Loxias | Loxias 34 Doctoriales VIII | Doctoriales VIII
Carmen-Ecaterina Aştirbei :
L’acte orphique à l’époque moderne : parole de silence d’un chanteur malade. Introduction à la poétique de Lucian Blaga
Résumé
Dans notre étude nous nous occuperons de la poétique de Lucian Blaga et de sa vision sur sur la création et la tâche du poète au XXe siècle. Nous considérons qu’une telle analyse faciliterait l’accès à la pensée blagienne et contribuerait à une meilleure compréhension de son œuvre. La première partie de l’article se constitue comme une analyse de la contribution de Lucian Blaga au développement de la poésie lyrique roumaine moderne, tandis que la deuxième partie a comme sujet la conception de Blaga sur l’écriture. La poétique de Blaga est intimement liée à sa philosophie et, plus particulièrement, à sa vision sur le mystère existentiel que lui, en tant que « guérisseur des mots », veut accroître. Il y a une « tristesse métaphysique » proche du silence qui se dégage de ses vers, puisque l’aventure de la connaissance se transforme en drame de la connaissance. Cela expliquerait peut-être la métaphore des poètes vus comme chanteurs malades ou lépreux, comme un peuple « indivisible ininterrompu ». Le poète devient Sauveur des mots et aspire à se sauver soi-même grâce à l’acte artistique, ce qui fait de Blaga l’une des consciences les plus actives de la littérature universelle et le fait inscrire dans la modernité.
Abstract
Our study focuses on Lucian Blaga’s poetics and on his perspective concerning literary creation and the poet’s task in the 20th century. We consider that such an approach may contribute to a better comprehension of both Blaga’s philosophical and literary work. The first part of our article is an analysis of Blaga’s contribution to the development of Romanian modern poetry, while the second part is concerned with the poet’s concept of writing. Blaga’s poetics is intimately linked to his philosophy and, more precisely, to his theory of the existential mystery that the poet, as a “healer of words”, wants to increase. There is a “metaphysical sadness”, close to silence, coming out from Blaga’s poetry, as the adventure of knowledge turns out to be a drama of knowledge. This may explain the metaphor of poets seen as sick or leprous singers, as an “indivisible and unbroken” people. The poet becomes a Savior of words who yarns to save himself too by his artistic act. Through these ideas, Blaga is an active conscience of the universal literature and part of modernity.
Index
Mots-clés : acte orphique , écriture, Lucian Blaga, métaphysique, mystère, poésie roumaine
Keywords : Lucian Blaga , metaphysics, mystery, orphic act, Romanian poetry, writing
Géographique : Roumanie
Chronologique : XXe
Plan
- 1. Lucian Blaga et la naissance de la poésie lyrique roumaine moderne
- 2. La poétique de Blaga – ou le retour du vers au silence originaire
Texte intégral
1Dans le monde francophone, le nom du poète et philosophe roumain Lucian Blaga n’est connu que de façon lacunaire1. Il y a malheureusement peu d’ouvrages qui offrent une perspective d’ensemblesur la vie et l’œuvre de Blaga en français même si, dans les dernières années, on a traduit des fragments de son œuvre lyrique, philosophique, dramatique et romanesque.
2L’œuvre poétique de Lucian Blaga, dont nous nous occupons dans cette étude, prouve une exceptionnelle richesse d’ordre métaphorique, symbolique, sémiologique, philosophique et culturelle. Par conséquent, elle a fait constamment le sujet de recherche des exégètes roumains. Pourtant, à notre avis, l’effort de déchiffrer, commenter et théoriser la production de Lucian Blaga, y compris sa poésie lyrique, est vain s’il se développe seulement au sein de la langue et de la culture source qui est, dans ce cas, la langue et la culture roumaine. Si la pensée d’un poète n’est pas théorisée en langue étrangère aussi, elle reste hermétique au public cible ; en d’autres mots, elle est enfermée dans sa propre langue d’origine. Une approche rétrospective de la poésie roumaine moderne et une étude sur la vision de Blaga concernant la poésie et la mission du créateur seraient, dans ce contexte, bien nécessaires au public français, puisqu’elles faciliteront l’accès à la pensée blagienne.
1. Lucian Blaga et la naissance de la poésie lyrique roumaine moderne
3La création blagienne, peut-être la plus originale de la littérature roumaine de ce XXe siècle tourmenté, se produit dans le paysage de grandes transformations de la lyrique nationale. Originale, dirions-nous, pour plus d’une raison : métaphorique et conceptuelle à la fois, elle trouve ses fondements dans une pensée philosophique rigoureusement développée, se sépare des normes prosodiques trop strictes, du descriptivisme et du sentimentalisme désuet, et se fait remarquer comme l’expression pure de ce que l’on pourrait appeler « la roumanité ». Basil Munteanu en fait pleinement l’éloge dans son Introduction à l’étude du lyrisme roumain :
[La poésie de Blaga] offre plus de facilité à l’analyse. [...] Face à un Arghézi [elle] est plus complexe, plus dramatique, plus enveloppée et beaucoup plus difficile à interpréter. Elle traduit avec une évidente fidélité la singulière alliance du concret et de l’abstrait, de l’extrême fraîcheur et de l’extrême raffinement ; alliance où l’on peut reconnaître le fond du lyrisme roumain et, peut-être, celui de l’esprit national même, dans son ensemble ; alliance d’une tout autre portée que celle de l’Orient et de l’Occident, où les voyageurs sentimentaux et pittoresques ont coutume de résumer, aujourd’hui encore, la Roumanie...2
4Nous croyons opportun de commencer cette présentation de la poésie de Blaga et de la manière dont elle est perçue dans le monde francophone avec quelques considérations d’ordre général sur la poésie roumaine à l’aube de la modernité.
5Dans son remarquable ouvrage Panorama de la littérature roumaine contemporaine3, qui fait partie de la collection Panoramas des littératures étrangères contemporaines, Basil Munteanu, historien et critique littéraire, fait une rétrospective des écrivains roumains les plus importants à travers les époques. On y retrouve une histoire du peuple roumain au carrefour des empires, une synthèse des caractères généraux de la littérature roumaine, un résumé des auteurs et des ouvrages des origines et jusqu’en 1866. L’analyse historique prend en compte aussi les conditions dans lesquelles a été développée cette littérature, parfois tardivement par rapport aux grands courants européens. Un exemple illustratif est celui d’Eminescu, qui a été considéré comme « le dernier des poètes romantiques et qui, pourtant, par la fraîcheur de son style et l’originalité de sa pensée, est entré dans la grande littérature universelle4.
6L’étude diachronique continue avec un chapitre sur la création et la critique à l’époque d’Eminescu et un autre sur la différenciation des courants et des doctrines avant la première guerre mondiale. L’entre-deux-guerres, qui a commencé avec la naissance de la « grande Roumanie » (le 1er décembre 1918) a été, sans doute, la période d’éclosion de cette littérature nationale, auparavant assez timide, fragmentaire ou opprimée. C’est l’époque où la littérature roumaine semble avoir atteint sa maturité, avec l’épanouissement de la nouvelle et la naissance du roman moderne5.
7La poésie lyrique, encore timide donc avant Eminescu, connaît son plus grand élan toujours après la première guerre mondiale, avec l’essor des courants littéraires et des nouveaux représentants. La création poétique roumaine, féconde à cette époque, « révèle une abondance et une intensité accrues6 ». Pour illustrer ce propos, il suffit d’analyser les sous-titres du Panorama de la littérature roumaine contemporaine dédiés à chaque poète : Minulesco, ou le symbolisme grandiloquent, Bacovia, ou le symbolisme sans musique, Vinea, ou l’avant-garde élégiaque, Botez, un pessimiste, Philippide, un panthéiste, Barbu, le poète-géomètre, Arghézi, un irréductible, Craïnic, ou les divines certitudes, Pillat, ou les beautés claires, Davidesco et ses études lyriques, Voïculesco, ou le tragique chrétien, Maniu, le primitif raffiné, Blaga, poète du mystère cosmique7. Malheureusement, l’œuvre de ces poètes est restée, jusqu’à présent, méconnue au public francophone parce que, à part quelques exceptions8, elle n’a pas fait l’objet de traductions.
8La veine lyrique semble constituer l’essence du peuple roumain, dont l’expression la plus haute est la ballade Mioritza. Le folklore, source inépuisable d’inspiration pour les écrivains et les poètes, constitue, selon Basil Munteanu, le fondement de la littérature roumaine :
Nous ne savons pas si, comme le prétendait le vieil Alecsandri au siècle dernier, le Roumain naît poète. Mais qu’il naisse poète, ou qu’il le devienne, il faut bien reconnaître que le lyrisme est, pour l’heure, son instrument d’expression et de recherche par excellence et qu’il remplit dans les pays une véritable fonction nationale9.
9La sensibilité de la poésie roumaine est doublée par une veine métaphysique, à laquelle appartient aussi la création de Blaga : « Rares sont, dans la récente littérature roumaine, les chants de pur sentiment – amour, bonheur, nostalgie ou mort – sans arrière-pensée métaphysique10 ». Cette poésie a atteint la hauteur de la dimension métaphysique même si « l’esprit roumain s’exprime par la voie la plus courte, qui est celle de l’intuition et de l’instinct11 ». Les ballades populaires en sont la preuve la plus véridique. Comment autrement interpréter le sacrifice du maître bâtisseur Manole qui met la création artistique au plus haut niveau axiologique en se sacrifiant soi-même pour l’achever ? Comment analyser le refus du berger de Mioritza sinon comme une compréhension plus profonde de l’existence humaine dans le cosmos et de l’harmonie qui vainc le chaos ?
10C’est toujours l’intuition qui a porté les poètes roumains, tels Eminescu, vers les questions philosophiques fondamentales de l’être, tandis que l’instinct et la passion se sont concrétisés dans les vers de Blaga, les plus tumultueux du vingtième siècle, caractérisés parfois comme ayant des accents « expressionnistes12 ».
11La poésie roumaine a évolué donc, au fil du temps, d’un lyrisme purement descriptif vers un « lyrisme métaphysique » imprégné de symboles, comme l’appelle Basil Munteanu13. L’expression la plus haute de ce nouveau lyrisme est la création de Blaga, puisqu’elle a ouvert la voie à la forme poétique la plus pure, la plus abstraite, avec Ion Barbu, le poète-mathématicien, ou Nichita Stănescu, le maître des « non-mots14 ». Nous pourrions affirmer, sans nous tromper, que toute la poésie roumaine du vingtième siècle porte en soi l’empreinte de la douce mélancolie des vers d’Eminescu mais aussi, le sentiment métaphysique de Blaga.
12Les thèmes abordés par la poésie roumaine moderne sont les thèmes de la littérature et de la philosophie de tous les temps, l’un des plus fréquents étant la quête de soi-même : « L’abolition du moi pose un des problèmes les plus dramatiques qui existent, un des plus significatifs aussi de la psychologie du Roumain : le problème de l’identité » (qui peut être retrouvé, selon le même auteur, dans des poèmes comme Mélancolie d’Eminescu, Causeries avec moi-même, Strophes pour tout le monde de Minulesco, dans la création de Bacovia, etc)15.
13À la différence des poètes comme Ion Pillat ou Tudor Arghézi, pour Blaga, cette quête identitaire acquiert des dimensions cosmiques, d’où l’universalité de son lyrisme : « Pour Blaga, cette perte de moi est un phénomène constant, qui revêt mille formes, suscite mille retours sur soi-même, crée une infinité de perspectives cosmiques et engage l’être universel ; le tout, non sans résistance, ni sans sursauts16.»
14La poésie roumaine est liée aussi à la grande poésie du monde grâce aux mythes qu’elle véhicule. Le thème du moi et de ses origines, concrétisé dans le mythe du sang, qu’on retrouve particulièrement dans la création de Blaga, est l’un des plus fréquents. Le poète est hanté par les questions philosophiques universelles :
Une des formes les plus prenantes de cette déperdition du moi et de sa laborieuse résurrection, ce qu’on pourrait appeler le mythe du sang : l’individu, ne parvenant pas à se détacher de sa lignée d’ancêtres et commandé impérativement par son atavisme, se sent noyé dans le sang collectif de sa race, qui coule et reflue librement le long des générations, comme un fleuve, comme une marée. Inventé, croyons-nous, par Lucian Blaga, qui en a tiré de grands effets, - voir, par exemple, son poème Sommeil dans L’Éloge du Sommeil, 1929 – ce mythe a hanté plus d’un an ses cadets17.
15Il y a, vraiment, dans le poème Sommeil,un mouvement des sentiers, des oiseaux, de la terre, du sang qui se retirent dans l’indicible, dans le silence, dans le sommeil universel18.
16Cette période d’éclosion de la poésie moderne est marquée aussi par des changements de nature stylistique : « [...] la technique du lyrisme moderne a trouvé chez les Roumains, non seulement une énorme disponibilité psychique, mais encore une extrême ingénuité, une incomparable fraîcheur de sentiment et d’esprit », considère Basil Munteanu19. La force de ce nouveau souffle poétique marqué par la pensée philosophique réside, selon le même auteur, dans la métaphore, figure privilégiée du style de Blaga :
C’est bien dans cette puissance métaphysique que nous voyons le trait le plus saillant du lyrisme roumain. Et il a fallu l’explosion de ce lyrisme, vers 1920, pour que, sollicitée par son désir exacerbé d’expression, la langue nationale révélât ses énormes réserves de sèves concrètes, si propres à la métaphore. [...] À tel point qu’on en vint à sacrifier la musique du vers au bénéfice de la projection métaphorique, afin de ne point gêner le libre jeu de celle-ci20.
17Le lyrisme roumain poserait aussi un problème de traduction, parce qu’il est imprégné de métaphores qui doivent être déchiffrées premièrement dans la langue d’origine pour qu’on puisse trouver après une forme optimale dans une langue étrangère. Dans le cas de la poésie de Blaga, le langage est soumis, en effet, à de terribles épreuves et il est obligé, par sa structure métaphorique, à se dépasser soi-même :
[Le langage] devient du coup une énorme métaphore, propre à traduire l’énorme fusion moniste et à capter les occultes similitudes ; tout comme les facultés et les éléments, les mots sont mis en question : les exemples de l’une ou de l’autre tendance abondent chez tous ces lyriques, Blaga et Arghézi en tête. [...] Chez tous, le langage, plutôt que de traduire ou de suggérer, tend à jalonner une direction, à signaler une perspective engageante21.
18À cela nous pouvons ajouter que pour Blaga le poème est, premièrement, la traduction du chant murmuré par son cœur, chant qui se transpose en paroles22. De cette manière, l’indicible prend une forme sonore et un contenu de sens.
19L’entre-deux-guerres est aussi l’époque où la poésie qui se libère des contraintes prosodiques trop rigides pour se faire l’outil le plus adéquat de la pensée métaphysique. La parole poétique devient plus légère, on renonce aux rimes encombrantes, on emploie les enjambements, on recourt au rythme intérieur et au vers libre. Une transformation rapide et étonnante de la poésie roumaine se produit à partir d’Eminescu ; son effort a été continué par ses successeurs (Blaga, Barbu, Arghézi, Stănescu). Il s’agit en effet d’un mouvement qui a commencé surtout dans la première moitié du vingtième siècle.
20Nous pouvons ajouter à cela la présence du vers libre, d’une musicalité intérieure plus marquée, mais aussi des enjambements qui constituent une autre expression du modernisme. L’ancien modèle prosodique est abandonné en faveur d’une poésie plus libre, dépourvue de contraintes formelles. Le paradigme moderne dans la poésie lyrique non seulement lie cette production à la grande poésie européenne, mais facilite aussi, à notre avis, la traduction et la diffusion des œuvres. L’emploi du vers libre et d’une prosodie moins rigide dans la poésie roumaine dans la première moitié du vingtième siècle expliquerait peut-être pourquoi la traduction des poèmes de Blaga a été accueillie chaleureusement en France, tandis que, malheureusement, la traduction de l’œuvre poétique d’Eminescu n’a pas eu de succès.
2. La poétique de Blaga – ou le retour du vers au silence originaire
21Pour approfondir la poétique de Blaga, nous considérons nécessaire d’analyser la façon dont il concevait l’écriture et la mission du poète dans ce trouble XXe siècle. Pour cela, nous citerons les mots de Horia Bădescu qui, dans sa « Préface » au volume L’ontologie de la souffrance chez Lucian Blaga, avoue : « Le monde tout entier me semble malade dans la poésie de Blaga. Mais tout livre me semble une maladie vaincue. » Et, plus tard, il continue :
L’acte orphique, en tant qu’archétype lyrique, n’est rien d’autre que le résultat d’une crise d’identité, la quête perpétuelle de ce que je sens être plus que je ne suis, moi, la quête de celui que je suis dans mon appartenance et dans l’appartenance du monde, mon être à moi dans son essence transcendante23.
22Le moi tourmenté du poète en quête de réponses aux questions ultimes de l’existence voit dans l’écriture la seule méthode de vaincre le temps qui fuit. Dans un admirable aphorisme dont la traduction en français détruit, en quelque sorte, le double sens, le poète affirme : « Poetul nu este atât un mânuitor, cât şi un mântuitor al cuvintelor. El scoate cuvintele din starea lor naturală şi le aduce în starea de graţie24. »
23Il y a un côté messianique dans cette vision du poète-guérisseur des mots : bien qu’agnostique, Blaga utilise à maintes reprises des images empruntées à la théologie orthodoxe. L’écriture, et la poésie plus particulièrement, est donc l’état de grâce privilégié qui aide le créateur à « sauver » les mots et à « se sauver » soi-même de la tristesse qui règne dans le monde :
[Blaga] sait que la réponse à cette souffrance née d’une insatisfaction ontologique, le vrai remède à cette faille, c’est l’écriture elle-même ; l’écriture est spécialement l’écriture poétique, dont un Blaga, soumis à la rigueur du temps a croisé le cortège des mythes, connu la féerie des labyrinthes, parcouru les sentiers des forêts de symboles riches de ces graals inaccessibles qui [...] nous empoignent tel un vol d’oies sauvages, nous aidant à supporter les grands vents du siècle et le fer des épines25.
24Pourtant, la parole poétique de Blaga se trouve toujours sous le signe d’un silence magique, une sorte de « refus de la parole » qui a marqué son enfance et dont il se souvient dans son roman autobiographique Hronicul şi cântecul vârstelor (La chronique et la chanson des âges)26, mais aussi dans son poème Autoportrait :
Lucian Blaga est muet comme un cygne.
Dans son pays
la neige des créatures tient lieu de parole.
Son âme interroge silencieuse,
séculaire est sa quête,
dans le temps sans fin
jusqu’aux frontières ultimes27.
25« Începuturile mele stau sub semnul unei fabuloase absenţe a cuvântului28 », avoue Lucian Blaga. Il caractérise ce phénomène mystérieux comme une sorte de « prolongement » d’un état embryonnaire au-delà du naturel ou comme une « une lucidité insolite » qui s’est placée entre lui et la parole29. Le destin de ce poète « muet comme un cygne » (mais on pourrait dire aussi, sans se tromper, « muet comme un signe ») semble appartenir au grand mythe universel des artisans dont le travail est synonyme au sacrifice pour la création :
Les mots ont été pour Blaga une « provocation », non seulement au sens métaphorique, mais aussi au sens propre, car le poète commence à parler à quatre ans seulement. Blaga craignait les mots. Ils les regardait comme s’ils étaient des êtres doués de force, de volonté et de grâce divine. Comme dans une initiation sacrée, il pénètre, muet, dans leur monde mystérieux, en étant son propre guide. Le résultat de la recherche est miraculeux : le silence, chargé de sensations et de sens profond, se matérialise dans une écriture singulière dans le paysage culturel roumain30.
26Ce silence une fois dépassé, Blaga apprend à jouer avec les mots et opère une sorte de poétisation du monde concret, poétisation qui dirige sa pensée vers les profondeurs du mystère existentiel : « Nestrămutat în obsesie, credincios unor himerice încăpăţânări de sorginte poetică, pretutindeni, tot ce atinge Blaga se converteşte în poezie31. »
27La première impulsion qui entraîne, sans doute, l’esprit blagien et le pousse à franchir le seuil du silence est ce que Mariana Şora appelle « l’instinct métaphysique32 » que l’on peut retrouver dans le poème Autoportrait où le poète parle de son âme qui
[...] est en quête,
quête muette et séculaire,
depuis toujours,
jusqu’à l’ultime frontière33.
28Les débuts de la poésie de Blaga se trouvent, donc, sous le signe de la soif de connaissance. On y retrouve, en d’autres mots, « [...] o insaţiabilă aspiraţie la cunoaşterea neîngrădită, la experienţa totală, la topirea frenetică în fluxul vital34 ». C’est le désir d’approfondir le mystère qui détermine Blaga à entreprendre son aventure poétique. C’est, peut-être pour la première fois dans la littérature roumaine, une poésie dont les fondements sont métaphysiques plutôt que lyriques, car Blaga reprend et approfondit la pensée de Mihai Eminescu, mais il y ajoute une touche philosophique plus évidente.
29Pourtant, le destin de toute parole prononcée semble être de revenir au silence d’origine. Il y a, en effet, et le lecteur attentif peut s’en rendre compte, un mouvement décroissant dans la lyrique blagienne. Elle est imprégnée au début de lumière, de frénésie, du dionysiaque, d’élan créateur et d’émerveillement devant le mystère (le premier recueil de poèmes est intitulé d’ailleurs, et pas accidentellement, Les poèmes de la lumière). Ce mouvement continue ensuite avec une sorte de combustion qui culmine avec la mort du dieu Pan et lors de laquelle le poète acquiert une sorte de sagesse universelle (le volume Les pas du prophète).
30Mais, comme l’entrée dans l’univers des mots est douloureuse, elle mène à une sorte de tristesse métaphysique : écrire et souffrir sont deux actions simultanées et intimement liées dans l’univers du poète « penché sur les énigmes du monde35 ». Sa poésie tout entière est parsemée d’« interrogatives tristesses36 » qui nous renvoient aux questions philosophiques les plus anciennes :
Je ne sais toujours pas pourquoi tu m’as précipité dans la lumière.
Était-ce seulement pour que j’aille parmi les choses
rendre la justice en déclarant
lesquelles sont vraies, lesquelles sont belles ?
Ma main suspend sa course : ce n’est point raison suffisante.
Ma voix s'éteint : ce n’est point raison suffisante.
Mère, pourquoi m’as tu précipité dans la lumière,
pourquoi m’y as-tu précipité37 ?
31De cette manière, les derniers recueils de poèmes deviennent l’expression du désir de la mort et de l’anéantissement du monde matériel. Le dialogue, toujours vif dans les créations de jeunesse, se transforme en monologue. Tout aboutit à un nihilisme presque nietzschéen devant la fuite écrasante du temps que Blaga appelle « le grand passage ». Pour illustrer ce parcours qui mène Blaga à porter « la faux du négateur » et à s’enfermer dans la « dernière tristesse38 », il suffit de se rappeler l’accent expressionniste d’un poème comme Vreau să joc ! (Je veux danser !) :
Terre, donne-moi des ailes
et je serai flèche fendant
l’infini [...]
traversé d’élans fulgurants [...]39
32et le comparer aux ultimes désaveux de l’existence :
Lourdement les alouettes tombent du ciel
comme des larmes sonnantes versées par la divinité sur les labours. [...]
partout règne une tristesse. Une négation. Une fin40.
33En ce qui concerne la figure du poète, on a remarqué que Blaga le conçoit comme un personnage messianique. Le créateur, qui n’a pas été précipité au monde pour déchiffrer le mystère de l’existence, mais, par contre, pour l’accroître par ses vers, trouve dans la poésie l’unique voie de « sauver les mots » de leur état habituel. Comme tout prophète, le « maître des vers » n’est pas une figure idéalisée, sereine, mais il est atteint par toute la douleur du monde. Voilà pourquoi la métaphore des poètes vus comme des chanteurs malades ou lépreux est très fréquente dans la poésie de Blaga. Ce serait, peut-être, un avatar moderne des « poètes maudits » de Verlaine :
Nous traversons des crépuscules
à la bouche des lys purs,
et nous cachons en nous
une fin sous l’armure41.
34ou bien :
Nous ne sommes que porteurs de chant
Sous le noir terreau des cieux42.
35Dans son ouvrage Cunoaştere poetică şi mit în opera lui Lucian Blaga (Connaissance poétique et mythe dans l'œuvre de Lucian Blaga), Mariana Şora écrit à propos du leitmotiv des chanteurs lépreux – icône du poète :
Neintegraţi în « cetate » prin funcţionalizare şi izgoniţi din paradisul cunoaşterii nemijlocite, poeţii suferă în carne şi în spirit durerea lumii :
« toată durerea
ce-o simt, n-o simt în mine,
în inimă,
în piept,
ci-n picurii de ploaie care curg.
Şi altoită pe fiinţa mea imensa lume [...]
mă doare ca o rană. » (Melancolie)43
36Il est intéressant d’observer que Blaga ne parle pas du poète comme figure générique, idéalisée, mais d’une communauté de créateurs prêts à propager le mystère dans le monde. Voilà des vers emblématiques qui témoignent de la vision de Blaga sur le destin des poètes :
Les poètes, tous les poètes ne font qu’un, peuple indivisible, ininterrompu.
Leur parole est muette. À travers les âges qui naissent et qui passent
leur chant célèbre sans cesse un même vieux langage
depuis longtemps perdu. [...]
ils se ressemblent par ce qu’ils taisent44.
37Blaga fait de la mutité, caractéristique personnelle, la définition même de l’esprit créateur. Cette génération de poètes unis par leur mission de vénérer le mystère existentiel semble mettre fin au « Babel » et à la « dispersion45 », tandis que le poème devient chemin fulgurant qui mène au cœur même du mystère. Cette vision cumulative sur la mission du poète de devenir Sauveur des mots et de se sauver soi-même grâce à l’acte artistique fait de Blaga l’une des consciences les plus actives de la littérature universelle et le fait inscrire dans la modernité :
je veux croire que le poème est chez Blaga, à la fois, un raccourci fulgurant et douloureux de la réalité vers le réel, et un chemin de campagne qui musarde parmi les champs féconds et en fleur de l’âme, de l’homme et de l’être universel qui, pour moi, de toutes façons ne font qu’un46.
38La poésie de Blaga, résultat de cette mutité envahie, est tantôt chant qui ne veut pas écraser la corolle de merveilles du monde, tantôt psaume adressé au Démiurge absent, tantôt cri poussé pour exprimer le désarroi du poète accablé par le néant existentiel. Mais, le plus souvent, la parole est douloureuse et son antonyme, le silence, est le seul qui guérit. De l’aventure de la connaissance le poète arrive au drame de la connaissance. En d’autres mots, dirions-nous, le poète accepte de briser son mutisme initial pour faire entendre son « chant » dans le monde, mais l’effort créateur le détermine de nouveau, une fois la maturité atteinte, de s’enfermer dans le silence originel, meilleur que toute parole prononcée, tel qu’il l’avoue dans le poème Le secret de l’initié :
Homme, je t’en dirais davantage,
mais à quoi bon ? –
D’ailleurs des étoiles se lèvent
qui me font signe de me taire
qui me font signe de me taire47.
39La prière ultime adressée par le poète aux lecteurs est celle de respecter sa mutité, sa décision de revenir au silence du cygne, puisque « amère est toute parole » :
[...] aussi – laissez-moi
cheminer muet parmi vous,
et venir à votre rencontre les yeux fermés48.
40En ce sens, Jean Poncet trouve un admirable oxymore pour définir la poésie blagienne : il l’appelle « une parole de silence pour dire les signes de l’indicible49 ».
41La modernité de la poésie lyrique de Blaga réside aussi dans la multiplicité des perspectives qu’elle offre à travers sa puissante veine métaphysique, peut-être l’unique liant dans cette baudelairienne « forêt de symboles ». Cette poésie met en évidence « le génie du passage, le contact fulgurant » ; c’est « une poésie hantée par un jeu de miroirs : l’union du sacré et du contingent, qui révèle ce besoin de transcendance50 ». Chaque poème est une aventure en soi qui nous conduit au cœur du mystère, sans le dissiper. Le lecteur francophone découvrira en traduction un poète-philosophe sensible et doué, toujours préoccupé par « les énigmes du monde51 » et dans sa création une multiplicité de perspectives qui ne sont que les multiples facettes du modernisme. Andrea Genovese écrit d’ailleurs, à propos de la diversité des poésies de Blaga, qu’« aucune ne ressemble [l’une à l’autre], toutes multiplient la parole, l’image, le portrait spéculaire52 ». Aux lecteurs maintenant d’en juger.
Notes de bas de page numériques
1 La documentation et la recherche en vue de la publication de cette étude se sont déroulées dans le cadre du programme POSDRU/88/1.5/S/47646, cofinancé par le Fond Social Européen, par l’intermédiaire du Programme Opérationnel Sectoriel Développement des Ressources Humaines 2007-2013.
2 Basil Munteanu, « La poésie de Lucian Blaga précédée d’une introduction à l’étude du lyrisme roumain », extrait des Mélanges offerts à Mario Roques, Archives de la Bibliothèque Nationale de France, 1951, p. 191.
3 Basil Munteanu, Panorama de la littérature roumaine contemporaine, Paris, Éditions du Sagittaire, 1938.
4 L’histoire a dicté, plus qu’une fois, le destin des écrivains : c’est aussi le cas de Blaga, mis à l’index par le régime communiste, qui est allé jusqu’à s’opposer à ce qu’il puisse concourir pour le Prix Nobel de littérature.
5 Voir Basil Munteanu, Panorama de la littérature roumaine contemporaine, Paris, Éditions du Sagittaire, 1938.
6 Basil Munteanu, « La poésie de Lucian Blaga précédée d’une introduction à l’étude du lyrisme roumain », extrait des Mélanges offerts à Mario Roques, Archives de la Bibliothèque Nationale de France, 1951, p. 180.
7 Voir Basil Munteanu, Panorama de la littérature roumaine contemporaine, Paris, Éditions du Sagittaire, 1938.
8 Voir l’Anthologie de la poésie roumaine publiée en 1981, préface de George Macovescu, Paris, Nagel, 1981.
9 Basil Munteanu, « La poésie de Lucian Blaga précédée d’une introduction à l’étude du lyrisme roumain », extrait des Mélanges offerts à Mario Roques, Archives de la Bibliothèque Nationale de France, 1951, p. 180.
10 Basil Munteanu, « La poésie de Lucian Blaga précédée d’une introduction à l’étude du lyrisme roumain », extrait des Mélanges offerts à Mario Roques, Archives de la Bibliothèque Nationale de France, 1951, p. 180.
11 Basil Munteanu, « La poésie de Lucian Blaga précédée d’une introduction à l’étude du lyrisme roumain », extrait des Mélanges offerts à Mario Roques, Archives de la Bibliothèque Nationale de France, 1951, p. 186.
12 Voir le poème Vreau să joc ! (Je veux danser !), traduction de Jean Poncet,dans Lucian Blaga ou le chant de la terre et des étoiles, hors-série de la revue Sud, textes réunis par Jean Poncet ; articles de G. Astalos, E. B. Steiciuc et alii, Marseille, Sud, 1996, p. 33 : « Ô, je veux danser comme jamais n’ai dansé ! / Que Dieu ne soit point / en moi / comme esclave en prison – enchaîné. / Terre, donne-moi des ailes / et je serai flèche fendant / l’infini, / autour de moi ne verrai plus que le ciel, / ciel au-dessus, / et au-dessous ciel – / et flambant dans des flots de lumière / je danserai / traversé d’élans fulgurants / afin que Dieu respire en moi librement / et que cesse sa plainte : / "Je suis esclave en prison !" »
13 Basil Munteanu, « La poésie de Lucian Blaga précédée d’une introduction à l’étude du lyrisme roumain », extrait des Mélanges offerts à Mario Roques, Archives de la Bibliothèque Nationale de France, 1951, p. 184.
14 Voir le volume Les non-mots et autres poèmes, Nichita Stănescu, anthologie de poésie, traduction de Linda Maria Baros, Pierre Dogi, Jan H. Mysjkin et Anca Vasiliu, Paris, Éditions Textuel, 2005.
15 Basil Munteanu, « La poésie de Lucian Blaga précédée d’une introduction à l’étude du lyrisme roumain », extrait des Mélanges offerts à Mario Roques, Archives de la Bibliothèque Nationale de France, 1951, p. 181.
16 Basil Munteanu, « La poésie de Lucian Blaga précédée d’une introduction à l’étude du lyrisme roumain », extrait des Mélanges offerts à Mario Roques, Archives de la Bibliothèque Nationale de France, 1951, p. 181.
17 Basil Munteanu, « La poésie de Lucian Blaga précédée d’une introduction à l’étude du lyrisme roumain », extrait des Mélanges offerts à Mario Roques, Archives de la Bibliothèque Nationale de France, 1951, p. 183.
18 Lucian Blaga, Somn (Sommeil), traduction de Sanda Stolojan, dans Lucian Blaga, L’Étoile la plus triste, Paris, éd. Orphée, La Différence, 1992, p. 59 : « Nuit sans faille. Les étoiles dansent dans l’herbe. / Les sentiers se retirent dans la forêt et les grottes, / le cor ne parle plus. / Des chouettes se posent comme des urnes sur les sapins. / Dans le noir sans témoins / s’apaisent les oiseaux, le sang, la terre / et les aventures où tu retombes sans cesse. / Une âme s’attarde dans les souffles, / sans présent, / ni passé. / Levant des rumeurs sourdes parmi les branches / des siècles ardents se réveillent. / Dans mon sommeil le sang me quitte / comme une vague qui se retire / et reflue vers les ancêtres. »
19 Basil Munteanu, « La poésie de Lucian Blaga précédée d’une introduction à l’étude du lyrisme roumain », extrait des Mélanges offerts à Mario Roques, Archives de la Bibliothèque Nationale de France, 1951, p. 189.
20 Basil Munteanu, « La poésie de Lucian Blaga précédée d’une introduction à l’étude du lyrisme roumain », extrait des Mélanges offerts à Mario Roques, Archives de la Bibliothèque Nationale de France, 1951, p. 191.
21 Basil Munteanu, « La poésie de Lucian Blaga précédée d’une introduction à l’étude du lyrisme roumain », extrait des Mélanges offerts à Mario Roques, Archives de la Bibliothèque Nationale de France, 1951, p. 183.
22 Voir le poème Stihuitorul (Le poète), traduction de Jean Poncet, dans Lucian Blaga ou le chant de la terre et des étoiles, hors-série de la revue Sud, textes réunis par Jean Poncet ; articles de G. Astalos, E. B. Steiciuc et alii, Marseille, Sud, 1996, p. 227 : « À écrire des vers même les plus neufs / je ne fais qu’œuvre d’interprète. / Et c’est bien ainsi : / Car tel est l’unique fondement sur quoi le vers / peut s’accomplir et se faire fleur / À jamais traducteur. Je traduis / en langue roumaine / le chant que mon cœur / me murmure tout bas, dans sa langue. »
23 Horia Bădescu, « Tout livre me semble une maladie vaincue », dans L’ontologie de la souffrance chez Lucian Blaga, sous la direction de Horia Bădescu, présente les travaux de la sixième édition du Colloque international Lucian Blaga, organisé par l'Ambassade de Roumanie en France le 24 mai 2003 à Paris, Troyes, supplément à « Cahiers Bleus », collection « Les colloques internationaux Lucian Blaga », 2004, p. 7.
24 Lucian Blaga, Elanul insulei (L’Élan de l’île), Cluj-Napoca, Éditions Dacia, 1977, p. 15 : « Le poète n’est pas seulement un Maître, mais aussi un Sauveur des mots. Il fait sortir les mots de leur état naturel et les amène à l’état de grâce. » (notre traduction)
25 Jean-Luc Wauthier, « Mettre le feu aux grandes ailes de la nuit », dans L’ontologie de la souffrance chez Lucian Blaga, sous la direction de Horia Bădescu, présente les travaux de la sixième édition du Colloque international Lucian Blaga, organisé par l'Ambassade de Roumanie en France le 24 mai 2003 à Paris, Troyes, supplément à « Cahiers Bleus », collection « Les colloques internationaux Lucian Blaga », 2004, p. 10.
26 Lucian Blaga, Hronicul şi cântecul vârstelor, Bucarest, Éditions Tineretului, 1965.
27 Lucian Blaga, Autoportret (Autoportrait), traduction de Sanda Stolojan, dans Lucian Blaga, L’Étoile la plus triste, Paris, éd. Orphée, La différence, 1992, p. 109.
28 Lucian Blaga, Hronicul şi cântecul vârstelor (La chronique et la chanson des âges), Bucarest, Éditions Tineretului, 1965, p. 3 : « Mes commencements se trouvent sous le signe d’une fabuleuse absence de la parole » (notre traduction).
29 Texte original : « o luciditate insolită », Lucian Blaga, Hronicul şi cântecul vârstelor (La chronique et la chanson des âges), Bucarest, Éditions Tineretului, 1965, p. 3.
30 Irina Petrescu, « Présentation de Lucian Blaga », dans Lucian Blaga – « Le Grand Passage », suivi de Nichita Stănescu – « Une vision des sentiments », Marseille, Autres Temps, 2003, p. 37.
31 Mircea Vaida, Pe urmele lui Lucian Blaga (Sur les pas de Lucian Blaga), Bucarest, Éditions Sport-Turism, Bucureşti, 1982, p. 21 : « Enfermé dans son obsession, fidèle à de chimériques obstinations d’origine poétique, partout, tout ce que touche Blaga se transforme en poésie. » (notre traduction).
32 En roumain : « instinctul metafizic », dans Mariana Şora, Cunoaştere poetică şi mit în opera lui Lucian Blaga (Connaissance poétique et mythe dans l'œuvre de Lucian Blaga), Bucarest, Éditions Minerva, 1970, p. 2.
33 Lucian Blaga, Autoportret (Autoportrait), traduction de Jean Poncet, dans Lucian Blaga ou le chant de la terre et des étoiles, hors-série de la revue Sud, textes réunis par Jean Poncet ; articles de G. Astalos, E. B. Steiciuc et alii, Marseille, Sud, 1996, p. 159.
34 Dumitru Micu, Lirica lui Lucian Blaga (La lyrique de Lucian Blaga), Bucarest, Editura pentru Literatură, 1967, p. 15 : « une insatiable aspiration à la connaissance illimitée, à l’expérience totale, à l’union frénétique avec le flux vital. » (notre traduction)
35 Lucian Blaga, Scrisoare (Lettre), traduction de Jean Poncet, dans Lucian Blaga ou le chant de la terre et des étoiles, hors-série de la revue Sud, textes réunis par Jean Poncet ; articles de G. Astalos, E. B. Steiciuc et alii, Marseille, Sud, 1996, p. 107.
36 Lucian Blaga, Psalm (Psaume), traduction de Sanda Stolojan, dans L’étoile la plus triste, Paris, éd. Orphée, La différence, 1992, p. 27.
37 Lucian Blaga, Scrisoare (Lettre), traduction de Jean Poncet, dans Lucian Blaga ou le chant de la terre et des étoiles, hors-série de la revue Sud, textes réunis par Jean Poncet ; articles de G. Astalos, E. B. Steiciuc et alii, Marseille, Sud, 1996, p. 107.
38 Lucian Blaga, Amintire (Mémoire), traduction de Sanda Stolojan, dans L’étoile la plus triste, Paris, éd. Orphée, La différence, 1992, p. 45.
39 Lucian Blaga., Vreau să joc! (Je veux danser!), traduction de Jean Poncet, Lucian Blaga ou le chant de la terre et des étoiles, hors-série de la revue Sud, textes réunis par Jean Poncet ; articles de G. Astalos, E. B. Steiciuc et alii, Marseille, Sud, 1996, p. 33.
40 Lucian Blaga., Tăgăduiri (Désaveux), traduction de Sanda Stolojan, dans L’étoile la plus triste, Paris, éd. Orphée, La différence, 1992, p. 81.
41 Lucian Blaga, Cântăreţi bolnavi (Chanteurs malades), apud Francis Coffinet, « Le noir sous le temps », dans L’ontologie de la souffrance chez Lucian Blaga, sous la direction de Horia Bădescu, présente les travaux de la sixième édition du Colloque international Lucian Blaga, organisé par l'Ambassade de Roumanie en France le 24 mai 2003 à Paris, Troyes, supplément à « Cahiers Bleus », collection « Les colloques internationaux Lucian Blaga », 2004, p. 17.
42 Lucian Blaga, Noi, cântăreţii leproşi (Nous, les chanteurs lépreux), apud Charles Carrière, « Le chanteur lépreux », dans Les marches insoupçonnées, réunit les colloques internationaux Lucian Blaga, mai 1995-mai 1996, organisés par le Centre culturel roumain de Paris, Troyes, supplément à « Cahiers Bleus », collection « Les colloques internationaux Lucian Blaga », 1996, p. 15.
43 Mariana Şora, Cunoaştere poetică şi mit în opera lui Lucian Blaga (Connaissance poétique et mythe dans l’œuvre de Lucian Blaga), Bucarest, Éditions Minerva, 1970, p. 60 : « Comme ils ne sont pas intégrés dans la "cité" par la fonctionnalisation et ils sont chassés du paradis de la connaissance immédiate, les poètes portent dans leur chair et leur esprit la douleur du monde (notre traduction) : « toute la douleur / que je sens, ne la sens point en moi, / dans mon cœur, / en ma poitrine, / mais dans les gouttes de pluie qui glissent sur les vitres. » (Mélancolie, traduction de Jean Poncet, dans Lucian Blaga ou le chant de la terre et des étoiles, hors-série de la revue Sud, textes réunis par Jean Poncet ; articles de G. Astalos, E. B. Steiciuc et alii, Marseille, Sud, 1996, p. 53).
44 Lucian Blaga, Poeţii (Les poètes), traduction de Jean Poncet, dans Lucian Blaga ou le chant de la terre et des étoiles, hors-série de la revue Sud, textes réunis par Jean Poncet ; articles de G. Astalos, E. B. Steiciuc et alii, Marseille, Sud, 1996, p. 185.
45 Gérard Bayo, « Muet comme un signe », dans La poétique du signe chez Lucian Blaga et dans la poésie française, textes des communications au Troisième colloque international Lucian Blaga, 24 mai 1998, organisé par le Centre culturel roumain de Paris, Troyes, supplément à « Cahiers Bleus », collection « Les colloques internationaux Lucian Blaga », 1998, p. 4.
46 Werner Lambersy, « De la réalité au réel », dans L’ontologie de la souffrance chez Lucian Blaga, sous la direction de Horia Bădescu, présente les travaux de la 6e édition du Colloque international Lucian Blaga, organisé par l'Ambassade de Roumanie en France le 24 mai 2003 à Paris, Troyes, supplément à « Cahiers Bleus », collection « Les colloques internationaux Lucian Blaga », 2004, p. 53.
47 Lucian Blaga, Taina iniţiatului (Le secret de l’initié), traduction de Jean Poncet, dans Lucian Blaga ou le chant de la terre et des étoiles, hors-série de la revue Sud, textes réunis par Jean Poncet ; articles de G. Astalos, E. B. Steiciuc et alii, Marseille, Sud, 1996, p. 109.
48 Lucian Blaga, Către cititori (Aux lecteurs), traduction de Sanda Stolojan, dans L’étoile la plus triste, Paris, éd. Orphée, La différence, 1992, p. 23.
49 Jean Poncet, « Une parole de silence pour dire les signes de l’indicible », dans La poétique du signe chez Lucian Blaga et dans la poésie française, textes des communications au Troisième colloque international Lucian Blaga, 24 mai 1998, organisé par le Centre culturel roumain de Paris, Troyes, supplément à « Cahiers Bleus », collection « Les colloques internationaux Lucian Blaga », 1998, p. 52.
50 Alain Duveau, « Lucian Blaga : le sacré et le contingent », dans Les marches insoupçonnées, réunit les colloques internationaux Lucian Blaga, mai 1995-mai 1996, organisés par le Centre culturel roumain de Paris, Troyes, supplément à « Cahiers Bleus », collection « Les colloques internationaux Lucian Blaga », 1996, p. 49.
51 Lucian Blaga, Scrisoare (Lettre), traduction de Jean Poncet, dans Lucian Blaga ou le chant de la terre et des étoiles, hors-série de la revue Sud, textes réunis par Jean Poncet ; articles de G. Astalos, E. B. Steiciuc et alii, Marseille, Sud, 1996, p. 107.
52 Andrea Genovese, « Lettre ouverte à Mariana Bojan », dans Les marches insoupçonnées, réunit les colloques internationaux Lucian Blaga, mai 1995-mai 1996, organisés par le Centre culturel roumain de Paris, Troyes, supplément à « Cahiers Bleus », collection « Les colloques internationaux Lucian Blaga », 1996, p. 50.
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Pour citer cet article
Carmen-Ecaterina Aştirbei, « L’acte orphique à l’époque moderne : parole de silence d’un chanteur malade. Introduction à la poétique de Lucian Blaga », paru dans Loxias, Loxias 34, mis en ligne le 15 septembre 2011, URL : http://revel.unice.fr/loxias/index.html/lodel/docannexe/file/7601/lodel/index.html?id=6884.
Auteurs
Carmen-Ecaterina Aştirbei est doctorante à l’Université « Alexandru Ioan Cuza », l’École Doctorale d’Etudes Philologiques de Iaşi, Roumanie, et à l’Université de Bretagne Sud, Lorient, France (thèse en cotutelle), sous la direction de Madame la professeur Marina Mureşanu et de Monsieur le professeur Jean Peeters. Son thème de recherche est « La poésie de Lucian Blaga et ses versions en français – figures de style et traduction ». Elle a publié plusieurs articles sur des questions traductologiques et littéraires.