mémoire dans Loxias


Articles


Loxias | Loxias 13 | I.

Le récit comme avatar du dialogue dans le théâtre de Daniel Danis

Dans le théâtre de Daniel Danis, récit et dialogue entretiennent un lien étroit et ambigu ; les spécificités génériques de chacun nourrissent l’autre. Loin d’appartenir au théâtre-récit ou d’être une simple narration du drame, la dramaturgie danissienne conjugue une hybridation narrative qui place le récit au cœur du dialogue – renouvelant ainsi le statut du personnage, celui de l’acteur et la place du spectateur. In Daniel Danis’s plays, narrative and dialogue have close and ambiguous ties ; the specifities of each genre feeding the other. Far from being narrative-theatre or a simple narration of the drama, Danis’s plays are an hybrid narrative which places narration at the heart of dialogue – therefore the status of the characters, of the actors and the place of the spectator are renewed.

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Loxias | Loxias 21 | Frédéric Jacques Temple, l'aventure de vivre

Frédéric Jacques Temple, aventure de la mémoire et porosité de l’être au monde dans La Chasse infinie

Le poème de Frédéric Jacques Temple a rapport au temps, au sens de mémoire. Il effectue un retour à l’aletheia, l’ancienne vérité, mémoire du mage et du poète, célébration qui rapporte le mot à un temps mythique où la chose simple était là sans traduction. Memorandum immémorial. Laisser une trace comme celle des menhirs des brandes celtiques ou bien des oeufs de granit de l’Aubrac. Le poète est celui qui traverse les strates du temps et témoigne du monde et de l’homme. Solitude, immutabilité, les caractères matériels des poèmes de Temple, comme des stèles, définissent une posture face au temps. Mais la réminiscence elle-même est reviviscence. Tout est émouvant enchevêtrement des fils de la vie, aventure de vivre, car « à chacun son aventure », ce qui fait que cette poésie taillée dans la pierre est aussi celle de la précarité, de l’évanescence, de la légèreté duveteuse d’une aile irisée de papillon.

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Mémoire et présence dans la poésie de Frédéric Jacques Temple

Nous interrogeons ici la poésie de Frédéric Jacques Temple en tant qu'elle nous semble indissociable du travail de la mémoire. Nous avons pris appui sur l'essai de John E. Jackson, Mémoire et création poétique (Paris, Mercure de France, 1992) pour analyser la dimension prospective du retour sur le passé et la dimension créatrice de la mémoire dans la poésie de Temple. La rétrospection a pour enjeu un sens et une plénitude sur le double plan existentiel et poétique, sans pour autant garantir le poète de l'expérience de la distance et de l'absence. La rétrospection devient même un lieu privilégié de l'affrontement du poète avec les difficultés du passage à la représentation, qui fait courir le risque d'un déficit ontologique irréparable. De là sans doute, chez ce poète éminemment conscient de sa propre précarité comme de celle du monde, une sensibilité particulière à des moments et à des lieux où la présence glisse du côté de l'interrogation et de l'énigme.

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À l’écoute avec Frédéric Jacques Temple

Les poèmes de Frédéric Jacques Temple requièrent une oreille attentive, car étant à l’écoute du monde, ils demandent en retour une fine écoute, afin que les paysages sonores qu’ils enregistrent soient dûment perçus, sur le plan acousmatique comme sur le plan acoustique. Une telle écoute est indissociable de l’exercice intense et continu de la mémoire, conçue comme une réserve de sons. Face à l’Histoire, qui engloutit tout dans son bruit et sa fureur, le poème de l’écoute valorise la légende, bonne conductrice d’acousmates, dans l’endophasie créatrice. Le poète, et à la suite son lecteur, est un « chasseur infini » de silences, qu’il emmagasine afin de les moudre et d’en faire la matière vive du poème. Homme des « petites perceptions », il accueille aussi le cri, modèle ses vers sur le rythme obstiné du train ou sur le lent cheminement des caravanes, élit les animaux pour totems sonores, se donne pour maître de musique l’oiseau, et sa tête est emplie des œuvres de bien des compositeurs. Ses poèmes traduisent au bout du compte une écoute exceptionnelle des langues en général, et du langage du poème en particulier, marqué souvent par le balbutiement des origines et « la rumination des siècles », qu’il nous demande d’écouter.

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Loxias | Loxias 22 | Doctoriales V

La mémoire comme plissement du Dehors dans Moderato Cantabile de Marguerite Duras et dans « A Doida » [« La folle »], (A China fica ao lado [La Chine se trouve à côté]), de Maria Ondina Braga

Dans Moderato Cantabile de Marguerite Duras et dans « A Doida » [« La folle »] de A China Fica ao Lado [La Chine se trouve à côté], de Maria Ondina Braga, le dehors intervient comme un élément de renaissance : intériorisé, il relance la mémoire, devenant ainsi garant d’une subjectivité. En revanche, le silence qui signe le secret et un gouffre de douleur souterraine, traduit parfois par un état de « passivité » extrême, semble vouloir tendre vers l’oubli de l’oubli lui-même. Le conflit entre ces deux forces, mémoire et silence, qui sauve de la mort, suppose néanmoins l’exténuation du sujet. Le cri, libérateur comme le mot qui dirait l’indicible, semble alors signifier  l’aboutissement ultime (inatteignable ?) de cette attente.

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Loxias | Loxias 32 | I.

Écrire le silence et l’amnésie : Georges Perec et Jean-Roger Essomba

Des écrivains contemporains tourmentés par les thèmes de l’absence et du silence, nous pouvons compter parmi les premiers Georges Perec. Cette obsession se justifie par la disparition de sa famille causée par les violences du génocide et de la deuxième guerre mondiale. Le traumatisme d’une vie déchirée se trouve donc à l’origine de son écriture de fait, le plus intéressant est d’explorer les moyens que l’auteur emprunte pour le mettre en mots. Dire la violence familiale est aussi le dessein de Jean-Roger Essomba. Sans être une œuvre autobiographique, Une Blanche dans le noir raconte les détresses causées par les coutumes en Afrique et qui poussent les jeunes à une immigration forcée. Il nous semble que certaines réalités sont si difficiles à exprimer que les auteurs empruntent souvent des thèmes particuliers et une écriture spécifique pour le dire. Ils mettent en scène des personnages amnésiques ou frappés par la folie, plongés dans l’inconscient du coma, engagés dans une quête-enquête, pour enfin atteindre l’utopie. Un monde qui sera d’une manière ou d’une autre la critique de la société réelle. Autant de manières de dire le silence, le traumatisme par une narration oblique. Ce moyen est-il efficace pour évacuer le traumatisme et vider le monde de telles catastrophes ?

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Loxias | Loxias 36 | II.

Le nom, la mémoire et l’oubli …

Texte publié en hommage à Bernard Vargaftig, disparu le 27 janvier 2012. Dans la mise en abyme des quatre récits en étoilede Vargaftig et Modiano, apparaissent les mêmes troubles d’identité, éclats du traumatisme, qui portent à s’échapper dans une écriture attenant, presque, à la « désidentité ». Contre l’étau qui se resserre, celui des fiches d’état civil ou celui d’une catégorie où l’on voudrait vous enfermer, qu’une seule solution : fuir. À moins qu’il ne s’agisse davantage de produire un certain nombre de faux-papiers, afin de mieux dissimuler une origine. Le vertige anonyme ouvre un gouffre entre soi et soi, un vertige-panique entre le nom de soi – l’ignorance de soi. L’écriture permet-elle de refaire « la liaison » – plus tard – avec ce que le silence a rompu ? Si la langue peut se construire comme une ruine de noms, dans la lumière des noms, alors Patrick Modiano et Bernard Vargaftig sont frères en écriture.

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Loxias | Loxias 43. | I. Questions de Littérature comparée à l'agrégation de Lettres modernes

La mémoire en miettes. Commentaire composé du groupement de textes « Le Petit Bossu » et « La lune » (Une Enfance berlinoise, de Walter Benjamin)

Grand lecteur et traducteur de Proust, Benjamin s’attelle comme lui, dans son Enfance berlinoise vers mil neuf cent,à mettre au jour les mécanismes de la mémoire à partir d’un matériau autobiographique. Par ailleurs, son ouvrageapparaît irrigué par les thèmes fondamentaux de sa pensée et, loin de constituer un exercice à part dans son œuvre, s’inscrit de ce fait de plain-pied dans celle-ci. Les deux textes finaux d’Enfance berlinoise, en particulier, illustrent l’effort original de Benjamin de compréhension de la construction du processus historique, qu’il conçoit en opposition à la notion courante d’un temps linéaire régi par une contestable idée de « progrès », et nous invitent à lire son ouvrage comme la mise en œuvre d’une écriture historique d’un type nouveau.

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L’oncle Rouka ou la « riche nostalgie » de Nabokov

Cet article propos une analyse de la fin du troisième chapitre d’Autres Rivages de Nabokov, consacrée au portrait de son oncle Rouka. à travers une très riche intertextualité proustienne, Nabokov développe ici sa propre écriture de la mémoire, faite d’un mélange entre autobiographie et fiction. Le passage révèle également l’ambiguïté du regard nostalgique qu’il porte sur son enfance, très loin d’une admiration univoque et sans nuance.

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Loxias | 51 | I.

« La mort de Saint-Loup » (Le Temps retrouvé)

L’épisode de la mort de Saint-Loup marque la fin de l’évocation de la guerre de 14 dans Le Temps retrouvé ; il entame également le mouvement qui conduira le narrateur à la décision de se consacrer à son œuvre littéraire. Pleurant son ami tué à la guerre, le narrateur se remémore leur relations passées : la personne de Saint-Loup devient personnage et sa vie un destin qu’il s’efforce de déchiffrer. Mais l’expérience du deuil contribue aussi à transformer l’histoire en mémoire.

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Loxias | 54 | I.

Le symbolisme du lit dans La Nuit des origines de Nourredine Saadi. Entre Eros et Thanatos

Le lit, extrêmement présent dans la tragédie grecque, l’est aussi dans la production littéraire de l’écrivain algérien Nourredine Saadi. Sans nulle prétention à l’exhaustivité, la présente contribution interroge sa dimension symbolique dans La Nuit des origines, son roman paru en 2005. Partant des réflexions de Jean Baudrillard sur l’objet ancien, elle démontre, d’abord, que ce meuble oriental se donne à lire comme un signe identitaire. Ensuite, elle révèle qu’il s’insère dans une intertextualité mythique, rappelant le destin tragique des héros mythologiques, Œdipe et sa fille (incestueuse) Antigone. Enfin, son retour d’un texte à un autre invite à le considérer à la fois comme le lieu d’une mémoire intratextuelle et comme une composante cardinale d’un « mythe personnel », lequel se caractérise par le triomphe de Thanatos sur l’Eros.

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La mémoire de l’enfance au Brésil et au Congo : une analyse de José Lins do Rego et Alain Mabanckou

Cet article propose une étude comparative entre les ouvrages Menino de Engenho (1932), du Brésilien José Lins do Rego, et Demain j’aurai vingt ans (2005), du Congolais Alain Mabanckou. En plus de l’inspiration biographique de leurs éléments fictionnels, ces romans se rejoignent au niveau de leurs univers narratifs : tous deux font appel à des marqueurs de l’univers enfantin et se situent dans l’enfance de quelqu’un. Chacun d’eux est raconté à la première personne du singulier, et les récits affichent la figure d’un narrateur-enfant ou d’un narrateur adulte qui retournerait alors dans son enfance par le biais des souvenirs. Inspiré par les travaux de Maurice Halbwachs sur la mémoire, ce travail de comparaison propose d’analyser quelques-uns des recours narratifs couramment utilisés pour convertir des fragments de mémoire de l’enfance en matière poétique. This paper proposes a comparative study between Menino de Engenho (1932), by the Brazilian author José Lins do Rego, and Demain j’aurai vingt ans (2005), by the Congolese author Alain Mabanckou. Aside their biographical nature, both novels have in common the establishment of an infantile narrative universe. Narrated in the first person, these two novels bring forth the eminently distinguishing figure of a child-narrator or of an adult narrator returning to his childhood by the bias of recollection. In the tone of the works of Maurice Halbwachs on the human memory, this work tries to analyse the narrative means that allow the internal conversion of fragments of childhood memories into poetic matter.

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Loxias | 64. | I.

« en remontant le fleuve vers cette éternité » : présence de Paul Celan dans le discours poétique des chansons de H.F. Thiéfaine

Les vers « ein Weisensteinchen, flussaufwärts, die Zeichen zuschanden gedeutet » que place H.F. Thiéfaine en exergue de « en remontant le fleuve » sont l’indice du dialogue qui s’établit dans le corpus des chansons avec les poèmes de Celan que Thiéfaine aborde dans l’original, comme il le fait de façon générale avec la littérature de langue allemande. La recréation des vers de Celan qui s’opère au plan implicite du discours multivoque dépasse le simple renvoi plus ou moins littéral pour devenir le vecteur d’un infléchissement symbolique de la dynamique discursive, qui incorpore désormais tant l’énoncé celanien que son contexte original au halo associatif aux multiples composantes qui vient nimber l’écriture thiéfainienne. Qu’il sous-tende la quasi-totalité du discours d’une chanson – comme c’est le cas pour « en remontant le fleuve » ou pour l’écho à la Todesfuge apporté par « les ombres du soir » –, ou qu’il résonne plus ponctuellement au détour de telle ou telle formulation énigmatique, l’écho récurrent que trouve la création de Celan dans celle de Thiéfaine vient substituer à la constatation « niemand zeugt für den Zeugen » l’évidence indéniable quoique sous-jacente d’un témoignage qui se propose de redonner voix et corps tant à l’œuvre qu’à la personne de Celan en tant que prototype du « martyr » au sens étymologique du terme, les autres témoins – comme Anna Akhmatova ou Ossip Mandelstam – convoqués dans le discours des chansons se rattachant d’ailleurs eux-mêmes à la constellation existentielle et historique qui a été celle de Celan.

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Loxias | 70. | I.

Bonnefoy à l’écoute de la mémoire rêveuse

Indissociables, la mémoire et le rêve non seulement constituent la matière d’où l’imaginaire d’Yves Bonnefoy surgit, mais aussi l’objet d’une réflexion sur la création littéraire. Indispensable à la connaissance de soi-même, l’analyse de la mémoire en rêve lui consent de se relier à la mémoire de l’Un qui unit le poète et le monde et, surtout, le poète et ses proches. L’exploration des phénomènes obscurs à la conscience aboutit à une théorie de la mémoire créatrice personnelle et originale mais qui n’oublie pas l’enseignement de ses maîtres, en particulier Rimbaud et Baudelaire. Memory and dream are inseparable in the poetry of Yves Bonnefoy; they are the bases from which the imaginary emerges and they represent the object of a reflection on literary creation. Indispensable to self-knowledge, the analysis of dreamy memory allows the poet to reconnect himself to the memory of the wholeness of the world. Although not forgetting the teaching of Baudelaire and Rimbaud, Yves Bonnefoy proposes a personal theory of memory création that arises after having explored and analysed the unconscious.

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