une part, autour d'une ville, Rome, et non pas de l'Italie tout entière, que se cristallisent les mythes d'origine et, d'autre part, plutôt que dans la juxtaposition, c'est dans la succession qu'ils s'organisent.

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Loxias | Loxias 13 | I.

Le teatro-narrazione italien, espace d’hybridation générique au service d’un projet civique

À partir du milieu des années 1990 émerge en Italie un courant de théâtre nommé teatro-narrazione, que l’on peut traduire en français par théâtre de narration ou théâtre-récit, porté par des artistes toujours plus nombreux et des générations variées. Cette forme théâtrale épique replace au cœur du dispositif théâtral l’art de l’acteur-narrateur et l’objet que sa parole et son corps engendrent, le récit. Le teatro-narrazione hérite de nombreux modèles ; il peut en particulier être considéré comme un avatar contemporain du théâtre de monologues de Dario Fo, et de son projet culturel et politique. Les récits du teatro di narrazione puisent leurs racines et leurs modes de fonctionnement dans la tradition fabulatoire populaire des conteurs-narrateurs, mais utilisés pour relater des évènements d’histoire et de mémoire collective tragiques, ils sont aussi travaillés sur le mode de la reconstitution documentaire, assumant une dimension civique et politique. Tous les phénomènes d’hybridation générique dont joue le teatro-narrazione contribuent à soutenir ce projet civique, et à lui conférer autant d’épaisseur que de richesse.

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Loxias | Loxias 23 | Programmes de littérature des concours 2009

Lorenzo, un enfant du siècle à la Renaissance

Le personnage de Lorenzo hérite de nombreux symptômes du « mal du siècle » romantique vécu et analysé par Musset : désœuvré et désenchanté, Lorenzo se perd dans la débauche et se dévoie dans un assassinat politique qui n’est qu’un meurtre crapuleux. On peut ainsi considérer la Florence de 1537 comme une métaphore transparente du Paris de 1830 : le déplacement d’époque et de lieu permet de mettre en perspective une maladie morale qui dépasse son temps et préfigure le nihilisme.

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Loxias | Loxias 30 | Doctoriales VII

Le rôle politique des femmes dans Aliscans

Au XIIe siècle, le royaume de France est une société qui cherche un nouvel équilibre ; peu à peu, les règles féodales se codifient et contribuent à la lente formation d’un nouveau corps qui ne sera pleinement constitué qu’au XIIIe siècle : la noblesse. Tandis que le droit gagne progressivement la France depuis son berceau italien, où l’on redécouvre et l’on glose les textes du droit romain, la théologie politique – notamment à travers le Policraticus de Jean de Salisbury – accroît son influence et fait du roi le « ministre de Dieu ». L’épopée constituant un terrain très propice à la célébration des valeurs et idées collectives, elle s’enrichit de ces thèmes et de leurs problématiques inhérentes. C’est ainsi que des chansons de geste telles qu’Aliscans présentent, en plus de leurs intérêts proprement littéraires, des enjeux juridiques en lien avec les préoccupations de l’époque qui les a vu naître. Le poète ne se contente évidemment pas, dans sa chanson, d’une simple transposition du droit en vigueur ; il va plus loin en plaçant les femmes au centre de la scène juridique et politique du récit qu’il développe. Ainsi, de La Chanson de Guillaume à Aliscans, le personnage féminin acquiert une autonomie, une consistance et une influence que l’on peine à retrouver dans d’autres genres littéraires du XIIe siècle et qui sont très largement absentes de la littérature renaissante.

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Loxias | Loxias 38. | Doctoriales IX

La maladie mentale dans les écritures dramatiques anglophones contemporaines

Il s’agira d’évoquer les spécificités de la maladie mentale dans le théâtre anglophone contemporain, c’est-à-dire principalement au Royaume Uni et en Amérique du nord. Avec l’évolution de la médecine, la folie a disparu des nosographies au profit des maladies mentales qui regroupent diverses pathologies. Le théâtre anglophone s’est emparé de cette thématique comme d’un medium pour aborder diverses questions politiques sensibles, la parole étant supposée être plus libre chez un « fou », les possibilités dramaturgiques sont plus grandes ainsi que la portée du propos, notamment en ce qui concerne l’Histoire. This paper examines the specificity of mental illness in the contemporary English-speaking theatre, mainly in the United Kingdom and North America. With the advances of medical knowledge in the mid-20th century, the more obsolete term "insanity" has been replaced by the more modern concept "mental disorder" which regroups a wide spectrum of different pathologies. English speaking theatre-makers soon seized upon the theme as a medium for sensitive political issues. Indeed, the supposedly greater freedom of speech amongst "insane" people interestingly adds greater dramaturgical possibilities and scopes, particularly regarding History.

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Le problème de « l’écrivain au fouet » : Die Blendung, d’Elias Canetti

Dans Die Blendung (écrit en 1930, publié en 1935), Canetti met en scène un misanthrope qui s’isole dans sa bibliothèque : à travers ce personnage, il règle certains de ses comptes avec Karl Kraus, le grand écrivain et publiciste viennois qui l’a profondément marqué. Les critiques ont en effet montré que Peter Kien et Karl Kraus ont en commun d’être « sans-dialogue » (« dialoglos ») (G. Stieg). Pourtant, dans un volume de son autobiographie, Jeux de regard (1985), Canetti affirme rétrospectivement que son roman reste influencé par Kraus : le romancier s’y pose en effet en « écrivain au fouet » (« Schreiber mit der Peitsche ») châtiant ses créatures. Or Canetti, tout en assumant une éthique de la « responsabilité » qui hérite de Kraus, s’oppose désormais à toute position surplombante de l’écrivain par rapport au monde. Il n’est cependant pas sûr que l’œuvre tardive de Canetti se soit vraiment dégagée de l’union entre morale et écriture, qui fonde l’écriture satirique.

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Loxias | 55 (déc. 2016). | I.

Politique de Lorca. Autour du Romancero gitano

L’indignation contre l’injustice sociale et la violence armée est une constante de Lorca depuis ses premiers textes jusqu’à ses déclarations publiques des années 1935-1936. En 1928, le Romancero gitano relève d’une protestation sourde contre la domination et le conservatisme social. En particulier, les gendarmes du « Romance de la Guardia civil española », incarnation abusive de l’autorité espagnole, sont les représentants du roman national contre lequel Lorca entend faire œuvre patriotique. Censeurs et destructeurs, ils apportent néanmoins une beauté sombre et sans égal, un contrepoint aux images délectables (sucrées, brillantes) du romance. De ce point de vue, la lutte des gitans et des gardes civils reprend l’opposition du créateur avec son duende. Et ce n’est pas la moindre des provocations de ce poème que de faire de la garde civile une image du démon gitan, et de gitaniser les gardiens de l’ordre bourgeois andalou.

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Loxias | 71. | I.

Boileau politique ? Du motif de la « ville » à la « nation des poètes » (Discours sur la satire)

Il s’agit ici d’aborder la question d’une éventuelle politique du poète. Boileau imite à plusieurs reprises le motif horacien du retrait de la ville comme espace urbain et symbolique à la fois. Il approfondit pourtant ce thème de la situation du poète dans l’espace social en lui conférant une dimension politique. Cet aspect lui a été en partie imposé par les réactions hostiles aux Satires de 1666 qui l’accusaient de représenter un danger pour l’État. On interroge ici la profondeur de sa réponse et on se demande ce que recouvre exactement le geste du satirique qui se prononce pour chasser les mauvais poètes de la cité. This paper deals with the question of a possible poet’s political intention. Boileau repeatedly imitates the horacian motif of the withdrawal from the city as an urban and symbolic space. However, he deepens this theme of the position of the poet in the social space by giving it a political dimension. This aspect was partly imposed on him by the hostile reactions to the Satires of 1666, which accused him of being a danger to the state. Here we question the depth of his response, and wonder what exactly is meant by the gesture of the satirist who speaks out to drive bad poets out of the city.

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« Or j’ai joué. » La politique dans l’œuvre de Jean Genet

La question du politique traverse l’ensemble de l’œuvre de Jean Genet, dans laquelle il assume la position marginale que la société lui a assignée. Une position qu’il a préservée en travaillant sa solitude, comme une manière de déjouer toute compromission sociale, mais surtout politique. C’est ainsi qu’il place au centre de son œuvre l’articulation – toujours à inventer – entre le politique et le poétique, où la révolte, le jeu et l’amour, occupent une place privilégiée. The question of politics runs through the whole of Jean Genet’s work, in which he assumes the marginal position assigned to him by society. A position that he has preserved by working on his solitude, as a way of thwarting any social, but above all political, compromise. And sog so the major component of his work is the articulation – still to be invented – between the political and the poetic, where revolt, play and love occupy a privileged position.

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Loxias | 75. | I.

La Nouvelle Héloïse, roman politique

La dimension politique de La Nouvelle Héloïse est manifeste : affirmée dès la préface, elle s’exprime particulièrement dans les lettres qui décrivent la bonne organisation de la petite société de la famille Wolmar. Mais y a-t-il une pensée politique du roman ? Comment ces discours appartiennent-ils à une trame narrative qui les suscite et dans laquelle ils prennent sens en même temps qu’ils l’éclairent ? Quel est le sens politique de ce scénario romanesque qui prend son point de départ dans la différence irréductible des conditions dans une société d’ordre ? L’impossible amour de la noble Julie et du roturier Saint-Preux pourrait être un lieu commun romanesque ; il s’agit d’abord un authentique problème politique. La conversion de Julie, et de tout le roman, à partir du mariage de l’héroïne, consiste en un effort pour passer du refus à l’acceptation de cette différence irréductible des conditions et à travailler autant que faire se peut à produire les modalités objectives de son acceptation subjective. Cette pensée politique du roman, délibérément conservatrice, est cependant travaillée par un doute que toute la fin exprime : il n’est pas du tout certain que le domaine de Wolmar soit seulement vivable.

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Les Regrets de Du Bellay : une écriture de la véhémence ?

La véhémence est une qualité du style qui donne force et énergie au discours. Notre article met en évidence son importance dans les sonnets des Regrets, à l’opposé des principes de simplicité et de modération pourtant affichés par le poète. Il étudie les différentes modalités énonciatives, poétiques et stylistiques de la véhémence dans le recueil. Il s’interroge enfin sur ses enjeux poétiques, éthiques et politiques, et met ainsi en évidence la dimension fondamentalement agonistique de l’écriture dans Les Regrets. Vehemence is a quality of style that gives force and energy to the discourse. Our article highlights its importance in the sonnets of the Regrets, in contrast to the principles of simplicity and moderation that the poet claims. It studies the different enunciative, poetic and stylistic modalities of vehemence in the volume. Finally, it examines the poetic, ethical and political issues at stake, thus revealing the fundamentally agonistic dimension of the writing in Les Regrets

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Loxias | 76. | I.

Témoignage et allégorie : écritures en miroir

Dans 1984 (1949), George Orwell narre le destin abject de Winston Smith comme Franz Kafka avait narré celui de Josef K. dans Le Procès (1925) ou Evgueni Zamiatine, celui de D-503 dans Nous (1920) : du point de vue de son personnage de proscrit. Aux yeux des prosateurs et prosatrices du xxe siècle, la focalisation interne a pu ainsi apparaître comme un dispositif narratif éthique pour représenter dans une fiction les nouvelles formes de violence sociale et politique que subissent les individu·es. De fait, elle ne permet pas seulement de mieux faire saisir le caractère intolérable des violences (telles qu’elles sont vécues), mais également de mettre à l’épreuve le potentiel protestataire des individu·es. L’invention d’Orwell vise à nous entraîner avec son personnage « dans le monde labyrinthique de la doublepensée » qui, sous un régime totalitaire qui a atteint la perfection, condamne les individu·es à l’autodestruction. La résistance de Winston Smith se concentre alors dans le refus d’un tel acte par lequel un esprit individuel se prive de sa capacité à connaître et à juger. Spécialement, le protagoniste de 1984 rappelle celui de Homage to Catalonia (1938), à savoir Orwell lui-même qui, comme lui, sentait « le sol s’ouvrir sous ses pieds à l’idée que le mensonge se transforme en vérité ». Au cœur de l’enquête de cet article, se trouve un questionnement sur les fils qui se tissent du témoignage de la révolution espagnole à l’allégorie de 1984. Testimony and Allegory: Mirroring Writing Practices In Nineteen Eighty-Four (1949), George Orwell narrates the despicable fate of Winston Smith in the same way that Franz Kafka narrates the fate of Josef K. in The Trial (1925) and Yevgeny Zamyatin, that of D-503 in We (1920): from the point of view of his outcast character. In the eyes of 20th-century prose writers, internal focus could thus appear as an ethical narrative device for representing in fiction the new forms of social and political violence to which individuals are subjected. In fact, it not only makes it possible to better grasp the intolerable nature of violence (as it is experienced), but also to test the protest potential of individuals. Orwell’s invention aims to take us with his character “into the labyrinthine world of doublethink” which, under a totalitarian regime that has reached perfection, condemns individuals to self-destruction. Winston Smith’s resistance is then concentrated in the refusal of such an act by which an individual mind deprives itself of its capacity to know and judge. Especially the protagonist of Nineteen Eighty-Four is reminiscent of the protagonist of Homage to Catalonia (1938), namely Orwell himself, who, like Winston, felt “the abyss opening beneath [his] feet at the thought of lies becoming truths”. At the heart of this paper’s investigation is a questioning of the threads that weave from the testimony of the Spanish revolution to the allegory of Nineteen Eighty-Four.

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Loxias | 82. | I.

Les représentations politiques méditerranéennes selon Margaret Mazzantini, Francesca Melandri et Louis-Philippe Dalembert

Tantôt dessinés en filigrane, tantôt soulignés, les personnages d’hommes politiques sont omniprésents dans le projet scriptural de la littérature qui traite des migrations contemporaines. Dans la littérature liée à la Méditerranée du début du XXIe siècle, les écrivains prennent souvent une posture critique vis-à-vis des personnages politiques. En français le Haïtien Louis-Philippe Dalembert dans Mur Méditerranée (2019) et en italien Margaret Mazzantini dans La Mer, le matin (2011) et Francesca Melandri dans Tous, sauf moi (2017) dénoncent en particulier une diplomatie mortifère dans laquelle les migrants deviennent une arme de négociation. Dans ce corpus, Mouammar Kadhafi, homme politique sulfureux, est peint de manière négative, parfois en tant que chef suprême des passeurs entre la Libye et l’Italie. Des hommes d’État occidentaux n’ont pas non plus un traitement de faveur au regard de leur implication dans les négociations entre l’Union européenne et Kadhafi dans ce qui est communément présenté comme une « crise migratoire ». Quels sont les enjeux d’une telle représentation négative des hommes politiques dans notre corpus ? A-t-on affaire à des romans à thèse ? Et comment l’écrivain s’empare-t-il du politique dans la littérature exilique pour intervenir dans un débat sociétal brûlant ? Sometimes drawn implicitly, sometimes underlined, the characters of politicians are omnipresent in the scriptural project of migrant literature. In literature related to the Mediterranean at the beginning of the 21st century, writers often take a critical stance concerning the political figures. In French the Haitian Louis-Philippe Dalembert in “Mur Méditerranée” (2019) and in Italian Margaret Mazzantini in “Mare al mattino” (2011) and Francesca Melandri in “Sangue giusto” (2017) denounce this deadly diplomacy in which migrants become a weapon of negotiation. Muammar Gaddafi, a sulphurous politician, is portrayed in a negative way, sometimes as the supreme leader of the smugglers between Libya and Italy. Western statesmen also do not get preferential treatment about their involvement in the negotiations between the European Union and Gaddafi in what is commonly presented as a “migration crisis”. What are the issues of such a negative representation of politicians in our corpus? Are we dealing with “Romans à these”? And how does the writer seize politics in exilic literature to intervene in a burning societal debate?

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