Alliage | n°66 - Avril 2010 Varia 

Antonino Drago  : 

La paix dans la science

Plan

Texte intégral

Lors de sa naissance, la science a du combattre une métaphysique étouffante qui voulait préétablir ses conclusions (Galilée). Mais elle a finalement acquis son indépendance, et puis, par la suite, parce qu’elle est le résultat d’expériences objectives et universelles, elle a donné une image d’assurance totale, en se posant sans conflit internes, comme absolue.  Jusqu’au point de se retourner sur la vie des hommes comme la solution la plus sûre aux conflits : la science apporterait la paix puisqu’elle proposerait les solutions les plus rationnelles suivant la raison universelle.  Calculemus ! Là est la vraie solution. Les scientifiques se sont offerts pour défaire les nœuds mondiaux : désarmement, faim dans le monde, développement,  etc.

En revanche, les plus grands apôtres de la non-violence (Tolstoï, Gandhi, Lanza del Vasto1), ont critiqué radicalement la science occidentale : en résumé, elle représente pour eux un dévoiement de l’esprit humain. Tolstoï : «  la science dit tout, sauf pourquoi nous devons vivre », elle est étrangère à notre vie puisqu’elle manque d’une dimension éthique. Lanza del Vasto : « L’irréparable manque de la science moderne, c’est le manque d’un savant qui la sache », autrement dit nous sommes face à un projet surhumain. Son application, la technologie, tout en concédant une quantité innombrable de facilités et de commodités,  donne aussi au développement une direction qui aliène la nature humaine et voue la société au profit plutôt qu’à un partage coopératif. Pour beaucoup, ces critiques apparaissent comme un conservatisme, réfractaire à la nouveauté. Je les ai prises au sérieux, en particulier celle de Lanza del Vasto et j’ai consacré trente années de mon parcours scientifique à éclaircir ce problème. Un argument important m’a été donné par la distinction qu’établit Galtung entre trois formes de violence : personnelle, culturelle et structurelle. La science entre dans le champ de la violence culturelle, dans la mesure où elle se pose comme solution unique et indiscutable des problèmes humains, c’est-à-dire qu’elle impose une vérité qui de plus a été obtenue sans lien avec la vie humaine.

La science et la guerre

Afin de ne pas tomber dans un débat philosophique peu accessible même aux personnes cultivées, nous considérerons le développement historique du rapport entre la science et la guerre.2

Tout au long de l’histoire, la science a toujours entretenu des liens étroits avec la guerre. Dans cette histoire, la Révolution française a été un moment de grande importance, puisqu’elle a rapproché étroitement la science, la technique et la stratégie pour atteindre son objectif de refondation à partir de la raison de la vie sociale, l’État en particulier, alors absolu et métaphysique (le sang bleu des rois !). Mais elle ne réussit finalement qu’à refonder le secteur militaire. Elle convertit ici la structure militaire mythique de l’aristocratie, finalisée par l’expansion impérialiste, en une expression institutionnalisée du peuple, finalisée, elle, par la seule défense de la Nation. En 1793, alors que les monarchies européennes se coalisèrent, la Révolution lança la levée en masse pour la défense de la population et des nouvelles institutions suivant ainsi la théorie de la défense totale (contredisant celle, naissante, de la guerre totale). Il s’ensuivit la « victoire » de la démocratie. Deux siècles après, en 1989, les peuples se libéraient des régimes totalitaires de l’Europe de l’est, répétant cette politique de défense populaire. La Révolution française avait anticipé le seul chemin qui se peut aujourd’hui parcourir comme alternative à la course aux armements : une défense, confiée non pas au pouvoir destructeur d’un arsenal militaire, mais à la solidarité de la population pour se protéger elle-même et ses institutions sociales.

La Révolution voulut également refonder la science mythique de Newton.3 Nous savons qu’en chimie, Lavoisier y parvint. Dans la préface de son livre principal, publié volontairement en 1789, il écrit vouloir effectuer une « révolution ». De manière plus générale, certains militaires se convertirent à ce projet : la géométrie (Monge, L.Carnot, Poncelet), l’analyse infinitésimale (L.Carnot), la mécanique (L.Carnot, Coulomb, Navier, Poisson, Poncelet) et la thermodynamique (née lorsque, pour étudier l’efficacité des machines thermiques, S.Carnot, déplaça son attention des canons, mythifiés comme doués d’une puissance quasi illimitée, aux machines civiles4). La figure centrale de ce processus fut Lazare Carnot. Militaire de formation, il théorisa d’abord la défense totale (populaire) en 1789, puis, en 1793, il la réalisa en tant que chef suprême de l’armée française. Fidèle à ses idées, il n’accepta pas Napoléon empereur, ni aucune guerre offensive. Lazare Carnot fut aussi un scientifique de valeur qui contribua surtout à la transformation de la mécanique céleste (siège de la métaphysique) en mécanique terrestre (celle du choc des corps, envisagé comme échange de quantités communes ; et plus généralement, la mécanique des machines, agrégats complexes de corps5), en la fondant sur le concept de travail et non sur celui, métaphysique, de force. De fait, il refonda de manière alternative toutes les théories scientifiques (mécanique, géométrie, calcul infinitésimal) ; en outre, il suggéra à son fils Sadi, les idées centrales qui donnèrent naissance à la thermodynamique.6

La refondation de l’analyse infinitésimale éclaircit la conception de Lazare Carnot sur la science. Il accepta et soutint toutes les bases de l’analyse, adoptant une point de vue pluraliste qui eut d’abord une grande popularité, mais qui se heurta rapidement au bellicisme du monde académique, qui, au cours de deux siècles écoulés, avait toujours proposé, pour chaque théorie scientifique, une seule fondation, occultant toutes les autres. De plus, il introduisit une conception pluraliste de l’organisation de toute théorie scientifique, comme une alternative à la conception alors dominante, de type pyramidal, suggérée par Aristote, puis suivie par Euclide et Newton : ou bien poser, au sommet,  des « principes » évidents desquels découlent toutes les lois, ou bien se baser  sur un problème général (en mécanique, trouver les quantités invariables lors d’un choc, c’est-à-dire les invariants classiques), pour la résolution duquel on cherche une nouvelle méthode scientifique. Sadi Carnot lui-même fonda la thermodynamique (la théorie scientifique qui devint ensuite l’alternative théorique à la mécanique traditionnelle) en posant un problème central (la plus grande efficience dans les transformations énergétiques) ainsi qu’en trouvant une nouvelle méthode (les cycles de Carnot) capable de le résoudre. Dans la lointaine Kazan, en Russie, Lobatchevski), qui avait étudié sur des livres français, fut capable de proposer une nouvelle géométrie, en changeant non seulement un postulat (le fameux cinquième) de la géométrie euclidienne, mais tout son schéma théorique.7 Ainsi naquit le pluralisme (et même le conflit) au sein de la science la plus ancienne et la plus fondamentale. Quelques décennies après l’échec de la Révolution, le mouvement ouvrier (qui ignorait malheureusement les nouvelles théories scientifiques) initia une théorie alternative dans les sciences sociales, le marxisme, qui affrontait le problème central du dépassement du capitalisme dans l’histoire.

Beaucoup de théories scientifiques (refondations d’anciennes ou de nouvelles) ont été occultées par la Restauration. Même après 1850, certaines  (comme par exemple la mécanique de Lazare Carnot) n’ont plus été reprises, et, de toutes façons, la science a été institutionnalisée suivant une série de voies autoritaires :

  • Formation d’académies scientifiques avec des cadres professionnels rigides

  • Procédures rigoureuses pour communiquer et valider les résultats

  • Langage (mathématique) sophistiqué établi comme une barrière face à ceux qui sont désireux de discuter de problèmes fondamentaux

  • Division du travail scientifique en champs nettement séparés (par exemple, l’économie et la physique et en particulier de la thermodynamique, les mathématiques des machines à calculer,…)

  • La scientificité comme critère définitif pour résoudre jusqu’aux questions sociales, c'est-à-dire, la science au dessus de toutes les autres valeurs de la société8

Des alternatives scientifiques

Mais, même dans la science, voici quelques décennies, un problème de grand intérêt social, celui de l’énergie, a retrouvé l’alternative scientifique d’il y a deux cents ans. L’American Physical Society a découvert que, de manière surprenante, depuis cent cinquante ans notre société n’a pas appliqué la science de l’énergie, la thermodynamique (l’idée centrale que, dans toutes les transformations énergétiques, le rendement optimal est donné par un cycle réversible de Carnot ; il serait sage de s’en rapprocher le plus possible). Pour l’avoir oublié, l’organisation sociale actuelle est profondément distordue à cause des énormes gaspillages effectués systématiquement.9

En redonnant de l’importance à la thermodynamique, on a pu remonter à l’alternative scientifique qui avait été initiée il y a deux cents ans, et la compléter. Les théories scientifiques de Lazare ou Sadi Carnot sont alternatives non seulement dans leur organisation, mais aussi dans le rapport qu’elles établissent entre mathématique et sciences de la nature : ce n’est plus le calcul infinitésimal métaphysique de Newton, qui utilise les infinités actuelles (le dx), mais la mathématique qui demeure attachées aux calculs effectifs. Cette mathématique, qui dans le passé a été souvent esquissée (par Lobatchevski, Lagrange ou Marx) a été rigoureusement fondée depuis quelques décennies ; on la dénomme « constructive ».10

Pour preuve de cette alternative, on remarque que les mathématiques traditionnelles ne traitent jamais des conflits. En réalité, autour de la Première Guerre Mondiale, certains y sont parvenus. Les équations différentielles peuvent décrire des phénomènes de compétition et de nature guerrière ; et avec les nombres entiers, la théorie des jeux peut analyser en détail toutes les situations de conflit (on ne comprend pas pourquoi Archimède ou Galilée ne l’ont pas inventée), comme le dilemme du prisonnier, avec lequel Rapoport a représenté la course aux armements entre deux puissances. Puis, la théorie des jeux a prévalu. Sa mathématique constructive (elle ne comporte des entiers, à traiter avec des systèmes d’équations linéaires) a créé un rapport avec la réalité différent de celui qui avait été établi par la physique théorique de Newton. Notons que dans le même temps, la physique a dû accepter que toute la réalité est formée de quantas et même la biologie théorique est née en rapport avec la mathématique constructive (c’est-à-dire, sans équations différentielles) .

La mathématique n’est pas seule à s’être donné deux types de fondations incompatibles. Depuis 1900, la logique qui, depuis le XIXe siècle, était sûre d’elle puisque mathématisée, s’est divisée aussi : d’autres logiques mathématiques sont apparues, au-delà de la logique classique. En outre, on a découvert qu’au lieu de la loi du tiers exclus (« Ou A, ou non-A »), c’est la loi de la double négation qui sert au mieux de frontière entre logique classique (« deux négations équivalent à une affirmation ») et logique non-classique : « acquitté pour insuffisance de preuves de culpabilité »  est un exemple de deux négations qui n’équivalent pas à une affirmation : cela ne veut pas dire que l’accusé soit innocent, mais que le tribunal n’a pas les éléments nécessaires pour décider le cas.

« Nous appellerons élément ce que nous n’avons pas encore décomposé » (Lavoisier) ; « le mouvement perpétuel [= sans fin] est impossible » (Lazare et Sadi Carnot) ; « ces deux principes ne sont qu’apparemment inconciliables » (Einstein) ; « On ne peut pas mesurer simultanément la position et la vitesse avec une précision illimitée » (Heisenberg).

 Ces assertions fondamentales sont toutes des doubles négations de logique non classique, qui démontrent que la science entière est divisée quant à ses fondements.

On ne saurait oublier la grande expérience de Freud, le théoricien de la science des conflits intérieurs. Il décrit sa méthode en faisant remarquer que l’analyste demande au patient de raconter librement, par exemple, ses rêves. Celui-là raconte avoir rêvé de rencontrer sa mère, et que dans un accès de rage, il allait la tuer. Mais, rajoute le patient, « je ne voulais pas la tuer ». L’analyste doit noter cette négation et en ajouter une autre à son tour : « Ce n’est pas vrai que le patient ne voulait pas tuer sa mère ». La première négation témoigne du traumatisme que le patient a refoulé (c'est-à-dire nié intérieurement) et qui pourtant, de temps en temps, revient à la surface. La double négation est la porte, offerte à l’analyste pour travail sur ce qui est refoulé et ainsi guérir le patient. En définitive, la théorie de Freud pose le problème de la santé du patient ; cherche ensuite à le résoudre avec une méthode nouvelle, qui commence avec une phrase négative du patient, niée plus tard par l’analyste, qui poursuit de manière inductive (ceci est un exemple de la méthode dialectique que Marx, théoricien des conflits sociaux, voulut refonder, par rapport à la théorie de Hegel, mais sans y réussir).

La logique est aussi cruciale pour la paix puisque la même expression, non-violence, est une double négation (la violence étant la négation de la vie), elle n’a pas d’équivalent positif, et consiste donc en deux affirmations qui ici n’affirment pas.  En revanche, le militarisme de caserne fait valoir la logique classique des certitudes absolues « Ami ou ennemi », « obéissance ou rébellion », « l’ennemi de mon ennemi est mon ami », etc. Il y a là deux mondes différents, incommensurables : la non-violence initie une nouvelle manière de raisonner absolument nouvelle par rapport à la logique classique des militaires.

« Les deux labyrinthes de la raison humaine »

La démonstration la plus claire que toute la science diverge sur ce point réside dans le principe d’inertie, la porte d’entrée de la science moderne. La version de Newton est

 « chaque corps immobile ou en mouvement rectiligne et uniforme persévère dans son état à moins qu’une force ne change cet état ».

La version alternative de L. Carnot est

« une fois qu’un corps est en repos, il ne peut pas se mouvoir par soi-même; une fois en mouvement, il ne change ni sa direction ni sa vitesse par soi-même »

(où « mouvoir » et  « changer » sont la négation d’« en repos», la situation qui ne demande pas d’explications). On remarquera que la double négation de Carnot n’a pas de correspondant positif qui soit scientifique ; de fait, pour énoncer cette idée positivement, Newton utilise le verbe « persévérer » qui n’est clairement pas scientifique, mais moral et animiste. Il y a ici une alternative dans le type de logique, classique ou non classique, quant à l’énonciation des fondements de la science.

En outre, on remarquera que Newton dit « chaque corps… », mot qui inclut aussi les corps que nous découvrirons dans le futur. Il est donc question d’infini actuel. Il en va de même quand il veut distinguer avec une précision infinie (actuelle) s’il y a une force ou pas, si le corps est immobile ou pas, si le mouvement est parfaitement rectiligne ou parfaitement uniforme et si le trajet qu’il parcourt est infini ou pas.  Ce sont des propriétés que l’énoncé de Carnot évite pour se limiter aux seules propriétés spécifiques de la physique expérimentale, opérationnelle et calculables, qui donc ne se recourent pas à l’infini actuel.

On pourrait voir qu’en mécanique, cette alternative est née avec Leibniz11 qui a ajouté que dans l’esprit humain il y a « deux labyrinthes de la raison humaine » : celui de l’infini actuel ou potentiel et celui du dilemme entre « loi » (se comporter selon certains principes a priori) et  « liberté » (recherche heuristique). Ils représentent deux options : le premier labyrinthe a été formalisé par l’option entre les mathématiques classiques et la mathématique constructive. Le second, par l’option d’organiser une théorie, soit selon un petit nombre de principes abstraits desquels déduire à l’aide de la logique classique toutes les lois comme théorèmes, soit en la centrant sur un problème général pour lequel on recherche une nouvelle méthode de résolution. Et ces deux organisations ont besoin de deux logiques différentes : ou classique (qui assure les déductions), ou non classique (qui est heuristique).

Ces deux options, même si elles peuvent être considérées en termes uniquement philosophiques (infini et organisation), sont pourtant bien formalisées (en mathématiques et en logique). Les choix entre ces deux options donnent lieu à quatre modèles de théories scientifiques qui, par conséquent, représentent l’actuel, inévitable, pluralisme de la science.12 Ils répartissent ainsi toutes les théories sur quatre quadrants, correspondant aux quatre modèles.  Ces options fournissent donc à l’esprit humain les points cardinaux d’une boussole qui nous oriente parmi les innombrables théories du monde moderne.

La conclusion générale est que malgré la nouveauté de la Révolution française, pendant deux cents ans, les scientifiques n’ont pas voulu examiner les conflits, autant intérieurs qu’extérieurs à la science. La science a été présentée comme une construction monolithique sans alternative possible, le seul lieu pacifié de toute l’activité et de toute la pensée humaine. Cette science a prétendu éteindre chaque conflit : par exemple, au début du XXe siècle, la lutte des classes à l’usine (là où le conflit ne pouvait plus être occulté) avec l’introduction du taylorisme dans le travail. Ou dans les années 50 à 80, l’opposition Est-Ouest, avec les solutions « supérieures » des scientifiques pour parvenir au désarmement, et même le problème énergétique, imposant les centrales nucléaire, qui auraient assuré le bien-être générale et par conséquent, la paix. Tout ceci à l’enseigne de « Nulla ratio extra hanc scientiam ».

En réalité, tout ceci peut apparaître comme un terrible et grandiose piège historique : pour ce que nous avons vu plus haut, la science n’a pas le monopole de la vérité, et chaque théorie y est déclinée en de nombreuses formulations alternatives. Il est donc temps de détrôner la violence culturelle de la science qui monopolise la vérité et prétend faire la paix. Au contraire, pour faire la paix, il faut trouver une nouvelle science apte à résoudre les conflits sociaux.13 Kuhn a suggéré que, de temps en temps, dans l’histoire de la science, on assiste à des changements de paradigme. Le changement historique que nous devons mener aujourd’hui peut être défini par la devise: « la paix comme changement de paradigme ».14 Par chance, le nouveau paradigme est déjà connu, comme de grands scientifiques (Einstein, Born) l’ont déjà indiqué : c’est celui de la non-violence. Sa dénomination elle-même introduit à une logique complètement différente, suggérant une méthode empirique de résolution des conflits que Gandhi appelait « expériences avec la vérité », suivant une méthode que nous avions déjà vue chez Freud et qui s’appuie sur la phrase « ce n’est pas vrai qu’il est mon ennemi ».

Il nous faut alors devenir les promoteurs d’un profond renouvellement culturel de la science, y compris dans sa didactique.15

Notes de bas de page numériques

1 . L. Tolstoï, Confession, 1882. M.K. Gandhi, Leur civilisation et notre délivrance,1908. Lanza del Vasto, Les quatre fléaux, 1959, p. 140.

2 . A. Drago, « Scienza e guerra », Atti del III Congresso Nazionale di Storia della Fisica, 1982, pp. 224-229.

3 . C.C. Gillispie, « The Encyclopédie and the Jacobinian Philosophy of Science », in M. Clagett (ed.), Critical Problems in the History of Science, Wisconsin U.P., 1962, pp. 255-269.

4 . A. Drago, « Sadi Carnot e la nascita di una nuova scienza », Atti III CNSF, op. cit., pp. 460-465 ; G. Salio, « S. Carnot, la nascita della termodinamica e le tecnologie belliche », Atti III CNSF, op. cit., pp. 236-241.

5 . Aujourd’hui, une théorie propose la complexité comme nouvelle situation paradigmatique En outre, depuis quelques décennies, la théorie du chaos avec un contenu lourdement mathématique, dément définitivement la conception déterministe de la mécanique newtonienne. Mais ces théories ne parviennent pas à éclaircir si elles sont colatérales de la théorie traditionnelle ou si elles en sont complémentaires, si elles en sont le dépassement historique ou déjà une alternative. En revanche, la complexité peut être interprétée comme une première manière de concevoir la conflictualité dans la science, parce que rien n’est plus complexe qu’un conflit, tout en évolution et rempli d’imprévus.  La théorie de Lazare Carnot (qui affronte une situation de grande complexité, celle d’une machine mécanique) et encore plus celle de Sadi Carnot (qui affronte la complexité d’un gaz ou des millions de milliards de milliards de molécules s’entrechoquent en désordre), expriment qu’une situation complexe peut être dénouée scientifiquement si on fait des choix. Ces théories ont abandonné l’attitude analytique (typique du mécanicisme newtonien) qui réside dans l’examen isolé des molécules et composants, pour évaluer la situation suivant des paramètres globaux qui sont l’énergie, le volume, la température et la pression d’un gaz. La théorie actuelle de la complexité ne parvient pas avec clarté à effectuer ce choix entre l’analytique et le global.

6 . Les œuvres de L. Carnot auxquelles on fait référence sont : Essai sur les machines en général, Dijon, 1783 ; Principes fondamentales de l'équilibre et du mouvement, Paris, 1803 ; Réflexions sur la métaphysique du calcul infinitesimal, Paris (trois éditions) ; Géométrie de position, Paris, 1803. Une première étude sur l’œuvre de Carnot est celle de C.C. Gillispie, Lazare Carnot Savant, Princeton U.P., 1971.

7 . A. Drago & A. Perno, « La teoria geometrica delle parallele impostata coerentemente su un problema ”, Per. Matem. 4, 2004, pp. 41-52.

8 . J. Ben-David, Il ruolo dello scienziato nella società, Il Mulino, 1970.

9 . F. Butera, Quale Energia per quale società, Mazzotta, 1980.

10 . A. Drago, Le due opzioni, La Meridiana, 1991; « Mathematics and alternative theoretical physics : The method for linking them together », Epistemologia 19,1996, pp. 33-50.

11 . A. Drago, « The birth of an alternative mechanics: Leibniz' principle of sufficient reason», in H. Poser et al. (eds), Leibniz-Kongress. Nihil Sine Ratione, 2001, Berlin, vol. I, 322-330, et La riforma della dinamica di G.W. Leibniz, Hevelius, 2003.

12 . Aujourd’hui, beaucoup envisagent la science comme une collection de modèles scientifiques, qui schématisent la réalité. Ici « modèle » a un sens plus précis, qualifié par son lien avec une conception des fondements de la science ; dans ce contexte, il y a quatre modèles avec des caractéristiques bien précises.

13 . Voir A. Drago, « L'annus mirabilis della fisica: la nascita del conflitto all'interno della scienza », Atti Conv. Foggia, 2005 et « Nonkilling Science », in J.E. Pim (ed.), Towards a Nonkilling Paradigm, Center for Global Nonkilling, Honolulu, 2009, 289-323.

14 . M. Nagler, « Peace as a paradigm shift », Bull. Atomic Scientists37, Dec. 1981, pp. 49-52.

15 . Voir A. Drago in Quad. Cres, Mani Tese, 1999, et « Lo schema paradigmatico della didattica della Fisica: la ricerca di un'unità tra quattro teorie », Giornale di Fisica 45 (n°3), 2004, pp.173-191.

Pour citer cet article

Antonino Drago, « La paix dans la science », paru dans Alliage, n°66 - Avril 2010, La paix dans la science, mis en ligne le 18 juillet 2012, URL : http://revel.unice.fr/alliage/index.html?id=3328.

Auteurs

Antonino Drago

Physicien et historien des sciences, ancien professeur d’histoire des sciences à l’université de Naples, enseigne dans les universités de Pise (Centre interdisciplinaire de sciences pour la paix) et de Florence. Auteur de nombreux articles et livres, en particulier sur la science, la guerre et la non-violence, dont récemment Difesa popolare nonviolenta (EGA, 2006).

Traducteurs

Charles Claudo