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Nicolas Mazel  : 

Des lettres d’amour aux lettres sur l’amour : usages de la lettre en contexte (pseudo-)normatif dans le De amore d’André le Chapelain (xiie siècle)

Résumé

Le présent article vise à étudier la présence de la forme épistolaire au sein du De amore d’André le Chapelain, traité didactique destiné à l’éducation amoureuse d’un jeune élève nommé Gautier. L’usage de la lettre en contexte normatif constitue un écart par rapport à la tradition ovidienne des Héroïdes. André le Chapelain transforme ainsi la lettre d’amour en lettre sur l’amour. Cette étude entend montrer comment s’opère le passage entre ces deux modalités de la lettre. Entre héritage fictionnel des Héroïdes et nécessité didactique inhérente au genre du traité, une négociation entre la tradition et l’esprit scolastique s’établit autour de la forme et du contenu de la lettre, preuve de l’efficacité de l’épistolaire à dire l’amour.

Abstract

This article aims at studying the presence of the epistolary form within Andreas Capellanus’s Tractatus de amore, a didactic treatise intended for the amorous education of a young pupil named Galterius. The use of the letter in a normative context constitutes a shift from the Ovidian tradition of the Heroides. Andreas Capellanus thus transforms the love letter into a letter about love. This study intends to show how the transition between these two modalities of the letter takes place. Through the Heroides’ fictional heritage and the didactic necessity inherent to the treatise genre, a debate amongst tradition and the scholastic spirit is established about the form and the content of the letter, proof of the effectiveness of the epistolary to say love.

Index

Mots-clés : André le Chapelain , discours amoureux, épistolaire, héroïde, Ovide

Géographique : Nord de la France

Chronologique : XIIe siècle

Plan

Texte intégral

1Le De amore d’André le Chapelain se présente comme un traité didactique amoureux. Sur un modèle largement inspiré de l’Ars amatoria d’Ovide, l’auteur entend éduquer à l’amour son élève Gautier :

“Cogit me multum assidua tuae dilectionis instantia, Gualteri venerande amice, ut meo tibi debeam famine propalare mearumque nauum scriptis docere qualiter inter amantes illaesus possit amoris status conservari, pariterve qui non amantur quibus modis sibi cordi affixa valeant Veneris iacula declinare.”

La force de l’affection sans défaillance que j’éprouve pour toi, mon vénérable ami Gautier, me pousse instamment à te faire connaître de vive voix et à t’enseigner par mes écrits la façon dont deux amants peuvent préserver l’intégrité de leur amour de même que les moyens dont ceux qui ne sont pas aimés peuvent se débarrasser des flèches que Venus a fichées dans leur cœur1.

2Le statut de ce traité est, comme le note Jean-Yves Tilliette, « éminemment problématique2 ». Oscillant entre la galéjade et l’ouvrage sérieux, le De amore invite à l’amour mais se clôt pourtant par un mouvement palinodique. Francesca Battista résume ainsi la position de la critique à l’égard de l’œuvre :

“Da più di un secolo la ricerca si adopera a trovare una soluzione che apra la strada alla comprensione del tratto in cui la considerazione dell’amore non è univoca, ma sembra scindersi in tanti aspetti e correr dietro a motivi diversi, che a volte appaiono perfino contraddittori.”

Depuis plus d’un siècle, la recherche s’efforce de trouver une solution qui ouvre la voie à la juste compréhension du traité dans lequel la considération de l’amour n’est pas univoque, mais semble se scinder en tant d’aspects et courir après des motifs si variés, que parfois même ils paraissent contradictoires3.

3C’est donc surtout une question d’interprétation de l’ensemble du traité qui a dominé au sein de la critique. Notre étude vise quant à elle à expliquer la convocation de certaines formes d’écrit dans le traité.

4Nous aimerions nous intéresser plus particulièrement à un phénomène textuel présent dans le livre I du De amore, celui de l’insertion épistolaire. Le chapitre VI, intitulé « Combien y a-t-il de moyens pour obtenir l’amour et quels sont-ils ? », propose une série de dialogues assumés par des personnages classés par rang social. Le dialogue G met en scène un grand seigneur et une dame de la petite noblesse. Leur discussion les conduit à s’interroger sur l’existence ou non du véritable amour entre époux et sur la nécessité d’éprouver de la jalousie entre amants : « an scilicet iner coniugatos verus amor locum sibi valeat invenire, et an inter amantes vigens sit zelotypia comprobanda4 » (« est-ce que le véritable amour peut exister entre époux et faut-il éprouver une grande jalousie entre amants ? »). Le dialogue se dirigeant dangereusement vers l’aporie, ils décident d’écrire une lettre à Marie de Champagne, dont on connaît le rôle majeur pour le développement de l’éthique courtoise et de l’amour courtois5. Celle-ci leur répond que l’amour ne peut se perpétuer entre époux6.

5Au-delà de la réponse donnée par Marie de Champagne, il faut se pencher sur ce qui a motivé la convocation de la forme épistolaire dans un contexte amoureux, d’autant plus que ces deux lettres sont un hapax dans l’économie générale de l’œuvre.

6Le choix de la lettre constitue un choix auctorial significatif. Il dessine les contours d’un paradoxe dans l’écriture de l’œuvre : comment établir un traité, écrit en prose latine, avec l’exigence de vérité qu’il doit honorer, tout en y incorporant des formes qui appartiennent nettement à la fiction ? Où poser une frontière entre la lettre d’amour et la lettre sur l’amour dans l’écriture du Chapelain ? Nous verrons que l’auteur joue d’une certaine liberté de la forme et de ses contraintes grâce à laquelle la casuistique amoureuse peut avoir partie liée avec la fiction.

Ovide et les lettres : tradition et influences ovidiennes

Le patronage d’Ovide au XIIe siècle

7La rédaction du De amore, de même que la présence de lettres au sein de ce dernier sont inhérentes à une présence multi-scalaire d’Ovide au XIIe siècle. Historiquement, l’écriture du De amore est contemporaine d’une période, l’aetas ovidiana7, durant laquelle Ovide a « exercé sur les clercs médiévaux une attraction telle qu’on peut parler de fascination8 ». L’imprégnation ovidienne est manifeste dans le milieu qu’a fréquenté André le Chapelain. Le poète antique est un modèle ainsi qu’une autorité : on apprend le latin à partir de ses textes de même qu’on y prélève de nombreuses citations9 pour les recopier dans des ouvrages didactiques10. L’écriture du Chapelain est ainsi nimbée d’un « sentiment de la langue11 » ovidienne.

8Mais l’influence ovidienne se lit surtout dans le rôle décisif qu’a joué Ovide dans l’élaboration d’un discours amoureux. En effet, « les auteurs médiévaux voient en Ovide le maître de la passion amoureuse12 ». Ovide est perçu comme une autorité du savoir sur l’amour grâce à son œuvre érotique, que le Moyen Âge réunit sous le nom d’Ovidius minor13. Ainsi, le patronage d’Ovide est à envisager dans un rapport à la langue, au matériau didactique et à la thématique amoureuse.

9Dans le cadre de notre étude du chapitre VI du De amore, il convient également de considérer le rapport à l’histoire des formes littéraires. Dans le livre III de l’Art d’aimer, Ovide se présente comme le créateur du genre de l’amour épistolaire14 :

“Vel tibi conposita cantetur Epistula uoce ;
Ignotum hoc aliis ille nouauit opus ».”

Ou déclame avec art de lui quelque Héroïde,
Genre inconnu jusqu’alors, qu’il créa15.

10Le choix de la lettre chez André le Chapelain n’est donc pas anodin : l’amour constitue bien plus qu’une thématique pour la lettre. Le De Amore diffère toutefois des Héroïdes en ce qu’il subordonne l’amour épistolaire à des enjeux normatifs et didactiques. Si le poète antique l’inscrit principalement dans une logique sérielle : il est un phénomène textuel circonscrit chez le clerc. Autrement dit, le De amore redéfinit les enjeux et les contours de la lettre d’amour pour les besoins de son traité.

André le Chapelain au carrefour de deux traditions

11La présence de lettres dans le De Amore se trouve au carrefour de deux traditions antique et médiévale : la lettre d’amour ovidienne et la scolastique. La rencontre de ces deux traditions ne semble pas aller de soi a priori. Le modèle ovidien est un texte versifié et doté d’une prosodie là où le modèle scolastique utilise la prose et l’idiome latin dans une logique méthodique et normative. Le traité fonctionne sur un principe de chapitrage adossé à des questions selon un ordre réglé. La réponse de Marie de Champagne prend la forme de l’exercice de la disputatio qui en expose de manière critique le traitement : « Ideoque utriusque diligenter assertione perspecta et ipsa veritate omnimoda inquisita indagine praesens litigium tali voluimus iudicio terminare16 » (« Ayant donc étudié avec soin vos deux thèses et ayant recherché la vérité par tous les moyens, nous avons voulu conclure le débat par le jugement qui suit »).

12Le modèle ovidien se retrouve par là fortement régi par la structure de pensée du traité. Le discours amoureux est désormais plus un discours sur l’amour mais il épouse toutefois encore une forme qui est significative du point de vue de l’amour. Il faut donc plutôt considérer le continuum qui unit entre l’héroïde et les lettres du De amore dans l’optique d’une bigarrure des discours. La rencontre des deux traditions rend compte d’une négociation entre le matériau amoureux et sa forme d’une part et l’appareil scolastique d’autre part. Étudions tout d’abord comment s’élabore l’auctoritas présidant à l’établissement du savoir amoureux.

L’auctoritas : figures d’autorité et construction du discours

13Le concept d’auctoritas au Moyen Âge est lié au substantif auctor sur lequel il se forme. L’auctoritas met en jeu les notions de modèle, de prestige, de crédit. De fait, l’auctor est celui qui fait autorité avant d’être uniquement l’écrivain. L’acte d’écriture est subordonné à une production de textes auxquels on puisse se référer avec obédience. L’autorité est en cela avant tout du domaine « de la vie intellectuelle17 ».

14En tant qu’œuvre didactique, le De amore entretient a priori une forte proximité avec ce concept. Or il est très rare de croiser des figures d’autorité dans le traité si ce n’est le Chapelain lui-même18. Il s’avère que le traité remet en question son rapport aux autorités. Les deux lettres du chapitre VI s’inscrivent pleinement dans ce mouvement. Les deux personnages s’adressent à Marie de Champagne pour savoir si le véritable amour peut exister entre époux et si les amants doivent éprouver de la jalousie entre eux. La présence de Marie de Champagne comme autorité est le signe d’un écart dans le processus de sélection des autorités communément admises. En effet, ce ne sont pas les autorités convoquées habituellement par le discours ecclésiastique qui encadrent ici le propos. Le traité intègre des autorités profanes. Ce sont des dames19 qui entreprennent de légitimer ce qui s’établit comme l’écriture d’un savoir amoureux. On peut s’interroger sur un tel truchement des autorités dans le De amore. Cette substitution des autorités est le résultat d’un jeu des personae orchestré par le Chapelain. Ce dernier a déjà pris la posture du praeceptor amoris propre à Ovide dans l’Art d’aimer20 lorsqu’il interpellait son élève Gautier au seuil du traité21. Plus loin, il prenait aussi le masque du dieu Amour à la suite des douze règles essentielles de l’amour22.

15En déléguant sa voix à Marie de Champagne, André le Chapelain érige la comtesse au rang d’autorité amoureuse. La critique a analysé cette présence de Marie de Champagne de plusieurs façons. Du point de vue de l’histoire littéraire, Pascale Bourgain a montré qu’André le Chapelain attribuait à la comtesse et à sa mère « la responsabilité de promouvoir des thèmes littéraires23 » et que leur patronage était « sans doute un procédé pour accepter d’une certaine façon les modes littéraires, jusque-là peu prisées à la cour même24. » On voit à quel point l’auteur joue sur le statut social des figures féminines sous lesquelles il se glisse, quand bien même leur présence dans un traité en latin25 ne va pas de soi. De son côté, Michèle Gally a proposé de voir derrière la présence de Marie de Champagne un jeu entre « le pouvoir du prince et l’autorité de l’écrivain26 ». Une transaction a lieu à l’échelle du texte : André le Chapelain confie à Marie de Champagne la responsabilité de la fabrique du discours amoureux, et « en retour légitime sa propre autorité sur cet échange27 ».

16Une autre interprétation est également possible si on considère la présence de Marie de Champagne par rapport à la forme de la lettre. La forme épistolaire demeure profondément marquée par l’héritage des Héroïdes dont le discours est tenu par des figures féminines. Sans aller jusqu’à faire de la lettre rédigée par Marie de Champagne une héroïde, on peut tout de même constater plusieurs similitudes d’une lettre à l’autre : l’élaboration d’un discours amoureux, la nécessaire présence d’une voix féminine et la renommée de cette même voix. Celle-ci provient d’une femme illustre pour reprendre la formule de Boccace. Discours, figure et notoriété relient d’une certaine façon la lettre de Marie de Champagne à la tradition ovidienne. La forme amoureuse qu’est la lettre se devait d’y inscrire une présence féminine pour légitimer sa parole.

17Sans doute le masque de Marie de Champagne permet-il à André le Chapelain de développer un discours qui dévie fortement de sa position de clerc28. Car le jugement que rend la comtesse s’inscrit tout à fait en contrepoint de la position de l’Église à l’égard du mariage. Pour Marie de Champagne, « le mariage ne saurait être le lieu de l’épanouissement amoureux29 » :

“Sed et alia istud ratione asserimus, quia praeceptum tradit amoris quod nulla etiam coniugata regis poterit amoris praemio coronari nisi extra coniugii foedera ipsius amoris militiae cernatur adiuncta. [399] Alia vero regula docet amoris neminem posse duorum sauciari amore. Merito ergo inter coniugatos sua non poterit amor iura cognoscere. Sed et alia quidem ratio eis obstare videtur, quia vera inter eos zelotypia inveniri non potest, sine qua verus amor esse non valet, ipsius amoris norma testante quae dicit : qui non zelat amare non potest.”

Mais notre affirmation s’appuie sur un autre argument encore : un précepte d’amour nous apprend qu’aucune épouse ne pourra obtenir la récompense du roi d’Amour, à moins d’être enrôlée dans sa chevalerie en dehors des liens du mariage. Et au contraire, une autre règle d’Amour nous enseigne que nul ne peut aimer deux personnes à la fois. Il est donc juste de dire que l’amour ne peut étendre ses droits entre époux. Mais une autre raison semble encore s’y opposer : c’est qu’entre époux il ne peut exister de véritable jalousie et sans elle il ne peut y avoir d’amant véritable, comme l’atteste la règle d’amour : « Qui n’est pas jaloux ne peut aimer30. »

18Le jugement est prescriptif, comme en témoigne la modalité déontique employée dans la réponse. Le discours de l’autorité repose sur l’usage du polyptote du verbe posse nié par l’adverbe de négation non31. Cet effet stylistique établit une règle au sujet de ce qui peut être et de ce qui ne peut pas être. La convocation du présent (non potest) et du futur (non poterit) lie contemporanéité et postériorité dans un mouvement de négation qui clôt la double interrogation ouverte par les deux personnages.

19Ainsi, pour rendre son verdict, Marie de Champagne s’appuie sur une syntaxe normative. Toutefois, on observe d’autres ressorts interviennent dans sa lettre pour bâtir le cadre du jugement, et plus globalement dans l’économie des deux lettres. Si l’autorité fait référence au roi Amour pour sceller sa réponse, c’est que sa parole s’inscrit dans un univers de référence dont elle est la représentante. La rigidité de la casuistique amoureuse est tempérée par l’utilisation de détours fictionnels.

La fiction comme renfort textuel

20Comme le note Claude Buridant, « si l’appareil logique peut paraître assez lourd, [et] si le style didactique du Chapelain a sans doute trop de rigueur », il semble toutefois que l’espace de la lettre entraîne une détente de l’écriture scolastique. En effet, les deux lettres du chapitre sont des exemples d’extraits du traité où « la pensée se brode sur un canevas de thèmes arthuriens32 » selon la formule de Paul Zumthor ». Le Chapelain y intègre des motifs constitutifs de l’amour courtois, notamment le motif du locus amoenus.

21Le cadre spatio-temporel est installé dans la première lettre, à la suite du développement métaphorique de la fontaine de science :

22“Quadam ergo die, dum sub mirae altitudinis et extensae nimis latitudinis umbra pini sederemus et amoris essemus penitus otio mancipati eiusque suavi et acerrimo disputationis conflictu studeremus investigare mandata”

23Donc, un jour que nous étions assis à l’ombre d’un pin d’une hauteur extraordinaire et d’une largeur énorme, nous nous abandonnions sans réserves au loisir de l’amour et nous nous appliquions à examiner ses préceptes dans un débat aimable, mais animé33.

24On constate d’emblée que la dimension évasive de la date du récit participe d’un flou temporel nécessaire au cadre du locus amoenus. La mention « quadam die » est une indication temporelle qui permet d’empêcher tout ancrage temporel entre l’événement raconté et le motif lui-même. En d’autres termes, la mention factice de la date garantit l’applicabilité du motif à une autre situation donnée.

25Le lieu décrit répond lui aussi à l’exigence des marqueurs du motif. Il prend des allures de jardin par la mention du pin, de même que sa quiétude autorise les personnages à discuter d’amour sans ambages et à l’abri de tout regard extérieur.

26Ce micro-récit développe ainsi une introduction à la requête au moyen d’une « scénographie elliptique34 » qui rappelle la connivence entre un motif et une forme dont la thématique amoureuse est le dénominateur commun. Mise en scène et mise en question du discours amoureux ont ici partie liée.

27Le détour par la fiction constitue dès lors une modalité de la fixation du savoir dans les lettres du Chapelain. La réponse de Marie de Champagne relève de ce même régime discursif. L’épistolière achève sa lettre par la date de rédaction : « Ab anno MCLXXIIII Kal. maii. Indictione VII. » Là encore, ces indications temporelles sont les marques d’une datation amoureuse. F. Schlösser rappelle que 1174 renvoie à la période de composition du Lancelot. La date d’écriture de la lettre se fait donc l’écho d’un développement contemporain de la littérature courtoise. C’est par conséquent une temporalité amoureuse qui régit les lettres. Parler d’amour nécessite d’inscrire son propos dans un cadre spatio-temporel propre à l’amour.

28Cette subversion des seuils de la lettre trouve sa conclusion dans la suite de la date que Claude Buridant analyse comme une périphrase désignant le premier mai. Le locus amoenus de la première lettre trouve son pendant dans la clôture de la seconde lettre évoquant par sa date la reverdie. Du locus amoenus à la reverdie, l’écriture didactique mobilise bien ces artifices dans sa logique. Aussi n’est-il pas anodin de constater que la mention de la reverdie parachève aussi bien la lettre que le chapitre lui-même. Le savoir amoureux est donc tributaire d’un cadre amoureux qui lui fournit des scénarios et une forme (la lettre) pour se constituer.

29Mais une telle configuration est avant tout permise grâce à la souplesse qu’offre la forme de la lettre.

Les possibles de la lettre

30L’utilisation de la forme épistolaire dans le De amore marque ainsi une étape cruciale dans l’évolution de ses usages. Entre lettre d’amour et lettre sur l’amour, André le Chapelain use des possibles de la lettre et de sa ductilité.

31L’une des raisons qui explique cette plasticité de la lettre est la relative souplesse dont jouit la forme au Moyen Âge. Comme le note Hélène Sirantoine, « en principe le canon épistolaire veut qu’une lettre soit composée de cinq parties (salutatio, exordium, narratio, petitio, conclusio), au Moyen Âge ce sont surtout l’adresse et le salut qui s’affirment en “signes indubitables35” de l’épistolaire36 ». Cette règle, valable du point de vue de l’ars dictaminis, n’est pas suivie scrupuleusement dans le De amore. Cette prise de distance est surtout visible dans le traitement de la narratio de la lettre envoyée à Marie de Champagne. Elle outrepasse la simple formulation de l’objet de la requête et ne répond pas à l’exigence de brevitas :

“[…] duplicis dubitationis nos coepit instigare discretio et laboriosi fatigare sermones, an scilicet inter coniugatos verus amor locum sibi valeat invenire, et an inter amantes vigens sit zelotypia comprobanda. Quarum quidem dubitationum quum frequens inter nos valde disputatio verteretur, et uterque nostrum suam partem videretur rationabili sententia roborare, neuter alterius voluit acquiescere voluntati vel productis rationibus consentire.”

Un différend s’éleva alors sur une double question dont la discussion difficile finit par nous épuiser : est-ce que le véritable amour peut exister entre époux et faut-il éprouver une grande jalousie entre amants ? La discussion sur cette double question n’en finissait point, chacun de nous semblait soutenir son opinion par des arguments raisonnables et aucun ne voulait se ranger à la thèse de l’autre ou céder aux raisons qu’il avançait37.

32Outre le micro-récit que nous avons déjà analysé, et qui, dans le cadre de la narratio, confine à la digression, on peut voir que les arguments des deux personnages ne sont pas donnés dans la lettre. Seul le lecteur les connaît, puisqu’il a lu le dialogue précédant l’écriture de la lettre. La principale destinataire n’en prend pas connaissance à la lecture, ou du moins n’en prend-elle pas connaissance dans la lettre :

“Super quo vestrum postulamus arbitrium utriusque vobis partis plenarie disputatione transmissa, ut sic a vobis subtiliter veritate discussa nostrum valeat iurgium competenti fine sopiri et iusta definitione sedari.”

C’est sur ce litige que nous vous demandons votre arbitrage et nous vous envoyons l’argumentation complète de chacune des deux parties afin que, ayant minutieusement examiné la vérité vous puissiez, en juge compétent, apaiser notre dispute et la faire cesser par une décision équitable38.

33Le contenu est rejeté dans un hors-texte qui interdit d’en connaître la formulation exacte. De fait, les arguments des deux partis sont résumés par le biais d’un discours narrativisé dont l’objectif vise moins à la synthèse qu’à la fictionnalisation d’une tension entre les personnages et à la nécessité cruciale d’y apporter une réponse définitive. Le Chapelain insère donc du jeu dans les étapes de la lettre. Toutefois l’intégration de ces séquences, éléments surnuméraires de l’ordre canonique de la composition épistolaire, ne remet pas en cause l’équilibre de la lettre même.

34Cette capacité de la lettre à se mouvoir est le signe une adéquation entre la forme de la lettre et la forme de l’amour. André le Chapelain fait de l’espace de la lettre un lieu où se rencontrent des matériaux hétérogènes. À l’instar d’Ovide et de ses Héroïdes, l’auteur mêle « hybridité des sources et des modalités de mise en œuvre39 » : la composante didactique, liée à l’économie générale du traité, la composante historique appelée par la présence de Marie de Champagne et la composante littéraire introduite en premier lieu par l’influence de la comtesse dans la diffusion de la courtoisie ainsi que par la présence des motifs qui lui sont afférents. Cette configuration rend compte d’une évolution des usages de la lettre, et surtout, d’une récupération progressive de cette forme par la littérature courtoise. En cela, ces deux lettres peuvent être perçues comme un exemple de transition entre une figuration de l’univers courtois et de ses représentants dans un contexte auxquels ils n’appartiennent pas, et une reprise complète de la forme épistolaire dans ce même univers40.

35Ainsi, le dispositif mis en place montre l’aptitude de l’auteur à manier à sa guise la forme épistolaire, et plus précisément, à articuler narration et commentaire en contexte amoureux. C’est en ce sens que l’on peut proposer de voir dans ces deux lettres l’écriture d’une courte et plaisante fiction didactique. La première présente la fable avec ses personnages et leur querelle d’amour, la seconde se charge d’apporter la leçon à tirer de cette casuistique amoureuse narrée, sans pour autant quitter41 le terrain de la fable. Mais ce diptyque repose lui aussi sur les fondations de la relation épistolaire qu’André le Chapelain détourne à son avantage. La réponse du destinataire, au fondement de la correspondance épistolaire, devient alors l’occasion d’une articulation en deux temps de la fable.

Conclusion

36On le voit donc, André le Chapelain fait un usage novateur de la lettre dans son traité. La disputatio fonctionne en synergie avec un « modèle fictionnel42 » empreint de littérature courtoise. La lettre d’amour se confond à certains égards avec la lettre sur l’amour, tant et si bien qu’elle inscrit la fiction comme élément-clé de l’enseignement amoureux. La raideur du discours scolastique est étroitement associée à une souplesse de la forme épistolaire, capable d’intégrer des éléments hétérogènes sans perdre son unité et son sens. En faisant appel à une forme marquée en contexte amoureux, l’auteur du traité ravive ainsi l’esprit ovidien aux prémices de son œuvre.

37Bibliographie récapitulative

38Œuvre d’André le Chapelain

Autres textes

OVIDE, De l’Amour. Les Amours. L’Art d’aimer. Les Remèdes à l’amour, textes établis par Henri Bornecque, émendés, présentés et traduits par Olivier Sers, suivis d’un index des noms propres, Paris, Les Belles Lettres, 2016

OVIDE, Héroïdes, texte établi par Henri Bornecque, traduit par Marcel Prévost, [1928], Paris, Les Belles Lettres, C.U.F, 2002

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Notes de bas de page numériques

1 Andreas Capellanus, De amore, consultable sur http://www.thelatinlibrary.com/capellanus/capellanus1.html. Pour la traduction française, nous renvoyons à l’édition Klincksieck en 1974 de Cl. Buridant, p. 45.

2 Jean-Yves Tillette, « Amor est passio innata ex visione procedens. Amour et vision dans le Tractatus amoris d’André le Chapelain, Micrologus, 1998, vol. 6, p. 189.

3 Francesca Battista, I volti dell’amore. Pluralità e intertestualità nel De amore di Andrea Capellano, Roma, Aracne, 2010, p. 49-50. Nous traduisons. Nous renvoyons également à la synthèse d’Alfred Karnein au début de son article « La réception du De amore d’André le Chapelain au XIIIe siècle », Romania, tome 102, n° 407, p. 324-325.

4 Andreas Capellanus, De amore, consultable sur http://www.thelatinlibrary.com/capellanus/capellanus1.html, éd. Klincksieck, p. 111 pour le texte traduit.

5 Adeline Richard-Duperray, L’amour courtois. Une notion à redéfinir, PUP, 2017, p. 13.

6 Andreas Capellanus, De amore, consultable sur http://www.thelatinlibrary.com/capellanus/capellanus1.html, éd. Klincksieck, p. 112 pour le texte traduit.

7 Sur la notion d’aetas ovidiana, nous renvoyons à l’excellent chapitre de Jean-Yves Tilliette intitulé « Savants et poètes du Moyen Âge face à Ovide : les débuts de l’aetas ovidiana (v. 1050-v. 1200) », in Michelangelo Picone, Bernhard Zimmermann (dir.), Ovidius redivivus, von Ovid zu Dante, Stuttgart, M&P, 1994, p. 63-104.

8 Marylene Possamai-Perez, « Ovide au Moyen Âge », 2008, p. 2, https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00379427/document (cons. le 10 juin 2022)

9 Birger Munk Olsen, L’étude des auteurs classiques latins aux XIe et XIIe siècles. Tome II, Catalogue des manuscrits classiques latins copiés du IXe au XIIe siècle, Livius-Vitruvius, florilèges, essais de plume, Paris, Éditions du C.N.R.S, 1982-1989.

10 Il faut noter à cet égard que plusieurs œuvres d’Ovide telles que l’Art d’aimer faisaient partie intégrante des programmes scolaires. Certains passages étaient également commentés sous la forme dite d’accessus. Sur ce sujet, voir Richard Trachsler, Clara Wille, « Les traductions vernaculaires d’Ovide au Moyen Âge et les commentaires latins. Le cas de l’Ars amatoria », Medioevi, n° 4, 2018, p. 177.

11 Pierre Laurens, Le sentiment de la langue. Voyage à travers le pays latin, Paris, Les Belles Lettres, 2021.

12 Laurence Harf-Lancner, Laurence Mathey-Mille, Michelle Szkilnik (dir.), Ovide métamorphosé. Les lecteurs médiévaux d’Ovide, Paris, Presses Sorbonne-Nouvelle, 2009, p. 11.

13 C’est-à-dire l’Art d’aimer, les Remèdes à l’amour, les Héroïdes et les Amours.

14 Dominique Millet Gérard, Le cœur et le cri. Variation sur l’héroïde et l’amour épistolaire, Paris, Honoré Champion, 2004, p. 16.

15 Ovide, De l’Amour. Les Amours. L’Art d’aimer. Les Remèdes à l’amour, textes établis par Henri Bornecque, émendés, présentés et traduits par Olivier Sers, suivis d’un index des noms propres, Paris, Les Belles Lettres, 2016, p. 300-301.

16 Andreas Capellanus, De amore, consultable sur http://www.thelatinlibrary.com/capellanus/capellanus1.html. Pour la traduction française, nous renvoyons à l’édition chez Klincksieck en 1974 de Cl. Buridant, voir p. 111.

17 Michel Zink, « Auteur et autorité au Moyen Âge », in Antoine Compagnon (dir.), De l’autorité. Colloque annuel du Collège de France, Odile Jacob, 2008, pp. 143-158. Ici p. 143.

18 Michèle Gally, « Quand l’art d’aimer était mis à l’index… », Romania, tome 113 n° 451-452, 1992, p. 430.

19 D’autres figures féminines comme Aliénor d’Aquitaine, mère de Marie de Champagne, rendent des jugements d’amour dans le De amore.

20 Ovide, Art d’aimer, I, 17.

21 Andreas Capellanus, De amore, consultable sur http://www.thelatinlibrary.com/capellanus/capellanus1.html. Pour la traduction française, nous renvoyons à l’édition chez Klincksieck en 1974 de Cl. Buridant, voir p. 45.

22 Cf. p. 91.

23 Pascale Bourgain. « Aliénor d’Aquitaine et Marie de Champagne mises en cause par André le Chapelain », Cahiers de civilisation médiévale, 29e année (n° 113-114), janvier-juin 1986. Y a-t-il une civilisation du monde plantagenêt ? Actes du Colloque d’Histoire Médiévale. Fontevraud, 26-28 avril 1984, p. 35.

24 Pascale Bourgain. « Aliénor d’Aquitaine et Marie de Champagne mises en cause par André le Chapelain », Cahiers de civilisation médiévale, 29e année (n° 113-114), Janvier-juin 1986. Y a-t-il une civilisation du monde plantagenêt ? Actes du Colloque d’Histoire Médiévale. Fontevraud, 26-28 avril 1984, p. 35.

25 Pascale Bourgain note qu’Aliénor d’Aquitaine et sa fille n’ont jamais patronné d’écrit en latin.

26 Michèle Gally, « Quand l’art d’aimer était mis à l’index.... », Romania, tome 113 n° 451-452, 1992, p. 430.

27 Michèle Gally, « Quand l’art d’aimer était mis à l’index.... », Romania, tome 113 n° 451-452, 1992, p. 430.

28 Pascale Bourgain, « Aliénor d’Aquitaine et Marie de Champagne mises en cause par André le Chapelain », Cahiers de civilisation médiévale, 29e année (n° 113-114), Janvier-juin 1986. Y a-t-il une civilisation du monde plantagenêt ? Actes du Colloque d’Histoire Médiévale. Fontevraud, 26-28 avril 1984, p. 35.

29 Adeline Richard-Duperray, L’amour courtois. Une notion à redéfinir, PUP, 2017, p. 22.

30 Andreas Capellanus, De amore, consultable sur http://www.thelatinlibrary.com/capellanus/capellanus1.html. Pour la traduction française, nous renvoyons à l’édition chez Klincksieck en 1974 de Cl. Buridant, voir p. 112.

31 Dans le cas de poterit, c’est le déterminant négatif nulla qui exprime la négation.

32 Paul Zumthor, « Notes en marge du Traité de l’amour d’André le Chapelain, Zeitschrift für romanische Philologie, n° 63, 1943, p. 179, note 3.

33 Andreas Capellanus, De amore, consultable sur http://www.thelatinlibrary.com/capellanus/capellanus1.html. Pour la traduction française, nous renvoyons à l’édition chez Klincksieck en 1974 de Cl. Buridant, voir p. 110.

34 Dominique Rabaté, « Poésie et autobiographie : d’un autre caractère », in Michel Braud et Valéry Hugotte (dir.), L’irressemblance : Poésie et autobiographie, Pessac, Presses Universitaires de Bordeaux, 2007, p. 36-47, https://books.openedition.org/pub/7022?lang=fr (cons. le 27 juin 2022).

35 Giles Constable, Letters and letter-collections, Turnhout, Brepols, 1976, p. 17.

36 Hélène Sirantoine (ed.), « La lettre diplomatique à la croisée des genres », dans Epistola 2. La lettre diplomatique : Écriture épistolaire et actes de la pratique dans l’Occident latin médiéval, Madrid, Casa de Velázquez, 2018, p. 1-7, https://books.openedition.org/cvz/6780 (cons. le 27 juin 2022).

37 Andreas Capellanus, De amore, consultable sur http://www.thelatinlibrary.com/capellanus/capellanus1.html. Pour la traduction française, nous renvoyons à l’édition chez Klincksieck en 1974 de Cl. Buridant, voir p. 111.

38 Andreas Capellanus, De amore, consultable sur http://www.thelatinlibrary.com/capellanus/capellanus1.html. Pour la traduction française, nous renvoyons à l’édition chez Klincksieck en 1974 de Cl. Buridant, voir p. 111.

39 Jacqueline Dangel, « Tragédie et élégie en interface dans l’œuvre ovidienne : essai sur les frontières génériques », in Isabelle Jouteur (dir.), La théâtralité de l’œuvre ovidienne, Paris, A.D.R.A-NANCY, 2009, p. 23.

40 On peut penser notamment au lai de Milon de Marie de France dont l’écriture est contemporaine à celle du De amore.

41 Rappelons la datation subvertie du 1er mai et le fait que Marie de France assure des jugements d’amour en langue latine et non en langue vernaculaire.

42 Corinne Denoyelle, « Les dialogues amoureux dans le Tractatus de Amore : l’autorité à l’épreuve de la dialectique, entre disputatio et fiction paradigmatique : Comparaison avec la traduction du XIIIe siècle », Le dialogue : ou les enjeux d’un choix d’écriture (pays de langues romanes), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2006, p. 69.

Bibliographie

Andreae Capellani regii Francorum de Amore libri tres, édition de Emil Trojel, Copenhague, Hauniae, « Libraria Gadiana », 1892

ANDRÉ LE CHAPELAIN, Traité de l’amour courtois, introduction, traduction et notes par Claude Buridant, Paris, Klincksieck, 1974, « Bibliothèque française et romane »

Pour citer cet article

Nicolas Mazel, « Des lettres d’amour aux lettres sur l’amour : usages de la lettre en contexte (pseudo-)normatif dans le De amore d’André le Chapelain (xiie siècle) », paru dans Loxias, 78., mis en ligne le 14 septembre 2022, URL : http://revel.unice.fr/loxias/index.html/lodel/docannexe/file/7601/lodel/lodel/index.html?id=10064.


Auteurs

Nicolas Mazel

Nicolas Mazel est doctorant contractuel en première année de thèse à l’Université Lumière Lyon 2 et à l’Université de Genève, sous la direction de Marylène Possamaï et de Cédric Giraud. Sa thèse, intitulée « Fortune des Héroïdes d’Ovide au Moyen Âge (XIe-XVe siècles : domaines français, latin et italien) », entend montrer comment s’est opérée la réception des Héroïdes d’Ovide au Moyen Âge et dans quelle mesure l’œuvre a influencé la production littéraire sur plusieurs siècles. Le corpus, constitué de traductions et de réécritures, se veut représentatif des différentes formes qu’a pu prendre la lettre-héroïde au cours des siècles. Il prend également en compte la composante philologique du texte des Héroïdes dans l’optique d’évaluer comment et par qui ces lettres ont été lues.