Loxias | Loxias 41 Le fragment en question | I. Le fragment en question 

Claude Dédomon  : 

Le Feu d’artifice de Patrick Deville : une écriture fragmentaire

Résumé

Cet article vise à montrer comment travaille l’esthétique du fragment dans Le Feu d’artifice. Dans ce roman, Patrick Deville organise la scène de l’écriture sous forme de collages et procède à la déréalisation des référents. La double fragmentation qui en résulte (une fragmentation radicale et une lente et douce fragmentation) laisse voir non seulement une pratique scripturale côtoyant les confins de l’art pictural, photographique et cinématographique mais aussi, et surtout, des personnages pris sous le charme de nombreuses images qui leur parviennent. Cette fascination permet à l’auteur de jeter un regard sur les paradigmes médiatiques et ses corollaires pour dénoncer les pratiques d’une société postmoderne foncièrement marquée par les simulacres et la simulation.

Abstract

This article aims to show how the aesthetics of the fragment works in Le Feu d’artifice. In this novel, Patrick Deville organizes the writing scene in the form of collages and makes derealization of referents. The double fragmentation that results (a radical fragmentation and slow and gentle fragmentation) reveals not only a scriptural practice mixing the confines of painting, photography and film, but also, and most important, characters caught under the spell of many images that they receive. This fascination allows the author to take a look at the media paradigms and its corollaries to denounce the practices of a society profoundly marked by postmodern simulacra and simulation.

Index

Mots-clés : collage , fragmentaire, hyperréalisme, postmoderne, simulation

Keywords : collage , fragmentary, hyperrealism, postmodern, simulation

Plan

Texte intégral

Introduction

Le paysage littéraire contemporain se compose d’un grand nombre de territoires aux frontières perméables. L’un des traits spécifiques de cette littérature est l’écriture fragmentaire dont la jubilation passe nécessairement, selon Françoise Susini-Anastopoulos, par une série d’opérations sacrificielles : « draguer », « ciseler », « aérer », « collectionner », « combiner »1. L’objectif d’une telle pratique est non seulement d’exploiter les limites de la forme, d’attaquer de front des conventions littéraires, des modes de représentation, une tradition, mieux de saper les tendances logocentriques de l’écriture mais aussi, et surtout, de nourrir et revitaliser l’écriture. À partir d’une lecture de Le Feu d’artifice de Patrick Deville, il s’agira  d’appréhender le fragment, non pas comme un aveu d’impuissance formelle, mais plutôt comme un schème au service de la production textuelle, un schème opératoire et interprétatif dont les enjeux sont à rechercher du côté d’une pratique postmoderne où tout n’est que truquage, manipulation, et artifice.

I. Des bris et débris : une fragmentation radicale

Il faut partir du titre Le Feu d’artifice pour se rendre à l’évidence de l’inscription du roman dans une démarche hétéronomique. Cette indication paratextuelle, de par son originalité, présente la pratique scripturale de Deville comme un spectacle réalisé au moyen de pièces d’artifice et autres dispositifs. Le titre est donc un ajusteur de lisibilité qui place le roman sous le signe de l’implosion, de l’artificialité, notamment une écriture qui se laisse lire en ses divers éclats. La fragmentation apparaît dès lors comme une caractéristique essentielle de ce roman, puisque Deville cherche constamment à le briser en fragments de texte, à l’abîmer en ses différentes nervures, à le réduire en pièces.

Pour parvenir à cet état fragmentaire ou pour mettre en place cette « poétique négative2 », le romancier intègre dans le récit des anecdotes tirées des œuvres de Jules Verne, des graffitis, des inscriptions, des écriteaux ou des mots placés sur des tee-shirts, des autocollants, des cirés, des pancartes et même des lambeaux de phrases représentant les fragments d’une lettre ou d’un message. Contrairement à certains auteurs qui utilisent de véritables fragments, des textes authentiquement fragmentaires3, Deville, lui, fabrique ses fragments ; il donne ainsi à son texte une illusion de fragment en passant nécessairement et particulièrement par une typographie différentielle ou par un surcodage des conventions typographiques telles que l’italique, la majuscule, les parenthèses et les tirets auxquels s’ajoutent de nombreux blancs formels qui permettent de séparer chaque séquence ou paragraphe du suivant et de renforcer le caractère fragmentaire du roman. En réalité, ce que détruisent ces blancs formels, c’est la construction syntaxique et narrative du récit. Fieke Schoots l’a fait remarquer dans son analyse sur les textes des jeunes auteurs de Minuit. Il écrit à propos :

Les textes des jeunes auteurs de Minuit sont fragmentaires dans la mesure où le blanc de la page domine le noir de l’encre. […] Les textes minimalistes sont découpés en alinéas séparés par des blancs. Ce morcellement formel traduit la parataxe syntaxique et narrative de l’œuvre minimaliste. Étant « la fonction disjonctive » par excellence, la parataxe, comme faillite de l’enchaînement et de la performance logique, manifeste des séries de trous, d’absences, de silences noués où se scellent les non-dits et les implicites4.

Patrick Deville, auteur minimaliste, utilise donc avec profit ces signes typographiques pour gommer l’intrigue, pour déjouer l’agencement du logos classique. Autrement dit, il s’agit tout  simplement pour lui, à partir de gestes sacrificiels et modernes (ciseler, aérer, collectionner, combiner) de troubler « l’image rassurante et gratifiante que la tradition nous livre de l’œuvre massive, et immuable5 ». En ciselant et en aérant par exemple, Deville rappelle des gestes de l’exigence fragmentaire chez William Burrought : le cut-up, une pratique introduite dans le champ littéraire en 1958 qui « consiste en un découpage de différents textes, rassemblés dans le but de former un texte inédit, à la forme complexe, fragmentée 6».

Dans Le Feu d’artifice, la technique trouve sa flexibilité à travers l’intégration des découpes ou autocollants (« Laissez-vous hâler »), (p. 78), des signes publicitaires (« ESSO, ESSO, ESSO, ESS… »), (p. 151), des extraits de posologie (« Tirez avec les deux mains vingt centimètres de tissu propre et sec »), (p. 12). Ces fragments prélevés ailleurs et intégrés dans le récit complexifient la forme romanesque, notamment par le biais des jeux d’arrangement et de permutation qu’ils subissent. Deville semble, par cette dimension ludique de l’écriture, s’approprier la théorie développée par Louis, l’un des personnages du roman ; théorie qui stipule que « toutes les formes complexes sont des arrangements et permutations de ces formes initiales simples7 ». L’écriture fragmentaire dans Le Feu d’artifice apparaît dès lors comme un pur jeu de formes et d’expérimentation où toutes les traces différentielles s’associent, se combinent pour donner lieu à une esthétique de l’impureté, selon l’expression de Guy Scarpetta8. En effet, pour ce théoricien, la collection et l’entassement de toutes sortes d’éléments dans le roman « jouent délibérément d’un principe d’accumulation, d’un effet de pullulement, de prolifération des formes, comme propulsé par une obsession du remplissage, poussé à l’excès9 ». Dans ces conditions, le roman de Deville se dessaisit de la notion d’œuvre (il s’appréhende donc comme « non-œuvre »), pour s’inscrire résolument dans la forte nuance barthésienne du texte. Il s’agit donc d’un roman dont la texture rend compte d’une écriture qui se construit comme réseaux de fils, comme compilation de fragments, comme un texte fragmentaire, comme un roman ouvert. Et, au bout du compte, ces fragments qui travaillent côte à côte, qui cohabitent permettent au lecteur d’accéder à la jouissance. Le plaisir du texte vient ainsi de cette spatialisation de l’écriture qui, selon Roland Barthes, se fait dans la coupure, la faille, la déflation, le fading10.

Cette violence faite au texte développe une forme ou une expérience primitive de l’écriture ; ce que René Thom appelle d’ailleurs la « saillance », une expérience liée à la perception d’une discontinuité qualitative impliquant, du moins en ce qui concerne le régime fictionnel de Deville, l’organe sensoriel de la vue. Il s’agit bel et bien d’une « saillance visuelle » dans la mesure où la contemplation dans le texte de fragments crée un dispositif de type tabulaire. Pour ce théoricien, en effet,

Si je contemple dans une pièce un tableau, il est clair que cette peinture a un contour, un cadre bien délimité, et ce qu’il représente fait de ce tableau une entité saillante dans mon panorama perceptif11.

L’importance de ces formes saillantes ou fragmentaires réside donc dans une profonde discontinuité textuelle qui se radicalise et s’amplifie par ses propriétés de propagation ou de dispersion. Il suffit pour s’en convaincre de se référer à certains mots, inscriptions et écriteaux qui, tels des parasites lovés, apparaissent dans le texte sous forme de signes ou d’images, mieux sous forme d’objets tangibles. On se référera aux signes suivants :

LOW – LOUD (p. 17), TILT (p. 18), CHARGEURS (p. 22), PRINT/RUN (p. 27), PONT-A-MOUSSON (p. 47), OFF (p. 75), JE T’AIME (p. 107).

Ces mots en lettres capitales agissent comme une couleur, comme le foyer d’une diffusion, comme une tache d’encre qui buvarde au point d’ouvrir leurs marges à la matérialité du signe et de l’image. Ainsi libérés du cadre phrastique, ces mots posent le problème de la linéarité du texte et du processus de figuration de l’écriture. Selon Fieke Schoots, Le Feu d’artifice se rapproche de la bande dessinée, se transforme en art visuel  puisque ces mots, ces écriteaux s’érigent en objets tangibles et palpables12. En passant du mot au signe, on débouche alors sur les ressources de l’art pictural dont les implications résident dans un processus de délinéarisation de l’écriture.

Si l’une des qualités formelles de la pratique fragmentaire dans Le Feu d’artifice dérive de la discontinuité, il faut lui associer une autre caractéristique fondamentale : la brièveté. En effet, Patrick Deville utilise beaucoup les formes brèves comme les phrases nominales : « Chez la Guêpe, un ami » (p. 12), « Une ou deux anecdotes » (p. 20), « Du monde » (p. 24), « Son ami La Guêpe » (p. 61), « Au paradis » (p. 68), « Alors la mer » (p. 110), « En catgut » (p. 124), « Une amie » (p. 133). Chez lui, généralement, ces phrases nominales sont isolées ou intercalées entre deux fragments, séparés par des blancs formels de tailles différentes, donnant ainsi l’impression de segmenter les paragraphes à la manière des sous-titres épisodiques qui viennent s’intercaler entre deux séquences filmiques. Il faut voir dans cette « pulsion réductrice » et cette « fascination du raccourci textuel13 » une puissance de l’instantané qui vise à découper « l’univers en petits segments pour échapper à la tyrannie du Tout inconnaissable14 ». Marc Gontard, lui, perçoit cette tentative simultanéiste ou instantanéiste non seulement comme la traduction de l’hétérogénéité de notre expérience du réel mais aussi et surtout comme une ellipse temporelle dont les avatars sont à rechercher du côté d’une pratique postmoderne du zapping, celle qui permet de voir le roman comme un univers de superposition, de collage où le discontinu devient un procès universel15.

La vitesse avec laquelle cette culture du zapping se matérialise s’observe nettement dans les nombreuses références qui se succèdent dans le roman. Il s’agit aussi bien des références cinématographiques, picturales, musicales, littéraires, philosophiques que publicitaires auxquelles s’ajoutent, de façon excessive, les grandes marques des produits de la culture de masse. Mais les références qui retiennent beaucoup plus l’attention du lecteur sont celles liées au cinéma et aux marques des produits de consommation. Ces références introduisent de façon massive « un monde techno16 » dans l’espace fictif.

Cet envahissement de signes culturels, médiatiques et électroniques dans le roman se traduit, dans un premier temps, par la présence de certains personnages qui vont voir des films (It’s a wonderful life) et se comportent comme des acteurs de cinéma à l’instar de Louis qui lance « de rapides coups de pied dans les pneus comme il l’avait vu faire au cinéma » (p. 32). Il leur arrive aussi de choisir des voitures qui « ressemblent un peu à celle que conduit Cary Grant complètement ivre au début de La mort aux trousses d’Alfred Hitchcock, 1959 » (p. 33). Enfin, d’autres rappellent « Lauren Bacall et Humphrey Bogart dans Le Port de l’angoisse de Howard Hawks (To Have and Have Not, 1945) » (p. 52).

En outre, à l’instar des écrivains qui font des citations littéraires une surenchère17, Deville, lui, cite, à profusion, des marques : le stylo est Waterman, le chewin-gum est sugarless, on consomme la bouteille d’eau Laurent Perrier, un athlète en chaussures Adidas, le costume griffé Saint-Laurent et la chemise Arrow, on achète une cartouche Camel, une bouteille Sauternes et des saucisses Knacks, on utilise des produits Lancaster, on se lave les mains sous un robinet Jacob Delafon et on les sèche devant le nouveau sèche-mains Stiebel-Electron, on ne roule qu’en Ferrari Testarossa, Chevrolet Beretta, Pontiac Firebird… et le plus souvent, en Mercedes.

Comme on peut le constater, Deville a un goût maniaque pour les marques de vêtements, de produits de beauté, de cigarettes, de voitures. Ce goût établit, bien évidemment, une transition entre une intrigue fictive et une réalité quotidienne – donc hyperréelle – au point de faire évoluer le lecteur dans un univers foncièrement recomposé, un monde artificiel et virtuel.

Le jeu citationnel que ce romancier installe à partir de ces nombreuses références provoque un court-circuit dans le roman de manière à valoriser le fragmentaire et l’hétérogène.

Ainsi, le surcodage des signes typographiques, l’intégration de bris et débris, l’érection de mots, inscriptions et écriteaux en objets tangibles, l’utilisation de formes brèves ainsi que l’exploitation massive des références organisent le récit sous forme de collages. De cette manière, Deville met l’accent sur un transfert d’extériorité, sur les traces d’un passage, d’un emprunt si bien que son écriture côtoie les confins d’un art du bricolage dont la puissance réside dans le jeu qu’induit le mot lui-même, du moins dans sa composition littérale : bri-collage. Analysant une telle dynamique à l’œuvre dans l’écriture, Tiphaine Samoyault écrit :

L’image de l’écriture qui en résulte procède de la récupération ou du recyclage, rompant avec l’idée et le modèle d’un développement organique de l’œuvre. La pratique […] peut s’apparenter alors au principe du collage pictural prôné par le cubisme puis par le surréalisme. En introduisant des bribes ou des fragments d’objets étrangers à l’art, directement empruntés au réel, il s’agit de coller la vie dans l’art, de la faire apparaître sans transformation et de brouiller ainsi les frontières entre l’art, la fiction et la réalité18.

Une telle analyse est le signe manifeste que le bricolage correspond bien à une esthétique moderne et contemporaine de la fragmentation et de l’hétérogénéité.

Si la technique du collage laisse apparaître une fragmentation radicale du roman, d’autres procédés comme le détail miniaturiste, la narrativisation ou la verbalisation des images conduisent le récit vers une lente et douce désintégration des formes.

II. L’effet réaliste objectif : une lente et douce désintégration des formes

Le Feu d’artifice est un récit qui commence à Nantes, une ville où vit un narrateur anonyme dont le métier est de négocier de belles voitures d’occasion qu’il fait rouler, avec ses amis (Louis et Juliette), à travers toute l’Europe. Dans une sorte de road movie (le film de la route) aux accents multicolores, le récit s’approprie quelques normes minimales du cinéma, ne serait-ce qu’en prenant en charge la technique du travelling, une véritable construction panoptique reposant sur le principe d’un espace mobile ou mouvant. L’œil du sujet percevant fonctionne ici comme une caméra qui invite à prendre part au spectacle de la réalité puisqu’au bout du compte, il n’y a d’intrigue que dans les seules possibilités qu’offre la route et à celui qui voit. Et comme le sujet percevant est constamment en mobilité (en raison même du thème structurel du voyage), les points fixés dans l’espace parcouru ou dans son panorama perceptif donne lieu à l’observation de plusieurs plans de la réalité, comme l’indique ce passage :

Elle tenait le volant d’une main, de l’autre tapotait le rétroviseur extérieur (il faisait chaud à nouveau et les vitres étaient abaissées), la route coupait des alignements de vignobles en pente douce où de loin en loin stationnaient des camionnettes bricolées19.

En cette description, il faut voir une trajectoire rectiligne induite par la mobilité du véhicule, mais une trajectoire découpée, fragmentée selon l’artificialité qu’offre la perception du paysage. En d’autres termes, « le découpage des alignements de vignobles en pente douce » traduit bien le dévoilement progressif ou successif des images. Dans ce récit, tout se passe comme si les plans étaient découpés et juxtaposés, c’est-à-dire mis les uns à côté des autres. L’espace textuel du descriptif se donne ainsi à lire sous un angle tabulaire puisque, dans son déploiement, certains plans sont isolés puis engagés dans une minutie descriptive qui doit beaucoup à l’univers expressionniste, où le réel, de façon incontestable, devient un assemblage de cubes :

Les murs que n’éclairaient plus la lampe jaune de frigo étaient découpés par des quadrilatères évasés, blancs et bleutés, qui se décollaient en oblique de la fenêtre ouverte20.

En présentant un monde déstructuré, en convertissant la réalité perçue en un monde géométrisé, la perception apparaît dès lors comme un artifice permettant au lecteur de pénétrer dans un univers virtuel et artificiel, un environnent où tout passe par le filtre des lunettes polarisés, des verres polaroïd, des vitres de voitures, des écrans de télévision ou d’ordinateur.

Dans ce récit, la minutie descriptive sature tous les plans de la réalité : le paysage, les hôtels (l’hôtel du Paradis, Bristol Palace), les centres commerciaux (Cap-Horn), les voitures, les marques de vêtements, de cigarettes, de chaussures, et de boissons, les appareils électroniques (appareil-photo, caméra, minitel, écran vidéo). Un exemple fortement expressif, l’hôtel du Paradis :

Je n’avais pas vraiment envie de retrouver Annette dans mon appartement de la rue Kervégnan, et j’ai décidé de m’installer à l’hôtel du Paradis : deux angelots en plâtre sur la façade, un pigeon vivant sur l’un d’eux, une coulée de fiente sur une joue. C’était un établissement décrépit sur le port, haut et droit, de chaque côté duquel s’affichait l’archéologie des immeubles attenants (pans de papier vieillot que retiennent des baguettes, surfaces de faïence, saillie d’un porte-savon qu’occupe une inaccessible savonnette), d’où je pouvais observer le va-et-vient du quai de la Fosse21.

Ainsi qu’il apparaît, la description se charge ici de montrer l’hôtel du paradis dans une dimension infinitésimale, en insistant notamment sur son matériel de construction et son délabrement. De la sorte, Deville met l’accent sur la matière pour faire ressortir ce qui est en déshérence et montre par la même occasion que, chez lui, le détail est avant tout présenté comme un art du visuel. C’est par le biais de la technique du « gros plan » qu’il parvient justement à réaliser une telle ambition. Même les personnages n’échappent pas à une telle entreprise dans la mesure où la technique finit par révéler leur véritable identité :

Je n’ai pas dit à Louis que je connaissais Juliette, ni à Juliette quels étaient mes rapports avec lui. Mais j’ai commencé à la suivre tous les jours après mon petit déjeuner, pendant sa coupure entre midi et deux. Je l’ai vue commettre de menus larcins dans des boutiques de vêtements, s’approvisionner en haschich dans un square, se faire avaler deux cartes bancaires dans des distributeurs de billets. J’ai vite découvert son habitude de jouer au jeune homme dans des quartiers où on l’appelait La Guêpe […]. C’était aussi étonnant de voir aussi une fille belle […] se métamorphoser en un gamin aussi minable et complètement insignifiant, à qui chacun laissait une paix royale. […] J’avais devant moi un gringalet un peu timide dont on pouvait sans effort imaginer la conversation insipide, la misère sexuelle et les manies compensatrices22.

Le portrait de Juliette passe par la perception du narrateur personnage qui se charge de révéler, au détail près, sa vie de débauche et son double caractère En passant les personnages, les lieux ainsi que les objets à la loupe ou, comme le dit Françoise Susini-Anastopoulos, « dans l’intimité modeste et rassurante du détail miniaturiste23 », Patrick Deville se comporte comme un peintre dans la mesure où il prend la peinture comme un remède à l’organisation de l’espace de l’écriture. La force de son secret réside dans sa capacité à fabriquer, à partir d’un surcodage ou d’une accumulation de parenthèses (donc de détails), des fragments, surtout quand on sait que la parenthèse, chez les nouveaux romanciers tout comme chez les auteurs postmodernes, est un artifice formel et descriptif qui rend compte des pratiques picturales dans le texte littéraire. Comme on peut le constater, Patrick Deville se livre à un pilonnage systématique du code réaliste en ayant recours à une exploitation massive et subversive de procédés picturaux. L’intérêt pictural se déplace donc du problème représentatif et se préoccupe du problème d’agencement et de composition.

Ce jeu exacerbé de la description passe aussi par la narrativisation ou la verbalisation de certains objets iconiques tels que les images visuelles fixes (les cartes photographiques, les cartes routières murales, les cartes postales, les images publicitaires, la lecture de tableau de bord) et les images visuelles mobiles, c’est-à-dire les images qui défilent sur les écrans de télévision et d’ordinateur. À travers cette attitude sémiotique, c’est-à-dire cette action qui consiste à exprimer par des mots ce qui appartient à un système signifiant non langagier (donc visuel), la description s’étale, abandonne la successivité linéaire et prospère dans la simultanéité picturale. Contrairement à la perspective traditionnelle de la sémiotique où le texte s’épuise à mimer le squelette diagrammatique de l’image, Le Feu d’artifice, lui, met plutôt l’accent sur une architecture, des plans, des lignes, des formes au point qu’en définitive, ce qui reste à la lecture c’est la structure et non pas l’histoire24. C’est en tout cas l’impression qui se dégage de la lecture de la description de cette photographie où l’accent est plutôt mis sur la complexité de la forme :

Tetsu Okura, accroupi sur le sol, lui présentait des séries de clichés en noir et blanc sur les Structures de l’espace. Les premières images recensaient les angles de 120̊̊ que forment entre eux les rayons de miel, les écailles des carapaces de tortues, les bulles de savon, la mousse de bière. Les autres révélaient la présence assidue dans la nature de la suite arithmétique de Fibonacci, dit Léonard de Pise (photographiée dans les spirales et les tourbillons, le cœur de la marguerite, le pourtour de l’ananas et de la pomme de pin)25.

Parfois, c’est uniquement la juxtaposition des plans qui est recherchée au détriment du contenu des images verbalisées à l’instar de cette compilation ou accumulation de photographies qu’on essaie de montrer au lecteur carte par carte :

Juliette avait acheté une mini-cafetière qui se branchait sur l’allume-cigare, un autoradio et des Quicksnap Fujicolor pour photographier Louis, souvent à son insu : Louis en chemise bleue en train de changer une roue (il avait enfilé des gants), Louis en érection matinale dans une chambre d’hôtel (elle avait fait glisser le drap), Louis au volant de nuit se massant la nuque (reflet du flash sur la vitre), Louis dans un café un soir qu’il l’attendait (elle était passée, coucou, par l’autre entrée)26.

Ainsi, dans un univers où tout se découpe et vole en éclats, où les choses se déforment et se transforment, où la description des objets passe par le filtre de loupes grossissantes, où les images visuelles fixes ou mobiles sont narrativisées, il se pose un problème de disposition formelle27 qui s’accomplit dans l’effet de multitude et qui s’organise selon de nombreuses brisures référentielles. En proposant davantage une multitude de référents (à décrire), le récit lui-même, paradoxalement, finit par s’effilocher ou par s’enliser. En d’autres termes, l’expansion descriptive ou l’excès de virtualité conduit irrémédiablement Le Feu d’artifice à « une lente désintégration des formes28 », c’est-à-dire une dislocation qui se fait de façon lente et douce. Mieux, il s’agit d’une écriture finement ciselée conduisant inexorablement vers un réalisme de type nouveau ou une esthétique hyperréaliste parce que le roman se développe dans un jeu virtuose où le réel passe au crible de différentes médiations ; il parvient donc au lecteur par tellement d’artifices – la peinture, le cinéma, la photographie, la télévision, l’ordinateur – qu’il finit par se déréaliser. Cette présence multiple est donc essentielle au caractère hyperréaliste de l’œuvre car la tentative d’intégrer le réel passe par un détour représentationnel : détour d’un art à l’autre, d’un domaine à l’autre. Ainsi, le fragmentaire apparaît comme un art du détour qui multiplie les effets de surface et finit par rejoindre le niveau de profondeur du texte. Autrement dit, et comme l’indique Françoise Susini-Anastopoulos, le fragment serait une forme de détour et de circonlocution, une pensée du report dont l’objectif est d’atteindre quelque chose d’essentiel29. Il convient donc de rechercher le savoir qui se dissimule derrière le choix fragmentaire.

III. Logique du choix fragmentaire ou les enjeux d’une écriture postmoderne

Il faut partir de l’idée selon laquelle trop d’images nous parviennent par tellement d’artifices pour situer les enjeux de l’écriture fragmentaire dans Le Feu d’artifice. En effet, dans ce roman, le constat de l’exubérance, de la sophistication, de l’outrance, de l’excès et de la profusion des images déboute et déroute le lecteur si bien qu’il se méfie de tout ce que lui sert l’imagination de l’auteur. Un tel soupçon permet de jeter un regard sur le paradigme de l’image en tant que produit de consommation et hyper-représentation des nouvelles technologies. Ce qu’il faut suspecter, en réalité, c’est l’image elle-même car l’illusion désenchantée, l’illusion moderne dans laquelle elle nous plonge montre que nous traversons une époque foncièrement marquée par les simulacres et la simulation, c’est-à-dire une période de fausseté.

En effet, dans le roman, les personnages sont constamment manipulés par les images qui leur parviennent. Ces images les empêchent de se forger une identité qui leur est véritablement propre. Par exemple, Louis cherche à rouler une voiture qui ressemble à celle que conduisait Cary Grant, un acteur du film La mort aux trousses. C’est aussi le cas quand il lance de rapides coups de pied dans les pneus comme il l’avait vu faire au cinéma. On le voit, le personnage n’est plus lui-même dans la mesure où il consomme sa propre existence au travers des media démultipliés. L’image affirme ainsi son règne en imposant sans cesse aux personnages des modèles et des exemples stéréotypés.

Par ailleurs, le traitement ironique que subissent ces analogies cinématographiques n’est pas sans rappeler une atmosphère de violence, de bagarre. Il suffit de se référer à la scène d’Il était une fois dans l’ouest, diffusée par un vidéobox (p. 147) pour se rendre à l’évidence de la représentation d’une telle atmosphère, à l’instar d’une scène du far west. À travers cette attitude ironique, Patrick Deville manipule les paradigmes médiatiques pour dénoncer l’agressivité des images sur les personnages. Baudrillard situe cette violence dans le cadre d’une machination subreptice ; c’est pourquoi il écrit que « nous sommes tous des Loud’s voués non pas à l’irruption, à la pression, à la violence et au chantage des media et des modèles, mais à leur induction, à leur infiltration, à leur violence illisible30 ». Baudrillard pense ainsi les médias comme une sorte de code génétique dont la fonctionnalité est de transformer et de programmer négativement les individus. Ce processus trouve, par exemple, sa flexibilité dans cette scène de braquage où le voleur, comme un acteur de cinéma, se comporte comme un individu programmé, une machine à tuer :

Un barbu s’était installé devant le jeu vidéo, qui portait des lunettes noires et des gants. La partie finie, il s’était approché du comptoir en brandissant un cran d’arrêt. Les billets de la recette dans la main gauche, il avait plongé la lame dans l’avant-bras du caissier avant de s’enfuir31.

De la sorte, l’écriture fragmentaire s’applique à représenter une société postmoderne où le sujet est instable ou en perte de repère en raison des modèles qu’il copie. À propos de ce sujet postmoderne ou ce sujet fragmenté ou dispersé, Gilles Lipovetsky, lui, parle plutôt de « procès de personnalisation [qui] génère […] le flottement existentiel dans et par l’abondance des modèles32 ». Le personnage flotte alors dans une posture énigmatique qui le coupe de la réalité sociale et le rend indifférent aux drames du monde réel. C’est pourquoi Juliette peut changer ou multiplier ses amants au gré de ses désirs et se transformer en jeune garçon pour se mêler aux adolescents qui secouent des flippers dans les salles de jeux33.

Sous le charme d’une image sublimée et esthétisée (donc une image artificielle), les personnages tombent dans une rêverie intime qu’ils exécutent avec tout ce que cela comporte de demandes subjectives, fantasmes et délires, comportements aberrants, incontrôlables, imprévisibles ; comportements que Lipovetsky résume sous la bannière du « déchaînement des passions amoureuses et fantasmatiques des sujets individuels34 ». Il y a, dans un tel déchaînement, non seulement l’expression de personnalités dispersées mais aussi, et surtout, la recherche d’une autonomisation individuelle qui place la société postmoderne dans le feu du paraître, dans le giron de la persuasion par la séduction.

Dans cette stratégie globale se pose aussi la question de la mode, avec les nombreuses références de marques (marques de vêtements, de voitures, des produits électroniques et alimentaires). Cette question invite constamment les personnages à être à la page, à s’adapter aux nouveautés, à vivre aux rythmes des découvertes technologiques. La personnalité apparente qu’ils produisent socialement et régulièrement repose sur le plaisir d’être regardé, sur la recherche de l’élégance et sur l’art de l’exhibitionnisme. La mode apparaît dès lors comme un « vecteur d’individualisation narcissique, un instrument d’élargissement du culte esthétique du Moi […] et [qui] a réussi à faire du superficiel un instrument de salut, une finalité de l’existence35 ». Ici, de toute évidence, il y a manipulation abstraite de signes de prestige, de marques de référence d’autant plus que le jeu citationnel pratiqué par Deville sert à justifier l’évidence d’une société de consommation reposant plutôt sur la marque des produits que sur les produits eux-mêmes. Dans cette logique de la consommation, Le Feu d’artifice, dénonce une esthétique de la simulation. Dans un environnement où l’originalité est truquée, où les formes sont continuellement imitées, où les produits se multiplient et se définissent par leur valeur dérivée, il est indéniable que les personnages subissent un processus d’acculturation émanant d’une subculture de l’objet.

Mais certains personnages sont fortement conscients qu’ils sont pris dans le cycle infernal de la société de consommation puisqu’ils se rendent nettement compte que « le monde est une hallucination passagère36 » et l’affirmation « d’un charmant malentendu de la permanence dans l’éphémère37 ». Dans ces conditions, Patrick Deville semble s’en prendre aux impasses actuelles de l’économie du marché et de l’individualisme, c’est-à-dire à une société qui baigne dans l’euphorie perpétuelle, une société dominée par le culte de la consommation, des loisirs et du plaisir. Le narrateur essaie de trouver une solution à ces impasses en lisant les œuvres des Stoïciens comme Épictète, Sénèque, Cicéron, Marc- Aurèle. Le Stoïcisme lui apporte une philosophie de la vie. D’abord, celle qui l’invite à ne pas faire entorse aux lois de la nature (« Plutôt changer tes désirs que l’ordre du monde38 ». Ensuite, celle qui lui permet de se retirer provisoirement du monde (« J’ai ouvert La vie heureuse de Sénèque et je me suis doucement éclipsé du monde39 ». La philosophie stoïcienne recommande alors aux personnages d’adopter une attitude d’impassibilité et de sérénité face aux événements de la vie. Elle s’appuie sur le principe selon lequel nous vivons dans un monde tellement chaotique qu’il faut donner libre cours à la nature pour ralentir son déclin. En d’autres termes, il faut éviter de tenter d’y mettre quelque ordre que ce soit afin de ne pas précipiter son effondrement total40.

Conclusion

En définitive, il faut retenir que Le Feu d’artifice actualise une écriture fragmentaire par la convocation d’importants dispositifs formels comme le collage d’éléments hétérogènes, les détails miniaturistes et la verbalisation d’images fixes ou mobiles. Cette convocation hétéroclite participe de la volonté de Patrick Deville de subvertir et de transgresser les tendances totalisantes du roman classique et de renouveler les possibilités du narratif à travers les techniques de picturalisation de l’écriture. Le fragmentaire, chez lui, loin d’être un aveu d’impuissance formelle, est une pratique qui enrichit constamment le texte grâce à ses nombreux détours : détour d’un art à un autre, d’un domaine à un autre, mais aussi détour ironique, celui qui permet de lire le fragment dans la logique passionnelle du second degré ou dans une perspective postmoderne. Ainsi, les idées que la pratique du fragmentaire éveille en Patrick Deville sont grandes car son texte donne à voir, entre spatialisation de l’écriture (fragmentation radicale) et minutie descriptive (écriture finement ciselée), une satire sociale reposant sur la caricature d’un sujet postmoderne manipulé par la société de consommation.

Notes de bas de page numériques

1  Françoise Susini-Anastopoulos, L’écriture fragmentaire. Définitions et enjeux, Paris, Presses Universitaires de France, 1997, pp. 100-104.

2  Si l’on se situe sur un axe historique, les livres de proverbes et autres sententiaires ou florilèges du XVIe siècle sont convoqués dans le cadre d’une réécriture comme c’est le cas chez Marguerite Yourcenar. Le fragmentaire chez elle se rattache à la récupération de textes anciens même si elle y associe des gestes modernes pour diversifier la pratique.

3  Selon Sophie Rabau, ce que l’on peut appeler « une poétique négative », c’est le fait de représenter l’action du temps, de briser le texte, l’abîmer, le réduire en pièces. Bref, il s’agit d’une description qui donne aux fragments obtenus la valeur de restes comme sauvés du naufrage du temps, « Entre bris et reliques : pour une poétique de la mise en fragment du texte continu ou de la fragmentation selon Marguerite Yourcenar », L’écriture fragmentaire : théories et pratiques, Perpignan, Presses Universitaires de Perpignan, 2002, p. 24.

4  Fiecke Schoots, Passer en douce à la douane. L’écriture minimaliste de Minuit, Amsterdam – Atlanta, GA, 1997, p  104.

5  Françoise Susini-Anastopoulous, L’écriture fragmentaire. Définitions et enjeux, Paris, Presses Universitaires de France, 1997, p. 53.

6  Gérard-Georges Lemaire, « Préface », Trilogie, Paris, Christian Bourgeois, 1994, p. 21.

7  Patrick Deville, Le Feu d’artifice, Paris, Les Éditions de Minuit, 1992, p. 30.

8  Guy Scarpetta, L’Impureté, Paris, Grasset, 1985.

9  Guy Scarpetta, L’Artifice, Paris, Grasset, 1988, p. 117.

10  Roland Barthes, Le Plaisir du texte, Paris, Éditions du Seuil, 1973, p. 15.

11  René Thom, « Saillance et prégnance », L’Inconscient et la science, Paris, Dunod, 1991, p. 65.

12  Fieke Schoots, Passer en douce à la douane. L’écriture minimaliste de Minuit, Amsterdam – Atlanta, GA, 1997, p. 91.

13  Nous empruntons à Françoise Susini-Anastopoulos ces expressions qui envisagent le fragmentaire comme un art de la diminution des signes, un art qui célèbre la gloire de l’instantané.Lire à propos L’écriture fragmentaire. Définitions et enjeux, Paris, Presses Universitaires de France, 1997, p. 104.

14  Françoise Susini-Anastopoulos, L’Écriture fragmentaire. Définitions et enjeux, Paris, Presses Universitaires de France, 1997, pp. 104-111.

15  Lire à propos Marc Gontard, « Le postmodernisme en France », Le Temps des Lettres, Quelles périodisations pour l’histoire de la littérature française du 20ème siècle ?, Rennes, Presses Universitaires de Rennes,2001, pp. 283-294.

16  Nous utilisons cette expression en référence à l’œuvre d’Alain-Philippe Durand, Un monde techno. Nouveaux espaces électroniques dans le roman français des années 1980-1990, Berlin, Weidler Buchverlag, 2004. Cet ouvrage met l’accent sur la manière dont l’imaginaire des romanciers contemporains est envahi par des éléments de la culture populaire, notamment la culture électronique. Il parle d’envahissement dans le cadre du « non-lieu », un concept emprunté au sociologue Marc Augé.

17  Nous pensons par exemple à Marie Darrieussecq qui fait de la citation la matière première de son roman Le Bébé (2002).

18  Tiphaine Samoyault, L’Intertextualité. Mémoire de la littérature, Paris, Nathan/Her, 2001, p. 25.

19  Patrick Deville, Le Feu d’artifice, Paris, Les Éditions de Minuit, 1992, p. 71.

20  Patrick Deville, Le Feu d’artifice, Paris, Les Éditions de Minuit, 1992, p. 29.

21  Patrick Deville, Le Feu d’artifice, Paris, Les Éditions de Minuit, 1992, pp. 21-22.

22  Patrick Deville, Le Feu d’artifice, Paris, Les Éditions de Minuit, 1992, pp. 20-21.

23  Françoise Susini-Anastopoulos, L’Écriture fragmentaire. Définitions et enjeux, Paris, Presses Universitaires de France, 1997, p. 118.

24 .Selon Jean Marie Kouakou « il y a une sorte de rabattement des plans, une simultanéité qui saute à l’œil. La lecture souligne alors la simultanéité des diverses parties de l’objet au lieu de s’intéresser à son degré de vraisemblance. », Problèmes du descriptif contemporain : l’exemple de Claude Simon et de quelques autres néo-romanciers, Thèse nouveau régime, sous la direction de Jean Claude Vareille, Université de Limoges 1989, p. 147.

25  Patrick Deville, Le Feu d’artifice, Paris, Les Éditions de Minuit, 1992, p. 30.

26  Patrick Deville, Le Feu d’artifice, Paris, Les Éditions de Minuit, 1992, p. 58.

27  Selon Jean Ricardou, « une description s’étire, et s’embrouille donc, à mesure qu’augmente le nombre des objets ou, même, la complexité d’un seul », Problèmes du nouveau roman, Paris, Le Seuil, 1967, p. 70.

28  Patrick Deville, Le Feu d’artifice, Paris, Les Éditions de Minuit, 1992, p. 118.

29  Françoise Susini-Anastopoulos, L’Écriture fragmentaire. Définitions et enjeux, Paris, Presses Universitaires de France, 1997, p. 217.

30  Jean Baudrillard, Simulacres et simulation, Paris, Galilée, 1981, p. 54.

31  Patrick Deville, Le Feu d’artifice, Paris, Les Éditions de Minuit, 1992, p. 77.

32  Gilles Lipovetsky, L’Ére du vide. Essais sur l’individualisme contemporain, Paris, Gallimard, 1983, p. 16.

33  À propos de ces jeux électroniques auxquels Juliette aime tant s’adonner, Baudrillard fait la remarque suivante : « Le joueur s’absorbe dans le bruit, les secousses, et les clignotements de la machine. Il joue avec l’électricité. En appuyant sur les boutons, il a conscience de déchaîner influx et courants à travers un univers de fils multicolores, aussi compliqué qu’un système nerveux. Il y a dans son jeu un effet de participation magique à la science. […] Rien de commun avec le rapport du cavalier à son cheval, ou de l’ouvrier à son outil, ou de l’amateur à l’œuvre d’art : ici le rapport de l’homme à l’objet est proprement magique, c’est-à-dire fasciné et manipulatoire », La Société de consommation, Paris, Denoël, 1970, pp. 173-174.

34  Gilles Lipovetsky, L’Empire de l’éphémère, Paris, Gallimard, 1987, p. 259.

35  Gilles Lipovetsky, L’Empire de l’éphémère, Paris, Gallimard, 1987, p. 44.

36  Patrick Deville, Le Feu d’artifice, Paris, Les Éditions de Minuit, 1992, p. 9.

37  Patrick Deville, Le Feu d’artifice, Paris, Les Éditions de Minuit, 1992, p. 84.

38  Patrick Deville, Le Feu d’artifice, Paris, Les Éditions de Minuit, 1992, p. 46.

39  Patrick Deville, Le Feu d’artifice, Paris, Les Éditions de Minuit, 1992, p. 83.

40  Lire à propos Fieke Schoots, Passer en douce à la douane. L’écriture minimaliste de Minuit, Amsterdam – Atlanta, GA, 1997, pp. 67-68.

Bibliographie

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Pour citer cet article

Claude Dédomon, « Le Feu d’artifice de Patrick Deville : une écriture fragmentaire », paru dans Loxias, Loxias 41, mis en ligne le 09 juin 2013, URL : http://revel.unice.fr/loxias/index.html/index.html?id=7453.

Auteurs

Claude Dédomon

Maître-assistant au Département de Lettres Modernes à l’Université Alassane Ouattara de Bouaké en Côte d’Ivoire, Claude Dédomon est titulaire d’un Doctorat unique de l’Université de Cocody-Abidjan (Côte d’Ivoire). Il s’intéresse particulièrement à l’extrême contemporain et aux nouvelles formes d’écriture romanesque. Il a écrit plusieurs articles sur l’écrivaine française Marie Darrieussecq et codirige actuellement un livre à paraître : Le Roman français moderne à l’aune du dialogisme bakhtinien.