Rolin (Jean) dans Loxias


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Loxias | 65. | I.

Désorientations. Poétique de l’échec dans Chrétiens et Ormuz

S’éloignant et s’affranchissant des récits de voyage en Orient traditionnels depuis le XIXe siècle, Jean Rolin a renouvelé le genre orientaliste en proposant une désorientation littéraire qui n’est pas sans avoir des conséquences éthiques et politiques. Jouant sur des dispositifs narratifs de postures et d’impostures, dans une écriture renvoyant subtilement aux grands mouvements littéraires du XXe siècle, le reporter met en scène des échecs, des désillusions et incapacités qui finissent par cerner les contours d’une poétique de la déroute.

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L’arrière-paysage d’Ormuz

Urbain, maritime, désertique, belliqueux, le paysage s’impose de plus en plus comme expérience de la réalité. Entre reportage et témoignage, il dépouille le regard de ses ornements et configure une relation où le sujet et l’objet ne sont plus séparés. Cette approche fusionnelle qui porte l’empreinte de l’espace assure d’une part la mobilité des événements et de l’autre l’opacité de la ligne d’horizon. D’où l’intérêt pour l’exploration des pages qui défilent géographiquement et qui défient les effets d’homologation à tel point qu’elles constituent un banc d’essai pour saisir tout ce qui apparaît ou se cache derrière les évidences et qui peut engendrer ou non un sentiment de la nature. L’analyse de la spatialisation à travers les fissures qui émergent dans Ormuz de Jean Rolin (P.O.L., 2013) – notamment le recours aux parenthèses et la présence des végétaux – interroge de près les enjeux d’une écriture du paysage qui agit en apnée pour creuser les contours du visible et qui finit par se faire paysage elle-même.

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« Tout ce que j’ai écrit vient du fait que je ne sais pas conduire »

Jean Rolin pose à maintes reprises un lien de causalité entre le fait qu’il ne possède pas de permis de conduire et son écriture. Ce qui pourrait passer pour un handicap, particulièrement difficile à surmonter pour quelqu’un qui ne cesse d’arpenter le monde et de le mettre en mots, devient donc une chance dont il se saisit pour développer un « art du voyage » singulier. Le piéton se tient au plus près du motif, ralentit à sa guise le tempo, scrute les fonctionnements opaques de la face cachée de notre modernité.

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À propos d’un « objet anodin » : le conteneur et ses récits dans Terminal frigo

Qu’en est-il du récit de voyage dès lors que l’accapare la mobilité des objets ? C’est à cette question que se consacre la présente étude, se penchant sur la place qui revient, dans Terminal Frigo de Jean Rolin (2005), à la circulation des conteneurs. Socialité et mobilité de l’objet sont initialement situées dans le vis-à-vis critique des travaux de Bruno Latour pour être ensuite considérées du point de vue des ordres de représentation qui domine le texte. Progressant ainsi de la géographie portuaire du conteneur aux biographies qui en composent le paysage humain, l’analyse propose de problématiser l’enjeu du voyage en regard des multiples mobilités traversant le texte.

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Le connaissement du monde

Les lecteurs des récits de mer et des romans maritimes n’est pas exactement le même que celui qui lit les enquêtes de Jean Rolin : Vu sur l’eau et Terminal frigo. Le premier reprend sous forme de recueil des articles parus dans des magazines, le second se présente sous la forme d’un roman à la trame assez lâche. Dans les deux cas, la matière est la vie des obscurs, soutiers, dockers, mécaniciens, ceux qui font réellement le tour du monde aujourd’hui dans l’anonymat complet ou ceux qui soutiennent par leur travail la circulation des marchandises tout autour du globe. Comme l’observe Paul Veyne dans Comment on écrit l’histoire, à propose d’événements vrais racontés par l’historien « ici, le roman est vrai, ce qui le dispense d’être captivant. » Cependant Rolin s’efforce de mettre en lumière la vie de ces marins, sur un ton un peu détaché, aussi spirituel que possible, mais toujours selon le point de vue du voyageur ou du flâneur des quais ou des zones portuaires, à la première personne, comme dans L’Explosion de la durite. Le mérite de ces récits, relativement brefs et circonscrits est leur sujet, la routine méconnue, les « choses vues ». La composition de Terminal frigo ressemblerait un peu à celle du Quart de Kavvadias, aux romans de Cendrars ou à une tradition du roman maritime qui enchaîne des récits d’anecdotes. Néanmoins, la manière de raconter adoptée par Rolin n’est-elle pas vouée plus ou moins à se terminer généralement en queue de poisson ?

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Jean Rolin ou la dilution géo-graphique du soi

La recherche des marques et des traces constitue un détour proprement littéraire aux confins de lieux fermés ou ouverts, apparaît comme un nécessaire truchement pour investir des espaces résonant avec soi, confirmant la présence au monde de l’individu. La littérature de Jean Rolin privilégie la dilution de soi dans un territoire que l’Histoire a modelé, permettant, dans un second temps, d’y lire les traces d’une présence auctoriale prenant en charge un récit dans lequel les pans biographique et géographique articulent un mouvement commun vers une plus grande vérité. Comment l’œuvre de Rolin façonne-t-elle en retour l’univers dans lequel elle est projetée ?

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Voyage et masculinité dans l’œuvre de Jean Rolin

Jean Rolin joue sur les stéréotypes du baroudeur solitaire, figure masculine s’il en est, mais qu’en est-il de la féminité dans cette œuvre littéraire viatique ? La femme n’est-elle qu’une proie ou qu’un objet de désir aux yeux du voyageur ? Ou bien est-il possible de mettre au jour une manière chez Rolin de mettre en péril les attendus stéréotypés pour laisser entrer une féminité plus douée pour le voyage et les rencontres interculturelles ? À travers la lecture de l’ensemble des récits de Jean Rolin, et plus précisément de Traverses (1999) et de Savannah (2015), on voit se mettre en place, progressivement, une « méditation sur le voyage comme géométrie du désir et comme déchiffrement des signes. »

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