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Adelaide Pagano  : 

Quelle méthodologie pour une édition critique numérique d’un texte imprimé du dix-huitième siècle ? Le cas du Fragment sur Shakespeare de Martin Sherlock

Résumé

Les éditions critiques numériques sont de plus en plus nombreuses dans le monde académique. Cependant, des points restent obscurs et peu clairs concernant leur nature et les processus mis en jeu dans leur réalisation. Cet article, loin d’avoir l’ambition de résoudre les nœuds liés à ce nouveau champ de recherche, offre un panoramique des réflexions apportées au champ des éditions critiques numériques jusqu’à aujourd’hui. En outre, en partant d’un discours plus large sur les éditions numériques, ce travail porte une réflexion sur les possibilités et les contraintes de porter en ligne une édition critique de l’œuvre de Martin Sherlock, Fragment sur Shakespeare (1779), en présentant aussi cet auteur méconnu et le contexte de réception de son œuvre.

Abstract

Scholarly Digital Editions (SDE) are nowadays a fertile ground for a newer approach to the texts. However, their nature is not yet defined and many questions about practices and methodologies are posed. This study has not the ambition to solve those pending issues but provides an overview of the theories and studies about the SDE until this moment. Moreover, the realization of a SDE of Martin Sherlock’s work Fragment on Shakespeare (1779) could be a prime example of the difficulties and the future possibilities of the digital field.

Index

Mots-clés : édition critique , numérique, philologie, Shakespeare, Sherlock (Martin)

Chronologique : XVIIIe siècle

Plan

Texte intégral

1 

Édition critique : de l’encre aux pixels

2L’ampleur de la problématique ontologique concernant les éditions critiques numériques, est tellement vaste que les pionniers des digital humanities, encore aujourd’hui, n’arrivent pas à les cerner dans un cadre univoque, partagé et clair1.

Évolution des conceptions philologiques

3L’édition critique est un travail de critique textuelle qu’il faut penser comme une discipline visant à comprendre la genèse et l’évolution d’une œuvre littéraire, en identifiant ses formes et en étudiant ses transformations dans le temps2. Transformation est, en fait, le mot qui semble le plus intéressant par rapport aux nouvelles façons de transmission des savoirs : le document comme objet est un élément qui change au fur et à mesure des éditions, des réécritures. Il subit des révisions, des ajustements, des réécritures quelle que soit sa nature. Ainsi comme le document/objet se transforme, sa description critique3 aussi a subi des transformations dans le temps : l’édition critique imprimée a vu, ces dernières trente années, un changement progressif du medium, en passant de l’encre aux pixels, de l’objet libre au médium immatériel du web4. Il ne s’agit pas d’un simple changement d’instrument utilisé par les spécialistes, il s’agit plutôt d’une nouvelle conception de l’édition critique en soi et, surtout, une nouvelle façon de penser l’organisation d’un travail de recherche ecdotique – repenser le paradigme de l’étude philologique qui conserve, tout de même, le but final des éditions imprimées, c’est-à-dire celui de donner une version du texte qui soit vérifié, fiable, et qui respecte les volontés de l’auteur. L’édition critique imprimée est organisée sur la base d’un discours structuré qui a été standardisé au cours des siècles et ces éditions « are constituted, as discourses, by the editor, or a team of editors, who provide as well as guarantee the edition’s coherence and intellectual focus5. »

4Bien que l’approche de la recherche ecdotique ait changé, il est vrai que la méthode de recherche par rapport au texte reste la même que pour les éditions imprimées : la méthode lachmanienne, par exemple, théorisée par Karl Lachman à la moitié du dix-neuvième siècle, reste à la base de la recherche philologique. Le travail, prévoyant une phase initiale de recherche des témoins (recensio) et leur confrontation (collatio) afin de reconstruire un ordre entre eux (stemma codicum) pour terminer avec la publication du texte (constitutio textus) reste toujours à la base de chaque édition critique numérique fiable. Si l’édition critique imprimée prévoit une introduction au texte, un apparat critique enregistrant les variations significatives, et une description des variations linguistiques significatives, l’édition critique numérique utilise ces outils comme une base de départ permettant plusieurs niveaux d’étude du texte.

5La méthodologie de recherche philologique étant la même pour les deux éditions, il serait facile de penser l’édition critique comme une simple numérisation des pages : pour éviter cette confusion Patrick Sahle a bien postulé que « l’édition critique numérique ne peut pas être imprimée sans subir une perte significative des contenus et des informations6. » Ce postulat nous semble un bon point de départ pour comprendre les potentialités du medium digital et de sa différence avec les versions papiers : la représentation du texte, sa juxtaposition avec les différentes versions prises en considération dans l’étude, les outils pour sa lecture et son décodage, qui ne seraient pas possibles dans une édition papier, sont presque tenues pour acquises dans une édition numérique. Il est bien normal, par exemple, de trouver une édition critique numérique supportée par une représentation du facsimilé7. De ce qui rend l’univers numérique si séduisant pour les chercheurs est la possibilité de créer des outils de lecture personnalisés pour chaque œuvre critique. Les outils de lecture pourraient être une simple visualisation sur écran des textes ou une lecture plus efficace des variations : il s’agit d’instruments de recherche qui permettent une lisibilité à la fois plus simple et plus interactive.

6L’interactivité du texte est une autre composante essentielle des éditions numériques, et celle qui pose plusieurs questions. Ayant dépassé les deux dimensions de la feuille et les limites spatiales que posent l’objet-livre, les éditions sur écran deviennent une sorte de table de travail pour le lecteur, où toutes les options de lecture et décodage du texte créés pour le texte deviennent, à leur tour, des outils de travail. L’utilisateur/lecteur est, ainsi, appelé à approfondir la recherche, sans pour autant s’arrêter à ce qu’il lit sur l’écran. Dans cette perspective, l’édition critique numérique semble être bien différente de l’édition sur papier. Le livre publié, contenant l’étude critique d’un texte, est, par sa nature, un objet bien défini, une étude complète, c’est-à-dire un produit achevé. En revanche, les humanistes digitaux semblent concorder sur la nature ouverte des œuvres critiques en pixel, qui constitue un processus d’analyse donnant, en même temps, des points de départ pour d’autres recherches ou pour changer, dans le futur, le texte avec de nouvelles recherches.

Se méfier du web : quelles contraintes pour les éditions critiques numériques

7Lors d’un colloque sur les Digital Humanities, qui a eu lieu récemment à l’Università degli studi de Milan8, Paola Italia9 a bien analysé le problème du degré de fiabilité des éditions critiques en ligne. Le web, parce qu’il est un espace extrêmement fluide, démocratique et accessible, devient un terrain très fertile pour toute sorte de travail ecdotique, qui ne reste plus une activité enfermée derrière les portes du savoir académique. La démocratisation du savoir, possible grâce au partage des connaissances perpétuelles, nous a amenés à assister à la création d’éditions critiques sur le web, dites collaboratives. Bien sûr, il existe des éditions collaboratives qui sont cernées dans le cadre de la recherche académique10, cependant, à côté de celles-ci on trouve de plus en plus d’éditions ouvertes aux utilisateurs du web, qui pourraient prendre part à une activité de transcription d’un document historique en ligne, sans pour autant avoir les compétences et les connaissances nécessaires ; en d’autres termes, pour ces types d’édition critique numérique, il n’est pas indispensable d’être un philologue spécialisé. Le modèle pour ces éditions est celui de Wikipédia, la plateforme web accessible aux internautes, qui recueille un savoir non vérifié.

8Les degrés de fiabilité, donc, deviennent un élément important pour encadrer la nature des éditions critiques en ligne. La réflexion proposée par Patrick Sahle sur le terme critique11critical dans la langue anglaise – vise à approfondir la problématique de la fiabilité des éditions en ligne.

9Penser de façon critique implique toute une série de compétences qu’il faut mettre en jeu face à un problème posé. Ces capacités, décrites par Peter Facione12, comprennent le fait d’être clair, de savoir analyser la question dans ses aspects significatifs et les aspects mis en ombre ; d’évaluer les informations acquises et leurs validités par rapport au problème ; de déduire les éléments qui ne sont pas explicites et, enfin, de contrôler les résultats obtenus en appliquant une autocorrection rigoureuse. Donc, appliquer ces stratégies aux champs des nouvelles créations numériques veut dire soumettre chaque élément qui fera partie d’une édition critique en ligne à ces procès. Il faudra appliquer une pensée critique aux contextes historiques, à la bibliographie, aux matériaux, aux facsimilés que l’utilisateur devra visualiser et au langage de balise sur lequel l’édition critique se forme. En utilisant les mots de Sahle :

We may take the word critical as a container for all those activities that apply scholarly knowledge and reasoning to the process of reproducing documents and transforming a document or text into an edition13.

Une édition critique numérique pour Le Fragment sur Shakespeare : penser à un modèle efficace

10Ayant réfléchi sur un plan théorique des Digital Humanities et, en particulier, sur leur application dans les études ecdotiques, il faudra, dans cette partie de notre discours, aborder la question d’un modèle efficace d’édition numérique à appliquer à l’œuvre de Martin Sherlock, Fragment sur Shakespeare. La complexité des nœuds à résoudre touche plusieurs niveaux d’analyse, qui concernent la question de la visualisation du texte et surtout, les possibilités de choisir un langage de balise optimal pour la création des éditions critiques numériques comme la TEI et, enfin, la possibilité de créer un réseau avec d’autres textes qui sont en relation avec celui de Sherlock.

Sherlock : connaître un auteur méconnu

11Nous n’avons pas beaucoup d’informations biographiques sur Martin Sherlock (1750-1797), dont l’existence est racontée en partie dans sa production épistolaire. Nous pouvons affirmer, avec quelques précisions, qu’il faisait partie de la famille Sherlock originaire du Kilkenny, en Irlande. Ses études au Trinity Collège ont été délaissées pour aborder, en 1777, la carrière de chapelain du quatrième comte de Bristol et évêque de Derry, Frederick Augustus Harvey. C’est à partir de cette date que nous commençons à avoir des informations sur Sherlock grâce à ses voyages avec le comte de Bristol dans son Grand Tour. Il est bien évident que Sherlock a été un vrai homme de son siècle, voyageant à travers l’Europe et visitant l’Italie comme le faisaient la plupart des intellectuels de l’époque. À Naples, où il fit la connaissance de l’abbé Galiani14, il publia son premier écrit, Consiglio a un giovane poeta, peut-être sous les conseils et le support de ses contacts italiens liés à l’Arcadie de Rome, Luigi Godard et Antonio Scarpelli. Ce petit écrit qui se situe à la rencontre entre un pamphlet polémique contre la littérature italienne et un écrit en hommage à Shakespeare, produisit un écho tellement vaste en Italie que Sherlock se trouva dans l’œil du cyclone, pour avoir offensé le Parnasse Italien15. Ces attaques contre la poésie italienne n’aidèrent pas Sherlock dans son travail de promotion de l’auteur de Stratford – la vraie intention de l’œuvre du Consiglio – en revanche ses jugements sur les grands poètes italiens lui furent presque fatals dans les sympathies du public : seuls Scarpelli et Godard soutinrent le texte de Sherlock.

12Dans son article sur Sherlock16, Benedetto Croce ne donne pas une grande importance au débat qui se créa autour de l’œuvre. Cependant, des recherches plus récentes de Corrado Viola et de Annalisa Nacinovic, ont bien expliqué non seulement l’importance intrinsèque constituée par le Consiglio, qui contient la première traduction en italien d’un dialogue du Julius César de Shakespeare, mais surtout son importance par rapport au contexte qui entourait l’œuvre et sa contribution à la réception de Shakespeare en Italie17. Le cas de Sherlock devient donc spécifique dans sa typologie parce qu’il s’agit du premier écrit sur Shakespeare en langue italienne, dont l’auteur est un direct connaisseur de la culture et la langue anglaise18. En outre, l’hommage à Shakespeare a bien attiré l’attention du reste de l’Europe, puisque les traductions en anglais et en français sont parues dans les pays respectifs en 1780 et 178619. Il ne faut pas s’étonner de la traduction de l’œuvre en français et en anglais : dans ces années-là la production de Sherlock ne s’arrêta pas seulement à l’Italie mais il produisit des écrits en langues française et anglaise : Lettres d’un voyageur anglois (1779), Nouvelles lettres (1780) et Letters on Several Subjects (1781), la seule œuvre de Sherlock écrite dans sa langue maternelle.

13La nature du texte – trilingue – et du débat oublié par la critique nous fait penser qu’il y aurait des possibilités de ne pas seulement présenter l’œuvre de Sherlock sur un plan philologique, mais, en l’encadrant dans une introduction plus développée, présenter les essais, la correspondance et les articles qui ont participé au débat, tout italien, sur le Consiglio. Une bonne partie de ces œuvres ont été déjà numérisées par les bibliothèques qui possèdent ces documents ; cependant créer des liens web avec ces documents pour créer une archive dédiée à Sherlock nous semble une possibilité concrète et faisable au cours du projet.

Reconstruire le contexte de l’œuvre : le débat sur Shakespeare. De l’édition à l’archive

14Shakespeare était pour Sherlock « il figlio primogeniro della natura20 » : il ne s’agissait pas d’un topos complètement nouveau pour les admirateurs du Barde ; au contraire, Sherlock avait puisé cette affirmation dans l’introduction d’Alexander Pope21 aux œuvres de Shakespeare. L’œuvre de promotion et hommage que Sherlock rédige s’insère dans un grand ensemble de débats et opinions qui animèrent tout le siècle dix-huitième et une grande partie du dix-neuvième. Il ne faut pas s’étonner, donc, que le débat entre le théâtre classique à la française et le théâtre élisabéthain reste, encore aujourd’hui, matière d’étude. Plusieurs questions, toujours nouvelles, sont portées à la lumière par les chercheurs, qui s’interrogent sous des perspectives d’étude différentes sur la question animant le siècle des lumières. Cette bataille d’opinion étant étendue sur tout le territoire Européen, devient particulièrement difficile à cerner dans un cadre temporel unique pour tous les pays intéressés, notamment la France, l’Italie, l’Allemagne, où Shakespeare a été apprécié dans des temps différents et de façons différentes. Nous nous intéresserons aux contextes français et italiens, qui nous semblent liés de façon très significative.

15Nous avons déjà mentionné le fait que Shakespeare est arrivé en Italie de deux manières : directe et indirecte. En délaissant pour cette étude les Italiens connaisseurs de la langue anglaise et, donc, connaisseurs du théâtre de Shakespeare, nous essaierons de comprendre l’influence des intellectuels français sur les opinions italiennes, dont Martin Sherlock se plaint dans son Consiglio.

16De manière générale, nous pouvons affirmer que le Lettres Philosophiques de Voltaire, publiées en 1734, furent le premier pas pour porter le théâtre de Shakespeare sur le continent. Ses opinions sur les représentations de Shakespeare devinrent de plus en plus connues et partagées par les intellectuels français : un auteur doué d’un indéniable génie mais « sans la moindre étincelle de bon goût et sans la moindre connaissance des règles22 », c’est là l’opinion de l’écrivain de Ferney, que toute l’Europe commença à partager. Sa leader opinion devient bientôt incontestable pour ses admirateurs. En fait, si on prend en considération les écrits sur Shakespeare en Italie, on se rend tout de suite compte que personne n’essaya de développer de manière originale l’opinion de Voltaire. Le seul cas remarquable d’opposition aux jugements de l’auteur du Candide fut le pamphlet de Giuseppe Baretti Discours sur Shakespeare et sur Monsieur de Voltaire23. Chaque étude sur la réception du Barde en Italie cite cette œuvre qui n’était pas trop convaincante du fait de son style extrêmement polémique : il ne s’agissait presque pas d’une opposition logique et raisonnée des opinions de Voltaire, mais plutôt d’une attaque à la figure de l’écrivain de Ferney. L’auteur italien essaya de démontrer le manque de connaissance de la langue anglaise de Voltaire, et donc l’impossibilité de formuler un jugement sur Shakespeare et son théâtre. Même si ce pamphlet est très peu considéré du point de vue du style, il est quand même pris en compte pour l’idée principale à la base de l’opposition à Voltaire : le fait qu’une œuvre d’art ne peut pas être traduite mot par mot sans la détruire dans son effet final24.

17Voltaire a-t-il jamais lu cette œuvre de l’Italien, ce n’est pas clair ; cependant toutes les oppositions proposées par Baretti nous semblent être prises en compte par Sherlock aussi dans son Fragment sur Shakespeare, où il adressa à Voltaire l’accusation d’avoir contaminé l’opinion de tous les intellectuels européens sur Shakespeare :

Le parole mostruosità e fossori mi furon dette in ogni citta ; e non potei capire per molto tempo la ragione per la quale tutto il Mondo disse queste due istesse parole. Un giorno per accidente aprii un volume di Voltaire, il mistero spari […]25.

18Les œuvres de Baretti et de Sherlock arrivent dans les mêmes années, précédées par la traduction la plus importante des œuvres du Barde, c’est-à-dire le travail de Pierre Letourneur. Une fois obtenue l’approbation du roi et de la reine de France, Letourneur publia ses traductions de façon systématique de 1776 au 1783, en suscitant la colère de Voltaire qui se lança dans une diatribe contre le théâtre anglais de matrice shakespearienne. Il faut, tout de même, réfléchir encore sur une donnée importante, à savoir que les Français n’étaient pas complètement ignorants des drames de Shakespeare, au contraire, des chef-d’œuvres du Barde – tel qu’Othello, Hamlet, Roméo et Juliette – circulaient déjà, il y a quelques années, grâce aux traductions – ou mieux, les réductions – de La Place26 et les adaptations de Jean-François Ducis27. Évidemment, les pièces jouées dans les théâtres parisiens et tirées des œuvres de Shakespeare étaient bien adaptées aux goûts des spectateurs français : le final de l’Othello de Ducis, par exemple, mis en place en 1792, eut son dénouement complètement révisé, pour éviter de heurter la sensibilité des spectateurs assistant à la pièce28.

19Ce débat sur Shakespeare en France arriva aussi en Italie, avec un peu de retard : pour Corrado Viola, le vrai moment où le débat sur un nouveau modèle de théâtre commença en Italie est l’année 1816, lors de la publication d’un article sur « Biblioteca italiana » par Mme de Staël, où l’autrice pria les auteurs italiens de s’ouvrir aux littératures du nord de l’Europe et les invitait à traduire. C’est pour cette raison que l’œuvre de Sherlock nous intéresse, parce qu’elle constitue une sorte de voix venant d’un pays étranger, qui anticipe d’une dizaine d’années les idées sur lesquelles se fonde le Romantisme italien. Avant cette date Shakespeare était presque ignoré des Italiens, qui dans la plupart des cas partageaient les opinions de Voltaire. Très peu d’auteurs italiens donnèrent du crédit au théâtre du Barde : nous pouvons mentionner les cas isolés d’Alessandro Verri et ses traductions inédites et celles de Giustina Ranieri Michiel29. Mais ces cas restèrent presque ignorés par la critique italienne. Il faudra attendre une sorte de maturation des esprits du Romantisme italiens, influencés par les Allemands qui adoptèrent Shakespeare comme leur modèle de théâtre.

20L’édition numérique dédiée à Sherlock sera précédée, dans ce projet, d’une large introduction visant à reconstruire le débat sur Shakespeare en Europe au dix-huitième siècle. Ce bref résumé qui avait le but d’encadrer l’œuvre de Sherlock est seulement la pointe de l’iceberg d’un réseau dense de correspondances épistolaires, essais, discours, introductions à des œuvres théâtrales qui méritent d’être portées à la lumière par le projet. L’édition du Fragment, donc, pourrait être la base pour une recherche plus vaste et plus articulée qui pourrait devenir une sorte d’archive30 recueillant les œuvres de la bataille sur le Barde.

21Cet article s’est ouvert avec une réflexion sur les qualités qui constituent une édition critique numérique. Parmi eux, l’idée de l’édition comme un travail jamais achevé, voire un laboratoire toujours accessible, est la définition la plus partagée. L’œuvre sur Sherlock, dans cette perspective, pourrait bien devenir une sorte de laboratoire pour les chercheurs travaillant sur le dix-huitième siècle et, en particulier, sur la réception de Shakespeare dans les trois pays étudiés.

22Il est difficile, actuellement de ne pas être séduit par cette perspective et les possibilités futures de cette recherche.

Les modèles d’édition numérique possibles pour l’œuvre de Sherlock

23L’œuvre de Sherlock s’inscrit donc dans le contexte du dix-huitième siècle et, en particulier, dans le débat sur la réception de Shakespeare en Europe. Cette œuvre, qui est extraite d’un texte publié en Italie, Consiglio a un giovane poeta, fournit un exemple des contraintes et opinions qui se formaient sur le Continent au sujet du théâtre du Barde. Cette œuvre de Sherlock, bien qu’oubliée par la plupart de la critique européenne, obtint un succès qui suffit à le rendre célèbre en Europe31 : en fait, peu après sa première publication en langue italienne, l’extrait sur Shakespeare était traduit en français (1780) et en anglais (1786). En délaissant pour le moment la figure de Sherlock, le contexte de réception de l’œuvre en Italie – qui pose des questions qui pourraient ouvrir un autre front d’étude – et le contexte, plus large, des échanges d’opinions sur le théâtre de Shakespeare, nous verrons quel type de visualisation sur écran on pourrait développer pour cette œuvre.

24Le but de l’édition est celle de mettre en comparaison les trois versions du texte de Sherlock, italienne, française et anglaise. Donc, il ne s’agit pas seulement d’une seule étude strictement philologie, mais on pourrait dire, d’une triple étude philologique, où les textes seront juxtaposés afin de donner au lecteur un panoramique à 360° de l’évolution du texte de Sherlock et de ses traductions.

25Les éditions comparatives imprimées ont toujours vu la difficulté de la réalisation d’une bonne visualisation des textes sur la page. Les éditions qui ont comme but la comparaison de plusieurs textes, en fait, doivent présenter au lecteur les différences entre les textes sélectionnés et, éventuellement tous les changements significatifs apportés au cours du temps ; pour cette raison, ces éditions ne peuvent pas présenter une structure traditionnelle de la page divisée entre texte et appareil critique, mais au contraire cet espace bidimensionnel de la page doit laisser la place à une vision plus articulée. Les artifices éditoriaux pour obtenir sur page une bonne représentation des éditions comparatives sont, avec le passage en pixel, complètement dépassées.

26L’édition numérique du Fragment sur Shakespeare pourra adopter l’espace de l’écran pour les trois versions du texte dans les trois langues, sans limite d’espace. Cependant, le fait de ne pas avoir de limites n’implique pas qu’il y ait des questions à se poser concernant la qualité et la modalité appropriées pour la visualisation. La philologie médiévale et classique semble avoir très bien compris les possibilités qu’offre une juxtaposition des différents témoins, en utilisant l’écran comme un vrai tableau interactif où c’est le lecteur/internaute qui choisit comment conduire sa recherche. Prenons, par exemple, l’édition critique numérique de The Wondering Jew Chronicle32, éditée par Giles Bergel pour l’Université d’Oxford. Ce site permet de choisir les modalités de visualisation du texte : d’un seul texte que le lecteur lit, on peut arriver à la juxtaposition multiple de tous les témoins enregistrés, le tout en cliquant la version du texte qu’on désire visualiser. De plus, la comparaison des textes devient encore plus efficace grâce au facsimilé de l’œuvre – donc avec l’ajout d’images – qui permet de confronter le texte à la page réelle.

27Une édition qui nous donne plusieurs traductions juxtaposées d’un texte est le projet réalisé par la Columbia University, DigitalDante33. Le texte de base que le lecteur peut visualiser est le texte italien, cependant il peut choisir de ne visualiser, à côté du texte en italien, qu’une des deux traductions proposées par le site. La particularité de ce site est l’option audio pour chaque chant de l’œuvre. Le lecteur peut choisir d’écouter une version audio du texte italien, mais il n’est pas possible de visualiser le texte et de l’écouter en même temps. Ces types d’outils digitaux portent l’analyse des contenus à un niveau qui n’est plus seulement textuel.

28Rendre possible ce genre de projet reste un problème pour tous les chercheurs qui sont habitués à la recherche classique dans les disciplines humanistes. Développer les compétences pour codifier une recherche philologique n’est pas très simple, cependant le nombre toujours plus élevé d’édition numérique d’œuvres littéraires a conduit, ces dernières années, à la création d’une communauté académique appelée TEI – Text Encoding Initiative. Ce projet permet un encodage plus simple de texte en ligne qui, avec sa version TEI-Lite34, vise à devenir l’instrument le plus utilisé dans le champ des éditions numériques. En outre, son propos est celui de rendre des notions informatiques accessibles à une bonne partie du monde des humanistes. La TEI permet aussi de définir des schémas d’encodage documentés par ses Guidelines35. Ces lignes directrices ont rencontré un large consensus parmi le monde des universitaires et aujourd’hui la TEI est désormais un point de référence dans le champ des Sciences Humaines.

Repenser les sciences humaines, le futur et le passé

29Il est bien évident que s’ouvrir aux nouvelles frontières de la digitalisation demande un effort bien lourd aux chercheurs habitués à la recherche traditionnelle. Les éditions critiques numériques, par exemple, requièrent certainement une méthode classique théorisée et largement utilisée, cependant l’application à une nouvelle forme de lecture et de décodage exige des compétences informatiques qui échappent, pour la plupart des cas, aux chercheurs de Sciences Humaines. De plus, ces compétences sont si spécialisées et sectorielles qu’il est bien difficile de se les approprier dans un bref délai. Il est improbable de retourner à une vision des connaissances typiques de la Renaissance36, où un homme seul possédait toutes les compétences artistiques et techniques pour la réalisation d’un projet. Cette vision certainement fascinante pour la recherche semble impossible à réaliser du fait du degré de spécialisation des connaissances toujours plus difficile. Pour cette raison, ces types de projets requièrent la constitution d’équipes de spécialistes permettant une collaboration et une circulation de compétences à la fois littéraires et scientifiques, comme c’est déjà le cas dans la plupart des projets sur les Digital Humanities – et en particulier, dans le champ des éditions critiques numériques. Dans le cas du projet sur Martin Sherlock l’étude théorique sera accompagnée d’un travail beaucoup plus pratique au sein d’une maison d’édition : les ETS de Pise. L’édition critique, articulée avec son introduction reconstruisant à la fois le débat sur Sherlock en Italie et le contexte plus large de la réception du Barde en Europe, trouvera au sein de la maison d’édition un terrain fertile pour son élaboration. En outre, la collaboration entre l’Université et une entreprise permettra la formation du chercheur, qui sera impliqué dans les procès de numérisation du projet.

30Pour conclure, Peter Robinson, dans son séminaire international sur la Philologie digitale organisé à Édimbourg a utilisé une métaphore qui semble bien décrire l’état de l’art des Digital Humanities jusqu’à aujourd’hui. Il a cité l’œuvre du carthaginois Marzianus Cappella, Noces de Philologie et Mercure37. Cette fable didactique célèbre la possibilité d’une nouvelle connaissance, embrassant la culture incarnée par Philologie et l’éloquence – voire la pensée pragmatique – de Mercure, en d’autres termes, l’espoir de voir une union entre la culture et la techné38.

Conclusion

31Cette étude n’a pas eu comme but, trop ambitieux, de déterminer un statut définitif et univoque des éditions critiques numériques, qui échappe encore aux chercheurs. Au contraire, cette réflexion portée sur les nouveaux genres de représentations des éditions critiques nous a permis de formuler des nouvelles idées par rapport à un projet en cours. Même si elles sont seulement théoriques, ces considérations servent à établir un modus operandi pour la réalisation de l’édition de l’œuvre de Martin Sherlock qui a une base raisonnée, tenant pour réelle l’affirmation de Patrick Sahle pour qui « il n’y a rien de plus pratique qu’une bonne théorie39. »

32L’œuvre de Sherlock numérisée nous semble un bon exemple des nouvelles possibilités ouvertes aux jeunes chercheurs des disciplines humanistes, où, à partir d’une réélaboration critique d’un texte on peut arriver à la création d’une chaîne de documents plus vaste, permettant d’autres projets futurs. En fait, en considérant notre affirmation initiale, où l’édition critique a été définie comme un chantier toujours ouvert à de nouvelles possibilités de développement et d’approfondissement, il est clair que ce projet pourrait, dans le futur, développer les coins restés sans lumières et qui n’ont pas été pris en considération dans l’étude, faute de temps, de ressources humaines et de connaissances spécialisées.

Notes de bas de page numériques

1 Plusieurs études se sont posé, au cours du temps, la question « qu’est-ce qu’une édition critique numérique ? ». À ce propos on peut citer les études de Peter Robinson, Making electronic editions and the fascination of what is difficult, « Linguistica computazionale », 2004, 20-21, pp. 259-275. Peter Robinson, Electronic Editions for everyone, Mc Carty Willard (dir.), Text and genre in reconstruction: Effects of digitalization on ideas, behavior, products and institutions, Cambridge, OpenBookPublishers, 2010, pp. 145-163.

2 Paolo Chiesa, Elementi di critica testuale, Bologna, Patròn, 2002, p. 11.

3 Le processus à la base d’un travail philologique réside dans l’activité de reconstruction non seulement du texte par rapport aux changements multiples dans le temps, mais aussi une reconstruction du contexte historique et de son auteur. Pasquale Stoppelli, Filologia dei testi a stampa, Bologna, il Mulino, 1987. Alfredo Stussi, Introduzione agli studi di filologia italiana, Bologna, il Mulino, 2007.

4 Des éditions critiques au début des années quatre-vingt-dix étaient distribuées sur des supports optiques comme les CDs et les disquettes. Cependant cette nature, au croisement entre l’objet matériel et le format en pixel, a trouvé une vie très brève à cause des nouveaux supports électroniques qui, au cours des décennies, les ont remplacés. De plus, le web offre la possibilité de l’open source, c’est-à-dire la visualisation des contenus de façon continuelle, accessible et gratuite.

5 Hans Walter Gabler, « Theorizing the digital scholarly edition », Literature Compass, 7/2, 2010, pp. 43-56, p. 44.

6 Patrick Sahle, « What is a Scholarly Digital Edition? », in Discoll Matthew James, Pierazzo Elena (dir.), Digital Scholarly Editing. Theories and Practies, Cambridge, Open Book Publisher, 2016, pp. 19-39.

7 Electronic Beowulf: https://ebeowulf.uky.edu/#.

8 Colloque du 8 avril 2019, qui a eu lieu à l’Université de Milan, « Digital Humanities. Verso un nuovo ordine del sapere ? ».

9 Paola Italia, dans sa contribution au colloque milanais qui avait comme titre Editing duemila. Testualità e responsabilità, cite plusieurs sites web et leur degré de fiabilité. Ce degré part d’un niveau qu’on peut juger fake, en utilisant la terminologie adoptée par Paola Italia, jusqu’à un niveau de forte fiabilité des sites. Italia Paola, Bonsi Claudia (dir.), Edizioni Critiche Digitali. Edizioni a confronto, Roma, Sapienza Università Editrice, 2016.

10 The University of Oxford text Archive: https://ota.ox.ac.uk/.

11 Patrick Sahle, What is a Scholarly Digital Edition?, op. cit., p. 24.

12 Peter Facione, Gittes Ann Carol, Think Critically, London, Parson, 2015.

13 Patrick Sahle, What is a Scholarly Digital Edition?, op. cit., p. 24.

14 Une des éditions du texte du Consiglio se trouve dans la Biblioteca Benedetto Croce. L’exemplaire possédé par Benedetto Croce porte une dédicace de l’auteur pour l’abbé Galiani.

15 Ce sujet est en peu trop vaste pour être abordé dans cette étude. Il faudra citer les études de Annalisa Nacinovich, « Il sogno incantatore della filosofia ». L’Arcadia di Gioacchino Pizzi 1772-1790, Firenze, Olschki, 2003.

16 Croce Benedetto, Un viaggiatore in Italia nel Settecento apostolo dello Shakespeare, in « La critica. Rivista di Letteratura, Storia e Filosofia diretta da Benedetto Croce », vol. XXVI, Napoli, 1928, pp. 461-467.

17 Corrado Viola, Approcci all’opera di Shakespeare nel settecento italiano, in Raffaella Bertolazzi, Cecilia Gibellini (dir.), Shakespeare : un romantico italiano, Firenze, Franco Cesati Editore, 2017, pp. 74. Corrado Viola cite deux manières grâce auxquelles les Italiens ont connu Shakespeare : de façon directe, en voyageant en Angleterre et de façon indirecte ; à travers le filtre de la culture française et allemande, sous l’influence des opinions de Voltaire, qui enflamme un débat sur tout le continent européen et celle allemande de fin de siècle, avec Gottsched, Bodmer, Herder et, enfin, Goethe et Schlegel.

18 Arturo Graf, Anglomania e l’influsso inglese nel secolo XVIII, Torino, Ermanno Loescher, 1911, p. 106.

19 Les œuvres de Sherlock ont été traduites avec les titres respectifs de Fragment sur Shakespeare (1780) et Fragment on Shakespeare (1786).

20 Martin Sherlock, Consiglio ad un giovane poeta, Naples, 1779, p. 57.

21 William Shakespeare, The works of William Shakespeare. In eight volumes. Collected and corrected by the former editors, by Mr Pope, Dublin, printed by and for George Grierson, at the Two Bibles, and for George Ewing, at the Angel and Bible, 1726.

22 Voltaire, Lettres Philosophiques, Chez E. Lucas, au Livre d’or, MDCCXXXIV, p. 63.

23 Giuseppe Beretti, Discours sur Shakespeare et sur Monsieur de Voltaire par Joseph Beretti secrétaire pour la correspondance étrangère de l’Académie Royale britannique, Londres, John Nourse et Durant Neveu, 1777.

24 L’essai de Luigi Morandi sur Beretti démontre que l’auteur italien n’écrivit pas son œuvre pour démontrer la valeur du théâtre de Shakespeare – comme dans le cas de Sherlock – au contraire, il voulait démontrer l’inefficacité des théories de Voltaire, en affirmant que traduire une œuvre d’art ne permet pas d’obtenir sur le public le même effet. Donc, pour Beretti, il en résulte l’impossibilité de juger la valeur d’un auteur étranger si on ne connaît pas parfaitement sa langue. Luigi Morandi, Voltaire contro Shakespare. Shakespeare contro Voltaire. Con otto lettere di Beretti, Roma, Casa editrice A. Sommaruga, 1882.

25 Martin Sherlock, Consiglio a un giovane poeta, op. cit., p. 88.

26 Pierre-Antoine de La Place traduisit entièrement une seule œuvre de Shakespeare, Richard III. En fait, son travail se limita à la narration exiguë de certaines scènes qu’il jugea particulièrement importantes. Amy Drake, Jean-François Ducis: Re-Creating Shakespeare for an Eighteenth-Century Audience, Selected Papers of the Ohio Valley Shakespeare Conference, vol. 5, Article 4, 2012.

27 Jean François Ducis succéda à Voltaire comme membre de l’Académie Française : dans son discours du 4 mars 1779 à l’Académie, Ducis révéla son admiration pour les trois auteurs français les plus influents, Racine, Corneille et Voltaire. Cependant, il puisa dans le répertoire de Shakespeare, même s’il ne connaissait pas la langue anglaise. Il adapta, pour les scènes françaises Hamlet, Othello, Roméo et Juliette, Macbeth et Le roi Lear. John Pemble, Shakespeare Goes to Paris: How the Bard Conquered France, London, Hambledon and London, 2005.

28 Mara Fazio, Il mito di Shakespeare nel teatro romantico. Dallo Sturm und Drang a Victor Hugo, Roma, Bulzoni, 1993, pp. 42-44.

29 Annamaria Crinò, Le traduzioni di Shakespeare in Italia, Roma, Edizioni di storia e letteratura, 1950.

30 Cette définition reste ambiguë exactement comme celle de Scholarly digital edition. Nous l’interprèterons, dans cette étude, comme un ensemble de textes choisis et sélectionnés portant sur le même sujet. Francesca Tomasi, « Edizioni o archivi digitali ? Knowledge sites e apporti disciplinari », in Paola Italia, Claudia Bonsi (dir.), Edizioni Critiche Digitali. Edizioni a confronto, Roma, Sapienza Università Editrice, 2016, pp. 117-124.

31 Thomas Carlyle parle de lui dans une de ses lettres. Ce témoignage nous démontre que son nom et son œuvre avaient circulé suffisamment en Europe. Carlyle Thomas, History of Frederich II of Prussia called Frederick the Great. In Eight Volumes, London, Chapman and Hall Limited, 1898, Volume III [éd. Cambridge University Press, 2010].

32 The Wondering Jew Chronicle: http://wjc.bodleian.ox.ac.uk/index.html

33 DIgitalDante : https://digitaldante.columbia.edu/

34 https://www.tei-c.org/Vault/P4/Lite/teiu5_it.html .

35 TEI Gidelines : http://www.tei-c.org/Guidelines/ .

36 Ce thème du retour au savoir des hommes de la Renaissance a été abordé aussi par Franco Moretti, lors de la présentation de la traduction de son travail Letteratura in Laboratorio, qui a eu lieu à l’Université de Naples Federico II, le 2 avril 2019.

37 Cette œuvre en neuf livres raconte la passion de Mercure, dieu du Logos, pour une femme humaine et mortelle. Cette femme ayant des mérites pareils à ceux du dieu latin est digne de cette union divine. Le cadeau de noces occupe une grande partie de l’œuvre, où chaque art (Grammatique, Dialectique, Rhétorique, Géométrie, Arithmétique, Astronomie, Harmonie) donné par Mercure à son épouse sera présenté.

38 Federico Meschini, Edizioni critiche digitali : sul rapporto tra testo, edizione e tecnologie, « DigItalia. Rivista del digitale dei beni culturali », vol. 2, Roma, 2003, pp. 24-42.

39 Patrick Sahle, What is a Scholarly Digital Edition?, op. cit., pp. 37. [trad. personnelle].

Bibliographie

Œuvres de Martin Sherlock

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Sherlock Martin, Lettres d’un voyageur anglois, Genève, 1779.

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Études

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Pemble John, Shakespeare Goes to Paris: How the Bard Conquered France, Londres, Hambledon and London, 2005

Pour citer cet article

Adelaide Pagano, « Quelle méthodologie pour une édition critique numérique d’un texte imprimé du dix-huitième siècle ? Le cas du Fragment sur Shakespeare de Martin Sherlock », paru dans Loxias, 66., mis en ligne le 14 septembre 2019, URL : http://revel.unice.fr/loxias/index.html/index.html?id=9234.


Auteurs

Adelaide Pagano

Doctorante de l’Università degli Studi di Salerno (Italie) en Littérature Française et Comparée. Son projet de recherche vise à créer une édition critique numérique trilingue du texte de Martin Sherlock Fragment sur Shakespeare (1780). Ses études parallèles abordent le roman français du vingtième siècle, en particulier l’écrivain Marcel Proust, dont un article est paru récemment dans la revue publiée par l’Université de Padoue, Quaderni Proustiani.