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Loxias | Loxias 32 | I.
« Behind the story I tell is the one I don’t » : Le cri silencieux de l’enfant abusée dans l’œuvre de Dorothy Allison
Dans L’Histoire de Bone, son premier roman semi-autobiographique, l’écrivaine américaine survivante d’inceste Dorothy Allison raconte l’abus physique et sexuel qu’une fillette subit aux mains de son beau-père. En proie à la terreur et incapable de dénoncer la violence, Bone est réduite au silence et s’enfonce peu à peu dans le désespoir. Pourtant, bien qu’elle décrive l’inévitable enfermement de la victime d’abus dans le cercle vicieux de la violence et du silence, Dorothy Allison donne en réalité une voix à l’enfant silencieuse et relève le défi, essentiellement féministe, de mettre des mots sur ce silence et de le briser. Ainsi, le travail d’écriture permet à l’auteure-survivante de pousser son propre cri : grâce à l’écriture autobiographique, Allison dénonce enfin, des années plus tard, l’enfer que lui a fait subir son abuseur. L’œuvre littéraire, en tant que « cri silencieux », brise le tabou de l’inceste, raconte l’inénarrable et l’expose aux yeux du monde. In Bastard Out of Carolina, her first semi-autobiographical novel, the American author and incest survivor Dorothy Allison tells the story of a girl who suffers repeated physical and sexual abuse at the hands of her stepfather. Bone is racked by terror and unable to denounce her abuser, so that she seems condemned to remain silent, and sinks deeper and deeper into despair. Although she describes the child as being trapped in a cycle of violence and silence, Allison in fact gives the silent child a voice, and takes up the feminist challenge of putting words upon silence in order to break it. The writing process thus allows the author-survivor to finally cry out : years after suffering the abuse, and thanks to life-writing, Allison manages to denounce the living-hell she went through as a child. The literary work, a “silent scream”, finally breaks the taboo that surrounds child sexual abuse, allows the victim to speak up about the unspeakable, and to expose it for the world to see.