hybridité dans Loxias


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Loxias | Loxias 12 | I.

Réécritures contemporaines de morts antiques (Sang de Lars Norén et L’Amour de Phèdre de Sarah Kane), le récit en sursis ?

Le récit de la mort de Jocaste et de l’aveuglement d’Œdipe, et le récit de l’attaque d’Hippolyte par un monstre marin sont deux des récits les plus célèbres du théâtre antique, qui montrent les fonctions et les ambitions de la narration sur la scène tragique antique et classique. Or il en va très différemment dans le théâtre contemporain qui se soucie bien moins de vraisemblance et peut montrer aux spectateurs ce qu’Horace puis les théoriciens de la scène classique ont proscrit. C’est pourquoi il est intéressant d’analyser ce que deviennent ces récits dans deux réécritures contemporaines, très différentes l’une de l’autre : Blod – Sang de Lars Norén (1995), qui est une récriture d’Œdipe Roi, et Phaedra’s Love – L’Amour de Phèdre de Sarah Kane (1996). Ce qui remplace le récit du messager implique une redéfinition des rapports du récit et de la représentation, qui renseigne sur la fonction que peut détenir le mythe dans le théâtre contemporain et s’avère, selon nous, emblématique de la poétique propre à chacune des œuvres.

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Loxias | Loxias 16

Les anamorphoses d'une bestiole dans Histoire de la chauve-souris de Pierrette Fleutiaux

« Comment c’est d’être une chauve-souris ? » lisait-on dans Pensées secrètes de David Lodge. En fermant le roman de Pierrette Fleutiaux, Histoire de la Chauve-souris, le lecteur se demande : « C’est quoi une chauve-souris ? ». C’est à cette question que je tenterai de répondre dans ce que j’appellerai « les anamorphoses d’une bestiole », car on s’en doute, la réponse n’est pas simple. La bête, pas tout à fait oiseau, pas tout à fait mammifère, cette forme de l’entre-deux, vit accrochée à la nuque de la narratrice qui, à son tour, n’est plus tout à fait femme, sans être pour autant bête. L’hybridation doublée d’un parasitisme appelle plusieurs lectures, selon qu’on voit dans la chauve-souris un être réel, imaginaire ou symbolique. Le lecteur doit alors démêler l’écheveau des sens… au risque de ne rien trouver ainsi que le laisse entendre la narratrice : « il se peut qu’après avoir démêlé tant de fils j’arrive au dernier fil et n’y trouve rien. » L’hybridité en favorisant la coexistence d’éléments disparates s’élève alors à la dignité d’une complexité créatrice de sens.

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Loxias | Loxias 30 | Doctoriales VII

Le schème du désordre à l’épreuve des textes romanesques de Marie Darrieussecq

Cet article se propose d’analyser le mode selon lequel opère le schème du désordre dans le régime de la fiction de Marie Darrieussecq. Dans la pratique textuelle de cette romancière, la discontinuité régit tous les éléments de la narration, notamment à travers la complexification de la voix narrative mais aussi, et surtout, dans l’hétérogénéité compositionnelle d’une écriture mêlant des matériaux de toutes sortes. La mobilisation de toutes ces ressources auxquelles s’ajoutent une ponctuation excessive et une gestion anarchique de l’espace textuel créent une prose haletante dont les contours restent flous et indéterminés. L’objectif d’une telle turbulence est de contester les grands récits fondateurs et d’ouvrir les romans pour en libérer des potentialités insoupçonnées. This article is an analysis of the way disorder view is presented in Darrieussecq fictious regime. In this novelist’s textual practice, there is a kind of discontinuity in all the narrative items, particularly through the complex of the narrative voice as well as the assorted handwriting using together devices of every sorts. The mobilization of all these resources combined with an excessive punctuation and the textual space mismanagement cause a panting prose with blurred and undetermined outlines. The aim of such a turbulence is to contest the great founding writings, to open novels and set the unsuspected potentialities free.

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Loxias | 50. | Doctoriales

Toujours migrants, mais désormais écrivains : stratégies identitaires et littérature africaine

La plupart des auteurs partis d’Afrique se sont posés comme migrants avant de s’insérer comme écrivains dans leur société d’accueil. Ils sont toujours reçus comme : migrants professionnels (Tahar ben Jelloun s’est installé en France pour enseigner et faire une thèse de doctorat en psychologie) ; comme étudiants (Max Lobé, Patrice Nganang, etc.) ; comme réfugiés (asile politique ou humanitaire) ; au titre de regroupement familial (Fatou Diome, sénégalaise, est allée en France en raison d’une histoire d’amour et d’un mariage avec un Français). Il existe aussi des cas d’immigrants illégaux comme Georges Yemy, ou comme Omar Bâ que le témoignage controversé de son expérience migratoire a justement fait connaître comme auteur. Ceux même qui sont nés en Occident de parents migrants ont d’abord connu la réalité de migrants avant de se distinguer comme écrivains. Il s’agit donc fondamentalement de sujets migrants, indépendamment de leurs stratégies. Contrairement à la femme de Lot, tous ont en commun de regarder sans cesse derrière eux, vers leurs origines, sans jamais être statufiés, c’est-à-dire que le matériau de l’origine est prégnant, mais leurs stratégies d’adaptation socioculturelle portent la marque à la fois des transformations identitaires qui ont cours dans leurs sociétés d’origine et des ressources multiculturelles mobilisées dans les sociétés d’accueil, ou ils créent et défendent de nouvelles identités hybrides, qu’il semble utile de catégoriser.

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Loxias | 70. | I.

Une héroïne étrange : l’hybridité de Silence en habit de jongleur dans Le Roman de Silence

Le Roman de Silence, texte français du XIIIe siècle, a connu un vrai succès à partir de 1985 dans les études féministes et les études genre dans le monde anglophone. Après les théories de la philosophe Judith Butler, les études sur ce texte se sont proposé d’analyser la performativité du genre de l’héroïne déguisée successivement en jongleur et en chevalier avant de retrouver son statut initial de femme. Dans la continuité des études queer, nous nous concentrons ici sur l’hybridité de l’héroïne qui transparaît essentiellement sous le déguisement du jongleur. Nous analysons la manière dont le roman contribue à brouiller les catégories identitaires de genre, sexe et d’identité sexuelle. Si l’hybridité de l’héroïne est extraordinaire, elle devient aussi une merveille médiévale, permettant de prendre en considération la terminologie queer dans toutes ses acceptions. The Roman de Silence, a French text from the 13th century, became popular from 1985 onwards in feminist and gender studies in the English-speaking world. After the theories of the philosopher Judith Butler, studies on this text have proposed to analyse the performativity of the genre by the heroine successively disguised as a juggler and as a knight before regaining its initial woman’s status. As a continuation of queer studies, we here focus on the hybridity of the heroin, which mainly shows up in the guise of the juggler. We analyze how the novel contributes to trouble the identity categories of gender, sex and sexual identity. If the heroine’s hybridity is extraordinary, it also becomes a medieval marvel, allowing queer terminology to be considered in every acceptance.

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