Victoire Feuillebois


Ancienne élève de l’École Normale Supérieure (Paris) et agrégée de lettres modernes, Victoire Feuillebois est docteur en littérature comparée et MCF en littérature russe à l’Université de Strasbourg. Ses travaux portent sur le romantisme russe et en particulier sur l’œuvre de Pouchkine (cf. Victoire Feuillebois, « Victimes du livre ? Dangers et vertus de la lecture empathique chez Jane Austen, Pouchkine et Balzac », Romantisme, 2016/4, n° 174, p. 101-110 ; « Byron, Pouchkine ou comment mûrir en romantique », conférence donnée à la Société française des Études Byroniennes le 4 octobre 2014, Bulletin de liaison, n° 40, mars 2015, p. 41-65 ; « Le prix d’une nuit : écrivains romantiques face à Cléopâtre [Pouchkine, Gautier] », Romantisme n° 156, 2012/2, p. 123-138). Elle a également rédigé l’introduction générale à la question « Pouvoir en scène » pour le manuel d’agrégation 2019/2020 des éditions Ellipses.

Articles de l'auteur


Loxias | Loxias 42 | Doctoriales X

Tieck et Hoffmann lecteurs de la fiction encadrée renaissante : du Décaméron aux contes nocturnes romantiques

Cet article propose de se pencher sur un aspect typique de la Novelle allemande romantique, à savoir que beaucoup des textes de l’époque se présentent comme enchâssés dans un cadre nocturne. Les prosateurs de l’Allemagne romantique empruntent ce dispositif à une tradition extrêmement ancienne, celle de la fiction à récit-cadre, très fréquente dans la littérature antique et tout particulièrement renaissante, et dont les deux matrices sont Les Mille et une nuits et Le Décaméron (qui ne se déroule pas dans un cadre nocturne, mais s’y apparente structurellement). La communication se concentre sur le modèle renaissant, et cherche à montrer, à travers l’étude d’Eckbert le Blond [Der Blonde Eckbert, 1797] de Ludwig Tieck et de La Maison déserte [Das Öde Haus, 1817] d’E. T. A. Hoffmann, comment certains auteurs déconstruisent le protocole renaissant du récit nocturne pour mieux souligner la spécificité de la nuit romantique, qui repose sur l’envahissement du monde humain par la « face nocturne de l’existence » (Gotthilf Heinrich von Schubert). Chez Tieck et chez Hoffmann, il ne s’agit pas de séparer des ordres pour témoigner de la puissance d’organisation du discours, mais au contraire de mélanger les niveaux du récit et des sphères de la réalité que le lecteur pensait séparés, et que les narrateurs croyaient séparer par leur art de la parole, afin de souligner l’activité de ce monde nocturne qui ne laisse pas domestiquer.

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Loxias | 63. | Agrégation de Lettres

Performativité politique et performativité théâtrale dans Boris Godounov de Pouchkine

Boris Godounov de Pouchkine met en scène l’idée de performativité (qui désigne le fait que la parole puisse constituer un acte) à travers non pas une, mais deux figures susceptibles de s’exprimer en souverain : l’une d’elle, celle de Boris Godounov, échoue sur la question de la performativité, puisque le seul acte de langage qu’elle accomplit véritablement dans la pièce est de l’ordre de l’aveu involontaire – et ce défaut apparaît immédiatement, contrairement à Richard III dont l’efficacité performative s’inverse lorsqu’il sort de la sphère immanente pour entrer dans celle de la justice rétributive d’ordre divin. L’autre figure pouchkinienne, celle de Grigori Otrépiev, rejoue l’acte de langage canonique décrit par Austin, celui du baptême, et même le fait qu’il s’agisse d’un auto-baptême et une usurpation n’empêche pas cette parole d’être caractérisée par sa grande efficacité. Ainsi, les deux trajectoires, descendante et ascendante, que suivent Boris et Gricha dans l’intrigue, sont aussi fonction de la performativité que leur parole est capable d’incarner. À travers une comparaison entre la nature et les manifestations de cette parole performative chez les deux figures du pouvoir dans la pièce de Pouchkine, cet article propose donc de montrer la manière dont le théâtre peut exposer les mécanismes du pouvoir sans pour autant devenir un instrument au service de celui-ci.

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