Antiquité romaine dans Loxias


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Loxias | 55 (déc. 2016). | I.

Sénèque ou la force de l’euidentia dans les livres I et II des Lettres à Lucilius

Dans les Lettres à Lucilius, œuvre parénétique par excellence, Sénèque doit trouver un moyen pour concilier rhétorique et philosophie alors précisément que les principes vétéro-stoïciens rejettent les artifices de l’ars rhetorica. Il a recours, pour ce faire, à la complexe notion d’euidentia qui lui permet de faire le lien entre docere, mouere et delectare. Sénèque réhabilite en effet l’image dans une rhétorique du regard qui fait de l’œil son principal destinataire et use de l’euidentia dans toute son étendue pour susciter l’assentiment du disciple. Grâce à elle, il peut montrer le stoïcisme sous un jour agréable, donner à voir les concepts de la doctrine et surtout placer sous les yeux un imaginaire rassurant et des images motivantes qui vont provoquer chez le lecteur la volonté de s’engager sur la voie de la sagesse. In Letters to Lucilius, work of moral improvement above all else, Seneca has to find a way to conciliate rhetoric and philosophy, whereas Old Stoicism principles precisely reject the ars rhetorica artifices. To do so, he resorts to the complex notion of euidentia which allows him to connect docere, mouere and delectare. Seneca rehabilitates indeed the image within a rhetoric of the look which mainly appeals to the eye and uses euidentia to its whole extent, leading to the disciple’s adhesion. Thanks to euidentia, he can show stoicism in a pleasant manner, let the doctrine’s concepts to be seen, and especially place under the eyes a reassuring mental universe and motivating images which trigger the reader’s will to commit to the wisdom path.

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Loxias | 73. | I. | 2.

Traduire une œuvre latine : le complexe du « traduttore, traditore »

L’Âne d’or ou les Métamorphoses d’Apulée est une œuvre narrative complexe au style foisonnant qui daterait de 161 après JC. En raison des particularités de la langue latine et de l’esthétique très élaborée d’Apulée, de multiples problèmes de traduction se posent. En donner un aperçu permet de saisir concrètement les difficultés et les enjeux inhérents à la mise en français de textes antiques. Comment peut-on parvenir à traduire sans trahir ? C’est la grande question que se pose le traducteur, une question à la fois fructueuse et déstabilisante. Mais qu’entendre par « trahir » un texte ? Faut-il faire sentir le latin sous le texte français ? Ou la fidélité au texte latin peut-elle passer par une traduction donnant l’impression d’être une œuvre littéraire écrite directement en français ? Les différents exemples considérés ici, issus de la lettre même du texte, tendent à apporter une réponse nuancée à ces interrogations, en soulignant l’intérêt réflexif des traductions, leur complémentarité avec l’œuvre source et leur force signifiante et créatrice. The Golden Ass or the Métamorphoses by Apuleius is an intricate narrative with an abundant writing style, which approximately dates from 161 A.D. Due to the peculiarities of the Latin language and to Apuleius’ sophisticated aesthetics, many translation problems arise. Giving an overview of these problems allows us to concretely grasp the difficulties and the challenges inherent in the translation of ancient texts into French. How can we manage to translate without betraying? That is a question that the translator must keep in mind, a fruitful and destabilizing question at the same time. But what exactly does it mean to “betray” a text? Should we hear Latin beneath the French text? Or can the faithfulness to the Latin text be expressed by a translation giving the impression of being a literary work directly written in French? The various examples discussed in this paper, taken from the letter of the text, aim at providing a qualified answer to these questions by highlighting the reflexive interest of translations, their complementarity with the original text and their signifying and creative power.

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Loxias | 75. | I.

La figure de Camille au livre V de l’Ab Vrbe condita : de l’élaboration d’un personnage à la construction de la vérité historique livienne

Nous verrons comment le personnage de Camille s’impose progressivement comme central dans le livre V de l’Ab Vrbe condita, en analysant les divers dispositifs déployés pour construire le personnage (de la simple notation à la scène détaillée), ainsi que la maîtrise de la parole et de la loi qui lui est conférée. Ces procédés, tout comme l’étude des regards et émotions qui façonnent le personnage (ceux des protagonistes du récit, collectifs ou individuels ; celui du narrateur, riche de sa connaissance de l’histoire de Rome et porteur d’un rôle moral), ou encore l’intertextualité, montrent que le caractère et les valeurs qui lui sont liés le placent dans la typologie de ces grands hommes qui ont fait la grandeur de Rome, les summi uiri ; toutefois, Camille semble parfois excéder ce cadre et atteindre une dimension plus individuelle, celle du protagoniste de la tragédie ou de l’épopée, dessinant un Camille héroïco-mythique. À travers l’élaboration du personnage, nous pourrons ainsi étudier la construction de la vérité historique livienne, qui repose sur l’articulation de plusieurs traditions, pour créer cette tension latente mais contenue entre individuel et collectif. We will see how Camillus’ character emerges as a key figure in the book 5 of the Ab urbe condita, thanks to the analysis of the different means to build the character (from notation to scene), and to his mastery of speech and law. These ways, with the study of looks and emotions which help to shape his figure (these of the narrative protagonists, who are individual or collective; these of the narrator, with his knowledge of Roman history and his moral role), or intertextuality, show that through his personality and values he belongs to the typology of these great men who made Rome great, summi viri. Yet Camillus sometimes seems to exceed this pattern and to reach the more individual dimension of the tragic or epic figure; he thus appears as a heroico-mythic Camillus. Therefore, through the development of the character, we will be able to study the construction of the livian historical true which is based on the articulation of several traditions, in order to create this latent but restrained tension between individual and collective.

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