Alliage | n°72 - Novembre 2013 Technobuzz 

Tudor B. Ionescu  : 

Connaissance socialement robuste : le jeu des perles de verre et les modes à la mode

Plan

Texte intégral

Dans les sociétés occidentales contemporaines, les récits d’avenirs technoscientifiques sont de plus en plus construits autour de slogans qui semblent avoir la capacité de se propager par eux-mêmes. Des mots à la mode tels que technologies vertes, aliments bios, énergie durable, ou société de la connaissance sont familiers à la plupart des citoyens qui suivent le discours des experts dans des contextes politiques. Les gens intègrent souvent ces mots à la mode dans leur vocabulaire de tous les jours, sans ressentir le besoin de leur prêter un signification profonde. Leur sens se dégage du contexte des récits où ils sont intégrés plutôt que d'une définition précise. Or c’est précisément leur présence dans le discours public et la conversation courante qui dessine le sens de ces mots à la mode.

Mais d’où proviennent ces expressions à la mode et, peut-être plus important encore, à qui peut-on en accorder la paternité ? S'agit-il d'individus, de collectifs de pensée, d’hommes politiques, d’experts, ou d’une combinaison de ceux-ci ? Quels sont les mécanismes par lesquels ces mots acquièrent du sens, du pouvoir, et de l'acceptation ? Pour répondre à ces questions, notre article propose un cadre d'analyse pour l'étude de la nature et des finalités des mots à la mode basé sur une interprétation d’un roman utopique de Hermann Hesse, Le jeu des perles de verre.1 Afin d’éprouver son efficacité, le cadre sera utilisé pour analyser un slogan apparu dans la communauté des chercheurs en science sociales il y a environ quinze ans : « connaissances socialement robustes ».

Des mots objets-frontières

Massimo Bucchi2 utilise le terme « objets-frontières » pour caractériser des phrases qui attirent l’attention des experts et des profanes en raison de leur capacité à brouiller les frontières entre disciplines dures et hiérarchies politiques. Dans cette perspective, les objets frontières jouent un rôle essentiel en permettant aux experts et au public, ainsi qu’à toutes les couches politiques et aux divers étages du management de se comprendre mutuellement. Bucchi, comme Star et Griesemer avant lui,3 souligne que les objets frontières jouent un rôle positif dans le discours commun ainsi que dans la conversation banale car ils permettent la communication entre domaines et disciplines disparates, bien que cette communication ne puisse se fonder sur des définitions précises des objets frontières sur lesquelles elle s'appuie. Leur signification semble être laissée intentionnellement floue.

La théorie des objets-frontières s’applique particulièrement bien au cas des projets européens de recherche et développement. Le financement peut être obtenu par des entreprises individuelles et des instituts de recherche ou par des groupes d’entreprises en suivant une procédure bien établie de demande de subvention. Dans ce contexte, le dialogue entre les auteurs des projets qui doivent convaincre les donneurs de subventions (et plus tard, les gestionnaires de la subvention, si la demande est approuvée) et les techniciens de ces entreprises s’établit sur des objets-frontières offrant un langage commun. Par exemple, pour un technicien, l’expression à la mode et l'idée de smart grids (réseaux intelligents) évoquent un système de contrôle automatisé ultra-rapide pour des réseaux d'électricité de taille petite et moyenne, qui permet aux consommateurs traditionnels d’alimenter le réseau électrique avec de l'énergie qu'ils produisent grâce à des cellules photovoltaïques ou d'autres moyens.4 Le manager cependant peut utiliser ce terme, qu’il associe vaguement avec le concept d’énergie verte, sans savoir ce qui se cache derrière, et sans s’intéresser aux aspects de l’automatisation du réseau intelligent ou des moyens par lesquels l'énergie verte peut être introduite dans le réseau. Le directeur, quant à lui, voit dans les smart grids une opportunité d’obtenir des profits qui pourraient être investis dans le développement de produits inscrits sur la feuille de route de l'entreprise. le haut management y voit une pièce maîtresse dans la stratégie pour relever les grands défis européens à long terme, tels celui posé par les réseaux intelligents d’électricité et d'énergie verte.

Ces subventions représentent une injection financière dans les projets de l'entreprise ou même dans les poches des actionnaires. Ici, le rôle de l’auteur d’une proposition de recherche est de cartographier les intérêts de la société de façon qu’ils cadrent avec les objectifs spécifiques du texte de l'appel à projets. C’est l’un des tours de magie qu’accomplissent les buzzwords. Le syntagme « réseaux intelligents d’électricité » crée ainsi une synergie entre tous les acteurs, bien que le sens de ce mot à la mode varie considérablement d’un acteur à l’autre. Lorsque les groupes d’entreprises et d’instituts de recherche affiliés à des universités forment des consortiums afin de demander conjointement une subvention de recherche, chaque partenaire compte sur le fait qu'une rumeur similaire sur les réseaux intelligents d’électricité circule déjà chez l’autre partenaire, faute de quoi ils ne seraient pas intéressées à entrer en collaboration. Ainsi, « réseaux intelligents d’électricité » devient un mot d'ordre pour créer un terrain d'entente et faciliter la collaboration entre différents partenaires.

La présentation des programmes-cadres de l’Union européenne, point de départ pour toutes demandes de subventions européennes, fait un usage intensif de slogans et de mots à la mode. Prenons l'exemple de la présentation officielle de l'initiative Horizon 20205 censée introduire le prochain programme-cadre européen. Dans les vingt premières diapos, on trouve des dizaines de slogans futuristes tels que « l’union pour l'innovation », « excellence scientifique », « industries compétitives », « société meilleure », « recherche de ciel bleu », « énergie propre, fiable et efficace », « transport vert et intelligent » et ainsi de suite... Même si le texte des appels à projets est plus précis, plus articulé, que ce nuage de mots à la mode, en l’introduction des appels à projet contient toujours une poignée de mots à la mode. Entreprises et universités les gobent sans esprit critique afin d'obtenir une part des fonds de r&d alloués par l’Union européenne. Mais tout ce buzz futuriste a-t-il des assises réalistes ou n’est-ce qu’une projection utopique ?

La métaphore du jeu des perles de verre

Le jeu des perles de verre, dont la publication précède de peu le prix Nobel de littérature attribué à Herman Hesse en 1946, peut être lu comme une version moderne de l’allégorie baconienne de la Nouvelle Atlantide. L'histoire se déroule en un endroit appelé Castalia, dans un avenir éloigné d’environ quatre siècles. En tant que membres d’une société savante quasi monastique, les Castalins consacrent leur temps et leurs efforts intellectuels à maîtriser le jeu des perles de verre. Le narrateur suit Joseph Knecht dans son apprentissage auprès du Magister Ludi, le maître du jeu.

Veuillez retrouver les illustrations sur la version imprimée.

Le jeu des perles de verre est dit apparaître au xxie siècle en Angleterre et en Allemagne. Il permettait à des musiciens et musicologues d’entraîner leur mémoire et de s’exercer au contre-point. Dans sa forme originale, un joueur introduisait un thème à partir d'une composition classique et le suivant continuait sur un thème tout en contraste. Tandis que cette séquence fondamentale du jeu était répétée, le parcours du jeu était enregistré sur un cadre boulier à l’aide de perles de verre coloré correspondant aux notes des thèmes musicaux sélectionnés. Plus tard, des mathématiciens ont adapté le jeu, en utilisant des séquences de symboles qui représentaient des énoncés mathématiques au lieu de notes. Le jeu a ensuite été adopté par d'autres disciplines scientifiques : des philologues, qui l’utilisèrent pour résoudre des problèmes linguistiques, et des architectes pour combler le fossé entre arts visuels et mathématiques. Dans sa forme définitive, le jeu utilise un langage de symboles et de formules, les mathématiques et la musique, mais il est devenu contemplatif plutôt que compétitif. D’après John Wilson,6 qui décrit la façon dont il a pu être joué, cet ouvrage surmonte la fameuse fracture intellectuelle et institutionnelle entre sciences exactes et sciences humaines, popularisée par le livre de C. P. Snow sur Les deux cultures. Les deux cultures sont réconciliées dans l'abstrait du jeu des perles de verre.

Une analogie entre le jeu des perles de verre et le fonctionnement de la communauté scientifique moderne a été esquissée à des fins critiques par David F. Horrobin, chercheur en biomédecine.7 Il considère Castalia comme une « métaphore merveilleuse de la recherche médicale et pharmaceutique moderne ».

Elle

« recrute les jeunes les plus réfléchis et les plus savants, les éduque à merveille, et les persuade que la plus grande réalisation de l'esprit humain est de se livrer indéfiniment au jeu compliqué et subtil des perles de verre. »

Selon Horrobin, le problème est que, contrairement à l’auto-suffisance dont jouit la fraternité de Castalia, la communauté de recherche biomédicale doit tirer son financement du monde réel. Les « prêtres-scientifiques », pleinement conscients de l’importance du cordon ombilical qui les rattache au monde réel, s’arrangent pour attirer des fonds importants en promettant des applications merveilleuses et en exagérant l’importance de résultats modestes. Mais tout ce battage de promesses illusoires ne saurait faire oublier que ce jeu moderne de perles de verre a aussi peu de relation avec la vraie médecine et le monde qui nous entoure que celui de la Castalia de Hesse.

En s'inspirant de la métaphore castalienne pour critiquer certaines orientations de la recherche biomédicale, Horrobin a suscité un vaste débat sur le niveau de complexité le plus adéquat pour une recherche fructueuse.8 Mais il a aussi jeté les bases d'un cadre d'analyse pour l'étude des politiques de financement de la recherche et du rôle des slogans et mots à la mode dans ce contexte. Considérons les mots à la mode comme des perles de verre représentant des thèmes fondamentaux de la musique, des mathématiques ou d’autres disciplines. Les thèmes eux-mêmes sont des motifs de base issus de divers registres lexicaux qui peuvent être agencés pour former des colliers de perles de verre. Il est alors possible de décrire le paysage mis en place par le programme-cadre Horizon 2020 de l’Union européenne en s’inspirant de la théorie de l'acteur-réseau.9

Vu à travers le prisme de la métaphore des perles de verre, un récit comme le programme-cadre Horizon 2020 compose un collier avec des perles provenant de divers domaines disciplinaires. Le mot d'ordre central serait quelque chose comme « l’union pour l'innovation » et sur ce motif on ajoute des perles comme « société meilleure », « industrie compétitive », « énergie propre » ou bien « transport intelligent ». Le programme Horizon 2020 est le résultat final d'un jeu des perles de verre disputé au niveau le plus haut par des chercheurs et des responsables politiques en charge de la politique européenne de la recherche.

Toutefois, le modèle castalin de Horrobin reste approximatif. Il ne permet pas de comprendre pourquoi certains de ces récits illusoires font leur chemin dans l’esprit des citoyens, qui acceptent plus ou moins consciemment que l'argent du contribuable soit dépensé à des fins telles que une « industrie compétitive » ou « innovation responsable »,10 en vue d’une « société meilleure ». Il faut donc pousser plus avant la recherche en étudiant les unités élémentaires de ces expressions à la mode (à savoir les thèmes composant du collier).

Sur l'acceptation sociale des mots à la mode

Même si l’on peut se demander si et pourquoi tout le monde affectionne les mots à la mode, il est incontestable que beaucoup de gens les utilisent plus ou moins sciemment dans la conversation courante. Ces mots à la mode servent aussi largement dans les campagnes de publicité pour façonner l’image des produits comme les aliments bios, l'énergie verte ou des technologies intelligentes aussi bien que les grands programmes-cadres tel Horizon 2020. Comme nous l'avons vu, le jeu des perles de verre repose sur la juxtaposition de thèmes issus (à l'origine) de la musique et des mathématiques. Or selon Platon et Aristote la musique est

« liée à la complexité de la nature humaine et à la perfection de la nature elle-même. »11 

Tandis que Platon faisait valoir que l'on est capable de reconnaître dans la musique des émotions comme le courage, la sobriété, la libéralité, ou la grandeur d'âme, Aristote ajoutait que le mouvement de la musique est si proche de nos propres émotions que certaines personnes l’identifient avec l'âme elle-même. La musique imite donc les émotions humaines et pour cette raison, elle n’a d’influence que sur les émotions. C’est dire que la musique ne peut toucher directement la raison, mais faciliter la communication et l’assimilation des connaissances en faisant appel à la familiarité de l'émotion.12 En combinant des thèmes de la musique (imitation de l'émotion) et des thèmes de mathématiques (quintessence de la raison), le jeu des perles de verre devient un système de transmission du savoir par l'émotion qui transcende le partage des facultés humaines. Avec l’adoption du jeu par d’autres disciplines, de nouveaux colliers ont vu le jour qui rendent les thèmes scientifiques plus accessibles aux citoyens ordinaires.

[Image non convertie]Dans le cas des buzzwords qui entourent les technosciences, des thèmes de science ou de technologie (objet d'intérêt en général) sont souvent associés à des mots à forte résonance émotionnelle. Comme le note Gerbner,

« le marché populaire pour la science est un mélange de grands espoirs, de peurs, d’intérêts utilitaires, de curiosités, de préjugés anciens et de superstitions. »13

Par exemple, la force d’expressions comme « énergie verte », « technologies intelligentes », « guerre contre le cancer », ou « société de la connaissance » vient de ce qu’elles juxtaposent un terme technique et un terme suscitant des émotions profondément ancrées en l'homme. De telles expressions mettent en jeu des éléments qui, dans les sociétés occidentales préchrétiennes, étaient traditionnellement arbitrés, protégés, ou patronnés par les dieux. Par exemple, dans la religion romaine, les capacités rationnelles de l'homme étaient attribuées à leur âme, qui était un génie. En fait, cette croyance suppose que tout avait une certaine forme de génie, qui incarnait la présence du divin dans les personnes comme dans les choses. Or, ce culte antique du génie pourrait bien aujourd'hui former la base de l’intelligence prêtée aux technologies. De même, la guerre contre le cancer peut se placer sous le patronage de Mars, le dieu romain de la guerre. Les technologies vertes et le développement durable tombent sous la tutelle de Silvius, le dieu des bois et des champs, la société de la connaissance sous la protection de Minerve, déesse de la sagesse et de la connaissance…

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Les sociétés occidentales réactivent néanmoins d’antiques figures et postures issues de mythologies polythéistes en dépit de l’effacement du sacré. Dans ce contexte de déficit spirituel, les mots à la mode dotés d’une résonance émotionnelle se chargent de pouvoirs d’attraction qui manquent aux termes modernes « énergie », « technologies » et « cancer » employés seuls. Dans la même ligne de raisonnement, le culte européen de l'union pour l'innovation, patronné par les dieux de la triade du Capitole romain (Jupiter, Junon et Minerve), ravive des croyances et des craintes ancestrales qui viennent alimenter l’imaginaire d’innovations technologiques miraculeuses, promesses d’abondance, santé, longévité et bien-être pour tous. Cela pourrait être l’un des mécanismes expliquant comment les perles de verre modernes, manipulées par les maîtres du jeu, parviennent à émouvoir des foules, prêtes à sacrifier l'argent des contribuables au service de causes aussi creuses que « l'union pour l'innovation » ou autres slogans.

Le Magister Ludi de la « connaissance socialement robuste »

La « connaissance socialement robuste » est une expression inventée par Helga Nowotny, Peter Scott et Michael Gibbons au tournant du siècle dernier. Ce concept est introduit dans deux livres influents qui décrivent le contraste entre l’actuel régime de production des connaissances (mode 1) et le nouveau système qui se met en place (mode 2).14 La « connaissance socialement robuste » est appelée à remplacer (à dépasser et englober, comme nous le verrons plus loin), la notion commune de « connaissance fiable »15 en lien avec le changement de régime de production des connaissances. Le mode 1 représente le système traditionnel de production des connaissances scientifiques (parfois désigné par la métaphore de « la tour d'ivoire » des scientifiques) ancré dans une société qui croit encore au déterminisme technologique. Le mode 2, un système bidirectionnel, où la production des connaissances est très sensible au contexte social qui participe à la construction du savoir. Le passage du mode 1 au mode 2 marque la fin du contrat social pour la science, établi au lendemain de la seconde guerre mondiale et inspiré du rapport de Vannevar Bush Science, the Endless Frontier.

Bush souhaitait que le gouvernement continue en temps de paix de patronner et contrôler la recherche scientifique, comme il l'avait fait pendant la guerre.16 Par contraste, Gibbons demande explicitement un nouveau contrat social pour la science, qui efface la démarcation nette entre science et société instaurée dans le mode 1.17 La « connaissance socialement robuste » est donc le produit d’une coévolution de la science et de la société. Tandis que la connaissance fiable produite dans les tours d'ivoire ne communique jamais efficacement avec le reste du monde, selon Nowotny et al., la connaissance socialement robuste émergera d'une interaction beaucoup plus intense de la science et de la société. Les scientifiques descendront de leur tour d'ivoire vers l'agora — un hypothétique lieu de négociation de la connaissance scientifique. Les scientifiques vont ensuite ouvrir au public le panier de la connaissance de telle sorte que les citoyens auront la possibilité de prendre la parole pour exiger plus de transparence et de responsabilité en ce qui concerne l’utilisation de l’argent public. Selon Nowotny, Scott et Gibbons, la robustesse sociale de la connaissance ne doit pas être confondue avec son acceptabilité sociale. Elle s’en distingue, car elle est déterminée par une connaissance du social et soumise à de fréquentes évaluations.18

Bien que le buzzword « connaissance socialement robuste » soit lié au projet de « société de la connaissance », il cible un public beaucoup plus réduit que d’autres mots à la mode, plus terre à terre. L’expression « connaissance socialement robuste » ne compte pas plus d’un ou deux milliers d’usagers, chercheurs ou étudiants en sciences sociales. Donc, contrairement aux mots à la mode précédemment évoqués, celui-ci présente la particularité de circuler dans un cercle restreint de chercheurs qui, en outre, sont eux-mêmes appelés à étudier la production de buzzwords dans les technosciences. Leur démarche réflexive ne les empêche pas de recourir à ces mots à la mode afin de pousser leurs propres thèmes de recherche sur l'agenda européen. Un tel buzzword peut-il être aussi efficace que les autres ?

Point de vue critique sur « la connaissance socialement robuste »

Bien que Sheila Jasanoff attribue un rôle potentiellement important au concept de robustesse sociale dans l’ambitieux projet d'évangéliser les masses en vue d’une gouvernance participative en Europe, d'autres chercheurs semblent avoir plus de mal à trouver le sens de cette expression. Berth Danermark, auteur d’une recension du livre de Nowotny, Scott et Gibbons, y relève plusieurs incohérences de logique et de style.19 Par exemple, les auteurs insistent sur le caractère relationnel mais non relativiste de la connaissance socialement robuste alors que pour Danermark, les deux signifient la même chose. La « robustesse sociale » n’est pas clairement distinguée de l’« acceptabilité sociale » et, globalement, le livre manque de clarté et de rigueur. Cette critique acerbe montre que le concept de « connaissance socialement robuste » ne parvient pas à toucher la corde sensible d'un expert dans le domaine. Il peine à se diffuser dans la communauté, où il aurait néanmoins pu être adopté s’il avait été exprimé par d'autres mots.

Peter Weingart propose une analyse critique plus fouillée du slogan « connaissance socialement robuste ».20 Il souligne pour commencer que cette expression est avant tout un dispositif rhétorique et que les auteurs ne font rien pour en préciser le sens. Selon Weingart, comprendre ce qui se cache derrière le concept de « contextualisation » est essentiel dans l'effort de comprendre ce qu’est la « connaissance socialement robuste » :

« [P]lus un domaine scientifique est fortement contextualisé, plus robuste est la connaissance qu’il peut produire. »

Tout comme Danermark, Weingart déplore le manque de distinction entre « robustesse » et « acceptabilité » ainsi que entre « relativiste » et « relationnel ». Mais il est clair pour Weingart que la « connaissance socialement robuste » est liée à l'établissement des priorités et des programmes de financement. Le dilemme foucaldien « du pouvoir et de la vérité » constitue le ressort de la robustesse sociale : « [L]e terme « connaissance socialement robuste » englobe le dilemme et suggère de manière programmatique sa solution ». Selon Weingart, le vague même des termes impliqués explique la popularité du slogan parmi les chercheurs sts et les praticiens de la politique scientifique car il crée l’illusion que le dilemme peut être résolu. Si les concepts étaient plus concrets et avaient une meilleure prise empirique, le message serait plus décevant. Ces deux observations sur le caractère illusoire des mots à la mode et leur capacité à se diffuser grâce à l'imprécision de leur signification fournissent la connexion avec la métaphore du jeu des perles de verre.

Weingart identifie en fait la sainte trinité des qualificatifs caractérisant les mots à la mode : vagues-populaires-illusoires. En soulignant que la « connaissance socialement robuste » à la fois pose la question du pouvoir et de la vérité aussi bien que la réponse à cette question, Weingart révèle le thème central de la construction de la « connaissance socialement robuste ». C’est le maillon faible qui ne peut tenir tout le chapelet des perles de verre. Est-ce un mauvais coup dans ce jeu ou est-ce dû à l’inadéquation de la version castalienne du jeu en conditions réelles ? La racine du problème semble être la fracture ontologique entre Castalia et le reste du monde. Comme le note Weingart, le dilemme du pouvoir et de la vérité ne peut être résolu, car il a été conçu sur la base d’une différenciation fonctionnelle entre les deux termes et peut être traité uniquement par la voie du discours. D’où le caractère essentiellement normatif de la formule « connaissance socialement robuste ». À Castalia, en revanche, où les habitants évoluent dans un système de castes, suggéré par le nom de Castalia, pouvoir et vérité se rejoignent. Cela explique pourquoi la « connaissance socialement robuste » englobe à la fois le dilemme et sa solution : les joueurs habiles sont capables de résoudre tous les dilemmes du monde réel grâce à la capacité du jeu à représenter l'ensemble de la connaissance du monde, mais cela ne fonctionne qu’à Castalia. Le magister ludi n’affronte le dilemme que lorsqu’il songe à quitter Castalia, tout comme Joseph Knecht, le personnage principal du livre de Hesse.

Que se passe-t-il quand un magister ludi retourne au monde réel ? Le jeu des perles de verre va-t-il aider à résoudre un dilemme en tournant des thèmes mathématiques et musicaux, ou philologiques et architecturaux comme à Castalia ? Apparemment non, comme le suggère l'analyse de Weingart. Et il rejoint à cet égard le commentaire d’Albertus Secundus, l'un des personnages évoqué par Hesse, sur l’abime qui sépare les joueurs du monde de l’histoire :

« D’une certaine façon et pour des personnes à l’esprit léger, les choses inexistantes peuvent être représentées par des mots, plus facilement et de façon irresponsable, que les choses qui existent, tandis que pour l’historien consciencieux et sérieux, c’est justement le contraire qui est valable. »21

Les chercheurs comme Weingart jouent le rôle des « historiens sérieux et consciencieux » qui s’engagent à critiquer les « esprits légers » (peut-être les chercheurs en sciences sociales) qui adoptent facilement les mots à la mode, tout en créant de nouveaux slogans, qui propagent « de façon irresponsable » des choses inexistantes. Cependant Albertus Secundus ajoute :

« Rien n’est plus difficile et pourtant, rien n’est plus nécessaire que de parler de certaines choses dont l’existence n’est ni démontrable ni probable. Le simple fait que des personnes sérieuses et méticuleuses les traitent en tant que choses existantes les amène plus près de l’existence et de la possibilité d’être nées. »

Les promoteurs de « la connaissance socialement robuste » comme des autres mots qui bourdonnent dans les technosciences sont en fait des déserteurs de Castalia qui ont suivi le conseil de Plinio Designori. Dans le livre de Hesse, lors d’une brève visite à Castalia, Plinio dénonce à tout propos le manque de contacts avec le monde réel. Certains joueurs aux perles de verre décident alors de quitter l'isolement de leur société monastique pour s’engager dans la politique de la science. Ces partisans de choses « dont l'existence n'est ni démontrable ni probable » forment des coalitions avec des « hommes sérieux et consciencieux ». Ils traitent les choses non-existantes comme si elles existaient, et (parfois) réussissent à les amener « un peu plus près de l'existence et de la possibilité d'être nées ». Cet extrait du travail de Hesse soulignant le fossé entre le monde sans dilemmes de Castalia et le monde réel, hérissé de contradictions et problèmes insolubles, nous aide à mieux cerner le pouvoir et les limites des mots à la mode en général. Les joueurs aux perles de verre qui choisissent de quitter Castalia continuent de pratiquer le jeu dans le monde réel aussi.

En faisant cela, ils ouvrent de nouvelles voies : le jeu lui-même est affecté par la poussière du monde réel et les perles de verre ne brillent plus de perfection. Elles sont abîmées par les dilemmes profondément ancrés dans la culture humaine aussi bien que par les « historiens sérieux et consciencieux » qui traitent les perles de verre elles-mêmes comme des choses non existantes. Dans l'ensemble, les maîtres du jeu semblent quand même tirer quelques bénéfices de cette pratique du jeu dans le monde réel. Tant que « les historiens sérieux et consciencieux » ne révèlent pas le raisonnement alambiqué derrière les colliers de perles de verre brillantes et colorées, les « hommes sérieux et consciencieux » ont tout le temps de les adopter et de les propager grâce à leur caractère vague, irrésistible et illusoire.

L'interprétation de chaque allégorie littéraire porte en elle-même une dose d’incertitude et de spéculation et doit donc être laissée ouverte à la discussion. Cependant, la saveur de perles de verre de ce que Weingart appelle « un ensemble considérable de métaphores [qui] continuent d’être inventées » met les mots à la mode dans une lumière qui augmente notre capacité de comprendre leur nature aussi bien que leur pouvoir d’action. Selon Weingart, la production continue de ces métaphores sert « la gestion ou la médiation de la frontière » entre le pouvoir et la vérité, ce qui rappelle le modèle des objets-frontières. À terme, ce « brouillage des frontières » crée l'illusion que le dilemme peut effectivement être résolu. Si cela ne fait pas partie d'un jeu, c’est l'œuvre des sophistes modernes.

Un casse-tête

Une fois posé ce cadre interprétatif, il reste une question importante : pourquoi la « connaissance socialement robuste » n’est-elle pas parvenue à atteindre une masse critique de partisans dans le domaine des sciences sociales ? En utilisant le cadre proposé, on peut donner une réponse à cette question. Dans une certaine mesure, cet exercice rappelle l’effort de résoudre un casse-tête du genre de ceux que l’on trouve dans les journaux et il doit donc être abordé dans cet esprit.

Tout d'abord, comme nous l'avons vu chez Weingart et Jasanoff aussi bien que dans notre propre expérience, les mots à la mode ne viennent jamais seuls. Les plus efficaces d’entre eux font partie d'un nuage ou d'une constellation d'autres mots à la mode, ou « d’un ensemble considérable de métaphores », d’une chaîne de perles de verre. Le jeu commence par la sélection d'un thème d'une certaine discipline. Dans le cas de la « connaissance socialement robuste », le jeu semble avoir commencé par le thème de la connaissance. Tout au long de l'histoire, bien des jeux ont dû commencer avec ce thème, y compris celui qui a donné la « connaissance fiable ». En fait, les auteurs du slogan « connaissance socialement robuste » ont cherché à remplacer la connaissance fiable par quelque chose de nouveau censé refléter les pratiques scientifiques du mode 2. Weingart conseille de chercher d'abord à comprendre ce que l'on entend par « contextualisation » afin de comprendre la « connaissance socialement robuste ». Le thème de la contextualisation est le thème fondamental sur lequel se tisse le concept et c’est un bon candidat à la juxtaposition avec la notion abstraite de connaissance dans la construction de cette chaine naissante de perles de verre. Cependant, la « connaissance contextualisée » existait déjà dans le langage des sciences sociales. Mettre des faits, des gens, des événements, des discours, etc. dans leur contexte original est l'une des techniques fondamentales de l'analyse quantitative et qualitative à la fois. Pour cette raison, le thème de la contextualisation doit avoir touché la corde émotionnelle de nombreux chercheurs en sciences sociales. Sa juxtaposition avec « connaissance » repose sur l’argument raisonnable qu'il existe de la connaissance utilisable et peut-être valable seulement dans un contexte limité. Les mathématiques et la musique de « la connaissance contextualisée » semblent en bon état.

Alors, pourquoi les joueurs décident-ils de ne pas utiliser le terme « connaissance contextualisée » dans leur livre et d’en proposer un autre ? Peut-être ont-ils voulu lier plus étroitement ce thème à d’autres aspects du mode 2, qui implique l'intégration sociale des connaissances scientifiques. Cette connexion peut se réaliser en ajoutant le thème social au jeu, ce qui aurait donné « la connaissance socialement contextualisée ». Cependant, les joueurs ne se contentent pas de ce collier de perles de verre relativement beau et continuent à jouer en raison d'une dérogation aux règles de la version castalienne du jeu. Si à Castalia, le jeu est pratiqué dans un esprit contemplatif, dans le monde réel il devient compétitif. Or la compétition exige des joueurs qu’ils surpassent tous les termes existants. Aussi les joueurs mettent-ils sur la table le thème plus fort et moins commun de la robustesse pour remplacer la contextualisation. En latin, le mot robuste, généralement associé à des choses en bois, signifiait à l'origine fort et dur.22 Aujourd'hui, il est surtout utilisé dans les disciplines d'ingénierie (par exemple, systèmes robustes, tests de robustesse etc.), de biologie (en référence à la robustesse des mutations), de morphologie, et d'autres domaines pas nécessairement axés sur la sphère de sciences sociales. Par contraste, en latin contextus désigne le résultat de « joindre ensemble » des tissus.23

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Robustesse, cette propriété tellement sèche et technique des choses, pouvait-elle jamais être en mesure de surclasser contextualisation — un concept si cher aux sociologues et si profondément relationnel dans son sens originel ? La notion de robustesse s’est révélée incapable de toucher la corde sensible des spécialistes, car elle suggère un type de connaissance fort, inertiel, et contraire à la féminité de la connaissance elle-même. Les joueurs visaient peut-être la triade capitoline (Jupiter, dieu du pouvoir et de l'État, Minerve, patron de la connaissance, et Junon, épouse de Jupiter et protectrice des femmes) en choisissant ce terme. La connexion avec la triade capitoline aurait pu servir l'idée de gouvernance participative. Pourtant, avec Minerve encadrée par les deux dieux romains les plus puissants, la triade capitoline représente un témoignage antique, du fait que dans la gouvernance des empires, le pouvoir se confond avec la vérité, ce qui nous ramène au problème identifié par Weingart : la « connaissance socialement robuste » englobe à la fois le dilemme du pouvoir et de la vérité, et sa solution. Quoi qu'il en soit, en tant que mot à la mode, elle n'a pas eu l'impact escompté.

Un casse-tête ancré dans le jeu des perles de verre n'a pas de solution unique, comme la plupart des jeux d’échecs. Peut-être les auteurs du slogan « connaissance socialement robuste » n’ont-ils jamais pensé à l’alternative de la « connaissance socialement contextualisée », voire n’ont-ils jamais songé à remplacer la contextualisation par quelque chose de plus attrayant pour les chercheurs en sciences sociales. À la vérité il est impossible de rejouer une partie du jeu des perles de verre parce que, comme le souligne Hesse, une partie ne partage rien avec une autre. Par ailleurs, habituellement il n’y a même pas de récits d'histoire précis de ces jeux. On a voulu montrer que chaque fois qu’est jouée une partie du jeu des perles de verre, les joueurs espèrent donner naissance à un nouveau collectif de pensée. La chaîne de perles de verre qui émerge d'un tel jeu peut être considérée comme un style de pensée spécifique, qui dure le temps d’un jeu. Pour que le style de pensée survive au-delà du jeu d’origine, il est nécessaire que d'autres joueurs le reprennent et qu’ils adhèrent au collectif de pensée en question. Idéalement, de nouveaux joueurs continueront à développer ce style de pensée en faisant redémarrer le jeu au point où il a été laissé par les joueurs précédents.

Conclusion

En mobilisant la métaphore d'un roman utopique de Hesse, cet essai a proposé une méthode plutôt inhabituelle pour aborder quelques questions relatives à la fabrication, la nature et la puissance des mots à la mode dans la société occidentale moderne. On peut faire valoir qu’en utilisant des métaphores pour élucider des problèmes complexes, on ne peut que faire du tort à soi-même et aux autres, plutôt que d'attaquer sérieusement un problème avec des conséquences pour le monde réel. Ces conséquences touchent la politique européenne de la science et de l'innovation et les dispositifs rhétoriques qu'elle utilise. On sait que dans les moments critiques, les romans utopiques ou bien dystopiques entrent souvent dans la discussion. En témoignent Le meilleur des mondes d'Aldous Huxley, l'absurdité des rencontres des héros kafkaïens avec « la loi » que nous avons tous vécue à un moment donné de notre vie, ou La grève d’Ayn Rand, livre préféré d’une grande partie des républicains américains, et enfin, Le jeu de perles de verre. Ces ouvrages remarquables sont-ils plus mensongers que les récits imaginaires et utopiques de la technoscience qui font partie de la propagande officielle de l'Union européenne ?

Pour démontrer le caractère utopique d’une écriture ou d’une idée, on peut analyser son rapport à une utopie déjà confirmée — et c’est ce que j'ai essayé de faire ici. En fin de compte, si nous l’acceptons, nous serons en mesure d'utiliser un avantage essentiel des romans sur la réalité : la plupart d'entre eux évoquent des (sur)réalités temporelles avec un début et une fin bien définis, dont nous pouvons apprendre quelque chose en un temps relativement court. Par ailleurs, les romans utopiques sont aussi le résultat de l'exercice mathématique consistant à pousser à leurs limites diverses formules de l’existence apparemment banales afin d'en savoir plus. Néanmoins, comme pour tout écrit, les lecteurs sont seuls en mesure de décider si la métaphore du jeu des perles de verre s’applique aux mots à la mode. Dans cet esprit, je voudrais également les inviter à s'adonner aux plaisirs de ce jeu et à commencer la découpe, la modification et l'ajout de tout ce qu'ils estiment nécessaires pour rendre cette argumentation socialement plus robuste.

Notes de bas de page numériques

1 Hermann Hesse, Le jeu des perles de verre: essai de biographie du Magister Ludi Joseph Valet accompagné de ses écrits posthumes. Paris, lgf, 2002.

2 M. Bucchi, « Of Deficits, Deviations and Dialogues: Theories of Public Communication of Science », In : M. Bucchi and B. Trench, eds., Handbook of Public Communication of Science and Technology, New York, Routledge, 2008, pp. 57-76.

3 Susan L. Star, J. Griesemer, « Institutional ecology. Translation and Boundary Objects. Amateurs and Professionals on Berkeley’s Museum of Vertebrate Zoology » Social Studies of Science, 19 (3): 387-420.

4 Sur les smart grids voir l’article de Gérard Dubey dans ce numéro.

5 http://prezi.com/1fogw2zvbiek/horizon-2020-officialversion/?auth_key=affe016b17ca2bf0d96d1d4a44f6a6ad3bb6bd63 (visité le 29.04.2013)

6 John Wilson, « The glass bead game», The Mathematical Intelligencer, 19, no. 2, 1997, pp. 23-25.

7 David F. Horrobin, « Modern Biomedical Research: an Internally Self-consistent Universe with Little Contact with Medical Reality ? », Nature Reviews 2, 2003, pp.151-154.

8 Voir Matthias Adam, « Multi-level Complexities in Technological Development ; Competing Strategies for Drug Delivery », In M. Carrier, A. Nordmann eds, Science in the Context of Application, Springer, 2010, pp. 67-83.

9 Michel Callon, and Bruno Latour, « Unscrewing the Big Leviathan,or How do Actors Macrostructure Reality ? », in K. D. Knorr-Cetina and A. Cicourel (eds), Advances in Social Theory and Methodology Toward an Integration of Micro- and Macro-Sociologies, London, Routledge and Kegan Paul, 1981.

10 Sutcliffe, Hilary, A Report on Responsible Research & Innovation, 2011, p. 7
http://ec.europa.eu/research/science-society/document_library/pdf_06/rri-report-hilary sutcliffe_en.pdf (accès le 04.05.2013) ; voir aussi l’article de Hélène Lestage et Chantal Nedonchelle dans ce numéro.

11 Mary B. Schoen-Nazzaro, « Plato and Aristotle on the Ends of Music », Laval théologique et philosophique, 1978, 34, n°. 3, pp. 261-273.

12 Ibid.

13 G. Gerbner, « Science on Television: How it Affects Public Conceptions », Issues in Science and Technology, Spring, 1987, 109-115 ; cité dans Peter Weingart, « Chemists and their Craft in Fiction » (film), The Public Image Of Chemistry, 2007, 12, 81.

14 M. Gibbons,. et al., The New Production of Knowledge: The Dynamics of Science and Research in Contemporary Societies, London, Sage, 1994 ; Helga Nowotny, Peter Scott and Michael Gibbons, Re-Thinking Science: Knowledge and the Public in an Age of Uncertainty, Cambridge, Polity Press, 2001. trad. fr. Repenser la science, Paris, La découverte, 2003.

15 John M. Ziman, Reliable Knowledge: An Exploration of the Grounds for Belief in Science, Cambridge University Press, 1991.

16 Sheila Jasanoff, «  Technologies of Humility: Citizen Participation in Governing Science », Minerva 41, 2003, n° 3, pp. 223-244.

17 Michael Gibbons, «  Science's New Social Contract with Society », Nature 402,1999, C81-C84.

18 Ibid.

19 Berth Danermark, recension de Re-Thinking Science: Knowledge and the Public in an Age of Uncertainty by Helga Nowotny, Peter Scott; Michael Gibbons, Acta Sociologica, 46, n° 2, june 2003, 166-169.

20 Peter Weingart, « How Robust is Socially Robust Knowledge? », Knowledge and Democracy: A 21st Century Perspective 1, 2011, pp. 143-156.

21 Hermann Hesse, Le jeu des perles de verre : essai de biographie du Magister Ludi Joseph Valet accompagné de ses écrits posthumes, Paris, glf, 2002, première partie.

22 Online Etymology Dictionary: http://etymonline.com

23 Ibid.

Pour citer cet article

Tudor B. Ionescu, « Connaissance socialement robuste : le jeu des perles de verre et les modes à la mode », paru dans Alliage, n°72 - Novembre 2013, Connaissance socialement robuste : le jeu des perles de verre et les modes à la mode, mis en ligne le 19 février 2015, URL : http://revel.unice.fr/alliage/index.html?id=4172.

Auteurs

Tudor B. Ionescu

Doctorant en ingénierie de l’université de Stuttgart et étudiant du master « science, technologie, société » à l’université de Vienne. Il s’occupe également des projets de recherche et développement (r&d) dans l’industrie de haute technologie.