Loxias | 73. Lazare et le Mauvais riche. Regards croisés sur les réceptions d'une parabole | I. Lazare et le Mauvais riche. Regards croisés sur les réceptions d'une parabole | 1. Recherches interdisciplinaires: -- mise en texte, mise en image, mise en drame de la parabole du Mauvais riche aux XIIe-XVIe siècles 

Océane Acquier  : 

La parabole de Lazare et du Mauvais riche dans les peintures murales de l’église Nostra Signora delle Grazie (Montegrazie, Imperia) : un exemple des rapports complexes entre images, inscriptions et paroles du prédicateur

Résumé

L’image singulière qu’est La mort tirant sa flèche, peinte sur le mur nord du sanctuaire Nostra Signora delle Grazie à Imperia (Montegrazie) en 1483, est à première vue centrée sur le procès d’un noble et sa damnation. À l’étude, elle se révèle étroitement liée à la parabole de Lazare tel que le présente saint Luc dans son évangile. Cette scène mêle aux figures des inscriptions, dont le dispositif visuel a ici été analysé autant que le contenu sémantique. Les objets épigraphiques, mis en lumière grâce à des techniques d’infographie, permettent de penser cette scène en elle-même, dans son cycle peint, au sein des peintures du lieu, mais aussi en diachronie, pour être finalement mise en rapport avec la figure d’un maître de la parole, Bernardin de Feltre. La pratique de la prédication apparaît comme une clef de lecture permettant de comprendre les peintures du sanctuaire. Aux écritures épigraphiques font écho des sermons prononcés par des prédicateurs issus des ordres mendiants qui sillonnaient le sud des Alpes, principalement au XVe siècle, et qui favorisèrent en cette région le développement des Monts-de-piété.

Abstract

At first glance, the singular image of Death shooting his arrow, painted on the north wall of the sanctuary of Nostra Signora delle Grazie in Imperia (Montegrazie) in 1483, focuses on the trial of a nobleman and on his damnation. But it turns out to be closely linked with the parable of Lazarus as presented by Saint Luke in his gospel. This scene counts non only characters but also painted inscriptions, which have been analysed as well as their semantic content. The epigraphic objects brought to light thanks to computer graphics techniques, allow to consider this image in itself, in its painted cycle, within the paintings of the place, but also in diachrony, and finally in its connection to a master of the word, Bernardin de Feltre. The practice of preaching appears as a key to understanding the paintings in the sanctuary. The epigraphic inscriptions respond to sermons delivered by preachers from the mendicant orders who criss-crossed the Southern Alps, mainly in the 15th century, and who promoted the Monti di Pietà in this region.

Plan

Texte intégral

La figuration de la parabole de Lazare et du Mauvais riche ne constitue pas un thème prédominant dans la peinture monumentale de la fin du Moyen Âge. De fait, ce récit néotestamentaire (Lc 16,19-31) voit sa présence figurée sur ce medium s’amoindrir dès le début du XIVe siècle, et même disparaître, après avoir atteint son apogée entre le XIe et le XIIIe siècle1. Le corpus de peintures murales recouvrant des lieux de culte au sein des régions du sud de l’arc alpin (Provence orientale, Ligurie et Piémont)2 ne fait pas exception à ce constat. Le récit parabolique de Luc n’est peint qu’une seule fois dans les 285 lieux de culte que nous avons prospectés, et encore, il ne peut être appréhendé puis lu ainsi qu’en décryptant la totalité des cycles muraux du monument, qu’en pensant les images dans leur lieu3.

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Figure 1 : Les peintures murales du mur gouttereau nord du sanctuaire Nostra Signora delle Grazie, Imperia (Montegrazie). Cl., DAO O. Acquier, S. Sorin

La scène, objet de l’examen qui va suivre, est appelée traditionnellement La mort tirant sa flèche ; elle a été peinte en 1483 par les frères Tommaso et Matteo Biazaci, dans le sanctuaire Nostra Signora delle Grazie à Imperia (Montegrazie), sur le parement interne du mur gouttereau nord. Cet épisode est le plus oriental du registre central des peintures du mur en question4 (voir Fig. 1).

Une scène unique : La mort tirant sa flèche

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Figure 2 : Composition de la scène : La mort tirant sa flèche. Mur gouttereau nord. Sanctuaire Nostra Signora delle Grazie, Imperia (Montegrazie). Cl., DAO O. Acquier

Dans un vaste espace couvert et percé de baies géminées, l’intrigue converge autour d’un homme richement vêtu. Ce dernier est cerné par un couple de figures contraires, l’une angélique et l’autre démoniaque. Par un jeu visuel d’antithèses, l’incarnation du Bien et celle du Mal s’opposent en tous points, par leurs postures (d’aplomb et agenouillée), par leurs situations autour de la figure centrale (en face et derrière), par la forme que prend la consignation de leurs paroles (ascendante et descendante), ou encore par l’orientation de leurs regards (levé et baissé) (voir Fig. 2). Le protagoniste, qui se tient debout, les bras croisés, ne prend pas part au dialogue se déroulant autour de lui5 : un échange dans le dispositif visuel des inscriptions crée une composition circulaire. Une courbe naît du discours du démon, contenu dans un phylactère et émergeant de sa plume. Ces paroles viennent s’enrouler contre l’oreille de son destinataire. La séduction ainsi figurée suggère la tenue d’un discours mielleux et sournois. À l’inverse, l’ordre intimé au noble par l’ange, consigné lui aussi dans un phylactère, est peint dans la direction opposée à l’homme qui en est pourtant le destinataire. Les mots tombent et frôlent le hors-champ de l’édifice, écrin de l’intrigue, de sorte que le discours angélique ne semble pas avoir touché le noble. La scène ainsi composée n’est pas sans évoquer les illustrations des artes bene moriendi6, où s’affrontent les figures du Bien et du Mal autour d’une âme mourante soumise à la tentation7 et dont le penchant vers le malin est parfois manifeste, comme dans la peinture murale de Montegrazie.

Le démon tentateur agit par deux fois : il discourt mais aussi écrit. Un livre ouvert est posé en équilibre sur son genou gauche (voir Fig. 2). Ce diable posséderait donc un statut spécifique : celui de greffier. Dans les années 1450-1550, ce démon singulier, subalterne du souverain de l’enfer, se fait de plus en plus présent dans la littérature, notamment dans les mystères et les moralités d’expression française. Il devient même un topos : une figure éminente lors des scènes de jugement individuel post mortem. Les péchés commis par le jugé sont consignés par un démon scribe, dans le but d’être exposés au tribunal céleste puis de faire poids dans la balance. C’est ainsi que, dans le Jeu des sept pechiés et des sept vertus (dernier quart du XVe siècle), le « dyable clerque » se voit confier la tâche de noter les fautes des vices sur un registre8. Dans le mystère hagiographique français La Pacience de Job, daté de 1478, c’est à Beelzebuth qu’est confié le travail de lister les péchés de l’âme jugée9. De son côté, le démon Tutivillus consigne les omissions des chrétiens lors des prières dans le Mystère saint Loÿs daté de 147010. Notons encore le personnage de Satan greffier mis en scène dans le Mystère de saint Martin (1496)11. Malgré la diversité de ses désignations, la mission du diable secrétaire reste identique : consigner sur un registre les péchés d’une âme en train d’être jugée.

Le diable écrivain de la peinture de Montegrazie semble être une mise en image de ces démons notaires bien attestés dans les mystères à la fin du XVe siècle. Mais un texte particulier semble plus proche encore de la peinture étudiée. Il s’agit d’un diable présent dans Le Pèlerinage de l’âme de Guillaume de Digulleville12. Cette œuvre narrative, connue pour avoir inspiré les fatistes de la fin du Moyen Âge, a pu de même inspirer l’image du diable notaire de la peinture de Montegrazie. Le démon nommé Sathan13 écrit sous la dictée de Synderesis lorsque cette dernière prononce son réquisitoire à l’encontre de Guillaume de Digulleville14 lors de son procès. Il semble que l’on ait affaire à l’une des premières mentions de démon greffier, personnage qui reparaîtra comme un leitmotiv dans les réécritures ou adaptations de ce poème écrit entre 1355 et 1358 par le moine de Chaalis. Dans Le Pèlerinage de l’âme, ce démon est finalement l’auteur d’un registre diabolique des péchés15. Guillaume de Digulleville lui donne même le rôle de tabellion16 lors de son procès devant l’archange saint Michel17. Sathan produit en effet les documents à charge, « tabellionnage »18, contre l’âme du moine cistercien qui vient d’assister en rêve à ses propres funérailles. La production de ces écrits a pour objectif de faire poids dans la balance19, afin d’obtenir la damnation de l’âme jugée. Le parallélisme entre cette scène racontée et l’action du démon écrivain des peintures de Montegrazie est notable. De fait, dans La mort tirant sa flèche, le diable notaire rédige l’accusation, le livre de conscience20 de l’âme à juger. De plus, dans la peinture murale, cette figure démoniaque renvoie à la syndérèse, c’est-à-dire aux questionnements individuels liés aux jugements moraux et à la faculté de reconnaître le bien. Le démon fait usage de l’impératif quand il apostrophe le noble et l’engage à une réflexion de ce genre : Ne timeas si peccatum facis cotidie poteris emendare (“N’aie pas peur si tu pèches tous les jours : tu pourras t’amenderˮ).

En comparant l’image du démon scribe proposée à la vue du spectateur à Montegrazie (et plus généralement le cycle du mur gouttereau nord du sanctuaire) avec la figure du diable notaire (et le texte dans lequel cette figure apparaît, le Pèlerinage de l’âme de Guillaume de Digulleville), on découvre d’autres analogies. Dans la suite des récits (pictural et poétique), lors de la pesée des charges devant l’archange Michel, on observe ceci : dans la peinture, deux lettres sont déposées sur les plateaux de la balance, dans le plateau de gauche est consigné un m pour malum, et dans celui de droite un b pour bonum21 (voir Fig. 3) ; dans le poème, l’écrit produit par Sathan notaire est placé sur un plateau de la balance22, avec une cédule de saint Benoît relatant les méfaits de Guillaume23, et l’énorme ver Synderesis24 ; et sont déposés sur l’autre plateau de la balance, pour faire contrepoids, la besace et le bourdon de Guillaume25, une cédule de saint Benoît exposant les bienfaits du moine26, puis in extremis une lettre du Christ imploré par Miséricorde27.

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Figure 3 : Trajet des documents à charge contre l’âme jugée entre la scène de La mort tirant sa flèche et celle de la pesée des âmes par saint Michel archange sur le mur gouttereau nord du sanctuaire Nostra Signora delle Grazie, Imperia (Montegrazie). Cl., DAO O. Acquier

Au sein des images du mur gouttereau nord du sanctuaire, les différents dispositifs visuels des inscriptions semblent se prolonger d’une scène à l’autre : du registre des péchés dans La mort tirant sa flèche, à la balance dans l’épisode de la pesée des âmes par saint Michel28 (voir Fig. 3 : notre flèche rouge représente le trajet des documents à charge contre l’accusé). Une verticalité parfaite s’impose entre le texte du registre tenu par le démon et la lettre pesée mise dans la balance. Après le jugement, cette dernière penche du côté du mal (voir Fig. 3) : l’âme est damnée. D’ailleurs le malum ne l’emporte pas dans cette seule scène, mais prédomine sur tout le mur gouttereau (voir Fig. 1). Sur les cinq registres peints qui se superposent, deux sont intégralement réservés au développement du mal, ainsi que la moitié de deux autres registres. À l’inverse, aucun d’entre eux n’est dans sa totalité dévolu au bonum.

De même, dans l’épisode de La mort tirant sa flèche, les personnages négatifs sont les plus nombreux. Un squelette archer occupe l’espace restant. Situé à gauche de l’intrigue principale, en proportion plus réduite que la scène de la tentation, il semble en former le prolongement (voir Fig. 4) et symbolise l’ultime moment de l’intrigue, à savoir la mort du noble que viennent d’exhorter diable et ange. De fait, le dispositif visuel de l’inscription liée à la figure de la mort préfigure la fin du récit. Le phylactère, dont le texte peint est illisible de nos jours29, est plongeant. Des mots en sont éjectés et se situent hors du cadre peint, à la manière d’une flèche tirée de son arc. Le texte ainsi projeté annonce le décochement imminent de la flèche de la mort (voir Fig. 4). Ce débordement de l’écriture hors du cadre du phylactère ne constitue pas une erreur des peintres. Au sein du cycle de Montegrazie, les frères Biazaci varient les modules des lettres pour qu’elles s’adaptent à divers cadres bien délimités. Le débordement observé constitue donc une figure de style, qui vient enrichir la représentation. Au sein de notre corpus, c’est la seule occurrence d’un tel dispositif. Mais plus encore, les mots éjectés du phylactère de la mort viennent empiéter sur la surface dévolue à une vertu particulière, la sobriété (sobrietas). Cette disposition de l’inscription est signifiante et permet d’accéder à un niveau de lecture supplémentaire.

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Figure 4 : La figure de la mort dans la scène La mort tirant sa flèche. Mur gouttereau nord. Sanctuaire Nostra Signora delle Grazie, Imperia (Montegrazie). Cl, DAO O. Acquier

Des images savamment agencées dans l’espace cultuel

La vertu Sobriété a placé sa main devant sa bouche comme pour signifier son refus d’ingérer de la nourriture spirituelle, symbolisée par les mots éjectés du phylactère de la mort, ainsi que de la nourriture charnelle, évoquée par le poulet embroché situé à sa gauche. Une relation s’établit donc entre cette vertu et la scène qui la surmonte. La mort est la passerelle créant une relation entre Sobriété et l’homme noble. Alors que la vertu se protège de la flèche verbale qui la menace, le personnage tenté du registre supérieur attend d’être frappé, les bras croisés dans une position passive (voir Fig. 4). Les deux proies de la mort s’opposent donc nettement.

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Figure 5 : Les vices contre les vertus dans la parabole de Lazare et du Mauvais riche. Mur gouttereau nord. Sanctuaire Nostra Signora delle Grazie, Imperia (Montegrazie). Cl., DAO O. Acquier

En écho à ce duel, la personnification de la gloutonnerie, vice contraire à la vertu de sobriété, est peint à proximité de cette dernière, dans une cavalcade des vices se déployant sur le même mur gouttereau du sanctuaire (voir Fig. 5). Cette personnification chevauchant un loup surmonte un épisode figurant la bonne communion : le don de l’hostie. Le glouton mange avec voracité une cuisse de poulet alors que l’homme bon situé juste en-dessous accepte religieusement l’eucharistie. Les quatre figures symbolisant tour à tour la mesure et l’excès se présentent aux yeux des spectateurs en miroir inversé (voir Fig. 5).

Il n’est pas sans intérêt de rappeler que ce couple vice-vertu côtoie souvent l’épisode de la parabole de Lazare et du Mauvais riche30. Ainsi certains prédicateurs comme Bernardino Busti31 lient-ils dans certains de leurs sermons le péché de gloutonnerie à la parabole de Lazare, qui devient un exemplum dans leurs démonstrations pour l’instruction morale de leurs auditeurs. Même si la scène du banquet du Mauvais riche n’a pas été mise en image dans les peintures murales de Montegrazie, un lien tacite avec cet épisode est perceptible à travers les figures contraires susmentionnées. Ces indices ne tendraient-ils pas à rapprocher du Mauvais riche de la parabole lucanienne (16,19-31) l’homme noble de la scène de La mort tirant sa flèche ? D’ailleurs, notre personnage peint n’est-il pas, comme le riche de Luc (16,19), « un homme riche qui se revêtait de pourpre et de lin fin » (voir Fig. 2) ?

La parole prêtée à l’ange dans cette scène viendrait conforter cette hypothèse. L’ange prononce la seconde partie d’un célèbre distique condamnant fermement le mauvais usage des richesses: « Fais le bien pendant que tu vis, si tu veux vivre après ta mort » (Fac bene dum vivis, post mortem vivere si vis) ; mais la première partie de la mention qui dit « O riche, riche, tu ne vivras pas tout le temps » (O dives, dives, non omni tempore vives) est omise dans nos peintures. Emplois, fréquence et contexte des mentions de ces deux vers, bien représentés dans la sculpture au Moyen Âge, ont été étudiés par Robert Favreau32. Et il s’avère que cette formule est surtout présente sur des épitaphes d’individus de haut rang. Elle a un rapport indéniable avec la notion de bonne mort dans un contexte privilégié qui risquerait de faire oublier leur mortalité aux puissants. Ce distique a également été employé en corrélation avec des représentations de la parabole de Lazare, parmi lesquelles on peut mentionner le chapiteau du cloître de la cathédrale Santa Maria Nuova à Monreale en Sicile33.

Par divers procédés visuels présents sur le mur gouttereau nord (voir Fig. 1), le noble pourrait donc renvoyer au Mauvais riche de la parabole (Lc 16,19-31), et en analysant la totalité des peintures murales du sanctuaire, on trouve des indices convergents. En effet, strictement en face de la scène de La mort tirant sa flèche, est peinte, sur le mur gouttereau sud, la résurrection de Lazare de Béthanie (voir Fig. 6). Cette scène (Jn 11,1-44) a fait l’objet de deux peintures sur le site34. Jésus s’y exprime devant le peuple juif (Jn 11,41-42) et ordonne par deux fois à Lazare de revenir à la vie (Jn 11,43) : « Lazare, viens dehors ! » (Lazare veni foras)35. Ce dernier émerge alors de son tombeau devant la foule amassée.

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Figure 6 : La résurrection de Lazare de Béthanie. Mur gouttereau sud. Sanctuaire Nostra Signora delle Grazie, Imperia (Montegrazie). Cl. O. Acquier

Ce Lazare n’est pas celui de la parabole de Luc, mais au Moyen Âge on s’est souvent interrogé sur l’identité des frères et sœurs de Béthanie. Si Marthe n’est confondue avec aucune autre sainte, depuis Grégoire le Grand Marie de Béthanie est régulièrement assimilée à Marie-Madeleine36. Quant à Lazare, surtout à la fin du Moyen Âge où son culte, notamment dans le sud de l’arc alpin, est en plein essor, il peut être assimilé au Lazare lépreux de la parabole lucanienne. Dans la peinture murale sud alpine, plusieurs exemples de confusion, volontaire ou non, sont visibles. Je signalerai ici le cycle de la niche centrale du chœur de la chapelle Saint-Érige de Saint-Étienne-de-Tinée (Auron). Les peintures murales, datées de 1451, donnent à voir Marie-Madeleine, Marthe et Lazare associés, mais Lazare y est figuré comme un lépreux portant une crécelle. Nicole Bériou mentionne également l’existence de traditions qui voudraient que Lazare de Béthanie ait eu la lèpre avant sa résurrection37. Et surtout, depuis le XIIe siècle, ce dernier est le saint patron de nombreuses léproseries38. D’ailleurs, un sceau de la léproserie de Saint-Lazare de Jérusalem associe, sur une de ses faces, la représentation du Lazare de la parabole, et sur l’autre, la figure de Lazare de Béthanie avec les attributs de l’évêque39. De même, dans la pratique de la prédication, le prêcheur peut faire le choix de tenir un sermon sur les deux Lazare simultanément, en évoquant un point qui les unit40, ou il peut au contraire préciser à son auditoire lequel des deux Lazare va faire l’objet d’un commentaire. Bernardin de Feltre, dans son sermon De divite Epulone et Lazaro paupere41, stipule ainsi qu’il ne faut pas confondre ces deux hommes :

[...] non pas le frère de Marthe, qui était riche, mais ce pauvre, ce mendiant, complètement infirme et malade qui avait la lèpre. (Non ille frater Marthe, quia ille erat dives, iste pauper et mendicus, totus infirmus et plagatus, qui erat leprosus.)

Dans le cas des peintures murales de Montegrazie, nous serions dans un contexte de représentations très subtiles des deux Lazare. En donnant face à face les deux images – la condamnation du Mauvais riche et la résurrection de Lazare (voir Fig. 7) –, les peintres n’ont pas cherché à montrer au spectateur l’opposition attendue dans le contexte de la parabole de saint Luc (c’est-à-dire un contraste entre la pauvreté et la richesse), ni à mettre en avant la maladie du lépreux et sa vie dans l’au-delà42. Malgré tout, les deux épisodes évangéliques se répondent d’un mur à l’autre : Lazare de Béthanie et le Mauvais riche sont liés. Si nous relisons la phrase d’amorce de Bernardin de Feltre dans son sermon De divite Epulone et Lazaro paupere43, nous voyons qu’il stipule clairement que le frère de Marthe était un homme riche (non ille frater Marthe, quia ille erat dives). Nous aurions donc affaire à une critique à l’encontre des mauvais riches coupables d’avarice auxquels on aurait opposé, sur le mur en face, le bon riche sauvé par Jésus. Notons que pour enrichir ce face à face, exactement entre ces deux figures, les frères Biazaci ont peint sur l’abside orientée une scène de l’Ancien Testament, la tentation d’Ève (voir Fig. 7 : illustrée sur le schéma par le carré rouge central) ; le spectateur était ainsi invité à réfléchir à la conduite à adopter durant sa vie face à ces richesses et à la tentation liée à leur usage.

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Figure 7 : Le bon et le mauvais riche dans les peintures murales du sanctuaire Nostra Signora delle Grazie, Imperia (Montegrazie). Cl., DAO O. Acquier, S. Sorin

Tout aussi importante est la figure d’autorité peinte sur la colonne engagée séparant l’abside centrale de l’abside sud-est (entre les deux images du Mauvais riche et de Lazare). Nimbé de rayons, le Image 10000000000000D8000001E9D2595665.jpgprédicateur franciscain Bernardin de Feltre est peint en pied (voir Fig. 8). Un titulus inscrit sous ses pieds, « saint Bernardin de Feltre » (Beatus Bernardinus de Feltrio), renseigne sur son identité. Le prédicateur tient dans sa main droite un phylactère où l’on peut lire : « N’aimez pas le monde » (Nolite diligere mundum). Il s’agit d’un thema de ses sermons, si bien que le phylactère renvoie à l’activité homilétique de Bernardin44. Or l’inscription semble condamner le Mauvais riche, vers qui l’inscription est orientée. Dans sa main gauche, Bernardin de Feltre porte et expose l’image d’un Mont-de-piété. L’inscription « Mont-de-piété » (Mons pietatis) et le phylactère où sont lisibles les paroles prononcées par Bernardin dans ses sermons manifestent l’efficacité de la prédication dans la création de cette institution dont il était un fervent promoteur45.

Figure 8 : Bernardin de Feltre. Colonne semi engagée du chœur. Sanctuaire Nostra Signora delle Grazie, Imperia (Montegrazie). Cl. O. Acquier

La représentation de Bernardin de Feltre au sein du sanctuaire est une adjonction due à Gabriele de Cella, en 1498, et destinée à compléter et amplifier la portée et le sens des cycles préexistants. Le prédicateur est en position médiatrice entre l’avare et le bon riche qui se répondent à travers lui, depuis les deux murs gouttereaux (voir Fig. 9). Il devient un lien explicite entre ces épisodes : une figure permettant de rapprocher encore plus ces scènes en suggérant une interprétation orientée et un nouveau niveau de lecture. La présence du prédicateur, comme son positionnement partial entre les deux riches, permet d’approfondir l’interprétation et de renforcer l’opposition entre l’homme avare et l’homme charitable. Par cet enrichissement sémantique des peintures du sanctuaire, la parabole (Lc 16,19-31) deviendrait la toile de fond, c’est-à-dire l’exemplum, dans un commentaire que peut impulser le thème de l’usura, thème cher au prédicateur peint sur la colonne46. Gabriele de Cella (associé ou non à son commanditaire), en 1498, ne désirerait-il pas mettre en avant Bernardin de Feltre en tant que porte-parole de l’institution du Mont-de-piété, en profitant de l’épisode réinterprété de la parabole de Lazare déjà en place dans le sanctuaire ?

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Figure 9 : Mise en scène du bon, du mauvais riche et de Bernardin de Feltre dans les peintures murales du sanctuaire Nostra Signora delle Grazie, Imperia (Montegrazie). Cl., DAO O. Acquier, S. Sorin

Dans l’espace cultuel de Montegrazie, l’emplacement du prédicateur, sur une colonne engagée de l’abside centrale, est très stratégique dans la mesure où il est à la vue de tous dès l’entrée dans le monument. Il fait figure d’autorité dans un espace où les nefs latérales ne sont distinguées de la nef centrale que par six colonnes élancées. Gabriele de Cella peint la surface ayant la plus forte emprise visuelle à l’intérieur du monument (voir Fig. 9). Par cette position dans le lieu de culte, la figure de Bernardin de Feltre semble être la résurgence sinon la pérennisation d’un acte de prédication qui entend promouvoir la fondation des Monts-de-piété et donc la charité.

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Figure 10 : Cartographie des fondations des Monts-de-Piété en Ligurie occidentale. DAO O. Acquier

La mise en avant du prédicateur Bernardin de Feltre et du Mont-de-piété qu’il porte pourrait-elle être sans rapport avec l’implantation de cette institution en Ligurie occidentale ? La répartition des Monts-de-piété dans la zone géographique de la province d’Imperia actuelle47 permet d’évaluer l’influence de l’image de Bernardin de Feltre et de son institution. Après recensement, il est possible de constater que la totalité de ces structures paraissent les unes après les autres dans l’arrière-pays de Porto Maurizio (ville de rattachement de Montegrazie alors appelée Montegrosso), c’est-à-dire dans la vallée du Prino et les deux vallées adjacentes, l’Impero à l’Est et l’Argentina à l’Ouest. Le sanctuaire Nostra Signora delle Grazie se trouve d’ailleurs être le centre d’un territoire de fondation de Monts-de-piété (voir Fig. 10). La figure de Bernardin de Feltre aurait eu un certain impact, puisque le sanctuaire polarise les Monts-de-piété dans une circonférence d’une quinzaine de kilomètres autour de lui48. La prédication et la puissance de l’image du prédicateur auraient impulsé une concentration de Monts-de-piété seulement dans cet espace de Ligurie occidentale49.

Un sermon peint

L’analyse de la scène de La mort tirant sa flèche éclaire de façon neuve les liens qui unissent textes, images et paroles au sein de peintures murales spécifiques, à la fin du XVe siècle. Elle a permis de mettre en relief plusieurs points : les stratégies d’emplacement des peintures dans le lieu de culte au cours du temps, ainsi que la fonction et la puissance des dispositifs visuels des inscriptions au sein des images. La mort tirant sa flèche est avant tout une scène de procès où divers choix de figuration de l’accusé suggèrent qu’est visée une catégorie sociale précise de la société, de sorte qu’on peut lire l’ensemble comme une mise en images de la parabole de Lazare (Lc 16, 22). L’ajout qui est fait, en 1498, d’un portrait du prédicateur Bernardin de Feltre, vient renforcer cette interprétation. Sa présence amplifie le sens premier des deux scènes que sont La mort tirant sa flèche et la résurrection de Lazare en Béthanie, en donnant à voir un personnage charismatique spécialisé dans la condamnation de l’usure et dans la promotion des Monts-de-piété. Il n’est pas impossible que les images du lieu de culte aient été mentionnées dans un discours homilétique en faveur de cette institution où la parabole de Lazare et du Mauvais riche devenait un exemplum efficace. L’on peut dès lors supposer qu’un prédicateur placé devant l’image de Bernardin de Feltre se présentait comme un légitime disciple faisant référence à cette autorité dans ses discours, qui gagnaient ainsi en autorité. Cette hypothèse serait confortée par l’attestation de la fondation de nombreux Monts-de-piété situés exclusivement autour du sanctuaire. La peinture aurait donc été efficace.

Notes de bas de page numériques

1 Jérôme Baschet, Le Sein du père. Abraham et la paternité dans l’Occident médiéval, Paris, Gallimard, 2000.

2 Description du corpus et de ses frontières spatiales et chronologiques dans Océane Acquier, Gourguen Davtian, Antoine Pasqualini, Sabine Sorin, Rosa Maria Dessì, « Les Peintures murales des lieux de culte du sud de l’arc alpin du XIVe au XVIe siècle », Géomatique Expert, 124, 2018, p. 35-40.

3 Sur la syntaxe des images médiévales et leurs analyses relationnelles, voir les réflexions de Didier Méhu, « Les rapports dans l’image », in Jérôme Baschet, Pierre-Olivier Dittmar (dir.), Les Images dans l’Occident médiéval, Turnhout, Brepols, 2015, p. 275-280.

4 Le cycle du mur gouttereau nord correspond à une vision de l’au-delà dont la temporalité est celle de la rédemption précédant le Jugement dernier, non figuré quant à lui. Pour cette distinction, voir Jérôme Baschet, « Une image en deux temps. Jugement dernier et jugement des âmes au Moyen Âge », Image re-vues, hors-série 1, 2008, p. 1-21, et Jérôme Baschet, Les Justices de l’au-delà. Les représentations de l’enfer en France et en Italie (XIIe-XVe siècle) [1993], Rome, École Française de Rome, 2014, p. 387.

5 Sur la représentation du silence dans les images médiévales, voir Vincent Debiais, Le Silence dans l’art, Paris, Cerf, 2019.

6 Voir Robert Chartier, « Les arts de mourir 1450-1600 », Annales. Économies, sociétés, civilisations, 31/1, 1976, p. 51-75., spéc. p. 53-54. Il aborde la forte diffusion de ces textes en Europe au XVe puis XVIe siècle. L’auteur fait d’ailleurs un inventaire des manuscrits des artes bene moriendi conservés à ce jour. Il référence aussi les images qui ont complété certaines versions et ont indéniablement contribué à leurs succès. Voir aussi les reproductions des onze miniatures du manuscrit du Wellcome Institue of the History of Medecine proposé par Henri Zerner, « L’art au morier », Revue de l’art, 11, 1971, p. 7-30. Ces images opposent des figures bénéfiques et maléfiques autour d’un mourant, comme dans La mort tirant sa flèche.

7 D’autant que le registre inférieur du mur gouttereau nord du sanctuaire Nostra Signora delle Grazie à Imperia (Montegrazie) expose des images explicitant comment bien vivre pour bien mourir. Six scènes juxtaposées, dont la première a disparu aujourd’hui, se succèdent. Les trois premiers épisodes sont consacrés à la bonne confession, à la bonne communion et à la bonne mort, tandis que les trois derniers sont leurs stricts opposés. Le divin et le malin sont présents et triomphent tour à tour dans chaque scène où ils luttent pour s’emparer de l’âme du défunt.

8 Voir Le Jeu des sept pechiés et des sept vertus, éd. Alan Hindley, in Jonathan Beck, Estelle Doudet, Alan Hindley (dir.), Recueil général de moralités d’expression française, t. 1, Paris, Classiques Garnier, 2012, p. 330.

9 Cité dans Élyse Dupras, Diables et saints. Rôle des diables dans les mystères hagiographiques français, Genève, Droz, 2006. p. 315.

10 Voir Margareth Jenning, « Tutivillus, the literacy career of the recording demon », Studies in Philology, 74, 1977, p. 1-91, spéc. p. 1-87.

11 Voir Moshé Lazar, « Les diables : serviteurs et bouffons. Répertoire et jeu chez les comédiens de la troupe infernale », Tréteaux, 1, 1978, p. 51-69.

12 Voir Le Pèlerinage de l’âme de Guillaume de Digulleville, éd. Johann-Jakob Stürzinger, Londres, Nichols & Sons, 1895 [désormais PA].

13 PA, p. 50, v. 1353.

14 PA, p. 51, v. 1385-1388 : « Le Sathanas de bout en bout / En i grant papier escrit tout : / Aussi tost com celle parloit, / Tout aussi tost il escrisoit. »

15 PA, p. 80, v. 2272-2276.

16 PA, p. 50, v. 1360, p. 52, v. 1426.

17 PA, p. 1-74.

18 PA, p. 80, v. 2275.

19 PA, p. 80, v. 2270-2274.

20 Dans la peinture murale médiévale, les livres de conscience sont rarement mis en images. Voir à ce sujet les articles de Jean-Pierre Suau, « Le thème du livre individuel des consciences dans les peintures murales méridionales du Jugement dernier à la fin du Moyen Âge », in Enfer et Paradis. L’au-delà dans l’art et la littérature en Europe [Actes du colloque de Conques, 22-23 avril 1994], Conques, Centre Européen d’Art et Civilisation Médiévale, 1995, p. 147-175, et Virginie Czerniak, « Une grande composition eschatologique d’origine canoniale : les peintures murales de la chapelle Saint-Gausbert de la cathédrale de Cahors », in Le ciel sur cette terre. Dévotions, Église et religion au Moyen Âge [Mélanges en l’honneur de Michèle Fournié], CNRS / Université de Toulouse-Le Mirail, 2008, p. 115-127.

21 On notera d’autres scènes peintes dans le sud de l’arc alpin qui mettent en scène des lettres sur les plateaux de la balance de l’archange saint Michel, dans l’église San Bernardino d’Albenga (1484) et dans la chapelle San Bernardino de Triora (fin du XVe siècle). Au sein du sanctuaire San Magno à Castelmagno, la peinture met en scène un mourant jugé par l’écrit. Le futur défunt, allongé dans un lit, est entouré par un ange et un démon tenant des parchemins sur lesquels sont consignées ses bonnes et ses mauvaises œuvres. La lecture du texte est rendue impossible, puisqu’il s’agit d’un simulacre d’écriture cursive. L’archange Michel vient compléter la scène avec sa balance.

22 PA, p. 80, v. 2271-2276.

23 PA, p. 81, v. 2292-2293, p. 82, v. 2334-2340, spéc. 2337-2339 : « En l’un escript sont contenus / Biens, en l’autre les maus sceüs / Du pelerin de mon habit. »

24 PA, p. 80, v. 2280-2282.

25 PA, p. 80, v. 2266-2269.

26 PA, p. 81, v. 2292-2293, p. 82, v. 2334-2340 (vers cités supra dans notre note 23).

27 PA, p. 83-86, v. 2369-2465 (texte de la lettre du Christ en faveur du moine).

28 Les frères Biazaci ont inséré entre ces deux scènes la région infernale où sont châtiés les envieux ayant échoué à dompter leurs tentations. Il y a donc un jeu d’écho entre les trois scènes.

29 Federica Natta, L’Inferno in scena. Un palcoscenico visionario ai margini del mediterraneo, Alexandrie, Falsopiano, 2013, p. 290. Cet auteur propose tout de même la transcription suivante : Quan[do] [ad m]ort[em] veg[nerat] [ani]maque oportere [...] [s]econ[dum] [demonium] morem e colp[a] [vit]anda pag[a] capala.

30 Frère Laurent, La Somme le Roi, Ms. 870, Bibliothèque Mazarine, Paris, 1295, f. 179, « Mauvais riche en enfer ».

31 Bernardino Busti, Rosarium sermonum per quadragesimam ac in omnibus diebus, tam Dominicis, quam festis per annum ; necnon de vnaquaque materia praedicabilium. Mariale item, seu sermones de Beatissima Virgine Maria [...], Brescia, éd. Hierati Antonii, 1607, p. 587.

32 Robert Favreau, « Sources des inscriptions médiévales », Comptes rendus des séances de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 153/4, 2009, p. 1277-1330, spéc. p. 1298.

33 Roberto Salvini, Il Chiostro di Monreale, e la scultura romanica in Sicilia, Palerme, S. F. Flaccovio, 1962, p. 92. L’énoncé dans son ensemble est sculpté sur l’abaque d’un chapiteau du cloître. Il légende et enrichit l’épisode.

34 Le mur gouttereau sud a été peint une première fois par les frères Biazaci, puis repeint avec le même thème iconographique (une passion du Christ) par Pietro Guido da Ranzo un peu avant le milieu du XVIe siècle. Il constitue donc un palimpseste. Voir à ce sujet Massimo Bartoletti, « Pietro Guido e la parete palisesto », in Franco Boggero (dir.), Montegrazie, un Santuario del ponente Ligure, Turin, Umberto Allemandi & C., 2004, p. 113-122.

35 Ces deux apostrophes répétées sont vraisemblablement dues à un repeint. En effet, les deux textes ne présentent pas la même écriture. Le premier phylactère présente des lettres gothiques et le second des lettres en capitales noires. Sur l’évolution de l’écriture épigraphique au Moyen Âge, voir Vincent Debiais, Robert Favreau, Cécile Treffort, « L’évolution de l’écriture épigraphique en France au Moyen Âge et ses enjeux historiques », Bibliothèque de l’École des Chartes, 165, 2007, p. 101-137.

36 Sur « la métamorphose de sainte Marie-Madeleine » vue à travers des textes médiévaux, voir Élisabeth Pinto-Mathieu, Marie-Madeleine dans la littérature du Moyen Âge, Paris, Beauchesne, 1997.

37 Nicole Bériou et François-Olivier Touati, Voluntate Dei leprosus. Les lépreux entre conversion et exclusion aux XIIe et XIIIe siècles, Spolète, Centro Italiano di Studi sullAlto Medioevo, 1991, p. 35-36.

38 Nicole Bériou et François-Olivier Touati, Voluntate Dei leprosus. Les lépreux entre conversion et exclusion aux XIIe et XIIIe siècles, op. cit., p. 36.

39 Pietro Delcorno, Lazzaro e il ricco epulone : Metamorfosi di una parabola fra Quattro e Cinquecento, Bologne, Il Mulino, 2014, p. 71.

40 Pietro Delcorno, Lazzaro e il ricco epulone : Metamorfosi di una parabola fra Quattro e Cinquecento, op. cit., p. 29. Dans son développement, l’auteur prend l’exemple du prédicateur Pietro Crisologo.

41 Sermoni del beato Bernardino Tomitano da Feltre, éd. Carlo Varischi, Giordano Dell’Amore, Milan, Cassa di Risparmio delle Provincie Lombarde, 1964, p. 231.

42 Ajoutons simplement que l’iconographie de Lazare le lépreux dans le sein d’Abraham, après avoir atteint son apogée entre les XIe et XIIIe siècles, périclite dès le début du XIVe siècle et disparaît au milieu du XVe siècle, au moins dans la peinture monumentale. Voir Jérôme Baschet, Le Sein du père. Abraham et la paternité dans l’Occident médiéval, op. cit.

43 Sermoni del beato Bernardino Tomitano da Feltre, éd. Carlo Varischi, Giordano Dell’Amore, op. cit., p. 231.

44 Sermoni del beato Bernardino Tomitano da Feltre, éd. Carlo Varischi, Giordano Dell’Amore, op. cit., p. 231-247, p. 381-393, p. 423-431.

45 Voir la cartographie proposée par Rosa Maria Dessì, Ippolita Checcoli, « La predicazione francescana nel Quattrocento », in Sergio Luzzatto, Gabriele Pedullà, Amedeo De Vicentiis (dir.), Atlante storico della letteratura italiana. Dalle origini al Rinascimento, Turin, Enaudi, 2010, p. 464-476, spéc. p. 471. Des points géographiques placés sur une carte d’Italie du nord indiquent les lieux où Bernardin de Feltre a prêché et où des Monts-de-piété ont été fondés à la suite de ses prédications. Voir aussi Saverio Amadori, Nelle bisacce di Bernardino da Feltre. Gli scritti giuridici in difesa dei Monti di Pietà, Bologne, Compositori, 2007.

46 Sur Bernardin de Feltre et l’usura voir Rosa Maria Dessì, « Usura, Caritas e Monti di Pietà. Le prediche antiusurarie e antiebraiche di Marco da Bologna e di Michele Carcano », in I frati osservanti e la società in Italia nel sec. XV [Atti del XL Convegno internazionale in occasione del 550° anniversario della fondazione del Monte di pietà di Perugia, 1462, 11-13 octobre 2012], Spolète, Centro Italiano di Studi sullAlto Medioevo, 2013, p. 169-227.

47 Voir Andrea Gandolfo, La Provincia di Imperia, Imperia, BLU Edizioni, 2 t., 2005. L’auteur mentionne la présence de Monts-de-piété dans chaque localité comprise dans la province d’Imperia actuelle. Dans cette région, la totalité des Monts-de-piété gravitent autour du sanctuaire à une circonférence de moins d’une quinzaine de kilomètres. Seul un Mont-de-piété sort de cette sphère et se situe à San Remo.

48 Il est répertorié dans l’inventaire de la Fondazione del Monte di Bologna e Ravenna : http://fondazionedelmonte.it/centro-studi-monti-di-pieta/storia/monti-in-italia/

49 Voir Andrea Gandolfo, La Provincia di Imperia, op. cit. Le premier Mont-de-piété de la région paraît dans le village de Dolcedo, six ans après la représentation du Franciscain Bernardin de Feltre dans le sanctuaire de Montegrazie. Il est fondé en 1504 à l’initiative du Dominicain Agostino de Savone, il demeurera actif jusqu’en 1863. Suite à cette première fondation, dans la vallée de l’Impero, ces structures de prêt sont érigées dès les premières années du XVIe siècle en plusieurs localités : à Pontedassio, sous l’impulsion des frères dominicains du couvent Santa Caterina, à Torria, ou encore à Gazzeli (Chiusanico) de manière plus tardive, en 1597. Aurigo est la dernière localité de la vallée à se doter d’une telle structure, vers 1630. Dans la vallée de l’Argentina, c’est à Montalto Ligure qu’en 1560 est créé un Mont-de-piété ; un autre naît en 1585 à Carpasio, et un autre en 1620 à Badalucco. Sur la côte ligure, entre les vallées du Prino et de l’Argentina, deux localités se dotent d’un Mont-de-piété : Costarainera dans la première moitié du XVIIe siècle, et Cipressa.

Bibliographie

Études

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Éditions de textes

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Pour citer cet article

Océane Acquier, « La parabole de Lazare et du Mauvais riche dans les peintures murales de l’église Nostra Signora delle Grazie (Montegrazie, Imperia) : un exemple des rapports complexes entre images, inscriptions et paroles du prédicateur », paru dans Loxias, 73., mis en ligne le 15 juin 2021, URL : http://revel.unice.fr/loxias/index.html/lodel/docannexe/file/7601/lodel/index.html?id=9745.

Auteurs

Océane Acquier

Océane Acquier est l’auteure d’une thèse de doctorat soutenue le 19 mars 2021 à l’Université Côte d’Azur et intitulée « Écriture épigraphique et sermons dans les peintures murales des lieux de culte du sud de l’arc alpin du XIVe au XVIe siècle (Provence orientale, Ligurie, Piémont) ».