Bacchante dans Loxias


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Loxias | 77. | I.

« ma sorcière a trempé / ses doigts dans le sang chaud » : « sirènes », « stryges » et « prédatrices » dans le discours poétique des chansons de H.F. Thiéfaine

De la « machine » que son partenaire invite à « me déchirer / m’arracher la chair & les os » aux « femmes-oiseaux » dédiant leur danse « à la mémoire d’amants noyés dans leurs arcanes », la qualité de « prédatrices » ou de « sorcières » est régulièrement dévolue aux incarnations du féminin dans le discours poétique de H.F. Thiéfaine. L’exploration constamment renouvelée de l’archétype mélusinien ainsi que de ses préfigurations mythologiques (tant classiques qu’extra-européennes) débouche sur la formulation des lois d’une « alchimie romantique » postulant par la bouche de la femme « qu’il faut séduire / pour mieux détruire ». En tant que cible et objet du déferlement dionysiaque appelé de ses vœux par la figure féminine, le partenaire masculin prêt à « jouer les victimes » ou à « s’annuler » peut aussi entrer de façon active dans la dynamique de déchirement propre aux « bacchanales ». S’instaure ainsi un règne des « corps écorchés » ou « écartelés » où le « nouveau festin de nos chairs androgynes » fait fusionner dans une même « annihilation » les volontés symétriques et opposées aspirant à une destruction réciproque. En témoigne « en hurlant au cœur de ma cible » la substitution du cri à la voix articulée telle qu’elle s’accomplit dans une indifférenciation énigmatique, rendant définitivement caduque la question de son attribution à la porteuse et/ou au porteur de l’élan « mortifère ». The characterization of female figures as predators or witches is quite recurrent in H.F. Thiéfaine’s poetical texts, which often base upon archetypal patterns and upon the mythological tradition of the classical Antiquity with figures like Mermaids – among which we find Thiéfaine’s version of the Germanic-romantical Lorelei –, Gorgons, Striges… or the mythology other countries or cultures with for example the bird-women from the Japanese Hell. The female figures embodies both seduction and destruction with the purpose of establishing domination not only over their partners, but over male principles in general, especially over God or his terrestrial equivalents. The male figures have to be killed, teared up, eaten up by all possible means and accept – or even welcome – their part as passive victims of female fury. However, the polysemous poetical discourse contains both the affirmation of female supremacy and the implicit negation of the female-dominated constellation as a result of an etymological reevalution of the key terms in the concerned sequence, revealing that in fact male figures are plainly able to counteract the female destruction plan. Annihilation of both partners or exacerbated erotic culmination is the result of this struggle for domination initiated by the female principle, and in which the male antagonist also has to play his part either in an accelerating or a retarding way.

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