représentation dans Loxias


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Loxias | Loxias 12 | I.

Le récit dans les tragédies d’Euripide : étude d’un discours performatif

Alors que les récits tragiques des messagers et des monologues divins dans les prologues des tragédies d'Euripide sont considérés comme des narrations nécessaires pour les scènes "impossibles" à représenter, nous proposons une analyse fondée sur l'aspect exclusivement dramaturgique du théâtre grec. A partir de la perception du théâtre comme une expérience vivante, une performance créatrice de variations scéniques à l'infini, nous allons démontrer que le récit tragique est un des discours de la performance, porteur de mouvements et d'émotions et producteur d'instants d'extrême théâtralité. L'aggelia du messager ainsi que le monologue divin du prologue, rappellent et créent des moments de théâtre rituel d'une ultime intensité. Relatif à un concept métathéâtral, le récit euripidéen engendre, par la rencontre du rite et de sa performance, un événement : l'événement à la fois du pathos et de l'expérience palpable de la scène. EURIPIDIAN NARRATION: STUDY OF A PERFORMATIVE DISCOURSE While narrative perspective of messenger and divine's speech is usually considered as a pragmatically necessary speech of the plot and its "impossible" representation, we propose a different, exclusively theatrical aspect of analysis. Based on the experience of the living word in performance and its stage variations, we will show that tragic narration is not only part of the play but a major producer of instants of extreme theatrical motions and emotions. Messenger's aggelia and divine monologue during the introduction of the tragedy, are creating extreme theatre moments working as reminders and creators of a ritual drama. Analogue to a metatheatre concept, the Euripidean narration produces, by the means of a fine conjecture of ritual time and space, a unique event: moments of pathos and living experience of the stage.

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Loxias | Loxias 24 | Pour une archéologie de la théorisation des effets littéraires des rapports de domination

La représentation de l'Occident dans L’Orientalisme d'Edward Said : théorie ou discours idéologique ?

L’Orientalisme d’Edward Said développe l’idée selon laquelle un savoir et un imaginaire sur l’Orient issus d’une position de puissance de l’Occident se sont construits discursivement et pendant des siècles et se sont institutionnalisés Ils traduisent une vision manichéenne qui oppose l’Occident, référence de toutes les valeurs, à un Orient, qui se distingue par sa déliquescence. Il s’agira de dévoiler l’enjeu de la réflexion de Said, de sa démarche intellectuelle, pour en dégager le caractère idéologique. En figeant l’orientalisme dans une atemporalité, en restreignant le champ de sa recherche au seul au monde arabe et en annihilant la dimension individuelle de la pensée des orientalistes, Said évacue le mouvement de la pensée occidentale et orientale et lui substitue des images pérennes : l’Occident offrant les images d’une force surdimensionné, protéiforme et l’Orient les images de la perte, de la ruine et du vide. L’usage que fait Said du comparatisme, qui sectionne les textes pour en dégager les éléments utiles à la démonstration, est conforme aux méthodes dont il déplore l’usage chez les orientalistes. En affirmant que l’Occident a créé l’Orient, Said castre, à son tour, le monde arabe, le fige dans l’image à laquelle il voulait le faire échapper. Il prive ainsi l’Oriental de sa propre pensée, de son histoire, de sa culture, de sa diversité ethnique et confessionnelle et le représente comme victime d’une histoire qui lui échappe.

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Loxias | Loxias 30 | Doctoriales VII

Les répercussions du voyage de retour sur la représentation du Nouveau Monde entre 1890 et 1945, ou Comment un non-lieu déréalise un lieu

En 1890, le front de colonisation s’achève et le visage de l’Amérique se métamorphose. À partir de cette date-là jusqu’en 1945, les écrivains européens en profitent pour redécouvrir l’Amérique. Ce nouvel exotisme est fortement influencé par le retour sur l’océan Atlantique en paquebot qui les pousse à évoquer ce « nouveau » Nouveau Monde et à le symboliser avant même de l’écrire. Cette sublimation est primordiale pour mieux comprendre la vision qu’imposeront ensuite ces voyageurs lettrés. In 1890, the frontier had been tamed and the face of America was transforming. From this date on, up to 1945, European writers took advantage of the phenomenon to rediscover America. This new exoticism was heightened by the return to the Atlantic in Ocean liner; a crossing which urged them to evoke this “new” New World and to symbolise it before writing. This sublimation is of primary importance to better understand the vision which these well-read travellers will then imposed.

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De l’espace à l’étendue. L’évolution de l’imaginaire spatial dans l’œuvre de Saint-Exupéry

L’espace chez Saint-Exupéry refuse la définition de « décor » et plus encore celle de « paysage », tout en gardant un lien fort avec les lieux concrets qui sont des repères pour l’homme. L’espace parcouru, connu dans sa matière, se révèle surtout à travers le dynamisme de l’imaginaire de l’auteur. D’après Bachelard, l’intérêt pour Saint-Exupéry « résidait dans la poétique des matières et des dynamismes ». L’espace devient le leitmotiv de son œuvre entière, ce qui nous a guidés dans la tentative d’illustrer l’évolution que celui-ci subit. Il s’agit d’un parcours pour ainsi dire « en spirale », soutenu par un tissu d’images qui s’alimente du contact avec les éléments du réel et au même temps qui tend vers une dimension transcendante, voire symbolique. Space is the privileged topic in the works of Saint-Exupery; it provides the material of the text, gives it its vitality and mobility. While speaking in spatial terms, the poetic of Saint-Exupéry feeds this foundational element that is far from being a mere decoration, much less a middle of action. The space here is filled with elements of increasingly personal and emotional, so we could define it a device key that opens access to meaning. Amorphous material space invites to give it a mark by transforming it into genuine human space.

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Loxias | Loxias 34 | Doctoriales VIII

Les parfums du silence et La lecture de Jean-Marc T. Pambrun : le refus du second rôle

Disparu en ce début d’année de l’Outre Mer, Jean-Marc Tera’ituatini Pambrun laisse une œuvre éclectique extrêmement riche. Il a une conscience aiguë du mythe de l’éden océanien tel que l’ont peint Bougainville, Loti, Gauguin, et bien d’autres. Il perçoit avec finesse les filtres – antiques, bibliques puis littéraires – que les écrivains-voyageurs ont toujours insérés entre la perception du territoire et sa transcription littéraire. Il en décrit les mécanismes, critique les motifs du mythe et joue à déconstruire ce fantasme romanesque. Jean-Marc Pambrun utilise toute la puissance du théâtre pour mettre au centre de la scène les Polynésiens trop souvent cantonnés aux seconds rôles, pour affirmer la réalité de la vie ma’ohi trop souvent déformée par les textes, par les clichés touristiques et pour donner voix aux mythes traditionnels de l’Océanie trop souvent écrasés sous le poids des livres métropolitains. Réappropriation thématique et linguistique, focalisation et réécriture, ces outils littéraires sont maniés par l’auteur afin de confier l’écriture d’un territoire à la plume et à la voix polynésiennes.

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Loxias | 49. | I.

« Chaplinades », Charlot et les avant-gardes : une réflexion sur le langage et la modernité

De la découverte des films de Chaplin en 1915 jusqu’aux années vingt, l’engouement porté à la figure de Charlot révèle des interrogations qui s’inscrivent dans une remise en question des valeurs de la représentation. Les artistes d’avant-garde s’interrogent sur l’image et le langage. Charlot incarne un regard porté sur la société et rejoint les préoccupations de jeunes poètes. Ensuite la mécanique de la gestuelle de Charlot est liée à l’intérêt que ces artistes portent au mouvement, à la décomposition des gestes et à la modernité technologique. Les poèmes montrent une tentative de transcription de cette technique. Enfin, les films de Chaplin trouvent un écho, par leur caractère expressif, dans une réflexion sur la représentation et ses moyens.

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Loxias | 50. | Doctoriales

Métaphore et poétisation du réel chez Apollinaire, Cendrars et Maïakovski

Apollinaire, Cendrars et Maïakovski ont inscrit la quête de leur identité de poète dans le monde en pleine mutation du début du vingtième siècle. La confrontation à une époque mouvante remet en question des certitudes et invite à un questionnement fondamental sur l’écriture poétique, ses enjeux, ses possibilités et ses expérimentations. Une partie de ma thèse s’est intéressée à la métaphore. Celle-ci pose des problèmes définitionnels qui révèlent la complexité d’un mécanisme qui s’appuie sur trois éléments : l’élément comparé, le comparant et le principe de l’analogie. La subjectivité s’inscrit dans ce mécanisme qui associe deux réalités dépourvues de liens. La métaphore implique la mise à l’œuvre d’une création volontaire et réfléchie tout en permettant un épanouissement du sens devenu pluriel. En tant que glissement ou encore passage à un second sens que Ricœur appelle « extension de sens », « epiphora », la métaphore n’est pas un ornement vain de rhétorique, elle implique un mouvement de sens et de création poétique. C’est cet aspect que je souhaiterais développer en examinant un corpus composé essentiellement de « Zone », la Prose du Transsibérien et Le Nuage en pantalon, trois poèmes qui posent des interrogations fondamentales sur l’écriture poétique et expérimentent des procédés novateurs.

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Loxias | 80. | I.

Déjouer le blackface au théâtre pour mieux dé-penser la race

Exhiber la race de l’Autre en jouant sur la couleur de peau est une pratique issue de la pensée coloniale et penser la race en termes d’apparence et de face barbouillée, c’est penser une hiérarchie chromatique. Dans la logique coloniale, le Blanc peut s’amuser pour rire à s’abaisser au Noir et foncer sa peau, mais le Noir ne saurait se hisser jusqu’au Blanc. Aussi même si le charbonnage de la face ne relève pas de la dérision, voire d’intentions racistes, reste-t-il perçu comme un geste réducteur et offensant qu’il s’agisse de « la comédie du barbouillé » à la française ou du blackface né aux Amériques. Le geste demeure un héritage colonial. Le Blanc peut jouer au Noir, mais, à ses yeux, il est impensable que le Noir puisse passer pour un Blanc. Ce qui a bien sûr des répercussions sur les modèles de représentation, notamment dans le monde du spectacle. C’est pourquoi il est nécessaire de déjouer et dé-jouer les gestes de blackface et d’apprendre à dé-penser la race au théâtre, d’en épuiser les imageries, d’en ruiner les fondements, d’en débusquer les stéréotypes. Dé-penser la race, c’est vider l’abcès de cet inconscient collectif colonial qui fermente encore dans les imaginaires, et penser le théâtre autrement. Nous reviendrons ainsi sur les controverses liées au blackface qui ont récemment agité la scène contemporaine en passant par l’histoire du grimage racial et par les enjeux politiques qui lui sont intimement attachés. Exhibiting the race of the Other playing with skin color is a colonial practice and thinking of race in terms of appearance and black-up imply a chromatic hierarchy. According to the colonial logic, the white man can have a good time lowering himself to play black in jest and darken his skin, but the black man cannot become white. Even if the blacking up process does not rely on derision, or even on a racist intention, it remains a reductive and offensive gesture whether it is the French « comédie du barbouillé » or the American blackface tradition. This practice is still inherited from colonialism. The white man can play black but, to him, it is unthinkable for the black man to play white. All this has had consequences on our models of representations, in particular in the living arts. It is the reason why it is necessary to foil and deconstruct the blackface practice and to learn how to un-think race in the theatre, to unpack its imagery, to destroy its foundations, to find stereotypes. Un-think race means to drain the abscess of this colonial, collective unconscious which is still festering in our imagination, and to think about theatre differently. We will come back to the controversies related to blackface which recently sparked a debate on the contemporary stage as well as explore the history of the blackface addressing its political dimension.

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