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Massamba Guèye  : 

La subversion sociale dans le conte sénégalais

Résumé

Il est aujourd’hui commode de considérer le conte comme étant uniquement un art du spectacle mais c’est oublier que dans les sociétés africaines, sa pratique est plus qu’un acte de production d’un discours spectaculaire, un élément vital dans le processus de socialisation de l’enfant et de l’adulte. Le présente étude propose une analyse des trois cercles du récit dans la société wolof sénégalaise en fonction du/de la conteur/euse. Il s’agit aussi de faire le lien entre le récepteur, le récit subversif et le personnage exceptionnel enfant dans trois récits majeurs du conte sénégalais wolof. Ces récits ne sont pas des prototypes de complaisance et de validation des tares sociales mais au contraire une vitrine qui montre que le personnage de rupture est un vecteur de progrès social et de renouvellement de la texture sociale de base. Les trois espaces types sont des cercles de récit qui engendrent une situation-répertoire dont bénéficie l’auditoire-producteur dans le processus de construction de son idéal de vie. Dans les trois contes types : « Mbakhané Ndiaye », « Coumba sans-mère », « Youmandé », nous analyserons le fonctionnement de la subversion dans le récit et dans l’itinéraire des personnages.

Abstract

It is today convenient to consider the tale as a performing art only but it is to forget that in the African societies, it is more than an act of production of spectacular speeches, a vital element in the process of socialization of the child and the adult. The present article proposes an analysis of three circles of the narrative in the society Wolof Senegalese in function of the storyteller. It is also a question of making the link between the receiver/narrative subversive by the character exceptional child in three major narratives of the Senegalese Wolof tale. Those tales are not prototypes of accommodation and validation of the social defects but on the contrary a shop window that shows that the character of break is a vector of social progress and renewal of the social basic texture. Three typical spaces are circles of narrative, which engender a situation-directory of which the public-producer benefit to build his ideal of life. In three typical tales : Mbakhané Ndiaye, Coumba the orphan, Youmandé, we shall analyse the functioning of the subversion in the narrative and in the route of the characters.

Index

Mots-clés : auditoire-producteur , situation-répertoire, subversion

Keywords : public-producer , situation-directory, subversion

Géographique : Sénégal

Plan

Texte intégral

Introduction

Les genres oraux présentent un ensemble d’aspects dont l’analyse révèle la mise en évidence d’une forte prise en charge du besoin du locuteur et du récepteur d’user des fonctions expressive et impressive du langage et d’en bénéficier pour mettre en scène un certain nombre de comportements sociaux. En effet, la littérature orale a cette faculté de dire dans un seul et même texte les attitudes à promouvoir, à bannir et/ou à consolider. Pourtant, certains analystes et collecteurs ont eu très peu de considération pour le conte sénégalais voire africain. Dans une de ces analyses, Louis-Vincent Thomas, que l’on considère comme une référence dans l’espace-nation Sénégal en tant que « fin connaisseur » des sociétés autochtones, affirme de façon péremptoire, parlant du conte diolas1 et du conte sénégalais, que :

Ce divertissement populaire par excellence, auquel participent souvent les vieux, s’adresse avant tout aux jeunes et aux femmes ; c’est pour cette double raison que le récit ne cherche guère la portée didactique ni même la logique interne rigoureuse2.

Dans le cadre de la transmission-conservation, il ne s’agit pas simplement de raconter de la même manière n’importe quel texte à tout auditoire. Il ne s’agit aussi pas seulement d’un divertissement. Il faudrait donc ne pas s’arrêter à penser que le conte est plus important que son lieu d’énonciation car le fait culturel répond impérativement à trois critères : un prétexte, un lieu et un instant. Le prétexte est prédéterminé par les us et coutumes et façonne la manière de pratiquer tel ou tel acte culturel. C’est ainsi, par exemple, que les danses rituelles ou de réjouissances sont accompagnées de textes différents qui participent à leur encodage. En plus, ces actes de socioculturels obéissent au lieu car le texte n’a de sens que conjoncturel. Nul ne peut en juger la valeur sémantique s’il laisse en rade le lieu de production qui lui même est étroitement lié à l’instant du dire performatif dans le cadre du conte.

Rappelons qu’en Afrique traditionnelle, tout comme dans beaucoup de villages d’aujourd’hui, le conteur raconte une histoire que le public connaît mieux que lui de sorte que ce que l’on attend de son récit c’est surtout une performance verbale personnelle qui manifeste sa capacité à investir le global dans un processus discursif personnel. De ce fait, le prétexte obéit à l’instant dans un espace prédéfini. Dans la société wolof du Sénégal, les trois cercles identifiables de la parole sont : le « ruum » (lire roum), le « ët » (lire eute) et le « pénc3 » (lire péñthie).Selon que le conte est dit dans un de ces espaces ou non, le discours porté par le texte détermine son sens et de la même manière, les rôles dévolus aux personnages changent contrairement à la définition classique du héros qui le fixe dans une fonction actancielle où selon une séquence actorielle.

Notons aussi que dans le domaine des contes, le Sénégal présente un répertoire riche du fait de l’existence de groupes ethniques très nombreux dont la mutualisation des productions offre un champ fertile aux analystes du genre. Cette mise en commun est rendue possible par la capacité du conte à s’adapter dans le temps et dans l’espace. Ce sont les mêmes contes qui circulent d’un groupe à un autre. Ayant toujours été un acte énonciatif à haute visée socialisante, le conte s’est doté des artifices de la parole nécessaires à la polysémie de son contenu de sorte que les récepteurs décodent ses différents messages selon le contexte mais surtout selon les marquages temporels qui définissent le modèle narratif.

C’est ainsi qu’il faut comprendre que, malgré son aspect fictif avoué, le conte s’inscrit dans la réalité d’une communauté et est marqué par les valeurs et les codes qui la caractérisent. Comme il est issu de la tradition populaire, plusieurs de ses éléments appartiennent à la mémoire collective4. C’est ce qui explique souvent qu’il comporte un aspect moral voire didactique qui s’adresse à tous les membres de la communauté. Roland Colin déclare à ce titre que :

Le conte est comme un sac profond : si loin qu’on y puise, on ramène toujours des poignées de secrets, d’évidences à la fois neuves et vieilles, de recettes, de savoirs utiles ou nécessaires, à croire que ce sac n’a point de fond car la sagesse et la vérité humaines qui sortent de ses profondeurs épousent tous nos geste possibles, intelligents ou sots, habiles ou maladroits, généreux ou pingres5

Dès lors, étudier la notion de subversion à travers le conte africain c’est, aujourd’hui, permettre qu’un certain nombre d’équivoques soient levées car le conteur africain de même que sa matière ne sont pas des complaisants dont le rôle est d’endormir leur public tout en évitant d’aborder de façon « démocratique », à l’occidentale, les vrais problèmes de leur groupe. Àcette notion de subversion, chacun peut conférer un sens positif ou négatif, en fonction de sa propre position par rapport aux valeurs du système en place ou à celles dont se réclament les acteurs de la subversion.

C’est pour cela que nous nous étudierons la subversion à travers trois contes de l’espace wolof du Sénégal avec des personnages dont les itinéraires sont jusqu’ici vus et conçus comme ordinaires alors qu’en réalité, il y a un discours subversif du conteur que soutient l’itinéraire des personnages de même que la substitution du rôle des personnages à des figures symboles de la hiérarchie bouleversée. La subversion sociale dans le conte sénégalais sera étudiée à travers ces contes types qui portent les marques d’une authenticité créative mais aussi les signes nécessaires et pertinents dont la lecture permettra de montrer comment, par la pratique du détour, un genre comme le conte devient un puissant vecteur de messages politiques car comme l’affirme Mircea Eliade : « Les contes, ceux d’hier et d’aujourd’hui, reflètent, sans aucun doute, un état de la civilisation et de la culture6 ».

Depuis les travaux de Propp, les différentes études ayant eu le conte comme objet en ont révélé bien des aspects ; cependant, il nous semble qu’on n’a pas suffisamment médité ces propos de Denise Paulme qui soutient ceci :

Un conte n’est pas le récit d’un fait divers, son but n’est pas de seul divertissement, il transmet toujours en langage allusif un message implicite ou plusieurs, que l’auditoire, c’est-à-dire, tout le village : amis, cadets… déchiffre plus ou moins aisément. […] Un conte, parce qu’il est du domaine de la fiction et que l’on semble n’y attacher guère d’importance, permet d’aborder les questions les plus graves7.

Les questions qu’abordent les contes africains installent de façon profonde des attitudes qui forgent la mentalité de l’auditoire. Il est donc bel et bien possible de lire cette subversion à travers la présentation succincte des trois récits qui permettra d’aborder la question de la dialectique de la normalité et de la transgression pour mieux mettre en exergue les personnages atypiques porteurs de caractérisations positives qui les mènent de la contrainte, à l’apothéose.

Résumé des trois contes

1. Mbakhané Ndiaye

Une méchante marâtre jeta dans la forêt l’enfant de sa coépouse décédée. Par la suite, le bébé fut retrouvé par un chasseur nommé Diam vivant sans enfant avec sa femme. En attendant qu’on le réclamât, le couple décida de s’occuper de l’enfant perdu et de le nommer Mbakhané Ndiaye. C’est ainsi qu’il fut éduqué en fils de chasseur. Il devint vite agile et fort. Un jour, un de se camarades de jeu lui révéla, de façon méchante, sa situation de fils adoptif. Après confirmation de cette nouvelle qui le bouleversa, le jeune héros se retira dans la forêt où il fut accueilli et accepté par les animaux.

Au fil du temps, il acquit un cheptel riche et varié. Un jour, deux de ses amis d’enfance décidèrent d’aller voir ce qu’il était devenu. À leur grande surprise, ils virent ses nombreuses richesses. Dès leur retour au village, ils firent le récit élogieux de sa réussite à la communauté. Le roi décida d’envoyer une expédition punitive pour lui voler ses biens mais ses conseillers lui suggérèrent l’idée d’inviter Mbakhané Ndiaye pour le faire mourir sur place.

Grâce à l’aide des animaux sauvages qui sont devenus les membres de sa famille de substitution par le pacte sanguin à base nominal, Mbakhané Ndiaye échappa au piège. L’expédition envoyée par le roi fut contrainte à la fuite devant la détermination de l’armée des animaux. Finalement le djinn lui donna les secrets de l’immortalité du roi qui aida Mbakhané Ndiaye à le vaincre. À la fin du conte, le jeune héros est intronisé par la communauté des humains.

2. Koumba l’orpheline

C’est l’histoire d’un homme qui avait deux épouses dont chacune avait une fille. Allah fit qu’une des femmes mourut et laissa sa fille avec sa coépouse. Les deux filles avaient le même nom. Pour les différencier, on les appelait : « Koumba-avec-mère » et « Koumba-sans-mère ».

Un jour, en lavant la vaisselle, Koumba l’orpheline oublia de laver une des cuillères en bois. Sa marâtre, furieuse, l’envoya la laver à la mer de Ndayane. Koumba, en pleurs, prit le chemin de la forêt. Elle subit des épreuves qu’elle surmonta avec brio et finit par rencontrer une vieille dame qui lui demanda, après l’avoir soumise à des tests d’éducation, de se préparer à retourner chez elle. La dame lui remit trois œufs qu’elle devait casser selon l’ordre et les lieux indiqués. Dès que l’orpheline cassa le premier œuf, des cavaliers armés en sortirent pour la protéger. Koumba se remit à marcher et cassa le deuxième œuf. Des lions et des panthères en sortirent. Les cavaliers les tuèrent. Koumba marcha, encore longtemps pour arriver chez elle. Avant de pénétrer dans le village, elle cassa le dernier œuf. De nombreux esclaves, battant des tam-tams et d’autres chargés de sacs d’argent, d’or, mais aussi de nombreux bœufs en sortirent. À son retour chez elle, elle devint la plus riche grâce à la vieille dame qui lui avait donné des œufs à casser selon un ordre bien indiqué.

3. Youmandé

Suite au décès de sa première femme, une marâtre profita de la faiblesse de son mari pour lui demander de chasser les garçons loin d’eux. La fille, Youmandé, quant à elle devait rester avec eux pour être l’esclave de maison. Un jour, la marâtre alla puiser de l’eau et eut des difficultés à la porter sur sa tête. Malgré sa fatigue, elle refusa l’aide du serpent, du crapaud et du margouillat. Finalement, elle accepta celle du lion tout en lui promettant Youmandé comme récompense.

Pour la première fois, elle autorisa Youmandé à aller jouer avec les autres filles à la sortie du village. Au beau milieu de la fête, les filles entendirent rugir le lion et se dispersèrent. Dès que l’animal se pointa dans la cours de la maison, elle ferma les portes et intima à son mari l’ordre de ne jamais l’ouvrir à sa fille. Le mari obéit à sa femme. Les deux frères de Youmandé, Massamba et Mademba8, informés grâces à des adjuvants magiques extraordinaires, sentirent la menace et vinrent au secours de leur sœur. Ils tuèrent le lion dans la cour de la maison et emmenèrent leur sœur. Le père lui pensait que Youmandé était morte.

Quelque temps après, ils décidèrent de rendre visite à leur père tout en disant à Youmandé de les attendre à l’entrée du village. Dès qu’ils demandèrent des nouvelles de leur sœur, le père déclara qu’elle était morte. C’est après cela qu’ils firent venir Youmandé dans la maison familiale. Le père reconnut sa fille et se transforma en acacia albida. La fille se dirigea vers la case de la marâtre qui, à la vue de Youmandé, se transforma en jujubier dès que leurs regards se croisèrent.

Normalité et transgression

Les notions de normalité et de transgression sont toujours à saisir dans le sens du code social qui les définit. Dès lors, on ne saurait leur conférer un sens universel et définitif pour tous les groupes sociaux. Il faudrait donc considérer que le normal est avant tout subjectif et particulier à chaque culture mais les conteurs ont pu, grâce à la fenêtre de liberté qu’ouvre le conte, tisser des discours subtils pour véhiculer des idées qui, dans une autre situation de communication sociale auraient été impossible à accepter par tout le groupe. En Afrique, le respect ou non des règles de fonctionnement du groupe provoquant des troubles organisationnels est sanctionné par la communauté dans sa globalité. Le discours de connivence ou de l’anti-loi naît alors du détour pratiqué sous forme d’ironie dans la langue wolof du Sénégal.

C’est ainsi que se manifeste le détournement des actes donnant naissance à l’inversion des rôles sociaux. Dans les trois contes de notre corpus, la situation de début paraît acceptée mais il faut lire les récits d’une autre façon. C’est d’ailleurs pour cela que nous préciserons comme André Leroi-Gourhan dans Le Geste et la Parole 19 qu’est dit « normal » ce qui est conforme à une moyenne considérée comme une norme, ce qui découle donc de la culture, ce qui est ordinaire, habituel. Les bases naturelles de normalité sont donc le contexte communautaire et les fondements communs de l’anormal entre autres. Dans ces trois contes, le processus de sanction des parents est validé par la transgression-consécration car les deux fils mettent à nu le mensonge du père dans « Youmandé » (texte 3) en lui montrant sa fille vivante alors qu’il l’a annoncée morte. De cette façon, le discours de la hiérarchie est invalidé par la victoire et la rupture finale car à la fin du conte, les enfants quittent l’espace originel pour marquer la fin du règne parental.

Dans le cercle restreint de la parole, le « ruum » ou la case, la grand-mère raconte cette histoire à un public du premier âge en insistant sur la gloire des frères qui n’ont pour adversaires que le père et la belle mère. C’est un appel à la prise de responsabilité familiale qui écrase le principe du silence de l’enfant dans une situation de non droit. Ce public premier n’agit que sur la démarche du conteur alors que dans le cercle troisième, quand ce conte est dit sur la place du village ou « pénc » l’auditoire peut entrer dans le récit du conteur, en prenant la parole, pour consacrer sa version ou l’amender. C’est ainsi que se manifeste la valeur idéologico-politique de ce récit qui dans son déroulement comme dans sa sémantique fustige la figure du père et installe la révolte pour protéger le faible. Les enfants sont appelés à prendre la parole pour sanctionner le mensonge familial là où le peuple peut lire la nécessité de contrôler les décisions politiques des autorités publiques. Il s’agit donc d’un conte qui se dit pour dédire ceux qui instaurent la pensée unique dans l’éducation des enfants en Afrique. Le conteur sait que son récit laisse des séquelles dans chaque enfant car le caractère est dit « Jikko » chez les Wolofs, terme qui pourrait se traduire par « sème-le ». Il est donc conscient que l’impact de son récit sur l’auditoire produit son effet de façon diffuse. Le texte n’est pas inoffensif car son objet exprimé est de faire changer d’attitude au groupe cible. Comme la semence met du temps à germer si la graine est bonne et la terre fertile, la mentalité de l’auditoire doit être irriguée de messages dont la majorité portent les valeurs à promouvoir.

Dans « Mbakhané Ndiaye » (texte 1), les mêmes méthodes narratives sont mises en place car le groupe, « père » de tout enfant, est victime de son égoïsme qui se manifeste dans le conte par la révélation méchante de la bâtardise du jeune héros. Une fois la transgression installée, les changements d’espace consacrent la rupture. La faute du groupe se présente comme une transgression à la fois individuelle et collective dont la sanction doit porter sur le roi-symbole. Ce conte substitue la jungle à l’humanité. Le héros n’est protégé que par les animaux face au danger que représente la société des hommes. Cette inversion des espaces de conflit et de réconciliation permet de mettre dans l’esprit de l’enfant l’idée que la cohabitation entre la faune et l’humain n’est pas toujours dangereuse. Il s’agit plutôt de construire très tôt une attitude de méfiance vis-à-vis de l’Homme. Même si un célèbre proverbe wolof dit que « L’homme est le remède de l’homme » ce conte montre que « L’homme est un vrai loup pour l’homme ».

Dans ce récit, toutes les considérations sont inversées. Le conte écrase la frontière entre normalité et transgression. Ainsi, s’il est dit à des enfants dans le cocon de la case, sa valeur répréhensive reste atténuée car il s’agit pour le/la conteur/euse d’attirer l’attention de son public âgé de six ans au maximum sur le fait qu’il faut se méfier de l’autre alors que le modèle social de base dit normalement le contraire. Cependant, c’est quand le récit est donné dans l’espace cours, le « ët », que la maisonnée le perçoit avec sa mémoire cognitive du fait du vécu commun dont chaque mot devient chargé, et les fonctions impressive et expressive de la langue réduisant la polysémie du texte. Le non-dit devient explicite à partir du moment où Mbakhané Ndiaye, le héros, se présente comme un cas anormal pour servir de miroir critique à la mauvaise gestion du secret. Le conte porte la critique de façon assez subtile car les références aux mondes humain et animal substituent adroitement l’un à l’autre comme pour attirer l’attention du groupe auditeur-conservateur-transmetteur qu’il doit avoir la force de dire non pour arrêter un système social qui met la Vie en péril.

Il est clair que la popularité d’un tel conte se justifie par l’acceptation du groupe à le relayer comme modèle informatif et porteur de leçons de vie au détriment de tout système politique répressif. C’est ainsi qu’on pourrait lire la dernière partie du conte condamnant la cupidité du roi qui cherche à dépouiller son sujet de ses biens. Le renversement du pouvoir anormal par l’homme dans une attitude de révolte normale est plus qu’un appel à l’insurrection, une exigence de relecture de la légitimité du pouvoir. Toute a-normalité est sanctionnée sans délais. Dans les sociétés africaines actuelles, ce conte aurait pu être censuré dès sa création à cause de sa virulence et son auteur condamné ou exilé pour « acte subversif tendant à renverser le pourvoir en place » car :

Les contes mettent le psychisme au travail, qu’il s’agisse du psychisme des conteurs, des auditeurs, des adaptateurs, des lecteurs, des chercheurs, des amateurs, des parents, des enfants, des détracteurs et même des indifférents10.

Dans Koumba-sans-mère, ou Koumba l’orpheline aussi, le danger est dans l’homme. La critique de la sanction normale que la marâtre édicte contre la fille de son mari est placée sous le viseur de la bouche du conteur. En effet, lorsqu’un enfant oublie de laver un ustensile, il doit être sanctionné alors que le conte dit le contraire. Il ne fustige pas l’attitude de la fille mais celle de la femme à qui la communauté donne le droit de punir. La sanction de la sanction passant par l’acceptation stoïque de la punition donne le pouvoir final à la victime. Le conte construit un univers qui semble perturbé dans cette version qui coupe volontairement la dernière partie de l’histoire11. Le statut social que gagne l’enfant lui confère une maturité de fait sans nullement tenir compte de son âge. Il est dit en Afrique de l’Ouest : « Un jeune qui a fait cent villages vaut un vieillard de cent ans ». Le renversement des forces met en évidence la capacité du conteur à dire l’angoisse de l’Homme avec des mots qui embaument son mal. La fin du récit plonge l’auditoire dans le regret ou le réconfort selon sa position face à l’héroïne. Ce conte est presque toujours dit dans l’espace de la maison, le « ët »ouvert à la communauté de la famille avec le devoir de garder secret des conclusions tirées explicitement ou tacitement. Pour asseoir une bonne lisibilité de son message, ce type de conte africain utilise des personnages atypiques pour véhiculer un discours souterrain à des degrés divers.

Personnages atypiques et caractérisations positives

En réalité, ces contes présentent des personnages atypiques du fait de leur statut textuel et social qui, même s’ils sont des archétypes de la littérature orale, demeurent aussi de véritables vecteurs d’une idéologie du groupe.

Le héros et les héroïnes des trois contes sont de deux catégories. Dans Mbakhané Ndiaye, l’enfant grandit et devient adulte à la fin du récit alors que dans les autres contes la fille demeure physiquement un enfant. Cette configuration permet de voir comment, en relation avec les adjuvants, le combat contre l’autorité et la remise en question de la fonction de celui qui incarne le pouvoir sont fondamentaux dans la construction d’un inconscient social critique. Puisque, d’après P. Péju,« chaque culture transforme, modèle, développe, diversifie les structures narratives des contes tout en maintenant la permanence de leur pouvoir sur les imaginaires individuels et collectifs12 », le système appellatif et le champ de la dénomination permettent de relever l’orientation idéologique du conte.

Dans la représentation sociale, la femme et l’homme sont dépositaires de pouvoirs dont l’exercice est bien contrôlé. Les trois contes présentent des variations de ces modèles en dessinant la figure femme-masculine. Dans ces cas, le père est présenté comme un être ridicule non conforme à l’image du pilier « ken13 ». Les deux frères de Youmandé, avertis par le savoir des génies, reviennent à la maison pour sauver leurs sœurs de la menace du lion. Dans cette séquence, les deux frères semblent être détenteurs du pouvoir absolu mais ils n’incarnent que la figure de la mère. En effet, le génie-savoir-adjuvant use du métadiscours pour leur dire que leur mère a été son protecteur car elle s’occupait avec soin de son arbre-gîte au milieu de la cour. Cette référence à l’acte maternel mise en lien avec la mission de sauvetage de la sœur révèle le vrai sens de la mission.Le récit use du magique comme validation spirituelle pour justifier le détournement du pouvoir familial. Le jeu de renversement des rôles passe par la consécration des enfants dont la maturation est justifiée par le séjour hors du milieu naturel.

C’est la confiscation du pouvoir de l’homme par la femme dans l’espace domanial qui confère aux enfants la possibilité de livrer le combat à la place du père. Cependant, étant donné que le vrai adversaire est la femme du père, le délégataire du pouvoir de la coépouse devient le lion ce qui permet de rétablir la configuration normale du combat : homme versus prédateur. Pourtant, la réalité du combat est ailleurs pour le public adulte du « pénc », la place publique : la mère protectrice agit sur le destin de ses enfants par sa présence in absentia. De cette manière, le conte condamne la femme toute en faisant l’éloge de celle-ci par le biais de la défunte. Cette caractérisation positive de la femme-mère est un jeu de validation du discours souterrain qui demande en réalité aux enfants et aux femmes de tenir tête dans l’espace familial lorsque leur vie est en danger.

Les deux opposants qu’incarnent la marâtre et le père passent de personnages à forme anthropomorphique à personnages à forme non anthropomorphique. Puisqu’ils ne peuvent pas satisfaire aux exigences qu’implique le statut de parents, la métamorphose s’impose. Cette chute du conte ne consacre pas seulement une fonction étiologique car les deux arbres choisis, en l’occurrence le jujubier et l’acacia albida, son caractérisés par leur odeur. Le jujubier (la marâtre) donne des fruits comestibles mais le père (le fromager) lui n’a plus le droit de mettre aux mondes des enfants d’où son incarnation en un arbre dont les fruits ne sont pas comestibles. Cette situation amplifie les traits négatifs des opposants qui, confrontés à des héros-enfants, placent ces derniers dans une case sociale méliorative. De la même manière, les dénominations permettent de relever la disqualification-requalification du chef de famille qui est réduit à un simple père de famille.

Koumba l’orpheline14 est le modèle de conte souvent dit dans l’espace « ruum » de la chambre et dans la cour de la maison « ët »car son message paraît appeler à la soumission à l’autorité mais quand on observe la démarche du texte, sa valeur sémantique change et renvoie plutôt au refus de suivre les conseils de la marâtre. Ce conte propose de chercher une vraie mère parmi les grand-mères que présente la famille au sens large du terme. L’enfant est interpellé sur la nécessité de se prendre en charge alors que la maîtresse de la cour familiale est avertie des sanctions qui l’attendent. Contre la violence faite aux enfants faibles, le conte montre une héroïne qui sait préparer sa vengeance contre sa famille et qui reste stoïque à l’énoncé de l’épreuve. Elle devient, au fil du texte, une héroïne qui fait preuve d’une force de caractère et d’une confiance en soi telles qu’elle représente une menace pour les autres marâtres détentrices du droit de vie et de mort sur les enfants de leurs coépouses.

Dans cette configuration, le jeune héros, Mbakhané Ndiaye, suit le processus de la maturation par la rupture avec l’espace physique. L’enfant se soumet volontairement à l’épreuve de la formation dans un autre univers pour fuir la honte que le groupe veut lui faire subir. Il est donc possible de lire la façon dont ce conte se construit selon l’auditoire et l’espace du récit car il ne s’agit plus pour l’enfant d’accepter tous les discours qu’on lui tient mais de prendre son destin en main par la rupture volontaire avec la communauté. Cette rupture-résurrection est donnée comme un gage de réussite économique (le héros possède un cheptel et des amis innombrables après son départ du village) et d’épanouissement personnel (il n’exprime jamais le besoin de revenir parmi les humains). Ce choix de rupture lui permet de vivre, comme les deux héroïnes, l’itinéraire formatif allant de la contrainte à l’apothéose.

De la contrainte à l’apothéose : les non-dits

Dans ces types de conte, la trajectoire héroïque révèle l’ethos du groupe créateur-porteur. En général, les récits traditionnels sont construits pour produire des modèles-miroirs positifs en fonction du destin commun que le groupe a choisi. D’ailleurs, le schéma du parcours héroïque peut se dessiner ainsi :

StabilitéRuptureSouffranceRésignationÉpreuvesGloire Apothéose

Depuis les travaux de Denise Paulme sur la structure du conte africain15, cet itinéraire semble ordinaire. Cependant, les récits de cette nature commencent toujours par une situation de déséquilibre très rapidement rétablie qui mène à une rupture entre la communauté et l’individu. Provoquée ou non, elle plonge l’enfant dans une position de souffrance d’ordre physique et psychologique. C’est ainsi que s’explique l’accomplissement du personnage vers sa maturation. Tous les personnages qui résistent à la violence infligée par le groupe finissent dans l’apothéose et la reconnaissance sociale. Cette situation peut sembler paradoxale pour ceux qui, à l’instar d’Antoine Basunga Nzinga, se posent la question de savoir :

Comment discuter de la dignité humaine dans une société où tout le monde est conscient de la primauté de la communauté sur l’individu ? Les auteurs s’accordent pour dire que dans la société africaine, c’est la communauté qui détermine l’individu16.

Cette trajectoire héroïque révèle au contraire combien l’individu prime sur le groupe dès l’instant où son combat est celui de la survie. Ce qui, ici, nous intéresse, c’est moins l’itinéraire en soit que les énoncés du conteur. Les qualificatifs péjoratifs accompagnent les récits destinés aux enfants comme une sorte d’aiguillage pour que le public ne se trompe pas sur les visées du conte. Les villageois sont taxés de « peureux », « traîtres » et « cupides » tandis que le roi est « cupide » et « mauvais ». Cette démarche subjective valide, aux yeux de l’enfant, le jeu de sanction des adultes qui ont mal agi alors que dans l’espace public du « pènc » l’autorité est indirectement interpellée car les Wolof soutiennent qu’il ne faut pas dire la vérité au chef mais il faut la poser à côté de lui : « Kilifa deesu ko wax dëg dees di tek dëg ci wétam ».Partant de là, nous considérons que la déchéance des détenteurs du pouvoir à la fin des contes est une sorte de manifeste que le conteur fait signer à tous les participants qui, dès l’entame de la séance, lui ont dit « daa na am17 » (cela arrivait souvent).

Les trois contes se terminent de la même façon qui permet à chaque fois à l’individu de prendre le dessus sur la communauté alors que l’on présente toujours l’homo senegalensis pour ne pas dire l’Africain comme un Être dominé et écrasé par le groupe. Comment une telle société a-t-elle pu générer et transmettre de tels types de récits ? Comment l’itinéraire de ces personnages construit sur le crescendo a-t-il pu servir de modèle de conception d’inconscients collectifs ? Nous pensons que la réponse est à chercher dans ce qu’au théâtre on appelle le sous-texte. Si la communauté ne voulait pas de ces comportements de l’individu face au groupe ces contes n’auraient jamais été dits dans le troisième cercle de la parole le « pènc » mais dans le seul espace que le pouvoir public ne peut contrôler, le « ruum », et dans lequel la confidentialité est d’autant plus assurée que le/a conteur/euse sait que celui à qui il/elle raconte ne peut répercuter le récit dans l’immédiateté de sa réception du fait de son âge.

Dans tout son parcours, le jeune héros est confronté à des difficultés qu’il apprend à surmonter seul. C’est pourquoi, dès le début du conte, il est séparé de l’adjuvant essentiel que représente la mère biologique. Ce dépouillement du personnage permet au récit de gagner en intensité car au fil des textes, les jeunes personnages sont de plus en plus valorisés alors que les adultes, censés représentés le pouvoir et la force, sont dans l’embarras. En outre, les contes n’instaurent aucun dialogue entre les héros et leurs parents dans les premières séquences du récit. Dans « Mbakhané Ndiaye » par exemple, c’est seulement au moment de l’apothéose, quand le jeune héros s’installe sur le trône que transparaît un message plutôt diffus. Dans « Youmandé », le seul dialogue père-fils se fait en l’absence de la fille victime. Plus qu’une situation normale d’énonciation dans une famille africaine, il faudrait lire dans cette séquence du conte un interrogatoire suivi d’une sentence dont la réalisation est immédiate : la famille se présente au tribunal des enfants.

Le récit ne dit pas d’où vient la métamorphose mais le conteur a déjà révélé que les deux adjuvants de Youmandé sont dotés de pouvoirs magiques très puissants. Cela veut dire que l’auditoire est appelé à comprendre cette fin de vie des parents comme une façon de sanctionner les adultes sans les toucher physiquement. Les professeurs Bassirou Dieng et Lilyan Kesteloot de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar rappellent cet invariant du conte wolof en ces termes : « Le père est souvent soit absent, soit inefficace pour protéger l’enfant qui est livré à sa marâtre (coépouse)18 ». Pour ce qui concerne Koumba l’orpheline, sa richesse est sa parole. C’est la réponse au vœu funeste formulé par la sentence de la marâtre. L’héroïne suit un parcours sans faute mais les seules prises de paroles que le conteur lui accorde se font dans la forêt car l’espace familial est une zone de non droit à la parole pour elle. Au bout de son périple, elle revient chez elle auréolée de gloire comme pour narguer des parents irresponsables qui ont cherché sa déchéance.

La déclinaison de l’itinéraire héroïque est aussi lisible dans le récit des exploits opposé à celui des malheurs du héros ou de l’héroïne. Le conteur y indique de façon implicite le déséquilibre idéologique auquel font référence ces contes. Les destins croisés des personnages sont aussi tissés de sorte à alerter l’auditoire sur les sanctions prévisibles en cas d’attitudes néfastes contre les enfants. Pour Koumba l’orpheline, le conteur prend bien soin de mettre en évidence son arrivée au village avec les richesses mais se garde de conter les réactions des parents et des villageois. Ce jeu de suspens est adressé aux adultes capables, après la séance, de se retrouver sous le « pènc » espace public pour en tirer diverses conclusions ou rappeler d’autres versions des mêmes contes. Pour l’auditoire de la cour composé de tous les âges, les messages sont décodés au fil du texte et les menaces comprises par les hommes et les femmes. C’est pourquoi les deux héroïnes Koumba et Youmandé sont élaborées dans deux moules différents car la première est une victime qui se prend en charge alors que Youmandé est sous la protection de ses frères.

L’élaboration des parcours révèle donc un discours souterrain car pour une société du non-dit et des sous entendus comme celle des Wolof du Sénégal, l’implicite est fortement accessible aux différents interlocuteurs. En dessinant des parcours de réussite, la société construit des mécanismes de contournement pour permettre à la parole de se déployer dans sa polysémie la plus inclusive. C’est donc faire largement fausse route que de considérer les personnages de ces contes comme vivant leur histoire au gré de la seule fantaisie créatrice du conteur. De cette façon, les trois cercles de la parole privilégient tel ou tel personnages dont l’itinéraire peut être totalement ou partiellement escamoté. C’est ainsi que la fin des contes fournit une bonne matière à réflexion : la contrainte est essentielle car c’est elle qui définit les conditions du parcours.

Conclusion

Au terme de notre analyse, nous retenons à travers ces contes wolofs que ce genre est à la fois simple et profondément complexe. Dans sa structuration comme dans sa thématique, il véhicule un discours souterrain empreint d’une subversion facile à lire si on connaît la philosophie morale19 du groupe générateur du récit. Étant donné qu’il y a divers lieux de production de la parole en fonction de la cible prioritaire et du message essentiel à livrer, les conteurs sénégalais voire africains, ont tissé dans leurs textes des messages de révolte qui préparent l’individu à faire face aux injustices sociales et politiques. Contrairement à ce que peuvent penser certains analystes, les contes sénégalais montrent par ces trois exemples qu’ils ne sont ni neutres ni inoffensifs car plus qu’un simple divertissement, le conte est une école de la vie qui prépare la personne à s’intégrer socialement dans le groupe qui l’a vue naître ou qui l’adopte.

C’est pour cette raison que nous avons montré dans cette étude comment, à partir de l’analyse de trois contes types de la société wolof du Sénégal « Mbakhané Ndiaye », « Youmandé » et « Koumba-sans-mère », il est possible de lire cette subversion en partant des trois lieux d’énonciation que sont le « ruum » (la case), le « ët » (la cour de la maison) et le « pènc » (la place publique). Nous nous sommes aussi attelé à démontrer comment l’apologie de la transgression montre que l’individu prime sur le groupe et comment l’enfant est invité à se révolter contre sa famille et le groupe s’ils représentent une menace. Ce parcours sémantique est surtout lisible dans l’itinéraire des personnages atypiques dont les réussites sont offertes comme modèles aux différents auditoires. La subversion semble ainsi être le ciment de ces contes.

Notes de bas de page numériques

1  Ethnie du Sénégal.

2  Louis-Vincent Thomas, Et le lièvre vint… Récits populaires diola, Dakar, Les Nouvelles Éditions Africaines, 1982, p 17.

3 Ces termes sont en langue wolof du Sénégal : « ruum » signifie en français le centre de la chambre, « ët » la cours de la maison et « pènc » la place publique du village.

4  Le conte était élaboré par et pour le peuple, et le fait que les contes soient identifiés à des auteurs précis est relativement récent car, pendant longtemps, le conte a été anonyme, appartenant en quelque sorte à tous.

5 Roland Colin, Littérature africaine d’hier et d’aujourd’hui, Tours, ADEC, 1965, p 12.

6  Mircea Eliade, « Les mythes et les contes de fées », p. 66, in Aspects du mythe, Paris, Gallimard, « Folio », 1963.

7  Denise Paulme, La Mère dévorante: essai sur la morphologie des contes africains, Paris, Gallimard, 1976, p. 11.

8  Les prénoms Massamba et Mademba signifient aussi en wolof, « N’importe qui » ou « Tout le monde ».

9  André Leroi-Gourhan, Le Geste et la Parole, 1, Paris, Albin Michel, 1964-1965, p. 335.

10 Geneviève Calame-Griaule, Le Renouveau du conte, The Revival of storytelling, Paris, CNRS édition, 1991, p. 242 et p. 245.

11 Ce conte constitue une version assez méconnue des aventures de Koumba. Dans les versions les plus connues, il y a deux sœurs. La fille de la marâtre qui s’appelle aussi Koumba-avec-mère fait le même trajet que sa sœur au retour de celle-ci mais finit par mourir du fait de son manque d’éducation.

12  Paul Péju, L’Archipel des contes, Paris, Aubier, 1989, p 24.

13  « Ken » en wolof signifie le pilier central qui supporte la charge de la construction.

14  Cherif Mbodj et Lilyan Kesteloot, Contes wolof ou la vie rêvée, Dakar, Enda et IFAN, « Clair de lune », 2001.

15  Denise Paulme, La Mère dévorante. Essai sur la morphologie des contes africains, Paris, Gallimard, 1976.

16  http://www.memoireonline.com/04/11/4398/m_Sagesse-et-pouvoir-une-hermeneutique-du-pouvoir-14.html

17  Le conte wolof s’ouvre par un dialogue entre le conteur et son auditoire quel qu’en soit l’âge. Cela donne : « Leeboon- Leepoon -Amoon na fi-Daa na am-Ba mu amee yéen a fekke ?-Yaa wax ñu deeg-waxu tay matut a gëm-Sa jos a ci raw. » C’est à dire : « On contait – On contait tout – Il était arrivé – Cela arrivait souvent – En étiez-vous témoins ? C’est de toi que nous l’avons appris – Il ne faut pas se fier aux paroles d’aujourd’hui. – Encore moins aux tiennes. »

18  Bassirou Dieng, et Lilyan Kesteloot, Du Tiéddo au Talibé. Contes et mythes wolofs II, Paris, Présence Africaine, 1989, p. 19.

19  Assane Sylla, La Philosophie morale des Wolof, Dakar, Sankoré, 1978.

Bibliographie

CALAME-GRIAULE Geneviève (dir.), Le Renouveau du conte, The Revival of storytelling, CNRS édition, (actes du colloque des 21, 22, 23,24 février 1989 à Paris), Paris, 1991

COLIN Roland, Littérature africaine d’hier et d’aujourd’hui, Tours, ADEC, 1965

ELIADE Mircea, « Les mythes et les contes de fées », Aspects du mythe, Paris, Gallimard, « Folio », 1963

DIENG Bassirou et KESTELOOT Lilyan, Du Tiéddo au Talibé. Contes et Mythes Wolofs II, Paris, Présence Africaine, 1989

DIOP Abdoulaye Bara, La société wolof. Tradition et changements. Le système d’inégalité et de domination, Paris, Éditions Karthala, 1981

Leroi-Gourhan André, Le Geste et la Parole, 1, Paris, Albin Michel, 1964-1965

KANE Mouhamadou, Essai sur les contes d’Amadou Koumba, Dakar, Les Nouvelles Éditions Africaines, 1983

MBODJ Cherif et KESTELOOT Lilyan, Contes wolofs ou la vie rêvée, Dakar, Enda et IFAN, « Clair de lune », 2001

PAULME Denise, La mère dévorante. Essai sur la morphologie des contes africains, Paris, Gallimard, 1976

PEJU Pierre, L’Archipel des contes, Aubier, 1989

THOMAS Louis-Vincent, Et le Lièvre vint… Récits populaires diola, Nouvelles Éditions Africaines, 1982

SYLLA Assane, La Philosophie morale des Wolofs, Dakar, Sankoré, 1978

Pour citer cet article

Massamba Guèye, « La subversion sociale dans le conte sénégalais », paru dans Loxias, Loxias 34, mis en ligne le 15 septembre 2011, URL : http://revel.unice.fr/loxias/index.html/lodel/docannexe/file/7601/lodel/index.html?id=6845.

Auteurs

Massamba Guèye

Dr. Massamba Guèye a fait une thèse unique à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar en 2009/2010 au Sénégal. Il est professeur de français depuis 1992. Il produit, réalise et anime aussi l’émission radiophonique bilingue « Contes et légendes » Français/Wolof sur RSI tous les mercredis et dimanches de 14h 30 à 15 h depuis 2001. En outre, il tient la rubrique hebdomadaire sur les langues et Littératures « Maux des mots » sur la télévision nationale du Sénégal RTS1. Conteur, dramaturge et poète, il s’intéresse de plus près à l’univers de l’oralité et des langues africaines surtout le wolof qu’il a appris à écrire à partir de 1979 à Louga. Depuis 1986, il fait des recherches sur la richesse et la qualité des expressions wolofs selon les différents niveaux de culture du public lors de ses séances de contes dans les festivals et théâtre du monde entier. Il est aussi expert consultant international en culture et pédagogie. Massamba Guèye est auteur de plusieurs livres de contes et de théâtre dont : Héritage et autres contes…, Dakar, 2002, Ed Le Nègre International, 57p ; Modou le riche bavard, Dakar, 2002, Ed Le Nègre International, 25p ; Tout conte fait … (livre-cd ), Dakar, 2008, Ed Le Nègre International, 57p ; Sénégalités, paroles africaines (théâtre), Dakar, 2011, Ed Le Nègre International, 57p ; Le Totem, et Les aventures des sœurs gourmandes (livre de lecture du Ministère de l’Education Nationale), Ed de la Brousse, 2010