Loxias | 77. Femmes et nourriture | I. Femmes et nourriture
Priscilla Wind :
Femmes en cuisine dans la performance contemporaine
Résumé
Les performeuses investissent l’espace de la cuisine dès les années 1970 afin de dénoncer le stéréotype aliénant de la femme aux fourneaux. Ces artistes défient la hiérarchisation des sujets artistiques, la cuisine servant de matériau brut pour leurs œuvres. À travers l’étude de performances et photographies récentes d’Elżbieta Jabłońska, de Rosemarie Trockel, d’Augusta Atla et de Marina Abramović, cet article analyse les liens entretenus le corps féminin et l’ustensile de cuisine, comment ces artistes détournent les codes de l’histoire de l’art et dans quelle mesure la cuisine se transforme en un lieu d’élévation spirituelle.
Abstract
Female performers have been investing the kitchen space since the 1970s in order to denounce the alienating stereotype of the housewife. These artists defy the hierarchy of art genres, the kitchen thus serving as the raw material for their works. Through the study of recent performances and photographs by Elżbieta Jabłońska, Rosemarie Trockel, Augusta Atla and Marina Abramović, this article analyzes the links between the female body and kitchen utensil, how these artists ironically play with the codes of art history and to what extent the kitchen space is transformed into a place of spiritual elevation.
Index
Mots-clés : art féministe ; performance contemporaine ; cuisine en art ; art et sacré
Géographique : Europe centrale
Chronologique : période contemporaine
Plan
- Mises en scènes de la cuisinière : corps féminin et ustensile de cuisine
- Représentations de la cuisine en art : hiérarchie des genres et domination patriarcale
- La cuisine comme espace spirituel
- Conclusion
Texte intégral
1À la fin des années 1960 puis durant les années 1970, les femmes artistes investissent particulièrement la photographie et la performance en tant que formes artistiques. Elles occupent notamment le domaine de l’art corporel pour proposer, au travers d’un female gaze, une critique des représentations stéréotypées du corps féminin et une rupture avec les canons esthétiques officiels afin de revendiquer une autre place de la femme dans l’art mais aussi plus largement dans la société. En exposant principalement des autoportraits critiques, elles utilisent leur corps tant comme un matériau de création artistique qu’un outil discursif. Confrontées à une histoire de l’art mais aussi à une société, dans lesquelles le corps féminin imprime différentes formes de domination patriarcale, les performeuses créent des contournements et distorsions ironiques pour déconstruire les mythes sociaux sous-jacents. Elles dénoncent notamment l’assignation des femmes aux tâches ménagères et l’essentialisation de celles-ci, ainsi que leur condamnation à des rôles considérés comme subalternes, en détournant des genres picturaux catégorisés comme des sous-genres dans la typologie traditionnelle des beaux-arts. Les artistes femmes ont ainsi défié la hiérarchisation des sujets artistiques, en utilisant notamment l’espace de la cuisine, à l’instar de la célèbre vidéo-performance Semiotics of the Kitchen de Martha Rosler (1975), comme matériau pour leurs oeuvres, les scènes de la vie privée étant considérées comme des sujets de deuxième plan. À travers l’étude de performances et photographies récentes d’Elzbieta Jablonska (Supermother, 2002 et Kuchnia, 2003), de Rosemarie Trockel (Herde) et d’Augusta Atla (Objets de femme, 2011), de Marina Abramović (The Kitchen, Homage to Saint Therese, 2009), cet article étudiera les figurations contemporaines de la cuisinière et analysera quels liens entretiennent le corps féminin et l’objet, ici plus précisément l’ustensile de cuisine, entre réification et distanciation. Comment ces oeuvres d’art participent-elles d’un acte militant inspiré du slogan féministe deuxième vague selon lequel « le privé est politique » ? En s’appuyant un des sujets majeurs des scènes de genre, de natures mortes mais étonnamment aussi des scènes religieuses allégoriques, la scène de cuisine, quelles reprises et réinterprétations des codes de l’histoire de l’art proposent ces artistes ? Enfin, cet article envisagera dans quelle mesure réinvestir l’espace de la cuisine comme atelier d’artiste esquisse de nouveaux imaginaires de la femme en cuisine et comment celui-ci touche à la mission transcendantale de l’art.
Mises en scènes de la cuisinière : corps féminin et ustensile de cuisine
2L’art féministe se développe particulièrement à partir des années 1970 et reste fortement marqué dans un premier temps par la réappropriation et le contournement des tâches ménagères dans des performances et photographies, le stéréotype de la femme au foyer comme représentation principale du corps féminin contraint donnant lieu à de multiples parodies. À la même période, la reconnaissance du travail ménager en tant que travail invisibilisé et gratuit, majoritairement féminin, devient l’une des luttes les plus historiques du féminisme, poursuivies encore très récemment sous la forme de « grève des femmes » en Suisse, d’abord le 14 juin 1991, puis reconduite dix-huit ans plus tard, le 14 juin 2019. Dans son essai Le capitalisme patriarcal1, la sociologue et militante italo-américaine Silvia Federici souligne notamment la persistance larvée encore de nos jours de cette injuste répartition du travail nécessaire à tout foyer. Même si la société connaît des évolutions positives dans la remise en question des stéréotypes de genre, le travail ménager reste donc encore aujourd’hui un domaine d’oppression largement dénoncé autant dans le militantisme politique que dans l’artivisme. Mais en marge du soin aux enfants, du nettoyage des sols, de l’aspirateur, de la lessive ou du repassage, la cuisine, à la fois travail ménager mais aussi pièce maîtresse du foyer domestique, revêt un rôle légèrement différent des autres tâches du quotidien, car cuisiner n’a jamais uniquement relevé du domaine du foyer, il est également synonyme d’art gastronomique, et en cela est régulièrement associé à la figure essentiellement masculine du chef. Il s’agit ainsi, non pas seulement de dénoncer une aliénation de la femme aux fourneaux, mais également de repenser le lien préexistant entre art et cuisine à travers ces œuvres et comment se réapproprier la noblesse de ce lieu, de ses objets mais aussi de cette activité, en tant que femme et en tant qu’artiste.
3Dans son article « Mise en scène du genre dans les émissions culinaires italiennes », l’anthropologue Luisa Stagi souligne l’existence d’une division sexuelle du travail dans les mises en scène culinaires selon deux principes bien différents :
[N]ous trouvons l’axe besoin/plaisir (food work/food leisure) : généralement les femmes qui cuisinent à la télévision mettent en scène une féminité rassurante liée aux soins ; pour les hommes en revanche, la préparation culinaire est liée au plaisir, à une occasion spéciale. […] Même les lieux de tournage des émissions reflètent cette différence : pour la cuisine effectuée par les femmes, les décors reproduisent l’atmosphère domestique […]. Une telle dichotomie suit aussi l’axe privé/public : si les femmes qui cuisinent sont immanquablement ancrées dans la reproduction de l’image de « la femme au foyer », les hommes vont à l’extérieur, à la recherche de goûts exotiques et bizarres. […] Les femmes sont plus facilement assimilées à la cuisine familiale et c’est pour cette raison qu’elles sont considérées comme des cuisinières et non comme de véritables cheffes, comme si cuisiner était pour elles un devoir et non une compétence acquise. […] Cette distinction, dans les émissions culinaires, est aussi soulignée par la manière dont les hommes et les femmes sont habillés : les hommes portent toujours la tenue du chef, les femmes sont habillées normalement2.
4Si l’on suit la typologie, la célèbre vidéo-performance de l’Américaine Martha Rosler, Semiotics of the Kitchen (1975), livrait déjà plusieurs clés d’interprétation critique au sujet de la représentation de la femme en cuisine. Dans cette oeuvre inspirée des émissions télévisées de Julia Child, qui incarnait la parfaite femme au foyer présentant des recettes familiales, l’artiste est vêtue d’une tenue de cuisinière, et non de cheffe, symbolisée par un tablier banal, et tourne sa performance sur fond de cuisine familiale standard. Affublée d’un air morne, elle présente par ordre alphabétique les différents ustensiles de cuisine à sa disposition. En insistant sur la démonstration sans commentaire de l’aspect technique de chaque ustensile, elle ancre sa représentation dans l’axe food work, mettant en avant la cuisine comme un travail d’ouvrière à la chaîne, consistant principalement en l’habile manipulation d’outils. L’intitulé de la performance, Semiotics of the Kitchen, suggère qu’il s’agit avant tout d’un langage à acquérir, et non d’un talent inné féminin, et donne une leçon ostentatoire et ironique à un public masculin à qui il serait nécessaire d’expliquer le B.A.BA de la cuisine, puisqu’il semble prétendre dépendre d’une expertise féminine, en réalité aliénante. D’autre part, son expression indifférente donne une représentation différente du rôle de la cuisinière que celle attendue par le stéréotype. Au lieu d’interpréter la figure maternelle nourricière, souriante et chaleureuse telle que le faisait Julia Child dans ses émissions culinaires, Martha Rosler désinvestit la tâche culinaire de l’émotionnel, et souligne la contrainte d’un travail essentialisé à tort, relevant du domaine invisibilisé du care, tâche indispensable au bon fonctionnement de la société qui consiste à prendre soin des autres, du geste médical à la nourriture3. Ici, Martha Rosler rappelle non sans dérision que la cuisine n’est pas forcément un art, ni l’expression d’une affection maternelle, elle est donc accessible à tout le monde, y compris aux hommes.
5Dans sa performance Kuchnia (Cuisine), présentée en 2003 au Neuer Berliner Kunstverein, l’artiste polonaise Elżbieta Jabłońska s’appuie également sur les instruments de cuisine pour interroger plus particulièrement l’entièreté de la division sexuelle du travail culinaire et incarner les difficultés de la femme contemporaine à dépasser ces stéréotypes de genre. Habillée d’une sobre robe beige, elle concocte en salle d’exposition différents plats élégants sur un équipement de cuisine aux plans de travail et ustensiles très disproportionnés. Apparaissant telle une petite fille jouant à la dînette dans cet environnement bien trop grand, elle sert ses plats au public qui les déguste sur de sobres tables blanches directement à proximité de l’artiste. Sur les serviettes accompagnant les plats est imprimée une petite annonce concernant une énergique jeune femme polonaise à la recherche d’un emploi. Si l’axe food work est à nouveau bien représenté par le travail permanent de la performeuse pour préparer des plats en grande quantité, la sobriété de sa tenue d’employée mais aussi la petite annonce caricaturale d’une immigrée d’Europe de l’Est à la recherche d’un travail dans le domaine du service à la personne, Elżbieta Jabłońska joue également avec l’autre axe, traditionnellement réservé à la sphère masculine, le food leisure. Car l’acte-même de la performance artistique transforme son acte en spectacle, en reprenant le concept très en vogue dans la restauration de l’open kitchen, élaborant des plats aux allures gastronomiques, la sobriété de ses vêtements lui procurant également l’élégance d’une grande cheffe. Mais l’artiste tient également à insister sur la difficulté et la gêne que peuvent ressentir les femmes à passer d’un axe à l’autre, en insistant notamment sur le fait qu’elle n’a pas les bons outils, qui sont littéralement trop grands pour elle voire à la limite de l’accessibilité et ne lui permettent pas encore d’atteindre le réel statut de cheffe de cuisine. Elle se relègue au plan d’enfant qui s’amuse ou imite, et qu’on ne peut prendre réellement au sérieux. En outre, dans une perspective post-féministe, c’est ici le cumul des oppressions patriarcales que lui confère son triple statut de femme, d’immigrée et d’artiste invitée dans les galeries chics de grandes villes d’Europe de l’Ouest, qu’elle compte dépasser en relevant les défis de cette performance. En cela, Kuchnia illustre la volonté des femmes de s’extraire des stéréotypes tout en restant confrontées à un monde masculin qui ne s’adapte pas à elles et continue à les dénigrer et à les rabaisser afin de les cantonner dans les rôles traditionnels lorsque celles-ci cherchent à modifier les catégories.
6La dialectique entre cuisinière et ustensile, dont il convient de dénoncer la symbiose oppressive et de repenser la coopération, se retrouve ainsi dans la majorité des œuvres féminines autour de la cuisine, dans le but de développer une réflexion sur le lien entre corps et objet. Aussi l’artiste autrichienne Birgit Jürgenssen se photographiait-elle en 1975 en train de porter un nouvel objet de son invention : le tablier-cuisine (Küchenschürze), qui intègre une gazinière à un tablier. Avec humour, l’artiste dénonce les fausses promesses de modernisation d’une société de consommation qui prétend simplifier le quotidien des femmes par le développement de nouveaux appareils électro-ménagers, sans jamais remettre en question la répartition traditionnelle des tâches ménagères. En imaginant une femme au foyer déjà tout équipée, modèle dans lequel celle-ci disparaît et se confond avec la tâche ménagère qu’on lui a attribuée, Birgit Jürgenssen met à nouveau en lumière le processus d’essentialisation féminine largement véhiculé dans les affiches publicitaires de l’époque.
7Ironisant sur cette symbiose entre femme et cuisine, d’autres artistes s’approprient les objets associés à ce lieu hautement symbolique pour en faire des matériaux artistiques à part entière. Dans ces œuvres, la représentation de la femme disparaît pour laisser place à une mise en perspective de l’ustensile lui-même, la femme-artiste prenant sa revanche sur des pièces et des objets qui étaient censés l’aliéner et proposent d’autres manières de faire de la cuisine un art. Suivant ce cheminement de pensée, l’artiste allemande Rosemarie Trockel conçoit dans les années 1980 puis 1990 des séries de croquis, sculptures et installations centrés autour du fourneau. Elle élabore des œuvres très simples en noir et blanc, au style minimaliste, en disposant de plaques de cuisson électrique de manière aléatoire et absurde sur de fausses cuisinières. Rosemarie Trockel s’inspire ici à la fois de l’art abstrait mais aussi du ready-made introduit par Marcel Duchamp, qui interroge ce qui différencie l’art du quotidien, mais aussi l’importance de la perspective dans notre interprétation de l’art et par extension dans notre vision du monde. Privé de sa fonction originelle oppressive, l’objet se dissocie de son utilisatrice, le fourneau stylisé et dépouillé catalysant alors l’absurdité de l’essentialisation féminine grâce à une esthétique minimaliste qui opère une sorte d’effet de distanciation. Le fourneau, épuré, dépourvu du corps féminin auquel on l’associe d’habitude, privé de son utilité première, est élevé au rang d’objet d’art dans la salle d’exposition et nous oblige alors, par sa soudaine singularité voire sa surprenante étrangeté, à changer notre regard sur des clichés sexistes, à interroger le processus barthien de mythification des objets du quotidien, mais aussi à repenser la hiérarchisation des activités nécessaires au bon fonctionnement de l’ensemble de la société.
Représentations de la cuisine en art : hiérarchie des genres et domination patriarcale
8Un système patriarcal valorise en priorité les domaines investis traditionnellement par les hommes et qui sont symboles de virilité, tels la carrière, la direction d’équipe, la réussite voire l’excellence de manière générale, le sport compétitif ou encore le combat, au détriment des domaines considérés comme féminins que sont notamment le soin à la personne, l’entretien du foyer ou encore le service public. Parallèlement à ces préceptes, dans l’histoire des beaux-arts, on confère à la représentation des scènes de la vie quotidienne et des personnes qui les animent une moindre importance qu’aux faits et aux personnages remarquables. C’est même une véritable hiérarchie des genres picturaux qui fut codifiée au XVIIe siècle en France par André Félibien dans le cadre de l’Académie royale de Peinture et de Sculpture, dans une volonté classiciste de recherche de la perfection esthétique. Selon cette catégorisation, on considère tout d’abord les portraits, les scènes de guerre, de mythologie ou de légendes héroïques comme les genres les plus nobles. En revanche, les peintures de cuisine se retrouvent classées principalement dans une sous-catégorie que l’on nomme « scène de genre », c’est-à-dire figurant des activités du quotidien, ou parfois encore dans un des genres les moins valorisés, celui de la nature morte, la représentation d’objets étant considérée comme un sujet bien inférieur à celui du portrait ou de la glorification de grands hommes, de figures mythiques ou mystiques. On prêtait en effet moins d’intérêt édifiant à contempler des objets sans âme plutôt que des figures humaines qui puissent générer une identification, une catharsis voire une transcendance.
9L’art moderne puis contemporain n’a eu de cesse, depuis le XXe siècle, de remettre en question ces canons et catégories esthétiques, notamment en interrogeant cette hiérarchisation classique des genres artistiques pour inventer de nouvelles formes de création. Dès 1970, l’historien de l’art allemand Udo Kultermann, dans son livre Leben und Kunst : Die Funktion der Intermedia4 (Art et Vie : La fonction de l’intermedia), explique cette évolution en revenant au présupposé fondamental de l’art selon lequel celui-ci serait l’un des fondements de la vie et de la société humaines. Citant l’artiste portoricain contemporain Rafael Ferrer, pionnier de l’art conceptuel et de l’art processuel, « There is no ‘gap’ between art and life5 » (« Il n’y a pas de ‘fossé entre l’art et la vie »), il souligne que, dès les années 1960, les artistes renouent particulièrement avec cet entrelacement de l’art et de la vie. On trouve donc à partir de cette époque une revalorisation et une stylisation des actes du quotidien comme faisant partie des processus intrinsèques à nos vies et par ce biais-même à l’art. C’est dans ce contexte théorique que des femmes artistes proposent de mettre en lumière les tâches ménagères dénigrées en tant que petit genre des beaux-arts pour en faire leurs sujets artistiques principaux. Inspirée par sa propre vie de sculptrice et mère au foyer, la performeuse américaine Mierle Laderman Ukeles marque ainsi les esprits en 1969 avec la publication de son Manifesto for Maintenance Art (Manifeste pour un art de la maintenance). Faisant un écho à la célèbre citation de Pablo Picasso, « L’art lave notre âme de la poussière du quotidien », elle repense dans ce traité d’esthétique les frontières entre espaces publics et espaces privés, tâches quotidiennes et travail artistique afin d’imaginer un continuum entre ces différents domaines, mettant en valeur tant les tâches domestiques que leur pendant public, ici le travail de nettoyage des musées et salles d’exposition. Créant un espace poreux entre ce qui, dans le monde de l’art, est considéré comme le travail invisible mais nécessaire pour que celui-ci advienne (ici l’entretien des bâtiments d’exposition tout comme des maisons des artistes), et le travail artistique en lui-même, Mierle Laderman Ukeles magnifie les tâches quotidiennes en œuvres d’art et replace l’art au milieu de la vie. À partir des années 1970, le travail domestique devient ainsi un matériau brut pour la création artistique. Pour ces artivistes, l’art n’est pas une fin en soi mais sert également d’outil militant pour dénoncer l’invisibilisation du travail ménager. Il s’inscrit dans un ensemble de pratiques qui vont du foyer à l’espace public, en prolongation du slogan féministe des années 1960 selon lequel « le privé est politique6 ». Car montrer et dénoncer publiquement le cantonnement des femmes aux espaces domestiques s’intègre entièrement dans les luttes féministes historiques.
10À cette fin, les femmes artistes s’approprient les genres classiques afin de revisiter autant une histoire de l’art poussiéreuse et misogyne que les clichés sexistes de la société dont elle se fait l’écho. Il s’agit ici d’explorer l’imaginaire collectif autour de la femme en cuisine. Dans son projet Objets de femme (2011), composé à la fois d’installations, de photographies et de performances, l’artiste danoise Augusta Atla revisite le genre pictural de la nature morte et de la scène de genre pour proposer une lecture critique des rôles traditionnels attribués aux femmes dans l’espace domestique. La performance éponyme illustre une saynète de cuisine. Imitant certains tableaux classiques, le décor se compose d’une table de cuisine recouverte d’un drap blanc manifestement préparée pour accueillir quelque repas festif. Autour de la table, plusieurs femmes vêtues de noir, rappelant les costumes traditionnels des campagnes d’autrefois mais aussi des tenues de deuil, apparaissent progressivement. Faisant écho à la technique picturale du clair-obscur, la vidéo joue des contrastes entre les vêtements noirs et le blanc des tissus brodés, des dentelles, des châles recouvrant les meubles et les chaises de la pièce. Les femmes interagissent ensuite avec les objets disposés sur la table : elles suspendent du poisson à un fil comme on le faisait jadis pour les faire sécher ou bien extraient les graines d’une grenade sur une planche en bois. Les photographies et installations reprennent ces ambiances, entre broderies, mobiliers anciens de cuisine et poissons suspendus, dont l’aspect désuet est accentué à l’aide de filtres photographiques atténuant au maximum les couleurs vives. Pour Augusta Atla, il s’agit avant tout d’insister sur la réduction du corps féminin à l’objet, ici de cuisine, et sa réification dans l’art mais aussi dans la société en effaçant le plus possible ce qui pourrait évoquer la vie ou la joie, pour rapprocher ses œuvres de natures littéralement mortes, y compris lorsqu’entrent en scène des femmes. Elle souligne comment la représentation de la femme dans des scènes de genre, lorsque celle-ci n’est pas le sujet de portraits visant à célébrer la beauté voire l’érotisme du corps féminin, la cantonne à des sujets et des rôles mineurs, dans l’art comme dans la société, précisément en raison d’un dénigrement de la vie domestique au profit de la vie publique, propres au maintien d’une hégémonie patriarcale.
11Les artistes féministes ironisent sur la hiérarchisation classique des genres, parfois dans le sillon d’autres mouvements iconoclastes de l’art moderne, mais cette fois-ci afin non seulement de se libérer de limites artistiques mais également de dénoncer des oppressions. Les fourneaux abstraits de Rosemarie Trockel détournent ainsi avec habileté le concept du ready-made développé par Duchamp, pas uniquement pour montrer que d’un objet peut surgir un sujet artistique majeur mais aussi pour suggérer une libération tant de l’artiste que de la femme vis-à-vis d’une hiérarchisation des valeurs esthétiques et sociales. Ces sculptures célèbrent avant tout la créativité comme l’émancipation du carcan social, moteur principal de l’art et preuve du talent au-delà des genres, quelles que soient les contraintes imposées par les stéréotypes de genre. Mais au-delà de la revalorisation des sous-genres historiques, d’autres artistes décident avec humour de confronter la scène de genre que détermine le décor de la cuisine à des genres artistiques considérés comme nobles dans l’histoire de l’art, tels par exemple la représentation de personnages héroïques. Elżbieta Jabłońska présente ainsi en 2007 une série photographique intitulée Supermother. Elle y expose notamment un autoportrait dans lequel elle se représente en costume de Batman, assise sur une chaise au milieu de sa cuisine, son fils en simple culotte assis sur ses genoux. Reprenant la figure populaire du super-héros, l’artiste polonaise interroge la signification de l’acte héroïque envisagé en temps normal comme un symbole d’hypervirilité et un service hors du commun visant à rendre justice à la communauté. Elle suggère une compréhension de la femme affairée en cuisine et aux activités du foyer comme une super-héroïne du quotidien, œuvrant au bien commun, qui mérite d’être visibilisée, valorisée voire glorifiée, dénonçant ainsi l’injustice de la hiérarchie patriarcale.
12Une seule exception mêle la cuisine à des catégories plus nobles de l’art selon la classification classique : le genre de la nature morte inversée qui consistait à figurer sur l’ensemble du tableau des victuailles et des ustensiles de cuisine7, en reléguant à l’arrière-plan des scènes religieuses allégoriques, un genre mineur que l’art du XXIe siècle, à l’instar d’Augusta Atla, tend à réinterpréter dans de nouvelles perspectives.
La cuisine comme espace spirituel
13Dans son article « La cuisine entre scène de genre, nature morte, et parabole8 », le peintre Gilles Chambon souligne en effet qu’avant la hiérarchisation classique des beaux-arts, plusieurs natures mortes inversées représentaient, dès le Moyen-Âge, des scènes issues de récits bibliques, alliant thèmes religieux et scènes de genre. Il note ici une incitation des peintres « à méditer sur la signification spirituelle des objets ordinaires et des scènes de la quotidienneté, le profane pouvant toujours renvoyer au sacré9 ». Ces tableaux reprennent principalement l’épisode du Christ chez Marthe et Marie de Béthanie. Dans ce passage du Nouveau Testament, Jésus rend visite aux deux sœurs en cuisine. Marthe prépare le repas tandis que Marie écoute la parole du Christ, assise à ses pieds. Marthe prend ensuite à partie Jésus pour critiquer l’attitude de Marie qui n’apporte aucune aide à sa sœur dans les préparatifs du festin. Le Christ confronte alors l’attitude de Marthe à celle de sa sœur, pour lui révéler la primauté de la vie spirituelle sur les basses préoccupations matérielles. Cette scène biblique devient ainsi un sujet apprécié du XVIe et XVIIe siècles, la représentation des aliments et outils de cuisine au premier plan faisant allusion à l’opposition entre nourriture terrestre et nourriture spirituelle.
14L’observation d’ustensiles de cuisine comme biais de réflexion sur la condition humaine n’est donc pas nouvelle, et son lien avec des sujets plus mystiques ou élevés reste toujours pertinent. C’est aussi ce qui se dégage de la performance Objets de femme d’Augusta Atla, à travers la dimension rituelle de la vidéo, qui évoque une cérémonie religieuse proche du rite funéraire. Les draps blancs brodés rappellent notamment les linges d’autel utilisés pendant les messes pour consacrer l’hostie et le calice, un rituel de transfiguration de la nourriture et de la boisson qui oscille entre mysticisme et magie. Mais ici, ce sont uniquement des femmes qui investissent les rôles d’officiants, dans le sillage du message christique de la scène de Marthe et Marie qui valorise les femmes dans le rôle de disciples des forces divines.
15La cuisine et les préparations culinaires font partie d’un imaginaire magique et spirituel que les performeuses investissent également pour renouer avec la dimension sacrée de l’art. Ce processus se retrouve particulièrement au cœur de la série de photographies et vidéo-performances The Kitchen. Homage to saint Therese de Marina Abramović en 2009. L’ensemble de ces œuvres ont été réalisées dans la cuisine abandonnée d’un ancien couvent espagnol qui servait autrefois d’orphelinat, La Laboral, à Gijón. De la même façon que dans la performance d’Augusta Atla Objets de femmes, Marina Abramović se représente vêtue d’une robe noire telle qu’en portaient les femmes ou religieuses d’antan, une tenue cérémonielle qui indique d’entrée une proximité avec l’expérience rituelle. Se référant aux peintures de la naissance ainsi qu’aux écrits de la mystique espagnole Sainte-Thérèse d’Avila, célèbre pour ses états extatiques, Marina Abramović dresse, dans ses vidéos, des tableaux vivants quasi-immobiles dans lesquels on la voit flotter dans cette grande cuisine au plafond de cathédrale, tenir un bol de lait avant que le tremblement de ses mains ne devienne incontrôlable ou bien apposer ses mains autour d’un crâne humain comme pour magnétiser l’objet. Dans ses photographies en noir et blanc, elle se figure en train de préparer la soupe, puis en état de désespoir devant de grandes casseroles et un crâne. L’artiste s’appuie notamment sur un passage des textes de la sainte espagnole dans lesquels elle relate comment, juste après avoir lévité dans une église, elle serait rentrée dans sa cuisine pour préparer une soupe mais aurait connu à nouveau contre son gré un deuxième épisode de lévitation. Amusée par la colère contre les forces divines qu’exprime Sainte-Thérèse d’Avila dans cet extrait, Marina Abramović recrée dans sa série The Kitchen des scènes dans lesquelles expériences spirituelles ou mystiques et vie quotidienne se croisent. Elle insiste notamment sur les contemplations métaphysiques que peut offrir l’espace de la cuisine, en reprenant le thème des vanités avec la figuration du crâne, symbole du caractère éphémère de la vie, en contraste avec les ustensiles de cuisine. L’artiste serbe précise ainsi dans le livre d’art éponyme, conçu pour accompagner ce projet, qu’elle s’inspire ici également des scènes de son enfance qu’elle passait dans la cuisine de sa grand-mère :
Toute mon enfance a consisté à évoluer autour de la cuisine. La cuisine était le centre de mon monde. La cuisine était le lieu où je racontais mes rêves à ma grand-mère. La cuisine était le lieu où elle me racontait des histoires, la cuisine était le lieu où l’on disait tous les secrets. C’était en quelque sorte un lieu où l’univers spirituel et l’univers du quotidien se rencontraient et se mêlaient10.
16Si, dans l’imaginaire collectif, la cuisine de la grand-mère évoque une pièce chaleureuse et réconfortante au centre-même de la vie familiale, les œuvres de Marina Abramović contraste fortement avec ce postulat. Dans la cuisine du couvent, qui est un large espace entièrement blanc, aux plafonds de cathédrale, plus proche de l’église que du foyer d’une maison, l’artiste évolue seule et sans joie apparente, entourée de grandes casseroles métalliques et autres ustensiles en acier rutilant. À la froideur des objets évoquant la cantine ou encore un bloc chirurgical se mêle le corps défaillant de l’artiste esseulée, tantôt aux mains tremblantes, tantôt avachie sur le sol comme écroulée sous le poids de la tâche culinaire que représente nourrir un orphelinat entier voire l’humanité, la présence du crâne évoquant en arrière-plan tant les femmes qui l’ont précédées dans ce sillage que la décrépitude humaine. L’état abandonné de la cuisine, envahie par les feuilles mortes, parfait encore l’évocation de la notion de nature morte. Loin du stéréotype de la mère au foyer chaleureuse et pleine de vie, la performeuse semble revisiter avec nostalgie un univers dont la vie et la chaleur humaine ont déjà disparu mais dont subsiste malgré tout la dimension religieuse. Des différentes figurations de la cuisinière dans l’histoire de l’art, elle retient la figure de la religieuse mystique dont elle incarne tout à la fois la puissance et la vulnérabilité. Marina Abramović livre ici une réflexion sur le rôle-même de l’artiste en soulignant la dimension historiquement sacrée de l’art qui devait transcender le public et l’aider à se relier au divin. Afin d’explorer le statut plus précisément de la femme-artiste, la performeuse serbe se réfère à la figure de la sainte mystique qui connaît également des états de transcendance, dans le cas de Sainte-Thérèse d’Avila par l’extase et la transverbération. Elle souligne dans cette œuvre que la capacité de l’artiste à toucher au sacré lui confère certes des pouvoirs surnaturels mais ne va pas sans sacrifice corporel, ici symbolisé par des états d’affaiblissement physique grandissants.
17Dans l’histoire des récits populaires qui associent le surnaturel et les femmes, les contes et les mythologies ont régulièrement associé la figure de la cuisinière et celle de la magicienne. En effet, la préparation de mets en cuisine est bien littéralement une opération de transfiguration et de magie concrète. Il est intéressant de souligner le choix des artistes déjà mentionnées qui incarnent des figures surhumaines dans le rôle de cuisinières : la femme augmentée par la technologie chez Birgit Jürgenssen dans Küchenschürze, la super-héroïne chez Elżbieta Jabłońska dans Supermother ou la sainte mystique chez Marina Abramović dans The Kitchen. Aucune de ces œuvres ne porte ainsi sur l’archétype de la sorcière. Ce stéréotype très répandu dans les contes allie pourtant volontiers cuisine et magie, lorsqu’on la décrit en train de concocter des potions ou autres poisons, ou encore s’apprêtant à cuisiner des enfants. En effet, cette figure féminine symbolisait la mauvaise mère qui procure une nourriture mortifère à ses proches voire tente de les dévorer, ou tout simplement la femme seule et parfois savante, notamment dans le domaine des plantes. On confère ainsi aux femmes un réel pouvoir de vie et de mort, qui commence par la naissance et se poursuit ensuite par l’allaitement puis la cuisine. Évidemment se cache derrière ces arcs narratifs un propos misogyne qui cherchait à diaboliser les femmes s’écartant des modèles considérés comme positifs : la mère nourricière ou encore la femme mariée11. Refuser un tel procès en sorcellerie des femmes en cuisine et réaliser plutôt des représentations novatrices (la cyborg, la super-héroïne) ou universellement magnifiées (la sainte), c’est construire un nouvel imaginaire pour les femmes et leur place dans l’art. En investissant particulièrement l’autoportrait et l’art corporel, ces artistes exploitent la dimension performative de l’art, elles imposent de nouveaux modèles féminins qui sortent des clichés de la femme au foyer. Elles permettent à leur public féminin de développer un autre imaginaire de la cuisine et de la femme en ce lieu mais aussi plus largement de repenser le rôle de l’artiste dans la construction des stéréotypes de genre et des réalités sociales.
Conclusion
18Les performeuses et photographes investissent l’espace de la cuisine dès les années 1970 afin de dénoncer l’une des oppressions majeures du patriarcat, le stéréotype aliénant de la femme aux fourneaux. En insistant, à l’intérieur de la division sexuelle de cette tâche quotidienne, sur l’axe food work (par opposition à l’axe food leisure investi par la figure masculine du chef culinaire), des artistes telles Martha Rosler dans sa vidéo paradigmatique Semiotics of the Kitchen ou Elżbieta Jabłońska dans sa performance Kuchnia, mettent en scène l’invisibilisation de ce travail ménager gratuit afin d’illustrer la difficulté à sortir de cette essentialisation féminine et démentir la bonne volonté et la chaleur associée au personnage de la mère au foyer. Comme l’esquissait déjà Birgit Jürgenssen dans Küchenschürze, elles expriment une volonté de sortir de la symbiose présupposée entre corps féminin et ustensile de cuisine, et de réinvestir cet espace central du foyer comme lieu de création artistique, par exemple en utilisant ses objets comme des matériaux bruts, à l’instar des fourneaux readymades de Rosemarie Trockel. Repenser la représentation de la cuisinière en art, c’est aussi casser les codes esthétiques et la hiérarchie classique des genres picturaux qui associaient la cuisine essentiellement aux catégories mineures de la scène de genre et de la nature morte. Le tournant performatif en art revalorise dès les années 1960 les actes du quotidien pour les replacer au cœur de l’art et de la vie. La perspective féministe souligne en outre la valeur militante de rendre politique ce qui était considéré du domaine du privé. Des artivistes de ce mouvement, telle Augusta Atla dans sa performance Objets de femmes) explorent ainsi l’imaginaire collectif de la cuisinière et se jouent de la classification des genres, comme dans la série Supermother d’Elżbieta Jabłońska. S’inspirant de la seule catégorie artistique plus noble représentant des scènes de cuisine, la nature morte inversée, elles mettent enfin en lumière le cœur du foyer comme un espace d’élévation spirituelle. Envisagé comme un lieu de rituel, elles y incarnent des figures en connexion avec le divin, tantôt officiantes dans Objets de femmes, tantôt sainte mystique dans la série The Kitchen. Homage to saint Therese de Marina Abramović, dont la puissance tout comme la fragilité en fait une illustration-même du sacrifice que représente le travail artistique. Loin de l’archétype surnaturel de la sorcière empoisonneuse ou mangeuse d’enfants, ces artistes contemporaines développent un nouvel imaginaire positif autour de la femme en cuisine en valorisant le pouvoir performatif et la mission première de l’art, celle de transcender la vie humaine.
Notes de bas de page numériques
1 Silvia Federici, Le Capitalisme patriarcal, Paris, La fabrique, 2019, 192 p.
2 Luisa Stagi, « Mise en scène du genre dans les émissions culinaires italiennes », Journal des anthropologues, Paris, CNRS, 2015/1-2 (n° 140-141), pp. 80-81.
3 Patricia Paperman, Sandra Laugier (dir.), « Le souci des autres. Éthique et politique du care », nouvelle édition augmentée, Paris, EHESS, coll. « Raisons pratiques », 2011, Recherches familiales, 2012/1 (n° 9), pp. 195-196.
4 Udo Kultermann, Leben und Kunst : zur Funktion der Intermedia, Tübingen, Ernst Wasmuth, 1970, 210 p.
5 Udo Kultermann, Leben und Kunst : zur Funktion der Intermedia, p. 181.
6 Carol Hanisch,, « The Personal is Political », in Barbara A. Crow, (éd.), Radical feminism: A documentary reader, New York, NYU Press, 2000, pp. 113-117.
7 Voir par exemple Pieter Aertsen, Jésus chez Marthe et Marie, huile sur panneau de chêne, Kunsthistorisches Museum, Vienne, 1552.
8 Gilles Chambon, « La cuisine entre scène de genre, nature morte, et parabole », publié le 21/09/2013, http://art-figuration.blogspot.com/2013/09/la-cuisine-entre-scene-de-genre-nature.html , consulté le 6/05/2022.
9 Gilles Chambon, « La cuisine entre scène de genre, nature morte, et parabole ».
10 Marina Abramović, The Kitchen, Madrid, la fabrica, 2009, p. 6: « my entire childhood was about going around the kitchen. The kitchen was the centre of my world. The kitchen was the place where I would tell my grandmother my dreams. The kitchen was the place where she would tell me stories, and the kitchen was the place where all the secrets were told. It was a kind of place where the spiritual world and the daily world met and mixed. »
11 Voir notamment Mona Chollet, Sorcières. La puissance invaincue des femmes, Paris, Zones, 2018, 240 p.
Bibliographie
Œuvres artistiques
ABRAMOVIĆ Marina, The Kitchen. Homage to saint Therese, Madrid, La Fabrica, 2012
AERTSEN Pieter, Jésus chez Marthe et Marie, huile sur panneau de chêne, Vienne, Kunsthistorisches Museum, 1552
ATLA Augusta, Objets de femme, vidéo-performance, Copenhague, 2011
JABŁOŃSKA Elżbieta, Kuchnia, performance, Berlin, Akademie der Künste, 2013
JABŁOŃSKA Elżbieta, Supermother, photographie, Houston, Anya Tish gallery, 2002
JÜRGENSSEN Birgit, Hausfrauen - Küchenschürze, photographie, Vienne, Sammlung Verbund, 1975
ROSLER Martha, Semiotics of the Kitchen, vidéo-performance, New York, Electronic Arts Intermix, 1975
TROCKEL Rosemarie, Herde, Cologne, salon Verlag, 1997
Autres textes
HANISCH Carol, « The Personal is Political », in CROW Barbara A., (dir.), Radical feminism : A documentary reader, New York, NYU Press, 2000, pp. 113–117
LADERMAN UKELES Mierle, “Manifesto for Maintenance Art, 1969 ! Proposal for an Exhibition, ‘Care’”, in BURNHAM Jack, Problems of Criticism, New York, Artforum, 1971
Études
CHAMBON Gilles, « La cuisine entre scène de genre, nature morte, et parabole », publié le 21/09/2013, http://art-figuration.blogspot.com/2013/09/la-cuisine-entre-scene-de-genre-nature.html, consulté le 6/05/2022
CHOLLET Mona, Sorcières. La puissance invaincue des femmes, Paris, Zones, 2018
FEDERICI Silvia, Le Capitalisme patriarcal, Paris, La fabrique, 2019
KULTERMANN Udo, Leben und Kunst : zur Funktion der Intermedia, Tübingen, Ernst Wasmuth, 1970
PAPERMAN Patricia et LAUGIER, Sandra « Le souci des autres. Éthique et politique du care », Recherches familiales, n° 9, 2012, pp. 195-196
STAGI Luisa, « Mise en scène du genre dans les émissions culinaires italiennes », Journal des anthropologues, n° 140-141, 2015, pp. 80-81
Pour citer cet article
Priscilla Wind, « Femmes en cuisine dans la performance contemporaine », paru dans Loxias, 77., mis en ligne le 15 juin 2022, URL : http://revel.unice.fr/loxias/index.html/lodel/docannexe/file/7601/lodel/index.html?id=10025.
Auteurs
Maîtresse de conférences de littératures et civilisation germaniques à l’Université Clermont Auvergne, docteure en arts du spectacle de l’Université de Vienne et membre permanent du CELIS. Autrice d’une thèse sur « La notion de mise en scène dans les pièces d’Elfriede Jelinek », elle a publié plusieurs articles sur l’évolution des esthétiques dramatiques dans le théâtre contemporain, sur le corps scénique et les représentations genrées dans les arts scéniques contemporains. Elle concentre actuellement ses recherches sur les performances féministes depuis les années 1970 ainsi que sur les formes du théâtre documentaire.