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Bohdana Librova  : 

Un aspect de l’actualisation du récit dans la branche I du Roman de Renart : l’adverbe or entre temporalité et argumentation

Résumé

Marque de la coïncidence du procès avec le temps de l'énonciation, l'adverbe or tient une place de choix parmi les procédés d'actualisation du discours, massivement convoqués dans la branche I, au nom de la destination orale de l'œuvre (ou de la mimésis de cette oralité). Au gré des configurations contextuelles, le signifié de base temporel s'infléchit vers une diversité d'effets de sens et de fonctions énonciatives (valeur imminentielle, marquage de palier énonciatif, renforcement assertif, marquage de l'orientation argumentative...). Le sème de contemporanéité n'est pas pour autant écarté du signifié de l'adverbe : plus ou moins saillant selon les occurrences, il confère au récit une dimension d'énonciation « in praesentia », proprement constitutive du style animé de la branche I. S'il est bien vrai qu'une valeur de « rupture » sous-tend la plupart des réalisations du morphème (le or médiéval a été, en effet, identifié à un « opérateur de rupture » dans des travaux d'inspiration culiolienne), prêtant à cet adverbe un puissant potentiel structurant,  elle résulte elle aussi de diverses modulations discursives du signifié temporel. Ce n'est qu'à date moderne que l'effet contextuel de "rupture" sera définitivement reversé au sémème du morphème, au détriment de la valeur temporelle. Plusieurs occurrences du texte témoignent néanmoins que, dès la langue médiévale, ce processus de grammaticalisation est amorcé.

Index

Mots-clés : adverbe « or » , ancien français, connecteurs (évolution des), grammaticalisation, oralité (marques de), pragmaticalisation, Roman de Renart

Plan

Texte intégral

1Qu’ils soient destinés à faciliter l’interprétation orale de l’œuvre ou à construire une oralité fictive à des fins esthétiques1, les procédés d’actualisation du récit abondent dans la branche I du Roman de Renart2. Certains interpellent directement le destinataire (ainsi, les adresses telles que or escoutez, 13673, oiez, 2239, or poez oïr 1853, les formules épiques comme la veïssiez, 3213, tant veïssiez, 1931, qui lors veïst, 737, qui donc oïst, 915 ou le présentatif « conniventiel » ez (estes) vos, 978, 1483, 1897), d’autres feignent de le replacer dans le cadre spatial des événements narrés (« Onques n’i ot cheval tenu/De si a tant qu’ils sont venu/Au mes Lenfroi le foretier », 5984), d’autres encore sollicitent son attention en induisant une équivalence fictive entre le moment de l’énonciation et les événements rapportés (ainsi, le présent de narration pertinemment rebaptisé en « présent de participation » par Jean Rychner5 ou les embrayeurs tels que (mais) hui : « qui viaut mais hui aler, si aut », 1658). Parmi ces divers procédés de l’« énonciation in praesentia »6, une place de premier plan revient à l’adverbe or. Avec ce déictique, l’actualisation du récit revêt des facettes multiples, dont certaines pointent déjà vers la grammaticalisation que l’adverbe subira entre le XVIe et le XVIIe siècles.

2Au regard de la polyfonctionnalité du morphème et de sa réduction en diachronie, le sujet se prête à trois questionnements : I) comment analyser les effets de sens multiples de or dans la branche I7, II) peut-on proposer une explication unitaire de cette diversité sémantico-fonctionnelle en dégageant un signifié de puissance commun à la totalité des emplois, III) le texte offre-t-il des éléments susceptibles d’expliquer la future grammaticalisation du morphème, devenu conjonction de coordination entre le XVIe et le XVIIe siècles8 ?

3Les questions I et III feront l’objet d’examen en cours d’article. La réponse à la question II nous servira de conclusion.

4En ancien français, le morphème or se distingue par une forte polyfonctionnalité non seulement en langue, mais également en discours, où il assume facilement plusieurs fonctions simultanées. Cette polyfonctionnalité discursive n’empêche pas cependant que l’on puisse dégager trois pôles grammaticaux, entre lesquels se meuvent les différents emplois : 1) l’adverbe circonstanciel, 2) l’adverbe d’énoncé et 3) l’adverbe d’énonciation.

51° En tant qu’adverbe circonstanciel, or marque la contemporanéité, fictive (dans la narration) ou effective (dans le DD), du procès dénoté par le verbe et du moment de l’énonciation. Il s’agit donc d’un déictique temporel, traduisible en français moderne par le maintenant temporel. Conforme à l’étymologie (or < ablatif du lat. hac hora), cette valeur temporelle reste plus ou moins présente dans la plupart des emplois médiévaux du morphème.

62° En tant qu’adverbe d’énoncé, or porte sur un segment d’énoncé, généralement sur une proposition, qu’il détache emphatiquement d’un segment précédent, en induisant parfois entre E1 (segment précédant or) et E2 (segment introduit par or) différents rapports logiques, tels que opposition ou conséquence.

73° En tant qu’adverbe d’énonciation, or porte encore sur une proposition, mais il ne concerne plus son contenu (le dit), comme en 2°, mais bien son énonciation elle-même (donc le dire), en marquant sa modalité illocutoire9.

8 

9Il convient dès à présent d’observer – quitte à devoir anticiper sur la solution du problème II – que, quel que soit son domaine d’emploi (référentiel en 1°, textuel en 2° ou pragmatique en 3°), or garde les propriétés fonctionnelles de déictique10. Sa tâche, en effet, repose sur un principe immuable : inscrire dans une actualité, fictive ou effective, un élément quelconque (qu’il s’agisse d’une information extralinguistique, d’un segment textuel ou bien d’un trait affectif traduisant une modalité illocutoire).

10Certains linguistes ont tenté d’établir une correspondance biunivoque entre la position de or et ses fonctions sémantico-énonciatives. Ainsi, pour M.-L. Ollier, la place postverbale serait strictement réservée au or(e)(s) circonstanciel, tandis que la position frontale serait un indice indéniable d’une fonction textuelle et/ou énonciative, à l’exclusion de la valeur temporelle11. Corrélativement à ce constat, la forme longue de or, c’est-à-dire ore (ores)12, qui apparaît majoritairement en position postverbale, serait réservée au signifié temporel13. Or, si ces observations rendent bien compte des tendances propres à l’ancien français (tendances au demeurant logiques, car la place initiale favorise la portée propositionnelle, tandis qu’une conformité tend à s’instaurer entre la forme longue et le signifié étoffé14), on ne saurait pour autant en extrapoler une règle15. Le caractère facultatif de ces corrélations, que notre texte contribue à révéler, n’est qu’une conséquence logique du flou catégoriel qui caractérise le statut grammatical du or médiéval.

11Ce flou catégoriel, il sera indispensable d’en tenir compte lors de l’étude de nos exemples, et ces considérations seront d’autant plus nécessaires que des contraintes de classement nous ont amenée à schématiser la complexité sémantico-énonciative des occurrences, afin de mieux faire ressortir les trois valeur différentes16

12Si dans la majorité des occurrences or garde sa valeur temporelle, celle-ci apparaît rarement seule : elle se combine en effet facilement avec différentes fonctions textuelles et nuances énonciatives. Seules quelques occurrences se contentent de réaliser le signifié temporel pur.

13Il est symptomatique que la valeur temporelle apparaît la plus nette dans la bouche du personnage le moins apte à profiter des potentialités du système – le jongleur étranger. Dans son pidgin minimaliste, or participe d’une séquence de déictiques purement « référentiels »:

(1) « Iai, iai, vair, vair, dist il, jel voi,/Ce dit Renart qui ainz n’ot foi./Se fust or ci icist Renart,/Ja fust il touz pandu a l’art. » (2579)17

14La valeur déictique ressort clairement de l’opposition établie par rapport à une donnée de localisation temporelle non déictique, telle que lors, « alors » (2), ou simplement par rapport au morphème du futur (3) :

(2) « Se Hersant portoit le juïse/Ou ele estoit arse ou esprise,/Lors le savroit qui or nel set,/Liez en seroit qui or vos het./Lors diroient tout a estrous:/ ‘Veez le coup, vez le jalous !’ »  (259, 260)

(3) « Renart, fait il, gardez vos mes./De ce avez vos ore pes,/Mes quant vos remesferez primes,/Vos revanroiz a ce meïsmes. (2148)

15On ne manquera pas de noter la présence d’une charge affective dans le cotexte des occurrences précitées : or y participe sans y contribuer par son sémantisme, qui reste purement temporel d’un acte illocutoire de menace, explicite en (1), davantage implicite en l’affinité de or avec l’atmosphère affective, affinité qui a favorisé son évolution vers l’adverbe d’énonciation.

16Chaque fois que or apparaît en position frontale, il tend à affecter d’une certaine portée l’ensemble de la proposition : il la détache du fond de la narration, en l’inscrivant explicitement dans l’actualité18.

17Faut-il pour autant considérer que sa portée propositionnelle s’exerce au détriment du signifié temporel ? Les réponses apportées à cette question divergent : pour M.-L. Ollier, la position frontale excluerait la valeur de temporalité référentielle : nous aurions donc affaire à un pur adverbe de phrase, destiné à détacher emphatiquement le deuxième membre d’un couple d’énoncés19. H. Nølke, quant à lui, voit dans le or frontal un déictique temporel classique, incidemment chargé d’« attirer l’attention » du lecteur/auditeur sur un point crucial du récit20.

18Il semble difficile de refuser une valeur temporelle à la majorité des occurrences du or frontal relevées dans la branche I. Plus ou moins affirmée selon les contextes, cette valeur coexiste avec la fonction d’articulation textuelle : il s’agit en effet d’une composante lexicalisée qui ne peut être écartée qu’en cas de configurations discursives défavorables à sa réalisation21.

19A la différence de la valeur temporelle, la fonction d’articulation textuelle reste tributaire des paramètres contextuels. A peine perceptible en (4) et en (5), où E2 (l’énoncé en or) s’inscrit dans un mouvement amorcé par une proposition précédente, cette fonction atteint des proportions considérables en (11-14), où or inaugure de nouveaux seuils narratifs : la charge d'organisation textuelle y prend le pas sur la valeur temporelle.

20La fonction de détachement actualisant est appuyée par le caractère sémantique et grammatical des segments placés dans la subséquence de or : sur le plan sémantique, il s’agit souvent d’énoncés qui rendent compte de la situation critique d’un personnage (généralement le protagoniste Renart) : formules dramatisantes à valeur détrimentaire, telles que Or est venuz vostre joïse (2026), Or iert Renart pris a la trape (ex. 9), Or est Renart pres de confondre (1224), Or est li feus griés a estaindre (298), interjections telles que ha ! las (1416) ou diverses locutions reflétant le désarroi intérieur du protagoniste, telles que avoir paor, ex. 17, Or sui ge morz, 2382 ou Or vodroit estre a Maupertuis, 1353). Les sémantismes des verbes inscrits dans la suite de or ajoutent du relief à la scène : nous y relevons de nombreux verbes de mouvement (ex. 8, 11, 12) et de perception affective (ex. 5, 13).

21Sur le plan grammatical, les verbes de E2 sont volontiers aux temps du présent (le présent de narration et l’accompli du présent qu’est le passé composé) – souvent en contraste avec les temps du passé contenus dans E1 – (7, 11, 12), et aux temps traduisant l’imminence du procès (9, 10).

22Ces éléments sémantiques et grammaticaux renforcent la portée textuelle du or frontal, en l'aidant à rehausser des moments critiques, dramatiques, de l’action narrée22.

23La fonction d’actualisation textuelle n’est que faiblement présente là où E2 (= la proposition en or) s’enchaîne harmonieusement avec E1 (= le segment textuel précédent). Ainsi, en (4), la proposition en or peut être considérée comme une complétive asyndétique dépendante du verbe savoir23 :

(4)  « Ce sache Dieus et saint Martins,/Or est venue vostre fins. »  (3096)

24De même, en (5), l’énonciation de E2, énoncé faiblement rhématique, a été préparée par les deux propositions précédentes24 :

(5) « Que fera ge, lasse, chaistive ?/Mout me poise que je sui vive./Or ai perdu toute joie/Et la riens que je plus amoie. » (2761)

25Lorsqu’une opposition est établie entre une séquence antécédente et l’énoncé en or, l’effet de détachement ressort davantage. Dans l’occurrence (6), la valeur temporelle se renforce cependant elle aussi, du fait de l'ancrage dans le temps de l’opposition établie entre E1 et E2 (or s'oppose respectivement à au departir et à en m’enfance) :

(6) « Au departir lor fis la lope./Or m'en repent, Diex! moie coupe./A tot le mont ai fait anhui,/Dolanz et repantanz en sui ;/Or doi venir a repentance/De ce que j'ai fait en m'enfance. » (1110, 1113)

26L’effet de détachement dramatisant augmente à mesure que les écarts sémantiques et syntaxiques entre les deux propositions se creusent (on notera dans les exemples suivants des cas de changement de sujet et de sautes de temps entre E1 et E2). Or souligne d’autant plus aisément les moments dramatiques exprimés par E2 :

 (7) La pes fust maugré les irois/...Se ne fust Chantecler et Pinte,/Qui avenoit a cort soi quinte,/Devant le roi de Renart plaindre./Or est li feus griés a estaindre,/Que sire Chanteclers li cos/Et Pinte.../Atraïnent une charroite/Ennoree d’une cortine:/Dedanz gisoit une geline…(298)

 (8) Li conciles fu asanblez/Et Renart ot les iauz bandez./Or l’en mainent as forches pandre,/Ha ! las, qu’il ne se puet desfandre ;/Mout volentiers s’en eschapast/Et a Maupertuis s’en alast/Et dust en sa meson a aise,/Mais il ne puet que Dieu ne plaise. (1415)

27Dans les exemples (9)-(10), l’effet de rupture est majoré du fait de la valeur imminentielle du temps verbal (or n’en garde pas moins son signifié temporel, qui glisse métonymiquement vers l’expression d’une époque imminente) :

(9) ...A molt grant paine s'en eschape./Or iert Renart pris a la trape,/Se Bruns li ors le puet ataindre. (700)

(10) A la terre entre .II. eschames/S'asist sa qeue entre ses james./Or estoit bien Renart cheü,/Se Diex li eüst porveü./En tel point l’avoit pris li rois,/La pes fust maugré les irois/Et la guerre preïst ja fin/Entre Renart et Isangrin,/Se ne fust Chantecler et Pinte,/Qui avenoit a cort soi quinte. (289)

28La fonction d’articulation du discours est spécialement prononcée en (11)-(13), où or instaure un nouveau palier narratif, marqué par le changement de paragraphe dans l’édition, et rehaussé à plusieurs reprises (11, 13 et 14) par une lettrine dans le manuscrit25:

(11) Mout fu en grant afflicion./Or s’an vont li baron a cort/Et passent l'aive qui la cort... (1163)

(12)  Mises les eüst a raison,/Se ne fust Grinbert le taisson./Or s'an vont li baron ensanble. (1209)

 (13)  Mout volentiers s’en eschapast/Et a Malpertuis s’en alast/Et fust en sa meson a aise,/Mais il ne puet que Dieu ne plaise./Or est Renart pris et lïez./Dex ! com Isangrin en est liez/Et Pinte et Chantecler li cos ! (1421)

29L'effet est comparable, lorsque or introduit des interventions de l’auteur destinées à attirer l’attention de l’auditeur sur un nouveau cadre énonciatif26 :

(14) Or sont asanblé li baron,/Si parleront dou mal laron./Or escoutez de dant Belin…27 (1367)

30Le détachement qu’opère or d’un segment d’énoncé par rapport à un segment antécédent implique souvent une nuance logique, telle que l’opposition ou bien la conséquence. Ceci n’a rien que de naturel, du moment que l’on considère que le moment crucial d’un procès, celui précisément qui fait volontiers l’objet d’une réactualisation fictive dans la narration, consiste souvent à établir un lien logique avec un autre procès ou avec une autre phase du même procès. Tout en conservant à or sa valeur temporelle, ces emplois confinent au mécanisme conjonctif (cf. 2.1.). Ainsi, or signale une conséquence en (15):

(15) « ...Ceste dame voil noçoier:/Ses sire est morz novelement,/Li rois l’ocist vilainement,/Mainte foiz li avoit forfait,/Or li a l’ame dou cors trait./Renart ot a non li lechierres... »  (2876)

31Contaminé par le sens adversatif véhiculé par mes, or peut être traduit par « à la place » (élément impliquant opposition) en (16), bien que le sens temporel de « maintenant » se réalise également, en opposant le cadre temporel de la situation actuelle de Renart à une époque imaginaire pendant laquelle sont censés survenir les événements hypothétiques envisagés par le protagoniste :

(16) Or vodroit estre a Maupertuis,/Si fermeroit mout bien son huis ;/…et Bruns li ors et dant Tibert/Et sire Nobles li lions…nou trairoient de la tainiere,/Tant est la terre fort et fiere./Mes or est Renart pris au laz/Et set bien ce n'est mie a gas. (1361)

32L’opération de « rupture » énonciative signalée par or s’infléchit vers l’idée de la concession en (17) – en forçant un peu l’expression : « il est vrai que Renart peut avoir peur maintenant ; il reste que son château ne sera jamais réduit par un assaut ».

 (17) Au chastel vienent en viron,/Chascuns i tant son paveillon,/Herbergent soi de totes parz./Or puet avoir paor Renarz,/Mes par asaut n’iert ja conquis/Ne ne sera a force pris. (1700)

33Or est également empreint d’une nuance concessive, traduisible par « certes… maintenant/désormais », dans l’extrait (18) (« Certes, vous serez désormais libre de décider de mon sort »). Tel un connecteur argumentatif, il assure l’articulation entre une séquence de DD et la réponse de Renart, livré à la merci de son interlocuteur :

(18) «...Qui de mort vos respitera,/Ja mes mes cuers ne l’amera. »/Respont Renart : « Sire Isangrin,/Or seront vostre li chemin ;/Encor est Dieux la ou i siaut,/Si vos conseillera, si viaut. » (2088)

34La réalisation de valeurs logiques et argumentatives, restée secondaire dans les exemples (15) à (18), augmente d’intensité dans quelques rares occurrences, de sorte à engendrer des effets comparables à ceux véhiculés par la conjonction moderne. Le signifié temporel de or est presque absent de la séquence (19), où le morphème introduit l'apodose d’un système hypothétique, qui exprime la conséquence de la réalisation, hautement probable, de l'hypothèse mentionnée par la protase (Renart – jongleur étranger vient de confirmer qu’il voulait bien être de la noce, et si ceci est réellement vrai, il ne manque donc plus que l’instance religieuse pour que le mariage puisse avoir lieu) :

(19) « Certes, sire, ce dit Poinciaus,/Qui mout fu avenant et biaus,/Se vos aus noces volez estre,/Or ne nos faut mes que le prestre;/Je vos donrai demain assez,/Se vos o nos venir volez. » (2906)

35En (20), la fonction de or est tout à fait conforme à la syntaxe moderne : il assure l’articulation inter-propositionnelle tout en marquant l’opposition entre E1 et E2; le signifié temporel fait ici l’objet d’une subduction avancée (on pourrait maintenir « or » dans la traduction) :

(20) « Je parti de vos avant ier/Par vostre gré et par amor,/Sanz mal talant et sanz iror;/Or ont tant fait li losengier/Que de moi se veulent vengier/Et vos m'avez jugié a mort. » (1245)

36La mince part qui revient à ces exemples au sein du corpus montre que la fonction de conjonction n’est encore que peu développée à l’époque de notre texte et qu’elle reste sans doute confinée au niveau des effets contextuels. Les occurrences (19) – (20) n’en sont pas moins des indices indéniables montrant que le cheminement de or vers sa valeur de conjonction de coordination est amorcé28.

37Si les emplois précités témoignent du processus de grammaticalisation, qui finira par restreindre le statut grammatical de or à sa fonction conjonctive29, d’autres occurrences relèvent d’un mécanisme que l’on a récemment, par référence au concept classique de « grammaticalisation », dénommé « pragmaticalisation »30.

38La pragmaticalisation aboutit à la création des « pragmatèmes », morphèmes qui portent sur l’acte d'énonciation31. Employé comme adverbe d’énonciation – pragmatème, or se charge d’actualiser une perception effectuée par l’énonciateur (il vise à « inscrire l’actualité d’une perception, le moment où elle s’organise dans la conscience d’un sujet… »32), en tant qu'elle motive son dire. Par ce biais, il contribue à modaliser l'énoncé33. Parmi les diverses modalités liées à intervention de or pragmatème, on peut relever, entre autres, l’indignation, la surprise, une prise de distance ironique, le renforcement d’une assertion ou d’une injonction.

39Comme c’était le cas pour la fonction textuelle, la fonction pragmatique de or reste généralement associée au sémantisme temporel, ce qui dénonce son caractère contextuel non lexicalisé. Or peut même, s’il commence une proposition, assumer simultanément le rôle d'adverbe d'énonciation et celui d'adverbe d'énoncé34.

40Comme le laisse présager sa portée sur le dire, le or d’énonciation apparaît exclusivement en discours rapporté, direct ou indirect, ainsi que dans des séquences narrées fortement empreignées de la subjectivité énonciative, s'apparentant par ce biais au DIL35. Dans le DIL des v. 1351-52, or souligne le désespoir ressenti par Renart en même temps que l'intensité de son désir d'échapper au danger :

(21) Bien set que sa mort est juree,/Ne puet mes estre destorbee./Or vodroit estre a Maupertuis,/Si fermeroit mout bien son huis. (1353)

41Le signifié pragmatique est caractéristique des échanges dialogaux. Le dialogue des v. 576 à 586 présente une suite d’emplois de ce type. La haute concentration de or sur ces quelques répliques enchaînées dépourvoit la déixis temporelle de sa fonctionnalité, tout en favorisant une interprétation pragmatique. Dès la première occurrence se dessine une nuance pragmatique, de l’ordre d’un renforcement assertif (on pourrait tenter de la rendre par « vraiment » ou par « en effet ») : le sens purement temporel est ici, en effet, privé de pertinence, dans la mesure où une modification de la localisation temporelle du contenu de la protase hypothétique (le fait de conduire l’ours à l’endroit où se trouve le miel) ne change strictement rien aux conséquences évoquées dans l'apodose (l’action ingrate de l’ours, ironiquement envisagée) :

(22) « Mais que vaut ce ? ce n’a mestier,/Que se je or vos i menoie/Et de vostre preu me penoie,/Si m’en feriez male part. » (577)36

42Bien que la valeur temporelle de or semble être mieux placée dans la réplique de Brun (où une opposition entre le présent et le passé est impliquée, vu que l’énonciateur s’étonne de la méfiance affichée par Renart au moment voisin de celui de l’énonciation, méfiance qui ne se justifie, aux yeux de l'ours, par aucune expérience passée), le contexte émotif semble privilégier une lecture pragmatique (expression de l'étonnement) :

(23) « Que avez dit, sire Renart ?/Mescreez me vos or de rien ? » (581)

43Enfin or confère une nuance de confirmation à la réponse de Renart, qui se veut à tout prix rassurante (traduisible par « surtout soyez rassuré… »)37 :

(24) « Non fais ! Or en soiez toz quites:/Ne vos en port plus mal corage. » (586)

44La déixis temporelle est, de même, redondante dans la question destinée à Renart par Grimbert, portant sur la position occupée par le goupil au moment de l’énonciation (25) : d’où la nuance d’accentuation expressive conférée à l’interrogation :

(25) « Renart, faist il, biax douz conpaig,/Di moi, ies tu or ça dedanz ? » (785)

45Pour des raisons analogues, il est loisible de voir en ore une marque l’impatience dans la requête instante de l’ours face à la perspective du miel, et ceci en dépit de la présence de l’adverbe car, qui donne déjà du relief à l’injonction38 :

(26) « Ce est la riens en tot le monde/Que mes las vantres plus desirre ;/Car m’en donez ore, biau sire,/Por le cuer bieu, la moie coupe ! » (562)

46Une partie considérable des emplois pragmatiques de or consistent à renforcer l’attitude critique prise par l’énonciateur vis-à-vis d’un procès effectué par son co-énonciateur. Plus ou moins affirmée, allant d’une fine ironie jusqu’à une franche réprobation, la critique est explicitée dans des éléments axiologiques inscrits dans la subséquence de or (cf. par exemple or oi bon plait, 28 c'estoient or les beles messes, 30 pour l'ironie, et par exemple or oi ge vilenie, 27, com avez or forfait, 31 pour la réprobation explicite). Relativement ambiguë entre 27 et 30, où la lecture temporelle demeure possible, la lecture pragmatique devient la seule plausible entre 31 et 33, où l'interprétation temporelle est inhibée par l’écart temporel ou aspectuel trop important entre le sémantisme de or et le procès auquel il est incident.

47Or marque un mouvement de surprise ironique et/ou d’indignation dans les répliques dialogales inscrites en (27) et en (28). Les deux formules sont représentatives d’un modèle bien attesté, minutieusement analysé par M.-L. Ollier, qui en donne la description suivante : situé en tête d’une réplique de dialogue, or est suivi d’un verbe de perception auditive (généralement  oïr), à la première personne, ou bien d’un verbe d’énonciation (généralement dire), à la deuxième personne ; les deux verbes sont à un temps du discours (le présent ou le passé composé), et ils introduisent un jugement porté par l’énonciateur sur le dire d’un premier énonciateur, jugement « par lequel il [càd l’énonciateur de or] s’oppose à ses attentes ou visées [càd à celles du premier énonciateur] »39. Toujours fortement asserté, ce jugement est le plus souvent négatif et conduit à rejeter catégoriquement les propos du premier énonciateur :  

(27) « ...Mescreez me vos or de rien ?/ - Oïl. - De coi ? - Ce sai ge bien:/De traïson, de felonie./- Renart, or oi ge vilenie,/Qant de tel chose me sordites. »  (584)

48Le rejet des visées du premier énonciateur (si rejet il y a) est beaucoup plus discret en (28), où il est atténué par l’ironie40, et relativisé par la suite de la réplique, qui montre que l’énonciateur (càd le teinturier) ne se laisse pas prier pour accepter la perspective du premier énonciateur (càd la formation de Renart en matière de la teinture) :

  (Renart s’adresse au teinturier en mettant en cause sa compétence :)

(28) «  ...encor t’en cuit assez aprandre/De meller tainture avec çandre :/Tu ne sez pas conment l’en fait »/Dist li vilains : « Or oi bon plait./Par ou entrastes vos ceanz ? » (2340)

49L’interrogation d’Isengrin reproduite en 29 peut être lue comme une transformation du modèle [Or diz tu/or oï ge + jugement négatif]. Nettement pragmatique, or marque l’indignation du sujet parlant devant l’énoncé proféré par le premier énonciateur41 : 

 (29) « Icel mortel siecle et l’anvie/Lairoie : plus n’an ai anvie. »/Dist Isangrin : « Cuivers traïtres,/Ce que est ore que vos dites ?/Tantes guiches nos avez faites/Et maintes farlores atraites.... » (2076)

50Obéissant à un mécanisme analogue à celui que nous avons dégagé pour les occurrences 27 à 29, or renforce une désapprobation, et par là contribue à marquer l’ironie fondée sur l’antiphrase les beles messes (ce syntagme désigne les préparatifs, effectués par Hersent et par Hermeline, en vue des secondes noces de cette dernière) :

(30) « Et vos, fait il, dame Hersant,/Assez fait mal qui le consant./Pute orde vielle, dont vos vient ?/Assez escorche qui pié tient./Ahi ! fait il, quex .ii. barnesses !/C’estoient or les beles messes/Que faissïez por moi chanter/De voz croupes faire tüer./Ce sache Dieus et saint Martins,/Or est venue vostre fins. » (3092)42

51Si dans les emplois pragmatiques énumérés jusqu’ici, or, quoique référentiellement redondant, pouvait faire l’objet d’une lecture parallèle en termes de déixis temporelle, cette composante interprétative semble inhibée dans les trois exemples qui suivent : soit que le procès daté par or y soit trop éloigné du moment d’énonciation – de sorte que même une lecture métonymique telle que « aussitôt » ou « naguère » est exclue –, soit que la temporalité ponctuelle impliquée dans or soit en désaccord avec la vision aspectuelle du procès, deux facteurs qui favorisent une interprétation purement pragmatique de l’adverbe.

52En (31), il est question de l’adultère (c’est Hermeline qui injurie Hersent à ce sujet) datant d’une époque largement révolue au moment de l’énonciation :

(31) « Pute vieille, pute remese,/L’en vos deüst ardoir en brese,/Si que la poudre fust vantee,/Qui a moi vos estes vantee/De mon seignor qui vos a fait./Aï ! com avez or forfait ! » (3160)

53En (32), le complément de pute aire désigne une qualité stable du sujet caractérisé (malgré son utilisation ironique par Renart à propos de Brun), et de ce fait semble difficilement compatible avec l’interprétation temporelle de ore, par définition ponctuelle.  Une fois de plus, ore sert à inscrire une perception – intellectuelle en même temps qu'émotive – dans la conscience actuelle du sujet : on pourrait paraphraser l’énoncé par « je constate maintenant à quel point vous êtes perfide, cet événement me fait mesurer à présent l’ampleur de votre perfidie » :

(32) « Bruns, fait il, je savoie bien/Que querïez art et engien,/Que ja dou miel ne mengerai ;/Mais je sai bien que je ferai,/S’une autre foiz l’avoie a faire./Com estes ore de pute aire,/Qant de ce miel ne me puiriez ! »  (638)

54Vu le type de caractérisation auquel or est incident (à savoir celle, bien pérenne, de la perfidie de Renart), on appliquera la même interprétation à (33), tout en considérant que le caractère notoire de la notion sur laquelle porte l’adverbe prête à son sémantisme une nuance de confirmation (à des fins de démonstration, on peut gloser l’occurrence par « tu es décidément trop malfaisant ») :

(33) …Mes se il en eschape vis,/Je li ferai panre la croiz:/Je vos en pri a haute voiz,/Fait Grinbert, que vos li doingnez. »/Adonc li ostroia li rois./Lors le fist li rois amener,/En son estant le fist lever./ « Aï, fait il, rous de pute aire,/Tant par ies or de mal afaire/Et si es male criasture./Certes, en toi pecha Nature... » (1454)

55Un type spécifique d’emploi pragmatique est constitué par le or renforçateur de l’acte d’injonction. Antéposé à une unité exprimant l'injonction (ainsi, à un verbe à l'impératif, au subjonctif jussif ou au futur injonctif), il figure généralement sous sa forme courte : « Or me dites, sire Isangrin» (271), « Tibert, or laissiez ce ester » (809), Or esterez, sire Couarz (avec un futur injonctif, 1546)43.

56Dans la majorité des emplois injonctifs, la dimension temporelle de or semble être réduite à une trace infime, à la suite du processus de subduction. Cependant, la trace qui en subsiste s'avère hautement fonctionnelle : en effet, la forme subduite du déictique temporel est en parfait accord avec l’insistance naturellement véhiculée par la modalité injonctive, qu'elle permet ainsi de renforcer44.

57C’est, de même, la trace latente du signifié temporel qui favorise or comme support de l’injonction rendue par des formes non verbales, telles que : « Or dont, dit Noble, au deauble ! » (270), « Tuit escrïent : ‘Or a la hart!’ » (1409), « Qar Martinet li clers li saut:/ ‘Or sus, or sus ! fait il, biau pere ;/aïde, aïde ! bele mere’ » (879), Or fors ! fait il, que par mes danz/Mar antarez ja mes ceanz. » (3077), « Seignor, fait il, or aprés tuit !/Veez le la ou il s’enfuit. » (1604), ou, avec l’infinitif substantivé, « Et dist li rois : ‘Or tost dou pandre !’ » (2091). Dans les tours injonctifs nominaux, en effet, le contenu latent de déixis temporelle semble compenser l’absence d’une composante verbale45.

58Enfin, s’il est bien vrai que le or injonctif représente un des cas les plus subduits de la sémantèse temporelle, il reste que le contexte de l’injonction, par définition actuel, constitue un environnement favorable à la réactivation du signifié temporel : celle-ci est notamment favorisée dans les occurrences où le temps de l’action visée par l’injonction s’oppose nettement à une époque autre (ainsi, aux v. 809 et 2260).

59Par un mécanisme analogue de resémantisation partielle, le or injonctif est susceptible de s’attirer d’autres nuances pragmatiques, telles que la distance ironique ou bien la dérision. En effet, or étant apte à actualiser une perception émotive, il arrive qu’il souligne une émotion ayant motivé l’énonciation de l’ordre : il traduit alors, à part le renforcement de l’acte injonctif, différentes attitudes émotives prises par le locuteur vis-à-vis de son interlocuteur, tels que la dérision et le mépris en (34) :

(contrairement à ce que s’imaginent ses ennemis, Renart a dévoilé leurs intentions et il ne sera pas dupe) :

(34) « Or vos tenez la jus tuit coi,/Contez d’Auchier et de Lanfroi,/Qui set noveles, si les cont/Et je l’orroi de ci amont. » (2223)

60On voit ainsi que, en dépit de son degré de grammaticalisation avancé, le or injonctif ne se soustrait pas aux aléas contextuels pesant sur le morphème : le contexte aidant, différentes valeurs sont susceptibles d'interférer au sein d'une même occurrence. Ce recouvrement fonctionnel apparaît de façon significative dans le dernier vers du programme de grammaire. Or y possède une double valeur pragmatique : il se charge de renforcer un tour injonctif (exprimé par le subjonctif à valeur jussive gart), en même temps qu’il traduit une nuance illocutoire proche de la menace (« que chacun se tienne sur ses gardes ! »), dont la réalisation est favorisée par le caractère fortement subjectif de l’énoncé, où l’on peut voir un DIL de Renart. Il n’en est pas moins doté d’un sens temporel, renvoyant métonymiquement à l’époque qui prend son commencement au moment de l’énonciation (« que chacun se méfie bien désormais » !). L’occurrence assure enfin une fonction importante dans l’articulation du récit (elle tient donc également de la fonction d’adverbe d’énoncé), en marquant la transition entre deux segments narratifs :

(35) …Et Renart ensi en eschape,/Mais or gart bien chascun sa chape ! (2260)

61Au vu de ce panorama d’emplois polyfonctionnels aux contours peu distincts, peut-on proposer une explication cohérente à la polysémie46 du morphème ? Nous tâcherons d’apporter à cette question une réponse en deux temps : d’abord en nous référant au domaine du discours, ensuite en replaçant la problématique sur le plan de la langue.

62Sur le plan du discours, l’explication de la diversité fonctionnelle semble devoir être cherchée dans la notion de contemporanéité inhérente au signifié temporel de or : mis à part les contextes oppositifs, qui opposent le moment de l’énonciation (ou un moment du passé fictivement assimilé à celui-ci) à d’autres époques, il est inutile de surmarquer l’époque présente, celle-ci étant par définition contemporaine de la profération de l’énoncé : cette redondance libère le morphème du domaine référentiel, pour lui permettre d’assumer des fonctions textuelles et pragmatiques. Ainsi un mouvement de subduction est-il amorcé, pouvant emprunter les deux chemins de grammaticalisation ou de pragmaticalisation. Cependant, sauf pour les emplois conjonctifs et injonctifs, qui pourront avancer jusqu’au bout du mouvement subductif, ces fonctions ne se reverseront pas en valeurs stables : elles resteront conditionnées par des facteurs contextuels et continueront à cohabiter avec le signifié temporel, d’où, en ancien français, la fréquente polyfonctionnalité de or en discours.

63Sur le plan de la langue, il semble possible de dégager un signifié de puissance susceptible de rendre compte de l’ensemble des effets de sens produits par l’adverbe : ce signifié de base peut, dans un premier temps, être caractérisé comme /déixis/ – si l’on veut bien accepter d’élargir ce concept, a priori conçu pour le domaine référentiel, aux domaines textuel et pragmatique47 –, puis redéfini comme /actualisation/, au regard de ses spécificités fonctionnelles dans les sphères textuelle et pragmatique. Ce signifié de puissance, sous-jacent à la totalité des occurrences, assure l’unité cinétique de or, depuis les emplois pléniers (ceux qui correspondent à la déixis temporelle) jusqu’aux emplois les plus subduits (ceux qui prêtent à or des fonctionnements purement textuels et pragmatiques).

64C’est donc la conjonction des deux facteurs – la présence du sémantisme de base et la redondance du signifié plénier dans des contextes temporels –, qui permettra le passage progressif du morphème de la sphère temporelle à la sphère textuelle. La disparition du signifié temporel (vers la fin du XVIe s.), et, dans son sillage, celle du signifié pragmatique (au XVIIe s.  pour le sens injonctif48), a sans doute été favorisée – outre la ténuité de la forme du morphème et sa préférence pour la position frontale, deux éléments favorables à la grammaticalisation – par le passage de l’oralité, où les déixis temporelle et pragmatique trouvent une place importante, au style écrit, dominé quant à lui par la fonction d’articulation textuelle49. Aussi bien, la réduction sémantico-fonctionnelle du morphème or s’inscrit dans un mouvement de déclin commun à l’ensemble des marques de l’« énonciation in praesentia », marques dont la branche I offre tant d’exemples éloquents.

Notes de bas de page numériques

1 Voir J. R. Scheidegger, Le Roman de Renart ou le texte de la dérision, Genève, Droz, (Publications romanes et françaises, 188), 1989, p. 121 et passim.
2 Nous désignons ainsi l’ensemble constitué par la branche I proprement dite et par les branches Ia et Ib.
3 N.B. : Les numéros des vers correspondent au (aux) vers contenant l’occurrence commentée. Nous nous dispensons en outre d’employer l’abréviation « v. » lorsqu’il s’agit de désigner des vers du Roman dans les citations. Nous nous référons à l’édition M. Roques, Paris, Champion, 2007 (1982), CFMA 78.
4 Il s’agit d’une variante graphique de de ci a tant, litt. « d’ici jusqu’à ce que ». Comme le montre cette traduction, on peut ici hésiter entre un sens spatial et un sens temporel, créé par métaphore, vu la présence de la locution a tant, « alors, jusqu’au moment où ». M. Perret cite des exemples plus univoques du sens spatial de la locution de ci a dans « Ancien français : quelques spécificités d’une énonciation in praesentia », Langue française 149, mars 2006, pp. 16-30, en particulier p. 20.
5 « Renart et ses conteurs ou ‘le style de la sympathie’ », TraLiLi, 9, 1971, pp. 309-322.
6 Par référence au terme de M. Perret, dans « Ancien français : quelques spécificités d’une énonciation in praesentia ». Le complément in praesentia sous-entend « in prasentia de l’interprète et de l’auditeur » : il s’agit de toutes les marques discursives destinées à faciliter au récitant le contact direct avec son public.
7 Sans viser toutefois à une énumération exhaustive de toutes les occurrences.
8 Pour cette datation, voir C. Badiou-Monferran, « Quelques aspects de la concurrence des graphies ore, ores et or au début du XVIIe siècle : distribution sémiologique et recomposition du système des connecteurs », Le français moderne, 2, 2003, pp. 211-247, en particulier p. 235.
9 Cette classification s’inspire, avec quelques modifications, de celle proposée par M.-L. Ollier (La forme du sens. Textes narratifs des XIIe et XIIIe siècles. Études littéraires et linguistiques, Orléans, Paradigme, Medievalia, 33, 2000, pp. 389-390 et 402-403).
10 Cf. H. Nølke, « Petite étude diachronique de or. De la déixis temporelle à la déixis textuelle », Grammatica, Festschrift in honour of Michael Herslund, H. Nølke et alii, éds., Bern, Peter Lang, 2006, pp. 393-404, en particulier p. 397 : « le ‘présentement’ temporel marqué par or dans les anciens textes se développe dans le ‘présentement’ textuel marqué par or dans les textes récents. »
11 Ainsi, M.-L. Ollier, La forme du sens..., pp. 389-390. Selon Ollier, le or frontal « ne fournit plus sa précision temporelle au verbe de l’énoncé, mais donne comme actuelle la profération de cet énoncé. » (p. 390).
12 La forme étymologique est ore (le « e » graphique représentant le [ǝ] central issu du [a] final de hora. Dans or, la chute irrégulière du [ǝ] s’expliquerait par une élision devant une initiale vocalique, tandis que ores témoigne de l’extension analogique d’un s à valeur adverbiale (cf. H. Bonnard, Cl. Régnier, Petite grammaire de l’ancien français, Paris, Magnard, 1997, 5e éd. revue, p. 32). Dans le présent article, nous nous servons de l’allomorphe or, forme subsumant aussi bien la réalisation brève que les réalisations longues.
13 Compte non tenu des accidents phonétiques entraînés par les nécessités de la versification (pour cette bipartition supposée entre or et ore, voir Ch. Marchello-Nizia : Dire le vrai : l’adverbe si en français médiéval. Essai de linguistique historique, Genève, Droz, 1985, Publications romanes et françaises, 168, p. 41).
14 Cf. l’explication avancée par C. Badiou-Monferran, postulant que la fonction de déictique temporel, « en tant que saisie plénière, convoque …. des sémiologies plus étoffées du morphème (ore et ores) » (« Quelques aspects de la concurrence des graphies… », p. 239).
15 H. Nølke par exemple reconnaît à certains emplois frontaux de or un signifié temporel évident (« Petite étude diachronique de or... », pp. 398-99).
16 Nous avons notamment considéré que, la valeur de déixis temporelle étant présente dans la majorité des occurrences, y compris celles où or fonctionne comme un adverbe de phrase, il aurait été redondant d’expliciter sa présence dans l’intitulé de chacune des deux sections consacrées à l’adverbe d’énonciation et à l’adverbe d’énoncé.
17 Les virtualités pragmatiques du morphème ne semblent pas être davantage mises à profit dans cet autre énoncé proféré par le « jongleur » : « Ne menjai ver .II. jorz entiers,/Or si menjut mout volentiers. » (2422), dans lequel or semble à nouveau garder essentiellement sa valeur circonstancielle, qui se trouve contextuellement associée à un effet de consécution (« je n’ai pas mangé deux jours entiers, et je mangerais donc à présent bien volontiers »). Cette collocation des deux morphèmes or et si ne semble donc pas vérifier les propriétés typiques de la séquence or si, récurrente dans les textes, propriétés étudiées par M.-L. Ollier (« La séquence or si en ancien français. Une stratégie de persuasion », Romania, 110, 1989, pp. 289-330 et 111, 1990, p. 1-36) et que nous résumons selon C. Buridant : cette séquence se trouve généralement dans un DD, lequel met « en présence, même virtuellement, locuteur et allocutaire, au sein d’une réplique. Dans cette réplique, ... or si a une valeur argumentative en sollicitant une adhésion de l’allocutaire, d’une manière non autoritaire et fondée, et en suggérant le plus souvent une invitation à faire où il a un intérêt certain. » (Grammaire nouvelle de l’ancien français, Paris, SEDES, 2000, § 420, 7).
18Tout en tenant compte de la présence de différents degrés de la fonction d’articulation textuelle, on peut ici rappeler la définition de Ch. Marchello-Nizia, selon qui or – adverbe de phrase « marque le seuil d’une nouvelle situation d’énonciation, il est la marque … de l’apparition d’un nouveau cadre de la locution ou de l’interlocution, il enclenche sur une temporalité différente de celle qui le précède. » (Dire le vrai..., p. 31).
19 Nous déplaçons ainsi à un niveau plus général la définition de M.-L. Ollier, qui insiste sur le phénomène de rupture opéré par or, en précisant que l’adverbe effectue un « détachement emphatique du deuxième terme d’une opposition » (La forme du sens..., p. 402). Pour l’explication du mécanisme de ce « détachement », voir la note 11, ainsi que l’article de M.-L. Ollier, « Or, opérateur de rupture ? », LINX, Linguistique de l’énonciation diachronique, 32, 1995, M. Perret, éd., pp. 13-31.
20 « Petite étude diachronique de or... », pp. 398-399.
21 Cela semble être le cas en 19-20 et en 31-33, ainsi que dans des emplois injonctifs.
22 « Avec or…, il [càd le conteur] s’attache à Renart et y attache son public, il participe à une action qu’il revit, tout en la mettant sous les yeux des auditeurs. » … « … grâce à l’adverbe or suivi du présent ou du passé composé, le conteur attire et fait vivre Renart dans le présent de ses auditeurs, …il le met, littéralement, en présence de son public… » (J. Rychner, « Renart et ses conteurs ou ‘le style de la sympathie’ », TraLiLi, 9, 1971, pp. 309-322, p. 315).
23 Or étant placé en tête d'un énoncé doté d'une forte charge illocutoire, celle de menace, la temporalité référentielle, d'ailleurs nettement affirmée, se reverse ici partiellement en une charge pragmatique : or relève donc à la fois de 2.2. et de 2.3., « adverbe d'énoncé » et « adverbe d'énonciation ».
24 Dans ce contexte d'un DD émotivement chargé, or semble à nouveau représenter une certaine valeur pragmatique, et, par conséquent, tenir en partie de la fonction d'adverbe d'énonciation.
25 La coïncidence fréquente entre la première lettre de or et les lettrines est révélatrice de la fonction structurante du morphème. De manière significative, les deux occurrences de or qui inaugurent respectivement les branches II et V, sont rehaussées par des lettrines : « Or me covient tel chose dire… » (II, 3257), « Or vos redirai d’Isengrin/Qui se remist en son chemin » (V, 5297). On retrouve des lettrines dans d’autres occurrences de or à forte fonction structurante : ainsi, dans « Or va Renart par le porpris » (II, 3363), « Or oiez, s’il ne vos anuist » (III, 3751) ou dans « Or avez bien oï conment/Sont venu en avant Renart/Et Isangrin li leus » (III, 3963).
26 Pour cette fonction de or, voir Ch. Marchello-Nizia, Dire le vrai..., p. 36.
27 Cf. encore les deux emplois suivants : « ...einz quidoit que ce fust le ber/Qu’a lui se vosist acorder./Or poez oïr grant mervaille… » (1853). Au v. 2799, la valeur de rupture véhiculée par or est soulignée par la locution de l’autre part: « Ne prist congié a son baron,/Ne l’aime mes se petit non./Or vous dirai de l’autre part/Del felon traïtor Renart,/Que Isangrin engingnié a/Par son anglois que il parla... ».
28 Tout porte à croire que cette grammaticalisation a été favorisée par la brièveté de la forme de or et par sa position frontale, favorable à la portée propositionnelle.
29 Changement qui est censé s’être effectué entre le XVIe et le XVIIe siècles. Notons cependant que le sens temporel survit dans des locutions et dans des adverbes composés, tels que d’ores et déjà, dorénavant et désormais, attestés pour certains depuis l’ancien français (ainsi, desormés et d’ore en avant – voir C. Buridant, Grammaire nouvelle..., § 418).
30 On peut certes considérer que la valeur de connecteur argumentatif (c’est-à-dire les emplois 19, 20 et, dans une certaine mesure, 17 et 18) relève déjà, sous un certain regard, du domaine pragmatique. Ceci est une question de degré et il ne serait certes pas raisonnable de vouloir tracer une frontière imperméable entre 2.2. et 2.3. Une fois de plus, la schématicité des répartitions se justifie par des nécessités de classement.
31 Pour le principe de la formation et pour la typologie des pragmatèmes, voir G. Dostie, Pragmaticalisation et marqueurs discursifs : analyse sémantique et traitement lexicographique, Bruxelles, De Boeck - Duculot, 2004, pp. 27-33, 47-48 et passim, ainsi que le numéro 154 de Langue Française (juin 2007), intitulé « Les marqueurs discursifs ».
32 M.-L. Ollier, La forme du sens..., p. 393.
33 Pour reprendre encore les termes de M.-L. Ollier, le or d'énonciation « transforme le propos auquel il sert de thème en un jugement de valeur, aussi bien assertion d’un vouloir, qu’intention ou promesse » (La forme du sens, p. 403).
34 Cf. les exemples 4 et 5 et la note 30. Cette polyvalence soulève évidemment le problème de la traduction de or pragmatème. Autant il y a de nuances pragmatiques différentes, autant il y a de traductions possibles : ainsi, on pourra employer "donc" avec l'impératif et le futur injonctif, un adverbe comme "surtout" pour traduire le renforcement assertif, "là" pour marquer l'indignation, "vraiment" pour renforcer la portée d'une figure ironique etc. On pourra également choisir maintenant, si le sens temporel demeure dominant, ou si une des valeurs acquises par maintenant en français moderne coïncide avec la nuance pragmatique exprimée par or (pour la polyfonctionnalité de maintenant en discours et pour ses différentes valeurs pragmatiques en français moderne, voir S. Mellet, « Réflexions énonciatives autour de ‘maintenant’ argumentatif. » Cahiers Chronos, 20 (« Ici » et « maintenant »), M. Vuillaume, éd., pp. 77-92, à paraître.)
35 Une marge de flou se dessine à propos des types de discours autorisant cette fonction de or, vu les difficultés qu’on éprouve pour distinguer le DIL des considérations subjectivantes émanant du narrateur : ainsi, pour J. Rychner (« Renart et ses conteurs… », p. 320), ce qu’on serait tenté de prendre pour un DIL ne serait qu’un commentaire du narrateur partageant les mouvements d’âme de son personnage (Rychner récuse ainsi, par exemple, l’analyse de H.-R. Jauss, selon qui les vers 101-105 de la branche IV transcriraient à la troisième personne un monologue intérieur de Renart : « (Or est Renars en grant balance),/Que s’il püent apercevoir/Que il les veille decevoir,/Li moine retendront son gage/O lui meïsmes en ostage,/Car felon sont a desmesure. » (texte cité selon l’éd. J. Dufournet - A. Méline, Paris, Flammarion, 1985, t. 1, br. IV, v. 100-105). En revanche, pour M.-L. Ollier, bien qu’elle prenne garde de rejeter catégoriquement l’interprétation en termes de commentaire du narrateur, l’interprétation en termes de DIL est massivement privilégiée dès que la possibilité s'en présente ; aux yeux de cette linguiste, cette distinction revêt une importance capitale, car selon elle le DIL est une condition sine qua non de la présence de or - adverbe d’énonciation. (La forme du sens…, pp. 387-404, en particulier 393-397 et p. 403). Il serait, à notre sens, peu fructueux de prétendre à continuer le débat, au vu des spécificités propres à or médiéval ainsi qu’à notre texte : en effet, la forte empathie du narrateur avec Renart, si bien montrée par J. Rychner, et, d'autre part, le vague catégoriel qui caractérise le or médiéval, rendent l’importance de cette distinction toute relative.
36 Sans que le contexte permette d’assigner à cette occurrence une valeur concessive, il est fort probable que c’est à partir d’emplois analogues (or de confirmation placé dans une protase hypothétique), que cette valeur a évolué. Dans ce type d’emplois conjonctifs, en effet, or fonctionne comme un renforçateur assertif spécifique, destiné à « [souligner] la virtualité d’un procès jugé inefficace à un moment virtuel x » (C. Buridant, Grammaire nouvelle..., § 566, c). Pour la valeur concessive de la locution se ... or, voir Ph. Ménard, Syntaxe de l’ancien français, Bordeaux, Bière, 1994, 4e édition revue, § 447, où l’on trouve l’exemple suivant : « S’ele estoit or bien sainte feme,/S’en ferïez deable fin ». (Joufroi, 1707).
37 Dans le même temps, or renforce la modalité injonctive véhiculée par l’impératif soiez.
38 On a là à notre sens deux phases différentes de la pragmaticalisation de or(e) : la première occurrence, hautement subduite, représente le produit final du processus, tandis que la deuxième (ore), essentiellement temporelle, ne se situe encore qu’à son début. (Nous nuançons là quelque peu l’opinion de Ch. Marchello-Nizia, pour qui cette combinaison de or antéposé et de ore postposé au verbe serait un indice d’une valeur temporelle de ore postposé (en l’occurrence, il s’agirait d’une valeur anaphorique, ce ore étant censé reprendre « un complément de temps préalablement énoncé », localisant des procès précédemment mentionnés) (Dire le vrai..., p. 40).
39 La forme du sens..., p. 440.
40 Dans l’hypothèse de la présence d’un effet ironique. Dans l’interprétation contraire (où bon serait à prendre comme un vrai mélioratif), il faudrait réviser la définition de M.-L. Ollier, pour ne voir en or qu’un marqueur de la surprise.
41 Ph. Ménard commente ainsi cette valeur de or(e) dans l’interrogation : « L’interrogation qui traduit la surprise, l’incrédulité, l’ironie, la protestation devant une idée que l’on repousse est exprimée à l’aide des adverbes si « alors », donc, ore : « Fix, car pren tes armes, si monte el ceval, si deffent le terre et aïe tes homes… - Pere, fait Aucassins, qu’en parlés vos ore ? (Aucassin, 2, 20 : « Père, répond Aucassin, que dites-vous là ») ? (Syntaxe de l’ancien français, § 99). Voir aussi notre exemple 23.
42 Dans la traduction, ce genre de or en réplique peut être rendu à l’aide de l’adverbe « là », qui a pour fonction de marquer une « opération de dissociation », permettant d’instaurer deux espaces énonciatifs différents (sur la proposition de M.-L. Ollier, dans La forme du sens..., p. 444).
43 Le or injonctif semble avoir été usuel encore à l’époque de Malherbe (selon C. Badiou-Monferran, « Quelques aspects de la concurrence des graphies ore, ores et or au début du XVIIe siècle : distribution sémiologique et recomposition du système des connecteurs », p. 240).
44 Voir à ce sujet O. Soutet, « Les tours injonctifs dans Raoul de Cambrai », Raoul de Cambrai, entre l’épique et le romanesque, Actes du colloque de l’Université Paris X, le 20 novembre 1999, Littérales 25, 1999, p. 155-166, en particulier pp. 162-164 : « ...de sa valeur déictique de base ('maintenant') n’est retenue que l’idée d’immédiateté, d’où procède son rôle de morphème de renforcement d’un constituant verbal (impératif ou subjonctif) orientant déjà l’énoncé dans la direction de l’injonction » (p. 163). L’interprétation en termes d’une nuance exhortative issue par subduction du signifié de contemporanéité nous semble être plus plausible que l’explication faisant dériver la valeur injonctive de or de sa valeur logique de conséquence (hypothèse avancée par C. Buridant, Grammaire nouvelle, § 419, 7), quoiqu’une nuance de consécution ne soit pas absente de certains tours injonctifs en or.
45 O. Soutet, « Les tours injonctifs dans Raoul de Cambrai », p. 164.
46 Nous désignons par ce terme la polysémie en langue, mais également la polysémie en discours, qui, à la différence de la polysémie en langue, n’est pas fondée sur des signifiés pleinement lexicalisés/grammaticalisés.
47 Pour la « déixis textuelle », voir P. Charaudeau et D. Maingueneau, Dictionnaire d’analyse du discours, Paris, Seuil, 2002, p. 160, cité par H. Nølke, p. 402. 
48 Compte non tenu des archaïsmes. La datation est de C. Badiou-Monferran (« Quelques aspects de la concurrence des graphies... », p. 240).
49 Cette hypothèse a été ébauchée par H. Nølke (« Petite étude diachronique de or », pp. 401-402). Une conclusion analogue a été formulée par C. Badiou-Monferran (« Quelques aspects de la concurrence des graphies... », p. 246), selon qui la grammaticalisation de or serait liée à l’accroissement de l’intérêt porté à la fonctionnalité « intralinguistique » du langage (c’est-à-dire, en principe, à la cohésion textuelle) aux époques classique et préclassique.

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Pour citer cet article

Bohdana Librova, « Un aspect de l’actualisation du récit dans la branche I du Roman de Renart : l’adverbe or entre temporalité et argumentation », paru dans Loxias, Loxias 19, mis en ligne le 28 février 2008, URL : http://revel.unice.fr/loxias/index.html/index.html?id=2105.


Auteurs

Bohdana Librova

Bohdana Librova est maître de conférences en langue française médiévale à l’Université de Nice, membre du laboratoire Bases, Corpus, Langage (UMR 6039, équipes « Linguistique énonciative » et « Dialectologie romane »). Ses recherches portent sur la linguistique textuelle de l’ancien français, ainsi que sur la sémantique des métaphores et des séquences figées, en français médiéval et en diachronie. Elle a également traité de la représentation des animaux dans les littératures française et latine du Moyen Âge.